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Chapitre 6. Les éléments de conception du LICI

6.1. Cahier des charges fonctionnel

6.1.1. Contexte

Pour rappel, le sigle LICI signifie Logiciel Intelligent de Cartographie Inversé. C'est le nom du projet qui a été donné par Gilles Vessière, le gérant de l'entreprise Médialexie, qui a lancé l'idée de ma thèse en contrat CIFRE. La volonté de développer l'outil LICI part à la fois d'un constat et d'une demande. Premièrement, certaines difficultés des élèves dyslexiques n'étaient pas encore suffisamment compensées par les outils déjà disponibles dans la barre Médialexie, et même par les outils existants de manière générale. Deuxièmement, certains clients de Médialexie avaient exprimé leurs retours positifs sur l'Imagineur, l'outil permettant de dessiner des cartes heuristiques, mais ils souhaitaient disposer d'un outil d'aide qui leur permettrait de construire ces cartes de façon automatique, afin d'ensuite les retravailler et les comprendre, plutôt que de devoir lire des textes afin de les créer.

Les difficultés que l'outil LICI doit compenser comptent parmi celles identifiées dans le Chapitre 1. Les personnes atteintes de trouble de la lecture ont une lecture lente et couteuse en mémoire de travail. Ceci rend la lecture pénible et la pénibilité implique un découragement. Ainsi, si un élève est amené à lire un long texte ou plusieurs textes, il risque de ne jamais atteindre la fin de sa lecture et donc de potentiellement passer à côté d'éléments cruciaux à la compréhension du texte. De plus, mécaniquement, une lecture

lente implique une difficulté à accéder au sens du texte. En effet, plus la lecture est ralentie, plus les éléments en mémoire de travail risquent d'être perdus avant d'avoir été mis en relation avec les nouveaux éléments rencontrés au fil de la lecture. L'accès au sens du texte s'en trouve alors d'autant dégradé. L'outil LICI fait donc face à un double enjeu, à la fois aider à la compréhension, par l'accès facilité aux informations contenues par le texte, mais aussi permettre de réduire le temps d'effort, de mémoire et de concentration nécessaires pour lire une grande quantité de texte, que ce soit un ou plusieurs textes dont la lecture est nécessaire pour remplir une tâche donnée.

De nombreux outils avaient déjà été développés par Médialexie pour faciliter la lecture, notamment des aménagements visuels et sonores, et pour faciliter l'écriture, dont la planification et la rédaction, mais aussi les correcteurs orthographiques, qui s’appuient sur la morphologie ou sur la phonétique, comme je l'ai expliqué dans le Chapitre 5. Cependant, un seul outil était dédié au sens du texte, un outil permettant d'extraire automatiquement un thème et quelques phrases, supposées porter les éléments clés du texte. Cet outil n'était pas assez performant et pas suffisamment complet. L'objectif de l'outil LICI était donc d'être plus performant et de se focaliser sur l'aide à la compréhension du texte, tout en étant parfaitement intégré à la barre d’outils Médialexie, pour faire bénéficier aux utilisateurs des avantages déjà existants.

La possibilité de créer un outil qui aiderait à la compréhension du texte grâce à des images avait aussi été envisagée au départ du projet. Une fois les mots-clés repérés, il aurait été possible de faire appel à une banque d'image et l'image correspondant à chaque mot-clé serait apparue sur la carte. Cependant, la polysémie de nombreux mots est un frein à l'emploi de ce mode de représentation. Pour le mot "café" par exemple, trois images, au moins, peuvent se présenter : le lieu (comme un bar), la tasse de café ou encore le grain de café. Effectuer un traitement automatique pour déterminer quelle représentation est la bonne grâce au contexte nécessite le recours à des ressources tierces, comme par exemple un arbre d'ontologie complet du français, et reste un véritable challenge.

6.1.2. Analyse des besoins

L'objectif déclaré de l'outil LICI est d'aider les collégiens dyslexiques dans leurs tâches scolaires. Plus particulièrement dans la manipulation et la compréhension des textes auxquels ils sont confrontés. Cela inclut, de façon non exhaustive :

 l'apprentissage de leurs leçons, que ce soit sur un livre scolaire, un document distribué par le professeur, ou une leçon dictée par le professeur,

 les travaux de documentation qu'ils sont amenés à faire, notamment sur internet en lisant des articles (actualités, wikipédia, site internet consacré à un thème étudié au collège, etc...)

Les éléments de conception du LICI

 les exercices d'analyse de texte, pour lesquels les élèves doivent lire puis répondre à des questions

C'est ce besoin que l'on retrouve avec la "bête à cornes", représentée sur la Figure 6.1.

Le LICI

Aider à la compréhension de textes dans les tâches scolaires :

l'apprentissage des leçons, les travaux de documentation, les exercices d'analyse de texte.

A qui le produit sert-il ?

Sur quoi agit-il ?

Dans quel but ?

Collégiens ordinateurTexte sur

Figure 6.1 La "bête à cornes" décrivant l'analyse du besoin pour le projet LICI

De façon basique, le LICI doit être capable de recevoir un texte en entrée, le traiter de façon "intelligente", c'est à dire calculer un ensemble de termes clés et fournir une représentation schématisé du texte sous forme de carte heuristique comprenant ces mots-clés. Ceci afin de

soulager les utilisateurs d'une partie de la tâche d'assimilation du texte et afin de contourner la représentation linéaire de l'information pour une représentation davantage spatiale et multimodale.

6.1.3. Fonctionnalités principales

Le LICI doit contenir un certains nombres de fonctionnalités minimales, dites principales (notées FP suivi d'une numérotation) et doit également répondre au plus possible de fonctionnalités complémentaires (notées FC), tout en se pliant à des contraintes.

Dans les fonctionnalités principales, on retrouve d'abord la capacité d'extraire les termes- clés d'un texte (FP1) et d'organiser ceux-ci sous la forme d'une carte heuristique (FP2). Deuxièmement, la capacité d'accéder directement par un clic au texte original à partir de la carte générée automatiquement, pour créer une cohérence entre la carte et le texte (FP3). Troisièmement, de pouvoir modifier la carte générée de façon dynamique, afin de l'adapter à la vision de l'utilisateur (FP4). Ceci inclut la possibilité d'ajouter ou de supprimer des nœuds, de modifier des nœuds, de les déplacer, de changer les couleurs, les polices, l'espacement entre les caractères, etc. Enfin, le LICI doit être capable d'extraire automatiquement les phrases clés d'un texte et de les proposer via un lien hypertexte (FP5), cette fonctionnalité venant se substituer à celle qui était disponible auparavant dans la barre d'outils Médialexie mais qui était jugée peu pertinente, de par son statut de fonctionnalité isolée.

6.1.4. Contraintes techniques

Concernant les fonctionnalités complémentaires, on retrouve tout d'abord des fonctionnalités très importantes, mais qui étant déjà disponibles avec les autres outils de Médialexie n'auront pas à être redéveloppées. En effet, il suffit que le LICI permettent d'accéder à celles-ci pas des liens hypertextes ou des menus via un clic sur certains éléments. Il s'agit notamment de la possibilité de consulter des dictionnaires et des dictionnaires des synonymes à partir d'un mot donné, mais aussi de pouvoir faire lire un mot, un groupe de mots ou une phrase par le lecteur de synthèse, sans sortir de l'interface du LICI (FC1). En plus de cette compatibilité avec les outils, l'outil développé doit générer une carte suivant un format de fichier qui permet d'être affiché dans l'interface de l'Imagineur (FC2). Cette contrainte est à la fois un avantage et un inconvénient. Un avantage car l'interface est d’ores et déjà développée et propice à l'intégration avec les autres outils de Médialexie. Un inconvénient car le format de fichier nécessaire est un format XML complexe qui ne respecte pas les standard XML, mais aussi parce que respecter ce format limite les possibilités d'idées novatrices qui seraient propres au LICI en terme d'interface. Enfin, dernier pôle de fonctionnalités complémentaires, plus que l'intégration à la barre d'outils Médialexie, le LICI doit permettre des échanges avec les autres outils, que ce soit

Les éléments de conception du LICI

ceux existants ou les outils futurs. Ainsi, les résultats des fonctions de calcul du LICI doivent être disponibles à l'extérieur du moteur de calcul lui-même, pour pouvoir être utilisées dans un autre contexte (FC3). Ces résultats sont le produit du logiciel avant affichage, ils doivent comprendre au minimum : une liste de termes clés, une liste de phrases clés, la liste de liens entre les termes clés ainsi que la valeur de ces liens.

Fonctions principales Fonctions complémentaires ou contraintes FP1 : Extraire les termes clés du texte FC1 : Produire un format permettant

l'intégration aux autres outils de Médialexie FP2 : Présenter l'information sous la forme d'une

carte heuristique

FC2 : Produire un format permettant l'affichage avec l'interface de l'Imagineur

FP3 : Fournir un lien d'accès direct entre les termes clés et le texte

FC3 : Fournir un accès aux données calculées par l'outil

FP4 : Permettre de modifier la carte dynamiquement

FC4 : Fournir un accès aux réglages des paramètres d'affichages

FP5 : Extraire les phrases clés du texte FC5 : Fournir un accès aux réglages des paramètres de calculs

FC6 : Contenir des fonctionnalités novatrices et des procédés exclusifs

FC7 : Être indépendant et libre en termes de licence

Tableau 6.1 Fonctionnalités et contraintes déterminés par le cahier des charges du LICI.

De plus, un fichier externe au code du programme, au format texte, doit permettre d'effectuer des réglages sur les calculs (FC5) et sur l'affichage des résultats (FC4). Par exemple, les autres développeurs de l'équipe de Médialexie doivent pouvoir changer les préférences en termes de nombre de termes clés affichés pour un texte donné ou encore de nombre de liens maximum affichés sur la carte générée. Ceci permettra d'avoir différents niveaux de complexité pour les cartes générées et il est prévu qu'un utilisateur expert du logiciel puisse choisir entre plusieurs niveaux de complexité préétablis.

6.1.5. Contrainte commerciale

En plus des contraintes techniques, une autre contrainte s'est ajoutée et a influencé les choix de développement de l'outil LICI. L'entreprise Médialexie, avait besoin d'être entièrement propriétaire du logiciel, pour le vendre selon ses propres dispositions. Cela impliquait plusieurs choses. D'une part, il était exclu d'utiliser des fonctions d'autres programmes distribués sous une licence qui impose de donner un accès libre à tout le programme (FC7). C'est notamment le cas des licences des logiciels libres ou de certains logiciels développés par des chercheurs. Je reviendrai sur ce point en donnant des exemples dans le 0, présentant le développement du programme lui-même. D'autre part, l'équipe de Médialexie souhaitait disposer d'une exclusivité sur au moins une partie du programme afin que celui-ci ne puisse pas être reproduit tel quel par une personne extérieure consultant des

publications de mes travaux de recherche (FC6). Le Tableau 6.1 rassemble l'ensemble des fonctions et contraintes déterminées à l'origine du projet. Il permet aussi de dessiner le diagramme de la "pieuvre", Figure 6.2, qui délimite le périmètre de la solution et récapitule les éléments et acteurs concernés par l'outil que je devais développer.

Informations sémantiques Le LICI Collégiens Texte sur ordinateur Barre d’outils Médialexie Imagineur FP1 FP2 FP4 FP5 FP3 FC1 FC2 Ergonomie Avantages commerciaux FC7 FC4 FC6 Outils futurs FC3 Exclusivité Gains Lisibilité Adaptabilité FC5

Figure 6.2 Diagramme de la "pieuvre", représentant les fonctions et contraintes attendues pour le développement du LICI.