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Bienfaits connus de l’allaitement maternel

Dans le document THESE UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE (Page 37-45)

I. CONTEXTE

I.3. Bienfaits connus de l’allaitement maternel

De nombreuses études réalisées depuis le début du XXe siècle ont analysé les bénéfices de l’allaitement maternel, aussi bien pour le bébé que pour sa mère. On peut également constater de nets avantages pour la société.

a) Pour l’enfant (15), (17)

Comme nous l’avons vu précédemment, le nourrisson reçoit par le lait maternel tout ce dont il a besoin sur le plan nutritionnel pendant les six premiers mois de sa vie.

Prévention des infections :

De nombreuses études ont montré que le risque d’infections serait diminué chez les nourrissons allaités. Il s’agit particulièrement d’une diminution de l’incidence de survenue de diarrhées aiguës infectieuses et d’otites moyennes aiguës, et d’une réduction du risque d’hospitalisation pour des infections respiratoires basses. L’allaitement maternel diminuerait la gravité de ces infections lorsqu’elles surviennent, notamment pour les infections respiratoires basses sévères.

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En effet, une étude de cohorte Ecossaise, publiée en 2015 et réalisée sur 502 948 naissances entre 1997 et 2009, chez des nourrissons jusqu’à huit semaines de vie, montre une association entre le mode d’alimentation et le risque d’hospitalisation. Plus précisément, les nourrissons étaient hospitalisés dans 79% des cas pour des infections respiratoires et intestinales et le risque d’hospitalisation était plus important chez les enfants non allaités exclusivement (18).

Nous pouvons ici citer une deuxième étude, publiée en 2007, s’intéressant à la durée d’hospitalisation d’enfants âgés de moins de six mois, qui a mis en avant que la durée d’hospitalisation pour une bronchiolite à Virus Respiratoire Syncytial (VRS) était inversement proportionnelle à la durée de l’allaitement maternel exclusif (19).

L’Académie Américaine de Pédiatrie a publié en 2012 un état des lieux de « l’allaitement et de l’utilisation du lait maternel » (20). Cette publication insiste sur la diminution du risque d’hospitalisation pour des infections respiratoires basses chez les enfants allaités exclusivement pendant au moins quatre mois, avec une réduction de ce risque de 72%. Il est aussi indiqué dans cette étude que l’incidence des otites moyennes aiguës est diminuée de 23% chez les nourrissons allaités, même non exclusivement, par rapport aux enfants alimentés artificiellement. Le même constat est observé pour les infections gastro-intestinales non spécifiques, avec une diminution de 64% de l’incidence de ces infections chez les enfants allaités (20).

Cependant, notons que généralement les enfants allaités au sein sont mis en collectivité moins précocement que les enfants nourris artificiellement, et que, de ce fait, ils sont moins confrontés aux pathologies infectieuses contagieuses.

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Allergies :

L’allaitement maternel a longtemps été considéré comme protecteur contre les allergies alimentaires. Cependant, des études récentes ont suggéré que l’introduction précoce des aliments solides diminuerait le risque d’allergie à ces aliments en favorisant l’acquisition de la tolérance alimentaire. Un récent article, publié par le comité de nutrition international ESPGHAN, en 2008, a reconsidéré les recommandations de l’OMS sur la durée de l’allaitement maternel exclusif : « La diversification ne devrait pas être introduite avant dix-sept semaines de vie et pas après vingt-six semaines. », soit entre quatre et six mois. Cette importante étude a également conclu que l’éviction ou le retardement de l’introduction d’aliments potentiellement allergènes (comme le poisson ou les œufs) n’avaient pas montré une réduction des allergies alimentaires (21). Comme le montre l’étude fondamentale de l’Académie Américaine de Pédiatrie, publiée en 2010 dans Pediatrics, la diversification alimentaire devrait être débutée entre l’âge de quatre et six mois, en introduisant de petites quantités d’aliments solides, et ce, progressivement (22). Cette diversification précoce permettrait ainsi une sensibilisation aux allergènes alimentaires, et donc une diminution des allergies alimentaires. L’allaitement maternel doit cependant être maintenu tout au long de la diversification, et le lait doit constituer le principal aliment du nourrisson jusqu’à ses deux ans.

Risque d’obésité diminué :

La majorité des études montrent une réelle augmentation du risque de surpoids ou d’obésité dans l’enfance ou l’adolescence en l’absence d’allaitement maternel. En effet, une revue de la littérature effectuée en 2005 a montré que soixante-et-une études, menées depuis 1966, mettaient en avant une association entre le mode d’alimentation d’un

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nourrisson et son obésité à l’âge adulte (23). Dans ces différentes études, l’allaitement maternel était associé à une diminution du risque d’obésité, par rapport à l’alimentation artificielle (23). On conclut que l’allaitement maternel a un effet préventif sur l’obésité ultérieure.

Quelques hypothèses ont été avancées pour expliquer ces résultats : une meilleure régulation des quantités de lait par l’enfant (les quantités de lait bues ne sont pas surveillées par la mère, et donc cette dernière aurait moins tendance à solliciter son enfant), des insulinémies plus élevées chez des nourrissons nourris par lait artificiel, et donc une stimulation du développement des adipocytes et de l’adipogénèse (Lucas, 1981), et enfin une meilleure appréciation d’une alimentation diversifiée par les enfants ayant été allaités (20).

Amélioration des performances intellectuelles :

Il a également été mis en avant un effet bénéfique de l’allaitement maternel sur la cognition et les performances scolaires. Plusieurs études prospectives sont arrivées à ce constat. En reprenant les résultats de ces études, l’Académie Américaine de Pédiatrie a récemment publié ses conclusions : les enfants allaités exclusivement trois mois ou davantage ont de meilleurs scores d’intelligence et de meilleures performances scolaires que les enfants non allaités (20). Cet effet est d’autant plus intéressant chez les nouveau-nés prématurés, pour lesquels les performances développementales seraient améliorées s’ils sont allaités. Cependant, les études permettant de conclure à ces résultats comportaient souvent des biais, notamment de confusion concernant les niveaux d’éducation parentale, les conditions socio-économiques et l’environnement familial. Ces résultats restent controversés (20).

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Néanmoins, parmi les facteurs pouvant expliquer les bénéfices de l’allaitement maternel sur le développement intellectuel, on retrouve la présence, dans le lait maternel, d’acides gras polyinsaturés à longue chaîne (notamment le DHA) participant à la formation du cortex cérébral (15).

Autres bienfaits pour l’enfant allaité :

L’état des lieux mené par l’Académie Américaine de Pédiatrie, publiée en 2012, montre une diminution de 30% de l’incidence d’un diabète de type 1 chez les enfants allaités exclusivement jusqu’à trois mois (20).

Cette même étude met également en avant une réduction de 31% des risques de

maladies inflammatoires du tube digestif chez les enfants allaités (20).

Parmi les résultats de cette étude, on note également que les enfants allaités et exposés au gluten par l’allaitement maternel présentaient un risque moindre de 52% de développer une maladie cœliaque (20).

b) Pour la mère

Les bénéfices de l’allaitement maternel portent aussi sur la santé de la mère.

Accélération de la perte de poids après l’accouchement :

Comme nous l’avons vu précédemment, dans les premiers jours du post-partum, chaque tétée engendre une sécrétion d’ocytocine, hormone entraînant des contractions utérines. Ces contractions utérines fréquentes accélèrent l’involution utérine, permettant une diminution plus rapide du volume abdominale, sans réelle perte de poids.

Cette diminution du volume utérin est néanmoins minime en termes de perte pondérale. Afin de déterminer si l’allaitement permettait d’accélérer la perte pondérale

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maternelle, une étude Américaine (en Caroline du Nord), réalisée en 2010 sur 14 000 femmes en post-partum, a montré, après ajustement des variables (régime, activité sportive, IMC de base…), que les femmes qui avaient allaité exclusivement six mois ou plus avaient perdu 1,38 kg de plus que celles qui n’avaient pas allaité (24). Ainsi, on note une accélération de la perte de poids dans les six mois du post-partum chez les femmes allaitantes, mais nous observons que cette accélération est minime, et que l’allaitement doit être exclusif pendant plus de vingt semaines pour obtenir un résultat significatif (24).

Effet contraceptif de l’allaitement :

La prolactine, hormone sécrétée par l’allaitement, dont le taux est corrélé au nombre et à la fréquence des tétées quotidiennes, permet une contraception naturelle par aménorrhée. En effet, comme il est précisé dans les « Recommandations pour la pratique clinique : contraception du post-partum », paru dans le Journal de Gynécologie Obstétrique en 2015, chez les femmes qui allaitent, on observe une reprise d’activité ovarienne habituellement retardée par rapport aux femmes qui n’allaitent pas (25). Cependant, ce système contraceptif est extrêmement dépendant des caractéristiques de l’allaitement (fréquence, durée, exclusivité), et n’est donc pas fiable à 100%, puisqu’une ovulation pourrait se produire.

Autres bénéfices sur la santé de la mère :

Une étude Brésilienne a montré en 2012 que les femmes qui avaient présenté des symptômes de dépression du post-partum avaient allaité moins longtemps, probablement par perte de confiance en leur allaitement (26). Il a été ainsi supposé dans cette étude que davantage de conseils et de soutien pour maintenir un allaitement maternel efficace chez

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une mère souffrant de dépression du post-partum pourraient améliorer les symptômes de dépression du post-partum (par encouragement et motivation des mères en leur capacité) (26). L’allaitement maternel exclusif bien conduit pourrait donc avoir un effet bénéfique sur les symptômes installés de dépression du post-partum. Cependant, aucune étude n’a permis d’établir un lien entre l’allaitement maternel et la survenue d’une dépression du post-partum.

L’allaitement maternel est connu désormais pour diminuer le risque de cancer du sein. La dernière édition du Code Européen contre le Cancer a publié en 2014 un rappel de ces connaissances (27). En effet, l’allaitement maternel protège la mère du développement d’un cancer du sein, en pré et en post-ménopause. Cet effet protecteur est dose-dépendant, c’est-à-dire que plus une femme a allaité longtemps et meilleure est sa protection contre le cancer du sein (27). On retrouve des résultats similaires pour le risque de cancer ovarien.

Le risque maternel de diabète de type 2 est moindre chez une mère qui a allaité. De nombreuses études ont mis en avant ce bénéfice de l’allaitement maternel sur la santé de la mère. Notamment, une méta-analyse d’études prospectives, publiée en 2014, a conclu à une diminution de 9% du risque relatif de survenue d’un diabète de type 2 maternel pour chaque augmentation de douze mois de la durée d’allaitement maternel (28).

c) Impact économique de l’allaitement maternel

Impact économique collectif :

La diminution, chez les enfants allaités, des infections bactériennes ou virales, notamment des diarrhées aiguës du nourrisson, engendre, comme nous l’avions vu plus haut, une diminution des hospitalisations, et donc une réduction des coûts de santé pour la société. Peu de données nationales existent sur cette économie. Cependant, en 1997, une

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analyse des bénéfices liés au mode d’alimentation des enfants montrait que pour une augmentation de 5% du taux d’allaitement maternel, une économie de 2,7 millions d’euros par an pourrait être faite, par unique diminution des dépenses liées aux pathologies des nourrissons entre 0 et 6 mois (17).

Impact économique individuel :

Comme le précise le Professeur TURCK, au sein d’un ménage, une alimentation au lait artificiel coûterait environ 500par enfant pendant les six premiers mois (surcoût lié aux biberons, aux boites de lait infantile, au matériel de puériculture) (17). A ce surcoût s’ajoutent les dépenses supplémentaires en soins médicaux et thérapeutiques, qui sont plus fréquemment nécessaires chez les nourrissons non allaités, car plus souvent malades (17).

Au travail :

Toujours lié à la moindre incidence de survenue d’infections chez les enfants allaités, l’absentéisme maternel est donc moins important chez les mères ayant allaité, ce qui constitue un net avantage pour les employeurs. Ainsi, les employeurs feraient de nettes économies en soutenant l’allaitement maternel. Ce point a été soulevé dans un récent article du Lancet, précisant que la mise en place de temps et de salles d’allaitement permettrait, à moindre coût, de réduire l’absentéisme maternel, mais aussi d’améliorer les performances des mères allaitantes sur le lieu de travail (29).

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