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D.4.d Une axiomatique de la capabilité sécurité fondée sur les fonctions de transformation

transformation

A quoi correspond la perspective d’occurrence d’un aléa négatif sur l’ensemble des biens Xi,

et des fonctions de transformation Fi ? Dans la suite de cette section, nous généralisons les

concepts élaborés par Sen à une situation d’incertitude valable pour toute personne en enlevant dans les notations l’indice individuel i. Comment alors définir une situation

d’insécurité dans le contexte de l’axiomatique ainsi posée ?

Rappelons que nous avons représenté un mode de fonctionnement fondé sur la fonction d’utilisation f

( )

. à partir du vecteur des biens x sous la forme b= f c x

(

( ))

, correspondant à une réalisation. Souvenons-nous alors de l’exemple de la bicyclette donné par Sen : « Bien sûr, c’est un bien. Il a différentes caractéristiques et nous pouvons nous concentrer sur l’une

d’entre-elles, à savoir le transport. Posséder un vélo donne à une personne la possibilité de se déplacer en des lieux où elle n’aurait pas pu le faire sans bicyclette. Donc, la caractéristique

de transport du vélo donne à la personne la capabilité de se déplacer» 134 . Comment l’insécurité modifie-t-elle le niveau de vie d’une personne donnée, c’est-à-dire l’ensemble des réalisations qui lui sont accessibles en amont de l’occurrence du risque considéré ?

En réalité, l’insécurité n’est pas privation du bien – la bicyclette, par exemple – dont dispose l’agent, dès lors que l’observation se fait ex ante : tant que l’aléa ne survient pas, il garde la

possession de ce bien. L’espace X des biens accessibles n’est donc pas modifié. En revanche,

les possibilités de convertir ces biens en modes de fonctionnement sont modifiées par la

situation de risque. Dès lors, certaines modalités de transformation des biens en modes de fonctionnement peuvent disparaître en cas d’occurrence du risque.

134

Posons un espace des capabilités de référence Q , caractérisé par l’ensemble de biens X et 0

l’ensemble des fonctions de transformationsF . Nous supposerons que 0 F contient k 0

éléments. Cet espace est considéré comme parfaitement sécurisé. On le note :

(

)

0 , 0 Q = X F . Soit également :

( )

(

)

( )

0 / ; . 0, Q =b b= f c x fF xX

Appelons θ, l’occurrence d’un aléa, pouvant intervenir avec une probabilité p

( )θ

, et examinons quel peut être son impact sur les biens et les fonctions de transformation. F , est θ le nouvel ensemble des fonctions de transformation de l’agent, en situation de risque. Il

permet d’écrire Qθ, caractérisé par l’ensemble de biens X et l’ensemble des fonctions de

transformationsFθ . On le note :

(

,

)

Qθ = X Fθ Soit également :

( )

(

)

( )

/ ; . , Qθ =b b= f c x fF xθ ∈X

Comment effectuer une comparaison entre ces deux espaces de capabilités ? L’ensemble des

fonctions de transformationFθ se définit par une composante soumise au risque

θ

, F , et rθ

une composante non soumise à ce même risque Fnrθ. Il peut donc s’écrire :

{

θ θ

}

θ Fr Fnr

F = , .

Pour fixer la comparaison entre les ensembles Fθ et F on distingue également au sein de 0 0

F les composantes qui seraient ou non soumises à l’aléa en situation d’incertitude :

{

0 0

}

0 Fr ,Fnr

F =

0

r

F correspond donc à l’ensemble des fonctions de transformation offertes à l’agent en

situation initiale, qui recouvre la composante risquée. Fnr0, à l’ensemble des fonctions de

transformation offertes à l’agent en situation initiale, qui recouvre la composante non risquée.

Il est alors possible d’écrire :

0 0 r r nr nr F F F F θ θ ≠ =

Par ailleurs, nous savons que F contient j éléments, r0 Fnr0 en contenant k – j.

Ecrivons plus précisément les fonctions de transformation appartenant à chacun de ces deux

ensembles :

{

}

0 10, 20,..., j0, (j 1)0,..., k0 F = f f f f + f Avec :

{

}

{

}

0 10 20 0 0 ( 1)0 0 , ,..., ,..., r j nr j k F f f f F f + f = =

De manière analogue, nous pouvons écrire :

{

1 , 2 ,..., j , (j 1) ,..., k

}

Fθ = f θ f θ fθ f + θ fθ , soit, comme Fnrθ =Fnr0 :

{

1 , 2 ,..., j , (j 1)0,..., k0

}

Il s’agit donc de comparer Fr0=

{

f10,f20,...,fj0

}

et Frθ =

{

f1θ,f2θ,..., fjθ

}

, c’est-à-dire les fonctions de transformation initiales et ces mêmes fonctions de transformation soumises à une

situation de risque. Précisons encore une fois que nous nous situons en amont du risque. Là encore, l’exemple de la bicyclette, utilisé par Amartya Sen et particulièrement illustratif. Chacune des fonctions de transformation dont dispose l’agent constitue en réalité le passage de la caractéristique d’un bien au mode de fonctionnement qu’il permet. La présence d’un risque pesant sur l’individu modifie ex ante l’espace des fonctions de transformation qui lui est accessible, même s’il n’y a pas occurrence du risque ex post.

En effet, si l’on prend une fonction de transformation fqθ, avec fqθ∈Frθ =

{

f1θ,f2θ,...,fjθ

}

,

il existe une probabilité p

( )θ

que l’aléa

θ

survienne effectivement et que cette fonction ne permette pas de transformer les caractéristiques du bien considéré en un mode de

fonctionnement qui lui était associé. Cela signifie que les modes de fonctionnement reposant

sur des fonctions de transformation soumises au risque ne sont plus accessibles en cas d’occurrence du risque

θ

. Plus formellement, en appelant x le bien représenté par une bicyclette, nous définissons un mode de fonctionnement bqθ soumis au risque :

( )

(

)

q q

bθ = fθ c x

De même, la fonction de transformation analogue f , non soumise à l’aléa q0

θ

permet de

d’obtenir le mode de fonctionnement b non soumis au risque, ce qui s’écrit : q

( )

(

)

0

q q

b = f c x

Or, avec une probabilité p

( )θ

, ce mode de fonctionnement n’est plus permis, c’est-à-dire qu’il n’est pas possible de convertir les biens en un mode de fonctionnement. Pour reprendre l’exemple de la bicyclette, il devient impossible de se déplacer. Avec la probabilité complémentaire, on retrouve b . Plus formellement, nous écrivons : q

( )

(

)

q q

( )

(

)

q q q

bθ = fθ c x =b , avec une probabilité 1−p

( )θ

Pour achever de définir la fonction fqθ, et la comparer à la fonction analogue f , non q0

soumise à l’aléa

θ

, posons la fonction o

( )

. , définie de la manière suivante pour un x donné :

( )

(

)

o c x = ∅.

On peut alors écrire fqθ sous une nouvelle forme :

( )

.

q

fθ =o , avec une probabilité p

( )θ

, ce qui rend inaccessibles les modes de fonctionnement soumis au risque. Avec la probabilité complémentaire, on a :

0

q q

fθ = f , avec une probabilité 1−p

( )θ

La même formalisation est possible pour toute fonction de transformation

{

1 , 2 ,...,

}

q r j

fθ∈Fθ = f θ f θ fθ , c’est-à-dire soumise au risque

θ

. C'est-à-dire,

{

1 , 2 ,...,

}

q r j fθ Fθ f θ f θ fθ ∀ ∈ = ,

( )

. q

fθ =o , avec une probabilité p

( )θ

, et

0

q q

fθ = f , avec une probabilité 1−p

( )θ

.

D’une manière plus agrégée, il est donc possible d’écrire Frθ =

{

f1θ, f2θ,..., fjθ

}

de la manière

suivante :

{

, ,...,

}

r

Fθ = o o o , avec une probabilité p

( )θ

, et

{

10, 20,..., 0

}

r j

Fθ = f f f , avec une probabilité 1−p

( )θ

.

Enfin, nous pouvons réécrire Fθ =

{

Frθ,Fnrθ

}

sous une forme détaillée. Nous avons déjà distingué les fonctions de transformation soumises au risque de celles qui ne le sont pas :

{

1 , 2 ,..., j , (j 1) ,..., k

} {

1 , 2 ,..., j , (j 1)0,..., k0

}

Fθ = f θ f θ fθ f + θ fθ = f θ f θ fθ f + f . Nous pouvons à présent écrire :

{

, ,..., , (j 1)0,..., k0

}

0

Fθ = o o o f + fF , avec une probabilité p

( )θ

, et

{

10, 20,..., j0, (j 1)0,..., k0

}

0

Fθ = f f f f + f =F , avec une probabilité 1−p

( )θ

. Soit, encore : Fθ ⊆F0, et avec p

( )θ

≠0 : Fθ⊂F0.

Pour le dire autrement, la présence d’un aléa réduit l’ensemble des fonctions de

transformation permettant d’atteindre des modes de fonctionnement. Il en résulte, que

l’espace des capabilités de l’agent en est probablement également restreint. Souvenons-nous que l’espace des capabilités d’une personne est entièrement caractérisé par les ensembles F et

X. Plus formellement :

(

,

)

Qθ = X Fθ et

(

)

0 , 0 Q = X F

Mais, le travail que nous venons de faire n’est pas suffisant pour conclure. En effet, deux approches permettent d’appréhender la sécurité en tant que capabilité : l’une, que nous venons de voir, est fondée sur les ensembles de biens et de fonctions de transformation en situation d’incertitude ; l’autre, sur les modes de fonctionnement accessibles à l’agent dans cette situation. Or, l’axiomatique de comparaison des espaces de capabilités dont nous disposons est fondée sur les modes de fonctionnement. C’est donc seulement en fixant une axiomatique de la capabilité sécurité sur les modes de fonctionnement que nous pourrons effectuer une comparaison des capabilités en univers incertain.