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II. CADRE THEORIQUE

2. L’attribution de rôles

2. L’attribution de rôles

Comme nous l’avons vu précédemment, les compositions de groupes que nous avons choisies pour notre recherche présentent certains dysfonctionnements ou les effets de celles-ci sont controversés. C’est pourquoi, nous avons choisi d’introduire la variable des rôles afin de tenter d’améliorer les interactions entre les élèves dans les compositions qui risquent d’être problématiques. La participation et l’influence des différents membres du groupe, compte tenu de leur statut, sont à l’origine de ces compositions qui peuvent dysfonctionner. Une proposition pour amener tous les élèves à participer serait de leur attribuer un rôle. Nous avons donc mené des recherches à ce sujet afin de trouver les rôles qui pourraient diminuer ces dysfonctionnements. Cela nous permettra également de mettre en avant les recherches déjà effectuées dans ce domaine.

Selon Cohen (1994), les groupes, dans lesquels des rôles sont assignés, peuvent travailler de manière efficace et productive. Elle relève également que l’attribution de rôles peut alléger les problèmes de non participation ou de domination d’un membre du groupe dans les interactions. En effet, l’attribution de rôles permet de structurer le

travail de groupe et incite chaque membre à avoir une part de responsabilité dans le travail produit et les solutions apportées.

Lors de nos diverses lectures, nous avons pu relever différents rôles. Barlow (2006) explique que certains de ces rôles servent à la production du travail en groupe tels que la personne-ressource, l’introducteur, le participant, etc. D’autres rôles facilitent les échanges tels que le président, le reformulateur, le négociateur, etc. Clarke et al.

(1992) parlent de l’attribution des rôles qui contribuent à organiser et à faciliter la participation des membres du groupe tels que le secrétaire, le présentateur ou le chronométreur. Puis, des rôles qui aident à structurer la discussion tels que l’intervieweur, l’incitateur ou le vérificateur. Ils expliquent également l’utilité des fiches descriptives des rôles durant la période d’initiation au travail de groupe. Cependant, peu de recherches portent sur les effets de l’introduction de ces rôles.

Selon l'article de Schellens et al. (2005) les résultats de leur recherche démontrent que les élèves ayant travaillé dans un groupe sans rôles ont acquis un niveau de connaissances comparable à celui du groupe auquel des rôles ont été attribués. Les résultats révèlent donc qu'il n'y a pas d'effet significatif quant à l'attribution de rôles.

Ils relèvent même des effets négatifs pour les élèves qui avaient le rôle de modérateur et de personne ressource car ces élèves ont obtenu un moins bon niveau de construction de connaissances durant le post-test. Seuls les élèves ayant pour rôle de résumer ont obtenu un meilleur niveau de construction de connaissances comparé aux élèves qui n'avaient pas de rôles. Concernant le rôle de théoricien, le niveau est comparable aux élèves du groupe sans rôles. Ils relèvent le fait que ces résultats ne concordent pas avec d'autres recherches qui démontrent que l'attribution de rôles stimule les discussions de groupe et permet une meilleure interaction et une meilleure collaboration entre les élèves. Les résultats obtenus lors de leur recherche ne révèlent pas de différence entre les discussions menée dans les groupes avec rôles et celles dans les groupes sans rôles. Ceci leur permet de soulever l'importance de définir clairement et d'expliquer les rôles attribués car ils relèvent le fait que les élèves ayant travaillé dans le groupe avec rôles sont restés trop fermés dans le rôle qui leur a été attribué et n'ont pas participé davantage dans les discussions de groupe. Ils pensent donc que d'autres recherches doivent être faites afin de pouvoir attester des effets de l'attribution de rôles.

Par la suite ces auteurs ont effectivement mené d'autres recherches qui ont abouti à des résultats positifs concernant l'attribution de rôles. En effet, dans les articles de De Wever, Schellens, Van Keer et Valcke (2008) et De Wever, Van Keer, Schellens et Valcke (2009), les résultats de leur recherche démontrent que l'attribution de rôle dans les discussions de groupe engendre un meilleur niveau de construction de connaissances en comparaison avec les groupes qui ont travaillé sans rôles. En effet, les élèves qui ont travaillé dans les groupes avec rôles ont su tenir le rôle qui leur était attribué tout en prenant part à la discussion de groupe et en développant cette discussion par des apports liés à leur rôle. La personne ressource a apporté des ressources externes, le théoricien s'est référé à des concepts théoriques, le «

starter » a introduit de nouvelles idées qui ont permis d'étoffer la discussion, celui qui doit résumer a bien tenu son rôle et le modérateur également. Tous ces rôles ont été bénéfiques pour les élèves et les ont aidés à mener l'activité avec succès. Ces auteurs relèvent également le fait que le moment d'introduction des rôles peut avoir un impact car cela permet aux élèves de mieux comprendre et intérioriser l'utilisation des rôles dans l'activité demandée. En effet, l’introduction de rôles est un outil qui aide à structurer le travail en groupe, particulièrement lorsqu’ils sont introduits au début des discussions du groupe, car ils aident les membres à démarrer le travail.

Cela permet aux participants de gérer eux-mêmes la tâche qui leur est donnée, de démarrer les discussions dès le départ et d’éviter d’être confronté à des difficultés car chaque membre se verra attribuer un rôle particulier qui lui permettra de contribuer à l’avancement de la tâche. Ainsi, si chaque membre tient son rôle, le travail sera structuré, les débordements seront donc inhibés, et cela leur permettra d’avancer dans la tâche en évitant les obstacles avec l’aide et la contribution de chacun. Donc, les rôles définissent des fonctions ou des responsabilités qui guident les participants dans leurs comportements et leurs interactions. Ils peuvent stimuler les membres du groupe et font le pont entre les périodes de silence. Il en résulte des interactions plus rapides et plus consistantes car elles sont plus structurées et donc plus élaborées. Ainsi, chacun contribue à la tâche et participe selon le rôle qui lui est assigné. Les participants sont soumis à une responsabilisation individuelle, qui les incite à tenir le rôle qui leur est assigné, et une responsabilisation collective, qui les pousse à collaborer et à contribuer au travail collectif. En outre, « les rôles favorisent donc l’interdépendance parce que chaque élève, en jouant son rôle, contribue au fonctionnement de l’équipe. On ne doit observer aucune rivalité dans l’exécution de ces rôles, mais une recherche de complémentarité. » (Gaudet et al., 1998, p. 203).

Dans notre étude, nous avons pensé à attribuer les rôles de journaliste et de spécialiste. Ces rôles permettraient de faciliter l’organisation des interactions et de légitimer la parole de chaque élève. Les élèves seraient donc amenés à s’impliquer davantage dans la tâche. Comme nous l’avons vu dans le chapitre 3, King (1999, cité par Buchs et al., 2006) relève les effets positifs du questionnement. En effet, le rôle de journaliste pousserait les élèves à questionner leur camarade sur la base d’un canevas de questions. Afin d’utiliser ce canevas, les journalistes sont amenés à traiter le contenu de l’activité et obligeraient par la même occasion les spécialistes à le traiter pour répondre aux questions. Nous pouvons faire l’hypothèse que les élèves qui se verraient attribuer le rôle de spécialiste seraient amenés à apporter davantage d’explications. Cependant, il pourrait s’avérer que l’attribution de rôles engendrerait des difficultés supplémentaires pour certains élèves. En effet, le fait de tenir un rôle en même temps que de réaliser une tâche cognitive pourrait leur être difficile.

Chapitre 6 : Problématique et questions de recherche

Cette recherche s'inscrit dans le cadre de l'apprentissage coopératif et s'intéresse aux interactions et aux apprentissages des élèves de niveau fort et faible lors d'un travail en duos sur des textes. En effet, nous avons souligné avec Cohen (1994, p.

27) que « les petits groupes de travail ont tendance à développer des hiérarchies dans lesquelles certains membres sont plus actifs et plus influents que d'autres. ».

Notre question de départ était la suivante : Quels sont les moyens à mettre en œuvre lors d'un travail en groupe afin de favoriser les apprentissages cognitifs de l’ensemble des élèves et d'éviter les effets négatifs de celui-ci ? A partir de là, les questions que nous nous sommes posées sont les suivantes : Comment l'enseignant peut-il favoriser les apprentissages dans le travail en groupe ? Comment faciliter les interactions ? Comment former des groupes afin de privilégier les apprentissages ? Comment éviter les effets négatifs du travail en groupe ? Ces premières interrogations nous ont permis de faire émerger une problématique centrée sur l’apprentissage coopératif et plus ciblée sur les deux aspects principaux que nous aimerions traiter, c'est-à-dire les modes de constitution des groupes (groupes homogènes et hétérogènes) en fonction des niveaux scolaires (niveau scolaire fort et faible) et l'attribution de rôles. Nous avons donc décidé, dans un premier temps, de nous centrer plus particulièrement sur les modes de constitution des groupes selon le niveau scolaire. Cela nous permettra de relever quelles sont les compositions qui favorisent davantage les apprentissages cognitifs des élèves de divers niveaux scolaires. Puis, dans un deuxième temps, nous intègrerons la deuxième variable qui est l'attribution de rôles afin de remédier aux dysfonctionnements éventuels dus à la composition des groupes. Ceci permet de mettre en évidence l'articulation de notre objet d'étude et de ses variables.

Notre problématique est donc la suivante : dans quelle mesure l'attribution de rôles ciblés permet de modérer les effets de la composition des groupes d'élèves en fonction de leur niveau. Notre première question de recherche est divisée en trois sous-questions.

Question de recherche 1: Quels sont les effets de la composition des groupes d'élèves selon leur niveau?

Question de recherche 1a: Quels sont les interactions et les apprentissages des élèves de niveau fort dans les groupes homogènes et hétérogènes?

La première sous-question s'interroge sur les interactions et les apprentissages des élèves de niveau fort. Nous avons souligné que, d’après une étude de Webb (1980, citée dans Webb & Sullivan Palincsar, 1996) concernant une activité en mathématiques, les élèves de niveau fort retirent plus de bénéfices au niveau des apprentissages lorsqu’ils sont en groupe hétérogène car ils sont amenés à apporter plus d’explications à leur partenaire que lorsqu’ils travaillent en groupe homogène.

Pour cette recherche, nous allons donc comparer, au niveau des interactions et des apprentissages, le travail des élèves de niveau fort au sein des groupes homogènes et des groupes hétérogènes.

Question de recherche 1b: Quels sont les interactions et les apprentissages des élèves de niveau faible dans les groupes homogènes et hétérogènes?

La deuxième sous-question se rapporte aux élèves de niveau faible. Nous avons souligné que les auteurs ne s’accordent pas toujours sur ce point. En effet, les études de Webb (1980, citée par Webb & Sullivan Palincsar, 1996) relèvent que les élèves de niveau faible retirent plus de bénéfices en travaillant en groupe hétérogène car ils reçoivent l’aide de leur partenaire de niveau plus élevé, ce qui est moins le cas lorsqu’ils travaillent avec un partenaire de même niveau. Cependant, les travaux de Cohen (1994) montrent que les élèves de niveau faible, lorsqu'ils sont en groupe hétérogène, peinent à interagir avec des élèves de niveau plus élevé ce qui, selon elle, est dû à un problème de hiérarchie et de généralisation du statut de l’élève.

Nous pouvons donc questionner le travail des élèves de niveau faible en groupe homogène afin de voir s'il serait plus bénéfique pour eux de travailler dans cette composition dans laquelle ils pourraient peut-être participer plus facilement. Pour notre recherche, nous comparerons donc, dans un premier temps, le travail des élèves de niveau faible en groupe homogène et hétérogène en nous centrant sur les interactions et les apprentissages.

Question de recherche 1c: Quels sont les interactions et les apprentissages des élèves de niveau fort et des élèves de niveau faible en groupe hétérogène.

La troisième sous-question porte sur les groupes hétérogènes et étudie les relations entre les élèves de niveau fort et les élèves de niveau faible.

Comme nous l’avons relevé plus haut, la littérature révèle des effets inconsistants des groupes hétérogènes impliquant des élèves de niveau fort et faible. Les études de Webb (1980, citée par Webb & Sullvan Palincsar, 1996) suggèrent que l’ensemble des partenaires pourrait bénéficier du travail en groupe hétérogène, les élèves de niveau fort bénéficiant des explications qu’ils apportent et les élèves de niveau faible profitant de ces explications. Cependant, les propositions de Cohen (1994) viennent interroger ces résultats car cette dernière met en garde contre les effets des caractéristiques de statut qui peuvent prendre place dans cette composition. En effet, il se peut que les élèves de niveau fort participent plus et soient plus influents et que les élèves de niveau faible peinent à prendre une part active dans le travail de groupe, s’appuyant sur leur partenaire.

De plus, De Wever et al. (2009) suggèrent que l'attribution de rôles lors du travail en groupe est favorable aux apprentissages. Nous avons ici décidé d’introduire deux rôles pertinents en situation de travail en duo sur des textes : un journaliste et un spécialiste. Notre hypothèse générale serait la suivante : ces rôles pousseraient chaque élève à s’investir pour jouer son rôle, ce qui pourrait atténuer les effets des

statuts initiaux dans les interactions, ce qui nous amène à notre deuxième question de recherche :

Question de recherche 2: Dans quelle mesure l'attribution de rôles aux élèves influence l'investissement de ceux-ci dans la tâche ainsi que leurs apprentissages ?

Pour répondre à cette question, nous comparerons les interactions et les apprentissages des élèves, tous niveaux confondus, qui ont travaillé sans les rôles avec les résultats des élèves qui ont travaillé avec les rôles.

Notre dernière question de recherche s’intéresse à l’effet de l’attribution de rôles au sein des différentes compositions de groupes. Celle-ci est divisée en trois sous questions.

Question de recherche 3: Quels sont les effets de l'attribution de rôles au sein des différentes compositions des groupes?

Question de recherche 3a: Quels sont les effets de l'attribution de rôles pour les élèves de niveau fort dans les groupes homogènes et hétérogènes?

Question de recherche 3b: Quels sont les effets de l'attribution de rôles pour les élèves de niveau faible dans les groupes homogènes et hétérogènes?

Pour les deux premières sous-questions, nous allons comparer les résultats des élèves lorsqu'ils ont travaillé en groupe homogène avec ceux des groupes hétérogènes, en comparant les résultats pour les deux compositions de groupes et en relevant les différences, s'il y en a, entre ceux qui ont travaillé sans rôles et ceux qui ont travaillé avec rôles. La première sous-question est centrée sur les élèves de niveau fort et la deuxième sur les élèves de niveau faible.

Question de recherche 3c: Quels sont les effets de l'attribution de rôles pour les élèves de niveau faible et les élèves de niveau fort dans les groupes hétérogènes?

Pour terminer, cette dernière sous-question porte sur les groupes hétérogènes. En effet, les résultats obtenus pour les questions ci-dessus nous permettront de comparer les résultats des élèves de niveau fort et ceux des élèves de niveau faible en groupe hétérogène avec rôles et sans rôles.

III. CADRE

METHODOLOGIQUE

     

   

Chapitre 7 : Dispositif de recherche