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Les cratères d’impact sont des objets géologiques constituant à la fois des mar-queurs de l’histoire de la cratérisation dans le Système Solaire et des indicateurs de la compo-sition des surfaces des corps telluriques.

Trois grandes problématiques actuelles peuvent se dégager à l’issue du premier chapitre de cette thèse :

Le flux d’impact

L’hypothèse du flux constant depuis trois milliards d’années est admise par la communauté pour dater les surfaces planétaires. Toutefois, certaines études montrent que ce flux a évolué sans apporter de nouvelles fonctions de chronologie. Ce flux de cratérisation est-il vraiment constant sur Mars ? As-t-il évolué, et si oui, pour quelles gammes de diamètres de cratères ? Autrement dit, la fonction de production de cratères a-t-elle évolué depuis le LHB ? Quelles peuvent être l’origine d’une éventuelle variation sur Mars et quelles peuvent en être les implications dans la chronologie martienne ? Peut-on contraindre l’évolution de ce flux ou celle de la fonction de production par la datation des cratères à éjecta lobés ?

Les variations paléoclimatiques martiennes

La morphologie des éjecta lobés est liée à la présence de volatils sous la surface de Mars. Est-il possible, par la datation de leur formation, de contraindre l’évolution spatio-temporelle de la couche riche en matériaux volatils ? L’obliquité de la planète est le facteur pricipal controlant l’extension spatiale de cette couche ? Est-il également possible de contraindre ce paramètre dans le temps ?

La base de données de cratères martiens

Les cratères d’impact de plus d’1 km de diamètre sur Mars sont très nombreux. Une base de données référence 384.399 structures sans préciser leur morphologie et contient de nombreuses erreurs. Comment est-il possible de la corriger rapidement ? Quels outils et stratégies peuvent être mis en place pour obtenir un catalogue de cratères juste et complet ? Quels peuvent être les

différences avant et après sa correction ? En quoi cette base de données révisée peut être utile pour la datation des surfaces martiennes ?

Ces trois grandes problématiques sont reliées les unes aux autres. Étudier les cratères à éjecta lobés et dater leur formation peut permettre de mieux préciser le flux d’impact et la fonction de production des cratères, et donc , la méthode de datation par comptage de cratères. Cette contrainte, apportée à la fonction de chronologie martienne, nous permettra d’obtenir des âges plus réalistes concernant les évènements géologiques ayant marqué son histoire et donc mieux comprendre les variations paléoclimatiques qui ont façonné sa surface. Enfin, la correction et l’adaptation d’une base de données de cratères martiens à la datation des surfaces est un outil indispensable pour préciser à l’échelle globale les modifications qu’a connu sa surface.

La réponse à toutes les questions posées dans les trois problématiques de cette thèse permettront d’améliorer nos connaissances sur l’évolution géologique et climatique de la planète Mars. Afin d’y répondre, nous présenterons dans un premier temps les données disponibles et la méthodo-logie développée pour l’étude et la datation des cratères à éjecta lobés, outils principal de cette thèse (chapitre 2).

Nous présenterons ensuite une étude où une large population de cratères à éjecta lobés a été daté. Les âges déduits à partir d’un modèle de chronologie à flux constant nous permettront de construire la fréquence de leur formation et de la comparer au modèle de flux d’impact. Une précision sur l’évolution temporelle de ce flux et d’une variation éventuelle de la fonction de production martienne pourra ainsi être apportée et répondre à la première problématique (chapitre 3).

Puis, une étude sur la datation de la totalité des cratères de type LARLE sera présentée dans le chapitre 4. Nous pourrons comparer la localisation de ces cratères et leurs âges avec la variation de l’obliquité de Mars, paramètre principalement responsable de la modification du climat. Enfin, la correction de la base de données de Robbins and Hynek (2012) sera présentée en chapitre 5. L’adaptation et l’application de cet outil à la datation des surfaces martiennes y sera détaillée.

Chapitre

2

Données et méthodologie développée pour

l’étude des cratères à éjecta lobés martiens

L’ajout de l’aspect temporel à l’étude des cratères à éjecta lobés est inédit et est susceptible de nous apporter de nombreuses informations sur le flux d’impact martien et les variations climatiques qu’a connu la planète dans le passé. Les éjecta lobés associés aux cratères de plus de 5 km de diamètre constituent d’excellentes surfaces pour effectuer une datation de leur mise en place par la méthode du comptage des cratères.

Des datations sur de telles surfacees avaient déjà été tentées par (Baratoux et al., 2007). En effet, la continuité et l’extension de leur nappe d’éjecta offre une surface suffisament importante pour qu’un grand nombre de cratères ait pu s’y former depuis leur mise en place. À la différence des datations des cratères rayés lunaires effectués par Trey (2013) et Quantin et al. (2015) par le comptage des cratères sur le fond des structures principales, notre étude se propose d’utiliser la surface continue que constituent ce type de nappe d’éjecta, dont la formation est synchrone aux cratères d’impact associés, afin de s’affranchir des éventuelles effets de resurfaçage et d’oblité-ration de petits cratères liés aux reliefs importants et aux conditions érosives martiennes au sein de la structure datée.

Ce chapitre présente les données et la méthodologie employée pour extraire une population de cratères présents sur une nappe d’éjecta la plus représenative de l’âge de formation d’un cratère à éjecta lobé.

Nous présenterons enfin une étude permettant de valider notre méthode de datation. Celle-ci consiste en la comparaison de deux datations effectuées séparément sur des couples de cratères dont la formation a été simultanée (Miljkovic et al., 2013).

2.1 Les données

Depuis le début de l’exploration martienne dans les années 60, 52 sondes et rovers ont tenté de visiter la planète Mars. Seules la moitié d’entres-elles, ont résussi à collecter des données et notamment des images de la surface qui nous ont fournit des informations capitales dans la compréhension de l’évolution de la planète rouge.

Nous présenterons ici les données d’imagerie qui nous ont permis de dater la formation des cratères à éjecta lobés : les images CTX et THEMIS.

2.1.1 Les images de la caméra CTX

La caméra CTX (ConTeXt Camera) à bord de la sonde MRO (Mars Reconnaissance Orbiter) en orbite autour de Mars depuis 2006 permet de fournir des images panchromatiques de la surface de Mars dans la quasi-totalité du spectre visible (500 à 700 nm). Du fait de l’orbite quasiment circulaire et polaire de la sonde MRO, la résolution des images produites par cette caméra est constante et vaut en moyenne 6 m / pixel (Malin et al., 2007).

Elles offrent également pour chacune d’entre-elles un champ de vue relativement large, compris entre 5 et 7° donnant lieu à des images d’une trentaine de kilomètres de large. La quantité de données acquises depuis le début de la mission permet de couvrir aujourd’hui plus de 80 % de la surface de Mars. La couverture et la résolution de ces images sont particulièrement utiles pour étudier en détail la morphologie des structures et pouvoir ainsi les replacer dans un contexte géologique.

2.1.2 Les données d’imagerie thermique THEMIS

L’instrument THEMIS (THermal Emission Imaging System) à bord de la sonde Mars Odyssey en orbite autour de Mars depuis 2002 possède deux systèmes d’imagerie multi-spectrale : un dans le domaine visible et l’autre dans l’infrarouge. Le système infrarouge nous permet d’obtenir des informations sur la température et l’émissivité des roches en surface par la mesure du spectre d’absorption entre 6 et 13 µm (Christensen et al., 2004).

La couverture de ces données est globale et leurs résolutions constantes, à 100 m / pixel (pour les acquisitions de jour). Les images THEMIS prises en infrarouge de jour nous permettent d’avoir accès à la variété et aux limites géologiques des terrains à l’échelle planétaire.

2.1.3 Complémentarité et applications des données THEMIS et CTX

Pour l’étude des cratères à éjecta lobés, la complémentarité des images CTX et THEMIS a été indispensable. Les images THEMIS ont été utilisées en amont des images CTX pour diverses raisons. La première est que celles-ci bénéficient d’une mosaïque à l’échelle glo-bale permettant d’identifier les cratères de plus de 1 km de diamètre comme le montre la figure 2.1. La deuxième est que ces données permettent de préciser si ceux-ci possèdent des éjecta lo-bés ou non. L’identification des cratères à éjecta lolo-bés étudiés au cours de la thèse s’est donc ef-fectuée grâce à ces données. La troisième raison est que la géologie régionale et celle à l’échelle des éjecta peut être mise en évidence au premier ordre avec les images THEMIS.

Les images CTX, quant à elles, doivent être mosaïqués avant d’être utilisés sur une zone d’étude pour bénéficier d’une résolution 16 fois supérieure à celle des données THEMIS. Elles nous ont permis d’identifier les cratères de plus de 100 m de diamètre présents sur les éjecta et de préciser l’identification et la morphologie des nappes comme le montre la figure 2.1.

D’autres données d’imagerie de la surface martienne comme les images HiRISE (High Reso-lution Imagery Science Experiment) ou MOC (Mars Orbital Camera) auraient pu être utilisées dans la suite de cette thèse, or, si les premières ont une résolution de 10 cm / pixel en moyenne, leur couverture spatiale est très limitée, les secondes couvrent quant à elle la totalité de la sur-face mais avec une résolution moindre (7,5 km / px). Le couplage des images CTX et THEMIS pour les différentes études que nous proposons dans la suite de cette thèse est donc le meilleur compromis entre couverture spatiale et résolution des images.

FIGURE 2.1 – A gauche, une image THEMIS prise de jour avec une résolution de 100 m / pixel, seul le cratère de plusieurs kilomètres de diamètre est distinguable. Les contrastes des structures géologiques comme la limite entre le cratère et ses éjecta sont clairement identifiables. A droite, une image CTX à 6m/pixel où les cratères d’une centaine de mètres sont bien visibles. La morphologie du cratère et de ses éjecta peut être décrite à cette résolution.