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B COMMENTAIRES SUR LES ENTRETIENS D’OGÃ BUDA 113

II. CONTINUITES ANCESTRALES ET HYBRIDATIONS 66 

II.1. B COMMENTAIRES SUR LES ENTRETIENS D’OGÃ BUDA 113

- Observations et interprétations de fond concernant les entretiens avec ce responsable religieux du Candomblé « Seja Hundê » de la ville de Cachoeira, à Bahia, et analyse de ses affirmations.

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1) L’Ogã Buda affirme que son candomblé est riche d’une tradition de quatre cents ans, ce qui semble anachronique au vu de la recherche historique. En effet, il n’avance aucune référence relevant des archives des historiens et spécialistes des religions afro- brésiliennes pour étayer cette assertion. D’autres collectes de données orales par des responsables religieux de cette tradition à Bahia n’étayent pas non plus de telles affirmations.

2) La plus ancienne mention d’un culte d’origine africaine au Brésil porte sur le calundu. Or cette pratique religieuse a été référencée pour la première fois dans une aquarelle d’un peintre amateur de Dresden, Wagener, au service du Prince de Nassau de 1634 à 1641, qui a vécu dans le Pernambouc de l’époque de la conquête hollandaise. Elle a été également mentionnée dans les poèmes du Bahianais Gregório de Mattos, au XVII siècle, puis par Nuno Marques Pereira dans son livre le « Peregrino da América ». Pour autant, la possibilité d’une si longue mémoire historique préservée par la tradition orale n’est pas à exclure totalement.

Une autre maison de candomblé se rattachant aux mêmes origines que le Ventura, la Casa das Minas, au nord du Brésil (dans le Maranhão), revendique elle aussi une longévité de quatre cents ans. A ce propos, l’ethnologue Sérgio Ferretti rapporte que, lors de ses premiers contacts avec ce terreiro, l’une des « anciennes » de cette communauté lui a dit que, « dans cette maison, il y avait des histoires de presque quatre cents ans ».

Sur le coup, il n’avait pas bien saisi le sens d’une telle affirmation, puisque la ville de São Luis, capitale de l’État, n’avait pas elle-même quatre siècles, si bien que la « Casa das Minas » ne pouvait pas être si ancienne. Plus tard, en 1995, Sérgio Ferretti a compris que, pour Dona Amância, l’histoire de la maison devait symboliquement remonter aux origines de la dynastie du royaume du Dahomé, au début du XVII siècle. Il apparaît donc que la mémoire orale est tout à fait capable de préserver des connaissances du passé qui, parfois, ne sont pas corroborées par les archives écrites. Cette mémoire a su ainsi préserver des généalogies avec des noms de personnages

historiques qui les ont précédés de plusieurs siècles. Pierre Verger a effectué des recherches en 1947 dans le Maranhão, et, en 1948, dans la capitale de l’ancien royaume du Dahomé. Voici ce qu’il raconte.

A Saint-Louis de Maranhon par contre, j’ai eu l’occasion de parler avec Mãe Andresa, qui m’a cité le nom des Voduns auxquels le culte était rendu dans le temple connu à Saint-Louis de Maranhon sous le nom de Casa das Minas (Maison des Minas).

Elle passa très rapidement sur Legba, dont elle préférait ne pas trop en parler en raison du caractère « malin » prêté au messager des autres dieux. Elle divisa en 3 familles les autres Vodun.

La première composée de divinités qui à l’époque m’étaient peu familières. J’y reviendrai après avoir parlé des deux autres dont les noms sont très connus en Haïti et à Bahia.

L’une d’elle comportait les noms de : Sobo – Bade – Avrekete – Agbe – Topodoun – Loko – Nanan Bioko (pour Boukou) Lissa – tous d’origine Houla, Hweda ou Aïzo, l’autre les noms de Azonssou – Azoani – Alogoue (pour Alokpe) Akossou-Sakpata – Dambira (pour Damballa Ouedo), tous d’origine Mahi, ainsi que Bossoukon (pour Bossikpon) et Azili de la région de l’Ouémé.

Toutes ces divinités sont présentes à Abomey mais appartiennent à des nations contre lesquelles les Dahoméens firent des expéditions guerrières.

Mais revenant à la première famille de Vodun, celle-ci composée de noms qui, à Abomey, ont été tous reconnus par la suite comme étant ceux de la famille des rois d’Abomey.

Certains de ces noms n’étaient guère connus que des prêtres d’Abomey et le fait que j’avais appris ces noms au Brésil était pour eux la preuve qu’il y avait là-bas des descendants de la famille royale.

Ce fut comme un mot de passe auprès de Mivede le Zomadonoussi, représentant sur terre la divinité à laquelle les offrandes sont faites immédiatement après les anciens rois et qui détient un pouvoir de juridiction sur l’ensemble des prêtres animistes d’Abomey. Ceci facilita grandement l’enquête que j’allais faire là-bas.

Voici les noms tels qu’ils m’ont été donnés, et dans le même ordre par Maë Andresa, ainsi que leur identification à Abomey.

Agongono qui fut facilement trouvé être Agonglo.

Savalou ou Azaka (de Savalou) qui joue un rôle important dans le culte des Tohossou (Zomadonou).

Dadahi - serait Agassou, le vodun des rois d’Abomey. Bepega - le fils du roi Tegbessou.

Sepazin - la fille du roi Wegbadja. Dako - le roi Dakodonou.

Bossou - Boussouhon un nom de Zomadonou. Joti - un fils de Dadaho.

Koessina - un frère du roi Agadja.

Aronovissava - Ahonovi Sava, sœur du roi Dako.

Zomadonou - est le Tohossou, premier fils anormal du roi Akaba. Dossou - serait le roi Dossou Agadja

Togpa - le frère de Zomadonou Desse - le fils du roi Kpengla.

Dossoupe - Kpelou-Tohossou du roi Tegbessou. Nani - une fille du roi Kpengla.

Tossa et Tosse - des jumelles du roi Agadja. Niaiadono - la mère de Akaba, Agadja, Hangbe. Et enfin Naité - Naité Sedume mère du roi Agonglo.

De l’examen de cette liste, il ressort qu’aucun des Voduns n’est postérieur au roi Agonglo, il se pourrait donc bien que le culte des divinités des rois d’Abomey ait été établi à la « Casa das minas » de Saint Louis de Maranhon par Na Agontime, veuve du roi Agonglo, mère de Ghézo qui, avec une partie de sa famille fut envoyée en esclavage, par Adanzan et que Dossou Yovo et le Migan Atindebacou cherchèrent si longtemps à travers les plantations des deux Amériques.106

Verger conclut sur cette question que des membres de la famille royale d’Abomey ont été exilés vers São Luis do Maranhão, et d’après ses informateurs, Nã Agontimé, la veuve du roi Agonglo, a été vendue en tant qu’esclave avec d’autres membres de la famille royale, et eux ont certainement emmené avec eux ce culte jusqu’au Maranhão.

Quant aux deux autres dates, proposées par l’Ogã, elles laissent matière à discussion. Selon l’historien et anthropologue Edison Carneiro, la fondation des terreiros de candomblé de Bahia, des candomblés « de tradition nagôs », ne remonterait qu’à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècles. On le verra plus tard quand nous traiterons de la formation du candomblé, avec l’arrivée des prêtresses africaines d’origine yorouba qui ont fondé le premier candomblé répertorié historiquement à Bahia : le Candomblé da Barroquinha.

Au sujet des représentations de Legba sous la forme d’un singe, et de l’émergence d’un nouveau vudum, Lebabimibome, l’Ogã Buda nous a fourni des informations précieuses sur l’apparition et le début d’un culte adressé à cette divinité. C’est en effet son père biologique,

l’Ogã Bobosa, qui a été le premier dans le terreiro Seja Hundê à organiser le culte de ce vudu

lorsqu’il lui est apparu un jour sous l’aspect d’un singe sous l’apparence d’une poupée noire pourvue des attributs de Legba, qu’il ordonne de placer dans l’atinsá de Legba, l’arbre loko, (fromager).

À quelques détails près, son apparition dans ce terreiro relève des mêmes processus que ceux qui se produisent au Dahomey, à la différence que l’arbre sacré existait déjà bien avant l’établissement du culte de ce vudu. Cela est corroboré par Herskovits lorsqu’il demande à ses informateurs la signification d’un vudu, « What is a vudu ? » Voici ce qu’il rapporte.

The native translates the term by the word « god, » yet within a shrine will point to a particular spot where a large jar is embedded and will say that the vodu is there. Quite apart from the concept of vudu which regards it as a deity of [the Thunder Gods, the       

Earth Gods, the Sky Gods], or discussed in considering the ancestral cult, the fact remains that a vudu is also thought of by the Dahomean as something which is localized, and that a spirit, while philosophically conceived as existing everywhere in space, must also have definite places to which it can be summoned, where it can be commanded by the proper formulae to aid its worshippers, and from which it can go forth to achieve those things desired of it. According to one account it is the god himself who indicates the place where the temple to a given vudu is to be established by giving a sign by which it is recognized that a shrine is to be built. One example given of such a sign was the appearance of the shoot of a lokó tree inside the house. It is not believed that the lokó can be planted, hence its appearance in such a place would be regarded as the demand of some deity that a shrine be established to him by the person in whose house the shoot

appears (…).107

De même, Herskovits estime qu’il n’est pas improbable que ce soit de cette manière que certains cultes se sont constitués et identifiés avec des lignées familiales. Dans la tradition dahoméenne, en effet, tous les cultes « publics » d’un vudu sont considérés au début comme étant associés à un groupe de gens liés par le sang, qui ont perpétué leur culte.108

Avançant un point de vue assez proche, De Surgy parle des trǫ. Il souligne qu’en matière de secours que les Evhés attendent du monde spirituel, ce n’est pas des ancêtres qu’ils se préoccupent le plus. Ils s’attachent plutôt à ces divinités que depuis peu on appelle vudu, et que Spieth qualifiait de dieux subalternes, subordonnés au Dieu suprême, ou de dieux terrestres.

Innombrables, et pour la plupart éphémères, ces divinités changent parfois de figure, de caractère, et même de fonction. Leur ensemble évolue parallèlement à la population des êtres vivants qu’elles sont destinées à secourir, ce qui empêche de leur assigner une place dans un panthéon stabilisé. Robert Cornevin (1962, p. 100) estimait qu’il en existait entre cinq cents et six cents. Il peut s’en inventer chaque jour de nouvelles, ou en être importées de l’étranger, tandis que certaines se métamorphosent en passant d’un village à l’autre ou d’une génération aux suivantes, quand on ne les abandonne pas, purement et simplement.

      

107 HERSKOVITS, Melville, idem.p. 170-174. 108 N1, HERSKOVITS, Melville, ibid., p. 170.

La transformation de certains ancêtres en divinités montre qu’il n’y a pas de différence de nature entre les deux. Il en va de même dans toute l’aire culturelle à laquelle se rattachent les Evhé.109 Spieth expose ainsi une idée générale de ces phénomènes.

« En résumé, écrit Spieth (1911, cité par Caldow, 1952, p. 12), y a-t-il un objet, quelle que soit la qualité particulière qu’il possède, qui impressionne distinctement, de façon agréable, l’esprit d’un homme et affecte directement son existence, dès ce moment un tro est né dans l’esprit des Evhé ». Un étang, cas de Blolui à Anloga (Gaba, 1965, p. 77), un tronc d’arbre creux sur le rivage, cas d’Atiti (Spieth, 1911, p. 109), un coin d’épaisse forêt, cas de Kpele, entre Kpenoe et Ho (Spieth, 1906, p. 456), une fourmilière, cas de Kovi à Bleamedzado (Gaba, 1965, p. 77),un essaim d’abeilles, cas de Tsihee à Dome (Spieth, 1906,p. 460), une source, une paire de tambours découverts abandonnés en brousse… se sont dans le passé transformés en trǫ. »110

Lors de telles manifestations et évidences, le premier soin d’un devin consulté est d’envoyer la personne concernée à des gens compétents, qui peuvent prendre en charge de telles divinités pour l’installation d’un ou de plusieurs autels ou sanctuaires. Ils s’occuperont aussi de l’initiation de l’appelé, à qui ils donneront les connaissances liturgiques, magiques et médicinales nécessaires. Au cas où la divinité n’est rattachable à aucun groupe déjà connu dans la région,le devin prendra en charge lui-même l’initiation, après avoir demandé au trǫ par la

divination comment elle exigeait d’être traitée. Il arrive même dans certains cas exceptionnels que la divinité révèle par la possession de l’individu la manière dont elle veut être installée et honorée.111

Les indications fournies par Herskovits et De Surgy sur les diverses manières dont un vudu peut apparaître dans un endroit précis et se révéler à une personne pour le commencement de son culte peuvent fort bien être étendues. Elles peuvent englober la façon dont le vudum est apparu dans le temple du Seja Hundê à Ogã Bobosa, dans la ville de Cahoeira à Bahia, s’inscrivant ainsi dans un processus identique à celui de la région du golfe du Benin.

      

109 De SURGY, Albert, Le système religieux des Evhé – connaissance des hommes, L’Hamattan, Paris, 1988, p.

43.

110 De SURGY, Albert, idem., p. 46.

111 N17, « D’après l’explication unanime des indigènes, écrit Spieth (1906, p. 442-443), le tro (qui signifie changer,

modifier, tourner) dont on se sert pour désigner les fétiches doit indiquer le caractère changeant, inconstant de ces dieux de la terre, qui réclament à leurs adorateurs aujourd’hui ceci, demain cela… », In De SURGY, Albert, ibid., p. 42-52.

Nous n’avons pas d’autres détails concernant les exigences posées par cette divinité aux responsables du culte du terreiro au moment de son apparition. Il n’en demeure pas moins que ce vudum fait aujourd’hui partie du panthéon de ce candomblé, sous le nom de Lebabimibome, et que des offrandes lui sont faites régulièrement. Nous en parlerons plus longuement lorsque nous évoquerons certains rituels pratiqués là-bas, avec l’immolation de volailles.

Lors des entretiens mon informateur, l’Ogã Buda, m’a fourni une donnée capitale pour ma thèse : la transformation de Legba, Leba, en Lebabimibome. A ce stade il prend la forme d’un singe, l’un des multiples aspects sous lesquels il peut décider de se révéler. S’il a choisi cette forme, c’est bien pour nous faire passer un message, car le singe ressemble beaucoup à l’être humain, tant par sa forme que par sa vanité. Mais, surtout, le choix de la forme du singe, animal endémique en Afrique, tient à son origine africaine et au fait que les Africains ont eux aussi été représentés et exhibés de cette manière par les colons et trafiquants d’esclaves.

Ainsi, en se présentant sous la forme d’un singe, Lebabimibome devient le Messager de la principale divinité célébrée dans ce terreiro, à savoir Bessem, le Serpent arc-en-ciel, qui représente le changement inhérent à toute chose dans l’univers. Or, ce Vudum Bessem est le représentant de toute la « nation jeje-mahin », à cause de son origine dahoméenne.

Il devient ainsi le Messager, le symbole de l’esclave et l’Exu du Dahomey. Legba se mettra dans la peau du singe pour représenter l’esclave africain et de tout un groupe ethnique. En tant que divinité communautaire et ethnique, ce vudum a des précédents dans l’aire fongbe du golfe du Bénin. Une région où l’on mentionne de nombreux cas de trǫ/vudu qui peuvent, dans certaines conditions, accéder à un statut de divinité lignagère, clanique. Voici ce qu’indique à ce propos De Surgy, par l’intermédiaire de Seth Nomenyo :

Le trǫ, écrit Seth Nomenyo (1968, p. 61), est d’abord le dieu d’un individu, celui qui est son « épouse » et sa « bouche ». Très souvent cet individu est un chef de famille. Le dieu est ensuite le dieu de la famille de cet individu, puis le dieu du clan de cette famille, de la tribu de ce clan ; enfin, selon son importance, le dieu du peuple auquel appartient la tribu ».

En réalité une divinité personnelle n’accède qu’exceptionnellement à un rang supérieur à celui de divinité familiale. Il faut pour cela qu’elle ait été acquise par un homme dont le successeur aille fonder quelque part ailleurs, sous sa protection, un autre village. De plus des divinités peuvent accéder immédiatement au rang de divinité

lignagère ou clanique quand elles sont découvertes ou acquises par un chef de lignage ou de clan au profit de tout un groupe.112

Quant à la signification du terme Bimibome, je n’ai pas encore trouvé de réponse définitive dans les écrits des auteurs qui se sont penché sur les religions du golfe du Bénin, et etudié tant le culte des vudu que celui des orisha. Pas plus de réponses dans les dictionnaires consultés, dans le « Dictionnaire fon-français » de Segurola, dans le « Dictionary of Modern Yoruba » d’Abraham… L’Ogã Buda, lui, propose une explication. L’étymologie de ce terme se trouverait dans certaines lettres qui le composent comme les B et les M du mot Bimibome, qui renvoient aux origines géographiques d’où proviennent la majorité des Jejes déportés à Bahia : le B, pour le royaume du Bénin ; et le M, pour la région Mahin, « Maxi », partie intégrante de ce royaume.

On m’a aussi demandé si le nom de cette divinité ne viendrait pas de la phrase présentée comme yorouba : /Legba Bi Ni Abome/, Legba originaire d’Abomé ?

Pour élucider cette question, je me suis adressé à un ancien diplomate yoroubaphone nigérian, M. Yemi Lijardu. Il m’a proposé plusieurs constructions dans sa langue natale pour exprimer l’origine et l’appartenance. Ainsi, si l’on veut signifier « Legba né à Abomey = Legba ti a bi ni Abomey » ou le cas d’un Legba originaire d’Abomey, les Yorouba diraient « Legba ti Abomey ou Legba ara Abomey. » Selon lui, le terme Bimibome n’est certainement pas d’origine yorouba car, si on le décompose, les deux premières syllabes /Bimi/ en yorouba signifieraient : [moi né, ou demande moi]. Quant au terme Bome, il n’aurait aucune signification en yorouba.

Même si l’on admet que cette phrase signifierait « un Legba originaire d’Abomé » (nom la capitale de l’ancien royaume du Dahomey en portugais), et même avec des changements d’ordre vocalique de la place de l’accent à la voyelle /o/ dans /bome /, dans la deuxième partie du nom de la divinité, cela n’en confirmerait pas moins l’origine de ce vudu. Il provient de l’espace culturel lié à l’aire linguistique gbe et à la religion des cultes vudu d’où sont issus les nombreux Africains qui ont été déportés au Brésil ; ils ont ensuite contribué à la formation de la nation jeje du Candomblé de Bahia, dont le temple Seja Hundê fait partie.

      

112 N17., “D’après l’explication unanime des indigènes, écrit Spieth (1906, p. 442-443), le tro (qui veut dire

changer, modifier, tourner) dont on se sert pour désigner les fétiches, doit indiquer le caractère changeant, inconscient, de ces dieux de la terre qui réclament à leurs adorateurs aujourd’hui ceci, demain cela… ». De SURGY, Albert, ibid., p. 42-52.

Lors de mon entretien avec l’Ogã Buda, je lui ai demandé s’il connaissait des histoires, des contes ou des mythes qui racontaient quelque chose sur l’origine de cette divinité et pourraient expliquer le changement d’aspect de Exu-Legbá, de Legba, qui adopte la forme simiesque sous laquelle il se fait connaître en tant que Lebabimibome dans son terreiro?

Il m’a répondu : « Pas du tout ! » Les Anciens se refusaient de leur raconter des histoires et préféraient qu’ils apprennent par eux-mêmes, par leurs propres pratiques et expériences. Et l’Ogã Buda a conclu : « Les Vieux ne nous racontaient pas beaucoup d’histoires, parfois quelques histoires du Saint de la maison, saint tutélaire du Seja Hundê, et rajoutait, « Quand il (le Saint) ne tue pas, il estropie. C’était tout. Les quelques histoires qu’ils nous ra- contaient se