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II.1 Diversité des cellules gliales

II.1.3 Astrocytes

Les astrocytes constituent la troisième population de cellules gliales du CNS et est de loin la plus diversifiée. Les astrocytes, ainsi nommés du à leur forme étoilée, peuvent être classifiés en deux types principaux, les astrocytes protoplasmiques et les astrocytes fibreux. Les astrocytes protoplasmiques, retrouvés principalement dans la matière grise, possèdent plusieurs prolongements ramifiés de façon uniforme tandis que les astrocytes fibreux sont plus abondants dans la matière blanche et sont composés de longs prolongements moins nombreux (Sofroniew and Vinters 2010). Il existe cependant plus de deux types d’astrocytes. Reichenbach et Wolburg les ont classifiés en plusieurs classes selon leur morphologie (Reichenbach and Wolburg 2005). Ces différents types d’astrocytes sont représentés dans la Figure 2. Cette grande hétérogénéité complique la caractérisation et définition de cette population de cellules gliales (Kimelberg 2004, Emsley and Macklis 2006).

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Figure 2 : Diversité des astrocytes et des cellules épendymocytaires.

Représentation morphologique des différents types d’astrocytes tels que classifiés par Reichenbach et Wolburg et leur positionnement relatif aux diverses structures du CNS. Abréviations : I tanycytes, II astrocytes radiaux (cellules gliales de Bergmann), III astrocytes marginaux, IV astrocytes protoplasmiques, V astrocytes velate, VI astrocytes fibreux, VII astrocytes périvasculaires, VIII astrocytes interlaminaires, IX asctrocytes immatures, X épendymocytes, XI cellules du plexus choroïde.

II.1.3.1 Structure et organisation

De façon générale, les astrocytes possèdent de 5 à 8 prolongements principaux hautement ramifiés. Ils sont généralement caractérisés par l’expression de divers marqueurs comme la vimentine, le marqueur S100 ainsi que « Glial Fibrillary Acidic Protein » (GFAP). Malgré qu’aucun de ces trois marqueurs ne représente adéquatement tous les astrocytes, GFAP est le plus couramment utilisé. Ce dernier est uniquement exprimé dans le corps cellulaire et les prolongements principaux de l’astrocyte donnant l’apparence étoilée aux astrocytes. Si l’on tient compte de toutes les ramifications secondaires provenant des quelques prolongements principaux, les astrocytes ont plutôt la forme d’un polygone arrondi (Figure 3) (Nedergaard et al. 2003). Dans la matière grise, et possiblement aussi dans la matière blanche, ces astrocytes sont distribués de façon uniforme et hautement organisée. Ceci fait en sorte que leurs prolongements occupent un espace relativement bien défini et exclusif à un seul astrocyte, définit comme le domaine d’un astrocyte. Les domaines d’astrocytes voisins ne se chevauchent pas (moins de 5 % de leur volume) et uniquement les ramifications les plus fines de leurs prolongements peuvent former des jonctions gap avec les astrocytes voisins et ainsi former un réseau communicant d’astrocytes (Ogata and Kosaka 2002, Nedergaard et al. 2003, Houades et al. 2008). La Figure 3 montre un marquage d’astrocyte faisant contact avec un vaisseau sanguin ainsi qu’une représentation de l’interaction entre astrocytes voisins. Les prolongements astrocytaires sont étroitement associés avec les processus pré- et post-synaptiques des neurones et forment une unité fonctionnelle référée en tant que synapse tripartite (Araque et al. 1999). La taille du domaine d’un astrocyte chez la souris varie d’une région cérébrale à l’autre, par exemple dans le cortex un astrocyte peut couvrir un volume total de 22 000 µm3 tandis que dans l’hippocampe ce volume peut aller jusqu’à 85 000 µm3. Étant donné qu’une majorité des synapses est associée à un

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astrocyte, un seul astrocyte dans l’hippocampe serait potentiellement associé à plus de 100 000 synapses. Les astrocytes humains sont beaucoup plus complexes et volumineux que chez le rongeur. Contrairement aux 5 à 8 prolongements chez le rongeur, les astrocytes humains peuvent avoir jusqu’à 40 prolongements cellulaires principaux et couvrir un volume 27 fois plus grand. Ceci permettrait à un seul astrocyte humain d’envelopper près de 2 000 000 synapses (Oberheim et al. 2006, Houades et al. 2008, Oberheim et al. 2009). La majorité des astrocytes sont aussi en contact direct avec la microvasculature du cerveau via leur pied astrocytaire. Ces derniers peuvent couvrir plus de 99 % de la surface des capillaires sanguins dans le CNS. Ils sont donc idéalement situés pour détecter et transporter les substrats énergétiques de la circulation sanguine vers les neurones, en passant par le vaste réseau interconnecté d’astrocytes (Kacem et al. 1998, Mathiisen et al. 2010).

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Figure 3 : Organisation et distribution des astrocytes dans le cerveau.

A- Coupe coronale montrant une distribution uniforme des astrocytes dans l’hippocampe de souris, les astrocytes sont marqués à l’aide d’un anticorps dirigé contre le marqueur S100. B- Coupe coronale dans le cortex pariétal représentant un vaisseau sanguin entièrement recouvert de pieds astrocytaires, marquage à l’aide d’un anticorps dirigé contre le marquer astrocytaire GFAP. C- Image d’un seul astrocyte exprimant la protéine fluorescente eGFP pour marquer les ramifications des prolongements de l’astrocyte. Le marqueur GFAP ne permet de voir que les prolongements principaux et secondaires, ce qui a conduit au terme astrocyte. D- Représentation de la forme et l’organisation des astrocytes par rapport aux vaisseaux sanguins et aux autres astrocytes. Les prolongements principaux positifs pour le marqueur GFAP sont représentés en bleu. Abréviations : (eGFP) Green fluorescent protein, (GFAP) Glial fibrillary acidic protein.

II.2 Transport et métabolisme des nutriments

Plusieurs études récentes suggèrent que les astrocytes soient impliqués dans la détection des nutriments et la régulation de la balance énergétique (Garcia-Caceres et al. 2012). En effet, les astrocytes sont idéalement positionnés pour pouvoir détecter les nutriments et hormones circulants. Ainsi, avant de discuter les différents rôles des astrocytes, il est important d’introduire les différents concepts du transport et du métabolisme des nutriments dans le CNS et l’implication des astrocytes dans ces processus. Le cerveau est isolé du reste du corps par la BBB, une structure composée de jonctions serrées entre les cellules de l’endothélium des capillaires sanguins du cerveau. La BBB assume un rôle essentiel en prévenant l’entrée de pathogènes et de toxines dans le cerveau et en permettant une régulation du milieu extracellulaire, notamment l’homéostasie ionique via la régulation des concentrations d’ions Na+, K+ et Ca++ (Hawkins and Davis 2005). Contrairement aux endothéliums des vaisseaux sanguins périphériques, les cellules endothéliales dans le cerveau sont imperméables aux petites molécules incluant les molécules hydrosolubles. L’imperméabilité de la BBB est assurée par plusieurs facteurs. (1) Les cellules endothéliales dans le CNS forment des jonctions complexes formées de plusieurs protéines de jonctions serrées ainsi que des molécules d’adhésion cellulaire. (2) Les endothéliums cérébraux ont des taux de transport vésiculaire inférieurs aux endothéliums périphériques. (3) Le transport de molécules à travers la BBB se fait principalement par des transporteurs hautement sélectifs. (4) Ces cellules expriment peu de molécules d’adhésion des leucocytes, ce qui limite l’accès des cellules immunitaires au CNS. Par contre, les molécules gazeuses,

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tels l’oxygène et le dioxyde de carbone, ainsi que les petites molécules liposolubles, tels l’éthanol et certaines drogues, peuvent diffuser librement à travers la membrane plasmique des cellules endothéliales de la BBB (Abbott and Romero 1996, Abbott et al. 2006, Chow and Gu 2015). Le transport du glucose, par exemple, est facilité par l’expression du glucose transporter (GLUT) 1 au niveau de la BBB (Yeh et al. 2008). La Figure 4 décrit les divers modes de transport des macromolécules à travers la BBB.

Reproduit avec la permission de Abbott, Ronnback et al. 2006 Figure 4 : Modes de transport à travers la barrière hémato encéphalique.

Représentation d’une coupe transversale de la BBB et des pieds astrocytaires qui y sont associés ainsi que des divers modes de transports à travers la BBB selon le type de molécules transportés. A- Le passage des petites molécules hydrosolubles est sévèrement restreint, uniquement les plus petites molécules peuvent emprunter cette voie. B- Les molécules liposolubles peuvent traverser au niveau des cellules endothéliales. C- Les composés non liposolubles comme le glucose, les acides aminés et les corps cétoniques sont transportés via des récepteurs membranaires par transport actif (nécessitant l’ATP) ou passif. D- Les plus grosses molécules et certains peptides comme l’insuline sont généralement transportés par endocytose médié par un récepteur. E- Les plus grosses protéines dans

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la circulation périphérique comme l’albumine sont transportées par endocytose suivant leur adsorption sur la membrane plasmique des cellules endothéliales de la BBB.

Due à leur association particulière avec la microvasculature du cerveau et la BBB (Figure 3 et Figure 4) (Mathiisen et al. 2010), les astrocytes sont les cellules les mieux positionnées pour détecter et transporter les nutriments de la circulation sanguine vers le CNS via leur pied astrocytaire. De plus, ces cellules forment un vaste réseau d’astrocytes connectés par leur prolongement via des molécules de jonction gap comme la connexin (CXN) 30 et 43. Ceci fait en sorte que les astrocytes peuvent acheminer ces substrats énergétiques vers les régions du parenchyme cérébral qui n’ont pas un accès direct à la circulation périphérique (Rouach et al. 2008). Les astrocytes sont aussi capables de stocker le glucose sous forme de glycogène pour répondre aux besoins énergétiques des neurones lors de périodes d’activité neuronale (Gruetter 2003). En effet, la plus grande partie des dépenses énergétiques du cerveau provient de l’activité neuronale (Harris et al. 2012, Howarth et al. 2012). Ceci a amené plusieurs à proposer que les astrocytes seraient impliqués dans le transport des nutriments et l’acheminement de ces derniers vers les neurones. Les astrocytes doivent donc être équipés pour le transport des principaux nutriments utilisé dans le cerveau, incluant le glucose et les acides gras.