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L’´etude de ce type de lentilles commence avec la d´etection des premiers arcs g´eants aux centre des amas de galaxies (Lynds & Petrosian 1986; Soucail et al. 1987, 1988) avec en particulier le cas d’Abell370. Nombre d’arcs furent d´ecouvert au centre d’amas depuis le sol (Fort & Mellier 1994; Gladders et al. 2003) et plus r´ecemment observ´es depuis l’espace avec le t´elescope spatial Hubble (Smail et al. 1996; Kneib et al. 1996).

Citons l’exemple spectaculaire d’A1689, r´eobserv´e avec la nouvelle cam´era ACS du HST et repr´esent´e sur la Fig. 2.2. La profondeur du clich´e (comparable au Hubble Deep Field) ainsi que l’exceptionnelle r´esolution angulaire en font un syst`eme `a part. Pr`es d’une centaine d’arcs sont pr´esents, soit une trentaine de sources `a diff´erents d´ecalages spectraux et multiplement imag´ees. Le nombre impressionant de contraintes sur les propri´et´es d’une telle lentille permet, on va le voir plus loin, de d´eterminer la masse du d´eflecteur avec une pr´ecision incomparable. Toutes les autres m´ethodes d’estimation de masse sont pr`es d’un ordre de grandeur moins pr´ecises que celle des trac´es de rayon dans le r´egime de distorsions fortes : strong lensing. L’´etude de la distribution de masse dans les amas au moyen des distorsions fortes est une des composantes principales de ce manuscrit et le chapitre 4 lui est presque enti`erement d´edi´e.

Dans ce commentaire g´en´eral introductif, il faut revenir un peu sur la possibilit´e d’´etudier les sources amplifi´ees. Les lentilles consid´er´ees ici jouent un rˆole de t´elescope gravitation-nel et permettent ainsi de d´etecter des sources tr`es t´enues au voisinages des lieux de forte amplification, les lignes critiques (cf section 2.4.1 et annexe B). Les galaxies les plus lointaines d´etect´ees `a ce jour sont observ´ees par cette m´ethode (Hu et al. 2002; Pell´o et al. 2004; Kneib et al. 2004). Cette course au d´ecalage spectral record est justifi´ee par l’int´erˆet d’observer des galaxies `a tr`es grand d´ecalage spectral car l’´epoque de formation des premi`eres ´etoiles et galaxies est encore peu connue. On ne sait pas bien `a partir de quel d´ecalage spectral l’univers est transparent au point de permettre au rayonnement des proto-galaxies de nous parvenir. Bien que la mesure soit encore incertaine, WMAP pr´edit une ´epoque de r´eionisation z = 17 ± 5 (Spergel et al. 2003). On comprend donc claire-ment l’int´erˆet du t´elescope gravitationnel repousser la limite de d´etection des premi`eres galaxies. Avec des instruments comme ALMA ou le JWST, le t´elescope gravitationnel jouera un rˆole majeur pour la d´etection d’objets aussi lointains.

Il existe aussi un domaine d’´etude particuli`erement int´eressant pour la cosmologie que nous n’aborderons pas directement dans cette th`ese mais qu’il faut mentionner. Il s’agit de la statistique des arcs, intimement li´ee au probl`eme de la distribution de masse au sein des d´eflecteurs. Nous verrons que beaucoup d’amas de galaxies1 agissent comme des lentilles fortes et produisent des arcs g´eants. Dans de nombreux cas, on observe mˆeme plusieurs arcs de sources distinctes dans le mˆeme amas. Bartelmann et al. (1998) montr`erent alors que l’on observait apparamment dans le ciel beaucoup trop d’arcs que le nombre pr´edit par les simulations num´eriques issues d’une cosmologie ΛCDM (environ un facteur 10). Cela favoriserait un mod`ele d’univers ouvert (oCDM) avec Ωm ≈ 0.2 et ΩΛ = 0 en contradiction avec les r´esultats de WMAP, entre autres. Depuis d’autres ´etudes, parfois tr`es r´ecentes, ont montr´e que le d´esaccord avec le ΛCDM est moindre si l’on tient compte de nombreux effets de sous-structures, de triaxialit´e des halos, d’effets transitoires de fusions de groupes et amas, d’une distribution des sources s’´etendant plus loin en d´ecalage spectral (z ≥ 1), etc (Meneghetti et al. 2003; Torri et al. 2004; Dalal et al. 2004; Wambsganss et al. 2004; Oguri & Keeton 2004). Ces r´ef´erences r´ecentes illustrent le dynamisme du domaine pour l’´etude du ΛCDM. Plus pr´ecisement, les comptages d’amas du EMSS pr´evoient

1on se r´ef`ere souvent au relev´e X Extended Medium-Sensitivity Survey (EMSS) pour la statistique des arcs autour de ces amas (Le F`evre et al. 1994; Luppino et al. 1999)

environ 900 arcs “g´eants” sur tout le ciel. Les simulations de Dalal et al. en attendent environ 10002, ce qui semble en excellent accord avec un univers ΛCDM. Une plus grande connaissance de la statistique de ces arcs devrait nous donner des informations essentielles sur la cosmologie (mod`eles de quintessence par exemple) et sur le profil de densit´e des lentilles. Les observations futures telles que le Massive Clusters Survey (MACS ; Ebeling et al. 2001) ou le CFHT Legacy Survey3 permettront d’aborder le probl`eme avec une bien meilleure statistique.

A la p´eriph´erie des amas `a arcs, on a observ´e que les autres galaxies de fond ´etaient ´etir´ees en forme d’arclets avec une d´eformation qui diminue si l’on s’´eloigne du centre (Fort et al. 1988; Tyson et al. 1990). Cet effet fˆut en fait une confirmation suppl´ementaire de la r´ealit´e du ph´enom`ene de lentille gravitationnelle. Les galaxies d’arri`ere-plan ne se trouvent plus d´emultipli´ees mais sont d´eform´ees tangentiellement (perpendiculairement `a la direction de l’amas d´eflecteur). Lorsque l’alignement tangentiel syst´ematique des ellipticit´es des images est inf´erieur `a l’ellipticit´e intrins`eque de la source, l’effet n’est plus mesurable sur une galaxie unique. N´eanmoins, en moyennant sur un grand nombre de galaxies d’arri`ere-plan on parvient `a mesurer cette polarisation syst´ematique : c’est le r´egime des distorsions faibles ou weak lensing que je d´etaille dans la section suivante.