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1 C ONTEXTE DE LA RECHERCHE

1.2 Aspects de l’intervention éducative influençant la réussite des élèves

Il faut par ailleurs reconnaitre que plusieurs facteurs autres que l’enseignant, tels le milieu socioéconomique ou certaines caractéristiques de l’école fréquentée, influencent la réussite des élèves.

En effet, depuis Coleman, Campbell, Hobson, McPartland, Mood, Weinfield et York (1966), du côté anglophone, ou les travaux de Bourdieu du côté francophone (par exemple Bourdieu et Passeron, 1999:1970), on sait que les élèves issus d’un milieu défavorisé risquent davantage d’accumuler des retards scolaires, qui conduisent à un taux d’échec et d’abandon plus élevé (Levin, 2004).

Il ne faut par contre pas conclure que l’école n’a aucun impact et que le destin des élèves est tracé par leur milieu d’appartenance. D’après Desbiens, Pascal, Bowen, Janosz et Bélanger (2006), ce ne sont pas tant les facteurs socioéconomiques des familles des élèves qui détermineraient la disparité entre les écoles, mais bien la taille des écoles et les problèmes organisationnels qui en découlent. Plus la taille d’une école est importante, plus il est difficile d’innover en réunissant les enseignants autour d’un projet d’école, d’un système de valeurs et de bonnes pratiques d'enseignement.

Il faut donc relativiser l’influence de l’enseignant et de ses pratiques pour les insérer dans la perspective plus large de l'intervention éducative (Lenoir, Larose,

11 Les études consultées utilisent tantôt l'efficience, tantôt l'efficacité pour exprimer l'efficience telle

que décrite ici. Par souci de clarté et de cohérence, nous utiliserons dans le cadre de cette thèse le terme efficience pour relater les résultats issus des recherches, peu importe que les auteurs convoqués aient utilisé dans leurs écrits le terme d'efficience ou celui d'efficacité.

Deaudelin, Kalubi et Roy, 2002). C’est d’ailleurs ce qu’ont fait certains chercheurs, par la réalisation de mégaanalyses, faisant la synthèse de plusieurs métaanalyses.

Fraser, Walberg, Welch et Hattie (1987) font la synthèse de 134 métaanalyses portant sur les facteurs qui influencent l’apprentissage des élèves. Ils ont distingué sept principales catégories : (1) les facteurs reliés à l’école, comme le nombre d’élèves par classe ou le climat de classe; (2) l’environnement social, dont l’influence des pairs ou de la famille; (3) l’enseignant, par l’intermédiaire de caractéristiques comme l’âge, l’enthousiasme, les renforcements auprès des élèves ou les attentes envers ceux-ci; (4) l’enseignement, par exemple selon la qualité de celui- ci telle que reconnue par les élèves, le temps effectif consacré à l’enseignement; le choix du matériel ou la connaissance de la matière à enseigner; (5) l’élève, selon par exemple son genre, son estime de soi, son quotient intellectuel, ses attitudes; (6) les méthodes d’enseignement, comme l’enseignement programmé, le recours aux technologies numériques, l’utilisation de supports visuels; (7) les facteurs reliés aux stratégies d'apprentissage, comme l’enseignement explicite de celles-ci, l’enseignement des outils structurants (comme des connaissances plus abstraites en début d’apprentissage) ou les types de renforcement adéquats en lien avec les stratégies. Il en ressort que ce dernier facteur est celui ayant le plus d’ampleur (r = 0,28, d = 0,61).

Wang, Haertel et Walberg (1993) ont, quant à eux, avec une méthodologie un peu différente, évalué 28 facteurs ayant une influence sur l’apprentissage des élèves à partir toujours d’une mégaanalyse traitant cette fois plus de 11 000 données statistiques. Les facteurs en tête de liste sont des facteurs que l’enseignant peut influencer, comme la gestion de classe (T score = 64,812) (par exemple le recours aux

questions pour rendre l'élève actif), les processus cognitifs (T score = 63) (comme les

12 Le T score est un indicateur de l'influence des facteurs où chaque facteur est comparé à l'influence

moyenne de tous les facteurs (50). La gestion de classe (64,8), les processus métacognitifs (63,0) et cognitifs (61,3) étaient en haut de peloton.

connaissances scolaires dans un domaine) ou les processus métacognitifs (T score = 61,3) (comme la planification, le contrôle de l'efficacité des stratégies), devant le milieu familial (T score = 58,4) ou la culture d’école (T score = 53,3). Les façons d’enseigner en classe se retrouvent en milieu de peloton (T score = 52,1).

Dans une première étude datée de 2003, Hattie a compilé les résultats de 357 métaanalyses s’intéressant à différents facteurs influençant le rendement scolaire. Parmi les quatre premiers facteurs, trois sont sous la gouverne de l’enseignant (renforcement et rétroaction, qualité de l’enseignement et enseignement direct) et un sous la gouverne de l’élève (connaissances préalables). Pour conclure, Hattie considère que l'enseignant est l'élément de la relation pédagogique ayant le plus d'effet sur le rendement scolaire (Hatie, 2003).

Hattie publie quelques années plus tard un ouvrage présentant 900 métaanalyses répertoriant plus de 60 000 recherches (Hatie, 2012). Il suggère de porter une attention particulière aux facteurs ayant un effet supérieur à 0,40, étant donné que ce résultat représente l’effet moyen de différents facteurs sur le rendement des élèves, selon d’autres métaanalyses (p.e. Fraser et al., 1987; Hattie, 2003). À partir d’une taxonomie des facteurs qu’il propose, Hattie (2012) convient que trois catégories de facteurs sont particulièrement importantes, soit l'enseignant (d = 0,47) le curriculum (d=0,45), et les méthodes d’enseignement (d = 0,43).

Comme le curriculum est établi et prescriptif, deux catégories de facteurs à l’échelle de la classe sur lesquels les acteurs ont un pouvoir d'action sont considérées comme primordiales pour la réussite des élèves, soit l’enseignant et les méthodes d’enseignement qu’il préconise.

Les auteurs préalablement cités distinguent, pour expliquer l’effet enseignant, certaines caractéristiques inhérentes à l’enseignant (qualité de l’enseignement, attente des enseignants, gestion de classe, encouragements) et d’autres relatives à son enseignement (mise en place de tâches exigeantes, approches

pédagogiques, exercisation, etc.). Cette deuxième catégorie, à laquelle l’enseignant peut facilement apporter des modifications, nous intéresse particulièrement.

En effet, en ce qui concerne l'enseignement de la grammaire du français, les approches pédagogiques et les pratiques d'enseignement qui en découlent sont des éléments qui, selon nos observations, suscitent beaucoup d'intérêt. Comme nous le verrons dans le cadre conceptuel, les multiples compréhensions des concepts évoqués amènent une confusion entre approches explicite ou implicite, approches directe ou indirecte, approches inductive ou déductive. C’est à partir de cette dernière dichotomie que nous aborderons la question des approches pédagogiques efficientes, la distinction "approche inductive" et "approche déductive" étant utilisée en enseignement du français langue d’enseignement au secondaire, entre autres dans les revues professionnelles (p.e Bilodeau et Chartrand, 2009; Lachance, 2008; Thibeault et Fleuret, 2013) et dans les programmes officiels (MELS, 2004, 2007).

1.3 Les approches et pratiques en enseignement de la grammaire