conception des scénarios. Il est donc tout à fait possible de prévoir des chemins supplémentaires qui
rejoignent le scénario nominal. La qualité et le sentiment de contrôle de l’utilisateur sont assurés au
prix d’un énorme travail de conception.
Dans les approches de planification privilégiées par [Riedl and Young, 2010,Porteous et al., 2010], des
mécanismes dereplanificationprennent en compte le nouvel état du monde causé par les imprévus
pour recalculer un nouveau plan vers l’objectif scénaristique prescrit.
Dans le cas de [Riedl et al., 2003], des mécanismes d’accommodationet d’interventionconjuguent la
replanification avec une modulation des effets des actions de l’utilisateur pour en minimiser l’impact
sur le déroulement du scénario. Cette supervision a cependant l’inconvénient de nuir à l’agentivité
de l’utilisateur. En outre, le fait que les actions de l’utilisateur soient systématiquement moduler nuit
fortement à l’acceptation du système.
Le mécanisme delate commitmentproposé par [Swartjes, 2010] est inspiré des techniques du théâtre
d’improvisation. Par ce mécanisme, l’état du monde n’est pas complètement déterminé à chaque pas
de simulation. Certaines valeurs du monde peuvent êtreinconnuesouimprécises. Elles sont affinées
au gré des besoins de la scénarisation. Le scénario étant ainsi le plus ouvert possible à chaque étape,
les possibilités de trouver un chemin pour atteindre un objectif donné sont maximales : on assure
donc la résilience.
Il y a peu de travaux sur les mécanismes de résilience pour l’étape de spécification. En effet, dans
les approches usuelles, soit les objectifs scénaristiques sont déterminés hors-ligne, auquel cas c’est
sur l’auteur que repose la résilience, soit l’objectif est généré dynamiquement mais le contrôle sur le
scénario est tel que l’objectif sera toujours atteignable quitte à nuire à la cohérence.
Les seuls travaux dans ce domaine relèvent de la prise en compte de l’apprenant en temps réel pour
la scénarisation. Dans le système OSE destiné à la formation des conducteurs de péniches
[Frico-teaux, 2012], les objectifs scénaristiques s’adaptent en temps réel en fonction de la charge cognitive
supportée par l’apprenant. Une limitation majeure de l’approche est que le contexte de la simulation
n’est pas pris en compte et donc il n’y a aucune cohérence dans le scénario global. Par exemple, les
conditions météorologiques peuvent changer plusieurs fois dans une même session.
A un niveau supérieur, il serait intéressant d’étudier la question de la méta-résilience pour
détermi-ner quels mécanismes mettre en place lorsque l’étape de contrôle ne peut satisfaire aux exigences de
l’étape de spécification. En effet, dans certains cas, l’état de la simulation ne permet pas la réalisation
des objectifs scénaristiques prescrits. Dans une telle situation, faut-il privilégier la réalisation partielle
des objectifs ou bien établir une toute nouvelle prescription ? Quelles mécanismes de négociations
permettent de prendre une décision entre la prescription et le contrôle du scénario ? Nous
n’abor-derons pas ces questions directement dans ce mémoire car elle requiert de disposer en premier lieu
d’un mécanisme de prescription fonctionnelle, cependant cette problématique mérite d’être étudiée.
2.8 Bilan et positionnement
Au travers des différentes propriétés listées ci-dessus, nous avons pu mettre en exergue un certain
nombre de qualités et de limites de différents systèmes de scénarisation.
Les approches scriptées sont beaucoup trop couteuses en terme de création de contenu. Les
ap-proches génératives permettent d’éviter cet écueil mais au prix d’une perte de contrôle sur le contenu
généré. L’approche hybride nous parait pertinente dans la mesure où elle permet d’intégrer au
sys-tème les connaissances de l’expert pédagogue autant pendant la phase de conception que pendant
la phase d’utilisation du dispositif. Idéalement, l’expert pédagogue doit pouvoir définir une
straté-gie d’apprentissage au travers d’un parcours idéal d’apprentissage pendant la phase de conception
du dispositif, mais il doit également pouvoir orienter la scénarisation avant ou pendant les sessions
CHAPITRE 2. SCÉNARISATION 2.8. BILAN ET POSITIONNEMENT
d’utilisation du dispositif.
Sur la question des contenus, nous constatons que les objectifs narratifs et pédagogiques sont en
gé-néral fusionnés. Or, nous pensons qu’il serait intéressant de découpler ces deux types d’objectifs au
moins dans la conception du système. Une telle distinction permettrait de mettre en scène des
situa-tions d’apprentissage similaires au travers d’histoires différentes, assurant ainsi une plus grande
va-riabilité des scénarios proposés. En outre, l’utilisation d’un modèle narratif indépendant du domaine
(et donc distinct du modèle pédagogique) permettrait de satisfaire notre objectif de réutilisabilité.
Nous pensons que l’efficacité d’un moteur de scénarisation pour les environnement virtuel de
forma-tion est optimale lorsqu’il intégère les trois niveaux d’agrégaforma-tion dans sa scénarisaforma-tion. Cependant, à
notre connaissances, il n’existe pas de travaux d’intégration de ces trois niveaux dans des EVAH
des-tinés aus domaines complexes.
De nombreux travaux s’attachent à déterminer du contenu scénaristique extra-diégétique
notam-ment par le biais d’assistances virtuelles. Or, peu de travaux s’intéressent à la difficile conciliation des
objectifs pédagogiques et narratifs à l’intérieur de la diégèse. Nous avons donc préféré centrer notre
étude sur le niveau intra-diégétique sans pour autant se désinteresser complètement de la question
des objectifs scénaristiques extradiégétiques.
L’autonomie de la simulation permet d’assurer une certaine cohérence des comportements et facilite
la conception puisqu’il s’agit d’imaginer les comportements de chaque type d’entité
indépendam-ment des autres. Cependant, une autonomie complète ne permet pas de rendre possibles la
spécifi-cation et la mise en œuvre d’un scénario particulier.
L’approche que nous présentons dans ce mémoire repose sur une hybridation. La simulation est
au-tonome pour faciliter la conception et permettre l’émergence de situations non-prévues. Toutefois,
un contrôle global est nécessaire pour garantir la qualité pédagogique et l’intérêt narratif. La
spécifi-cation du scénario est opérée à partir de l’état du monde courant pour établir des objectifs
scénaris-tiques à la fois pédagogiques et narratifs. La mise en œuvre du scénario se charge de rendre effectives
les prescriptions en procédant à des ajustements minimaux ne brisant pas la cohérence. Cette
archi-tecture globale, nommée SELDON, est issue de travaux précédents de l’équipe et a été formalisée dans
la thèse de Camille Barot [Barot, 2014]. La contribution que nous présentons dans ce mémoire est
ex-clusivement centrée sur l’étape despécification dynamique des objectifs scénaristiquesau sein de
cette architecture.
Chapitre 3
Modèles pour la prise en compte de
l’apprenant dans les Environnements
Informatiques pour l’Apprentissage
Humain
If you are a student you should always get a good nights sleep
unless you have come to the good part of your book, and then you
should stay up all night and let your schoolwork fall by the wayside,
a phrase which means ’flunk’.
The Austere Academy, Lemony Snicket
Sommaire
Dans le document
Scénarisation personnalisée dynamique dans les environnements virtuels pour la formation
(Page 45-48)