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7. SYNTHESE

7.4. Bilan du projet au Cameroun

D‟un point de vue plus général, quel bilan pouvons-nous tirer de l‟ensemble du projet?

Reprenons les cinq objectifs établis au début du travail:

1. Constituer une batterie de tests neuropsychologiques adaptée au contexte camerounais et établir des normes en administrant cette batterie auprès d’enfants camerounais en bonne santé âgés de 6 à 20 ans.

Cet objectif a été atteint. Une batterie de dix tests psychométriques a été adaptée au contexte socio-culturel camerounais et des données normatives ont été récoltées auprès de 125 enfants âgés de 6 à 20 ans, scolarisés à Yaoundé. Notre batterie est cependant limitée dans le nombre de domaines cognitifs couverts, les capacités verbales n‟étant par exemple pas évaluées. Des efforts supplémentaires doivent encore être réalisés pour que les psychologues camerounais disposent d‟un éventail de tests plus large. Dans ce sens, l‟adaptation des batteries d‟évaluation de l‟intelligence générale (WISC, NEPSY, K-ABC, etc.) nous semble être un axe prioritaire pour l‟évaluation cognitive des enfants camerounais.

2. Former une équipe de psychologues camerounais à l’utilisation et à l’interprétation de la batterie.

Cet objectif a été atteint. Quatre psychologues camerounais ont été formés à l‟utilisation et à l‟interprétation de la batterie. Ils ont activement participé à la récolte des données normatives et à l‟évaluation des patients drépanocytaires. Ils constituent aujourd‟hui une ressource pour l‟unité de neurologie de l‟Hôpital Central de Yaoundé et sont impliqués dans d‟autres projets de recherche, notamment pour l‟évaluation des troubles cognitifs liés au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) (Njamnshi et al., 2009).

172 3. Utiliser la batterie dans le cadre du projet de détection et de prévention des attaques

cérébrales chez les enfants souffrant de drépanocytose au Cameroun.

Cet objectif a été atteint, la batterie ayant été administrée à un grand nombre de patients drépanocytaires durant l‟année 2007. Malheureusement, aucun patient n‟a été examiné avec cette batterie depuis lors (cf. point suivant).

4. Evaluer la sensibilité et la spécificité de la batterie de tests neuropsychologiques pour la détection des complications cérébro-vasculaires chez les drépanocytaires au Cameroun.

Cet objectif n‟a pas été atteint pour deux raisons. Premièrement, nous avions projeté d'évaluer la sensibilité de notre batterie en consultant rétrospectivement les données des patients qui devaient être suivis tous les six mois durant trois ans au moyen de l‟examen Doppler transcrânien et de l‟examen neuropsychologique. Cela nous aurait permis d‟étudier l‟évolution des performances cognitives chez les patients qui auraient présenté un AVC durant le suivi, afin d‟évaluer si l‟utilisation de l‟examen neuropsychologique permettait d‟améliorer la détection des futures attaques cérébrales par rapport à l‟utilisation unique du Doppler transcrânien. Malheureusement, le suivi des drépanocytaires n‟a pas pu être mis en place à l‟Hôpital Central de Yaoundé, que ce soit avec le Doppler transcrânien ou avec l‟examen neuropsychologique. Deuxièmement, la batterie n‟a pas pu être administrée à un nombre suffisant de patients suivis aux Hôpitaux Universitaires de Genève et ayant bénéficié d‟une IRM cérébrale (cf. point suivant).

5. Administrer cette même batterie auprès d’enfants drépanocytaires suivis aux Hôpitaux Universitaires de Genève.

Cet objectif n'a été que partiellement atteint. La batterie a été administrée à sept enfants drépanocytaires suivis aux Hôpitaux Universitaires de Genève dans le cadre du travail de maîtrise d‟Anaëlle Blum et de Vanille Apotheloz. L‟objectif était d‟évaluer la sensibilité de la batterie pour la détection des infarctus silencieux en comparant les résultats de l‟examen neuropsychologique à l‟IRM cérébrale. Nous avons réalisé que nous ne pourrions pas rassembler une cohorte suffisante de patients pour atteindre cet objectif en nous limitant à l‟examen des patients suivis aux HUG. Une collaboration a par la suite été développée avec des psychologues

173 français (Prof LeGall, Dr Roy et Dr Roulin) qui ont récemment mis au point une batterie d‟évaluation des fonctions exécutives chez l‟enfant. Nous projetons d‟administrer cette batterie à une large cohorte de drépanocytaires en France et en Suisse, ce qui devrait permettre d‟évaluer la sensibilité des tests pour la détection des infarctus silencieux. Si la batterie de tests montre une bonne sensibilité/spécificité pour la détection des infarctus silencieux, nous pourrons alors la proposer comme outil de détection dans les pays où l'accès à l'IRM cérébrale est limité.

Dans l‟ensemble, le bilan de ce projet nous semble largement positif. Au-delà des résultats scientifiques, ce travail a permis de développer un champ de la psychologie qui n'existait pas encore au Cameroun. Si, aux yeux de certains, le domaine de la neuropsychologie peut paraître trop « stérile » dans les pays en voie de développement, il nous semble que ce projet illustre au contraire l‟utilité de cette discipline dans les régions disposant de moins de ressources médicales.

La mise en place de l‟examen neuropsychologique est relativement facile, peu coûteuse et efficace. Ces éléments font de l‟examen neuropsychologique un instrument particulièrement adapté pour les pays en voie de développement.

Dans le même sens, un nouveau champ de collaboration entre le Cameroun et la Suisse a été ouvert à travers ce projet. Une convention entre les Facultés de psychologie de Yaoundé et de Genève a été signée en 2009. Cette convention devrait permettre de faciliter les échanges scientifiques entre les étudiants et les enseignants de ces deux universités dans le futur.

Parmi les activités réalisées parallèlement au projet scientifique, la création de la bande dessinée informative sur la drépanocytose nous semble particulièrement intéressante. Ce type d‟action est relativement simple à mettre en place et permet de toucher un large public. L‟amélioration des connaissances sur cette maladie nous semble extrêmement importante, tant dans les régions où la maladie est très présente que dans les pays industrialisés où la drépanocytose est pratiquement inconnue.

La réalisation de ce travail a été rendue possible grâce à une bonne collaboration entre les différents acteurs du projet. La collaboration avec les psychologues engagés sur le projet et l‟équipe de neurologie de l‟Hôpital Central de Yaoundé a été très fructueuse et n‟a souffert

174 d‟aucune difficulté majeure. Nous tenons à saluer ici le travail réalisé par le Prof Njamnshi, qui est l‟initiateur de ce projet et de tant d‟autres dans le domaine de la neurologie au Cameroun.