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PARTIE 1 : ETAT DE LA LITTERATURE

II. Mécanismes cellulaires et moléculaires de la croissance musculaire : étude à partir

II.3. B.2. Les autres voies régulatrices de mTOR

Une revue récente a cherché à mettre en exergue les mécanismes de régulation de

mTOR en réponse à des contraintes mécaniques (Spangenburg 2009). Bien que certains

acteurs aient déjà été évoqués précédemment, cette analyse se focalise sur leur implication au

cours de l’hypertrophie de surcharge.

Les SAC

Une des hypothèses développées dans cette revue est l’implication des canaux ioniques

activés à l’étirement SAC (Stretch-Activated Channels). Les SAC sont des canaux dont la

perméabilité au calcium et au sodium augmente en réponse à des déformations mécaniques de

la membrane sarcolemmale. Lorsque le fonctionnement de ces canaux est inhibé par des

agents pharmacologiques (streptomycine ou gadolinium), il apparaît une réduction de

l’hypertrophie musculaire et une moindre activation de la voie Akt/mTOR en réponse à une

surcharge chez le rat (exercice excentrique) (Spangenburg and McBride 2006). Même si cette

étude semble attester du rôle des SAC dans la régulation de la voie Akt/mTOR, il n’a pas été

possible de confirmer si cette réponse physiologique est le résultat de l’inhibiteur

pharmacologique per se, ou d’une action non spécifique de la drogue.

La voie des FAC

Un autre système de régulation de la voie mTOR évoqué est la voie des intégrines et des

FAK. Ces protéines, constitutives des FAC (Focal Adhesion Complexes), servent de points

d’ancrage entre le cytosquelette et la MEC et semblent jouer un rôle de senseurs mécaniques.

La surcharge fonctionnelle provoque l’activation de la voie des FAC, comme l’atteste

l’augmentation des niveaux de phosphorylation de FAK et de la paxilline (Gordon, et al.

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2000), FAK semble agir sur l’activation de mTOR mais il existe peu d’informations à ce sujet

dans le muscle squelettique. Des données obtenues dans d’autres tissus montrent que la voie

des FAC pourrait favoriser l’activation de mTOR en réprimant TSC2 (Gan, et al. 2006) ou en

agissant sur PI3K (Xia, et al. 2004). Des études menées dans le muscle en surcharge devront

apporter des éléments de réponse concernant le rôle véritable des FAC dans la régulation de

mTOR.

La voie médiée par LIF

Le dernier mécanisme évoqué dans la revue de Spangenburg (2009) est l’implication de

LIF (Leukemia Inhibitory Factor). L’expression de cette cytokine est augmentée de manière

conséquente dans le muscle en surcharge (Sakuma, et al. 2000) et l’invalidation du gène

codant pour cette protéine est associée à une absence d’hypertrophie de surcharge

(Spangenburg and Booth 2006). Cependant, le mécanisme par lequel LIF affecterait la

réponse hypertrophique reste à démontrer.

Les voies des MAPK

La famille des MAPK est composée de quatre membres : ERK1/2, p38, ERK5, et p54

JNK (Jun NH

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-terminal Kinase). Outre leur implication dans l’activation de facteurs de

transcription musculaires, des données récentes montrent que les voies des MAPK, en

particulier celles faisant intervenir p38 et ERK1/2, joueraient un rôle dans la régulation de

l’activité de mTOR dans des situations de surcharge. A la suite d’un exercice en résistance

chez l’homme, l’activation de p38 et de ERK1/2 est associée à une hyperphosphorylation de

P70

S6K

sur ses résidus Thr

421

/Ser

424

, alors que les niveaux de phosphorylation de P70

S6K Thr389

et d’Akt

Ser473

sont respectivement inchangés et diminués (Deldicque, et al. 2008). Cette

phosphorylation de P70

S6K

indépendamment de mTOR pourrait faciliter l’activation

progressive et complète de cette kinase, conduisant à augmenter la synthèse protéique. Dans

le modèle d’overload, p38, ERK1/2 et p54 JNK sont également hyperphosphorylés durant les

premières heures qui suivent l’ablation des agonistes (entre 3 et 12h) (Carlson, et al. 2001). A

notre connaissance, seule une étude a établi un lien entre l’activation de la voie

MEK1/2/ERK1/2/TSC2 et la stimulation de mTOR, indépendamment de la voie PI3K/Akt

durant les temps précoces de la surcharge fonctionnelle dans le modèle d’overload (Miyazaki,

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Même si la compréhension des mécanismes de régulation de mTOR par les MAPK n’en

est encore qu’à ses balbutiements, la voie des MAPK semble jouer un rôle non négligeable

dans l’activation précoce de mTOR en réponse à une surcharge mécanique.

Les répresseurs de mTOR : l’AMPK et REDD1/2

Bien que les exercices de surcharge favorisent la synthèse protéique, ce processus peut

être réprimé durant l’activité musculaire. En effet, au cours d’exercices en résistance, une

inhibition de la synthèse protéique est souvent rapportée et mise en relation avec une

activation de l’AMPK (par phosphorylation de l’AMPKα2) et une altération de l’activité de

mTOR (Dreyer, et al. 2006). L’AMPK agirait comme un détecteur du stress énergétique, en

inhibant les processus anaboliques consommateurs d’ATP et en favorisant les processus

cataboliques générateurs d’ATP. La régulation de l’AMPK dans le modèle d’overload a

également été étudiée, et contrairement à ce que l’on pourrait attendre, elle est hyperactivée

dans cette situation hypertrophiante (Thomson and Gordon 2005; McGee, et al. 2008 ;

Mounier, et al. 2009 ). L’invalidation de l’isoforme AMPKα1 chez des souris est capable

d’exacerber l’hypertrophie de surcharge, alors que chez ces souris transgéniques, l’activité de

l’isoforme AMPKα2 est augmentée (Mounier, et al. 2009). Ceci suggère que l’AMPKα2

agirait préférentiellement dans les adaptations métaboliques du muscle squelettique

(Jorgensen, et al. 2005), tandis que l’AMPKα1 pourrait être un régulateur crucial et

déterminant de l’hypertrophie musculaire. L’activation sévère de l’AMPK dans le modèle

d’overload pourrait contribuer à restaurer l’homéostasie métabolique perturbée par les

synthèses protéiques considérablement accrues. L’activation de l’AMPK pourrait aussi limiter

une hypertrophie musculaire exagérée, agissant ainsi en feed-back négatif comme contrôle de

l’hypertrophie (Thomson and Gordon 2005).

On commence à peine à approcher les mécanismes de régulation de l’expression de

REDD1 et REDD2 au cours de situations d’hypertrophie de surcharge. Des études récentes

faites chez l’homme montrent que les niveaux des transcrits de REDD1 et de REDD2 sont

réduits à la suite d’exercices en résistance (Drummond, et al. 2008 ; Drummond, et al. 2009),

alors que dans le modèle d’overload chez le rongeur, l’expression de REDD2 serait

totalement effondrée (Miyazaki 2010). Ces observations suggèrent que ces régulateurs

négatifs de mTOR seraient inhibés au cours de l’hypertrophie de surcharge.

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mTOR est un régulateur central de la protéosynthèse et de l’hypertrophie en réponse à

une surcharge fonctionnelle. Bien qu’activée dans cette situation, la voie IGF-I/PI3K/Akt

n’apparaît plus comme indispensable au processus d’hypertrophie de surcharge et pourrait

être compensée par d’autres acteurs moléculaires en cas de défaillance. Ainsi, d’autres voies

intracellulaires, en particulier la voie des FAC et celle des MAPK interviendraient dans

l’activation de mTOR en réponse aux contraintes mécaniques. Bien qu’il soit nécessaire de

clairement le démontrer, l’expression des répresseurs de mTOR REDD1/2 pourrait être

altérée au cours de l’hypertrophie de surcharge. De manière paradoxale, l’AMPK est activée

dans le modèle d’overload, probablement en réponse aux stress cellulaire et métabolique

engendrés par les contraintes mécaniques ; cette activation permettrait entre autres d’assurer

un rétrocontrôle négatif de « protection ».