• Aucun résultat trouvé

5. Analyses empiriques

5.3 Analyses statistiques

5.3.1 Tests de différences des valeurs moyennes

Avant d’analyser les résultats des estimations économétriques, il s’avère nécessaire d’analyser le « comportement naturel » de nos données en effectuant quelques analyses statistiques. Pour ce faire, nous effectuons des tests de différence des valeurs moyennes de l’indice des institutions de droits de propriété privée en fonction des différentes caractéristiques des pays de notre échantillon.

Selon l’approche économique, une augmentation du revenu par tête est favorable à l’amélioration de la qualité des institutions de droits de propriété privée. Statistiquement, on devrait s’attendre à ce que les pays les plus riches -en termes de revenu par tête- soient dotés de meilleures institutions de protection des droits de propriété. C’est ce qui semble ressortir du tableau I.1 puisqu’il apparaît dans ce tableau, que les pays dont le revenu par tête en 1970 est supérieur à la moyenne de l’échantillon, disposent relativement de meilleures institutions. Le tableau I.1 indique une différence de 1,82 de la valeur de la qualité des institutions de protection des droits de propriété en faveur des pays dont le revenu par tête en 1970 est supérieur à la moyenne, comparativement à leurs homologues dont le revenu par tête est inférieur à la moyenne du revenu par tête dans notre échantillon. Cette différence est significative à 1%, et est supérieure à la valeur de l’écart type (1,65, confer tableau AI.2 dans l’annexe relative à ce chapitre) de l’indice des institutions de droits de propriété dans notre échantillon.

L’approche historique de l’analyse de qualité des institutions accorde un avantage aux pays de droit commun sur leurs homologues de droit civil en matière de protection des droits de propriété privée. L’analyse statistique semble ne pas remettre en cause cette hypothèse, puisqu’il apparaît que la qualité des institutions de protection des droits de propriété est en moyenne supérieure dans les pays de droit commun, comparativement aux pays de droit civil. Cette différence (-0,68) est statistiquement significative à 5% mais faible. En valeur absolue, elle est inférieure à la valeur de l’écart type des institutions de droits de propriété dans notre échantillon.

44 Dans la logique de l’approche culturelle, les pays de confession religieuse protestante sont supposés disposer d’un avantage en matière de protection des droits de propriété comparativement aux autres pays. Pour vérifier statistiquement la validité de cette hypothèse, nous comparons les valeurs moyennes de la qualité des institutions de protection des droits de propriété entre pays selon l’appartenance religieuse de leurs populations. Dans ce cas, le tableau I.1 indique que les pays dont le pourcentage de la population de confession protestante est supérieur à la moyenne de l’échantillon, disposent de meilleures institutions de protection des droits de propriété comparativement à leurs homologues dont le pourcentage des protestants est inférieur à la moyenne de l’échantillon. Cette différence est statistiquement significative à 1% et conforme à l’approche culturelle.

L’approche politique de l’analyse de la qualité des institutions identifie les institutions démocratiques, l’inégalité de revenu et l’abondance en ressources naturelles comme de potentiels déterminants de la qualité des institutions de protection des droits de propriété. Le tableau I.1 indique que les pays les plus démocratiques -ceux dont la valeur de l’indice de démocratie est supérieure à la moyenne de l’échantillon- sont ceux dotés de meilleures institutions de protection des droits de propriété. De même, le tableau I.1 montre que les pays les plus inégalitaires -ceux dont le niveau d’inégalité de revenu est supérieur à la moyenne de l’échantillon- sont ceux dont la qualité des institutions de protection des droits de propriété est faible. Enfin, il apparaît à travers le tableau I.1, que les pays les mieux dotés en ressources naturelles -ceux dont la valeur moyenne du niveau de ressources naturelles est supérieur à la moyenne de l’échantillon- disposent des institutions de protection des droits de propriété de qualité relativement faible par rapport à leurs homologues les moins dotés en ressources naturelles. Toutes ces différences de valeurs moyennes de l’indice des institutions de droits de propriété sont statistiquement significatives à 1% et leurs signes sont conformes aux arguments de l’approche politique.

Les tests de différence de valeurs moyennes indiquent des résultats cohérents avec chacune des quatre approches théoriques de l’analyse des déterminants de la qualité des institutions de protection des droits de propriété. De même, les résultats du tableau I.1 montrent que les différences relatives à la qualité des institutions démocratiques sont les plus élevées de toutes les différences des valeurs moyennes de l’indice des institutions de droits de propriété. Avant de passer aux évaluations économétriques des différentes théories, nous présentons dans le tableau I.2 des coefficients de corrélation entre les différentes variables et analysons ces corrélations.

45 Tableau I.1 : Résultats des tests de différences des valeurs moyennes de l’indice des institutions de droits de propriété privée selon les

différentes caractéristiques des pays de notre échantillon

PIB par tête Origine légale Pourcentage de protestants Droits politiques Gini Ressources naturelles

pibt1 pibt2 différence ol1 ol2 différence protes1 protes2 différence Demo1 Demo2 différence gini1 gini2 Différence rn1 rn2 différence

Droits de propriété

4.434 6.250 -1.816 5.123 5.801 -0.678 4.999 6.080 -1.081 4.551 6.982 -2.430 5.779 4.699 1.079 5.848 4.119 1.729

- - (7.75)*** - - (2.24)** (3.57)*** - - (10.90)*** - - (3.94)*** - - (5.52)***

Observations 71 68 - 101 40 - 98 39 - 95 43 - 72 61 - 76 36 -

Note : Pibt1 (pibt2) désigne la valeur moyenne de l’indice des institutions de droits de propriété privée pour les pays dont le PIB par tête est inférieur (supérieur) à la moyenne du PIB par tête dans notre échantillon.

Ol1 (ol2) correspond à la valeur moyenne de l’indice des institutions de droits de propriété privée dans les pays de droit civil (droit commun).

Protes1 (protes2) correspond à la valeur moyenne de l’indice des institutions de droits de propriété privée dans des pays où le pourcentage des individus de confession religieuse protestante est inférieur (supérieur) à la valeur moyenne du pourcentage des protestants dans les années 1980 dans notre échantillon.

Dem1 (dem2) il s’agit de la valeur moyenne de l’indice des institutions de droits de propriété privée dans les pays où la valeur moyenne de l’indice des institutions démocratiques (indice des droits politiques de Freedom House ) est inférieure (supérieure) à sa valeur moyenne dans l’échantillon.

Gini1, (gini2) utilisés pour désigner la valeur moyenne de l’indice des institutions de droits de propriété dans des pays où l’inégalité de revenu est inférieure (supérieure) à la valeur moyenne de l’inégalité de revenu dans l’échantillon.

Rn1 (rn2) correspond à la valeur moyenne de l’indice des institutions de droit de propriété dans des pays où l’abondance en ressources naturelles est inférieure (supérieure) à la valeur moyenne de l’abondance en ressources naturelles dans l’échantillon.

Différence mesure la différence (entre 1 et 2) des valeurs moyennes de l’indice des institutions de protection des droits de propriété. Les chiffres entre parenthèses désignent les t de student associés à ces différences. ***, ** sont utilisés pour désigner des différences de valeurs moyennes significatives respectivement au seuil de 1% et 5%.

46

5.3.2 Analyse des coefficients de corrélation

Dans le tableau I.2, il apparaît une corrélation significative entre l’indice des institutions de droits de propriété et chacun de leurs déterminants. Tous ces coefficients de corrélation sont significatifs au seuil de 1%, à l’exception de la corrélation entre l’origine légale et les institutions de protection des droits de propriété privée qui est significative à 5%. Par ailleurs, les coefficients de corrélation entre l’indice des institutions de droits de propriété et ses différents déterminants sont tous de signes attendus. Le tableau I.2 indique que la corrélation entre les institutions de protection des droits de propriété et les institutions démocratiques est la plus élevée des corrélations.

Le tableau I.2 indique aussi qu’indépendamment de l’indice des institutions de droits de propriété considéré, les différents déterminants des institutions de droits de propriété privée affichent des coefficients de corrélation majoritairement significatifs à 1%, et ce avec leurs signes attendus. Le coefficient de corrélation entre les institutions de droits de propriété privée et l’origine légale est celui dont la signification varie, selon l’indice des institutions de droits de propriété considéré. Remarquons aussi à travers le tableau I.2, que la corrélation entre les institutions démocratiques et les institutions de droits de propriété privée est la plus stable, la plus élevée et elle est égale au moins à 0,70, indépendamment de l’indice des institutions de droits de propriété considéré.

L’analyse de corrélations entre les différents déterminants des institutions de protection des droits de propriété s’avère aussi pertinente, car une forte corrélation entre ces déterminants pourrait rendre difficiles les estimations économétriques ou rendrait difficile l’interprétation des résultats. Dans l’approche politique par exemple, on peut s’attendre à une corrélation entre l’abondance en ressources naturelles et la qualité des institutions démocratiques ou entre l’abondance en ressources naturelles et le niveau d’inégalité. Car les pays fortement dotés en ressources naturelles, pourraient également être des pays où l’inégalité de revenu est élevée, où la qualité des institutions démocratiques est faible (voir Ross, 2001).

Comme on peut le constater, certes, il existe une certaine corrélation entre les différents déterminants de la qualité des institutions de protection des droits de propriété mais ce sont de corrélations faibles. Ainsi par exemple, la corrélation entre l’origine légale et le pourcentage des Protestants n’est que de 0,18 et significatif à 5%, il s’agit donc d’une corrélation relativement faible contrairement à ce que l’on pourrait soupçonner. Dans

47 Tableau I.2 : Coefficients de corrélation entre les variables dans l’échantillon total

Drfi Pibt ol Prot dem gini Rn Lat frag Mie Drkk drhf icrg demo landfao polity cont

Drfi 1.00 Pibt 0.56a 1.00 Ol 0.19b -0.15c 1.00 Prot 0.41a 0.19b 0.18b 1.00 Dem 0.76a 0.58a 0.08 0.44a 1.00 Gini -0.38a -0.46a 0.27a 0.05 -0.38a 1.00 Rn -0.44a -0.35a -0.02 -0.07 -0.37a 0.17c 1.00 Lat 0.59a 0.68a -0.24a 0.25a 0.54a -0.65a -0.37a 1.00 Frag -0.37a -0.51a 0.24a -0.03 -0.42a 0.38a 0.37a -0.54a 1.00 Mie 0.30a 0.39a 0.24a 0.10 0.53a 0.06 -0.18c 0.06 -0.38a 1.00 Drkk 0.93a 0.55a 0.14 0.35a 0.78a -0.42a -0.49a 0.59a -0.49a 0.32a 1.00 Drhf 0.85a 0.48a 0.25a 0.38a 0.72a -0.26a -0.44a 0.44a -0.41a 0.37a 0.91a 1.00 Lcrg 0.91a 0.62a 0.06 0.33a 0.71a -0.51a -0.38a 0.70a -0.45a 0.19b 0.85a 0.73a 1.00 Demo 0.66a 0.49a 0.19b 0.43a 0.88a -0.28a -0.30a 0.42a -0.39a 0.55a 0.69a 0.66a 0.58a 1.00 landfao -0.31a -0.14 -0.01 0.06 -0.11 0.27b 0.49a -0.37a 0.08 0.16c -0.26a -0.17c -0.38a -0.01 1.00 Polity 0.59a 0.57a 0.18b 0.34a 0.82a -0.25a -0.40a 0.49a -0.35a 0.51a 0.63a 0.64a 0.53a 0.72a -0.10 1.00 Cont 0.63a 0.53a 0.20b 0.31a 0.76a -0.30a -0.39a 0.52a -0.38a 0.46a 0.65a 0.63a 0.57a 0.67a -0.13 0.89a 1.00

Note : a, b, et c désignent des coefficients de corrélation significatifs respectivement au seuil de 1%, 5%, et 10%. La définition des variables ainsi que les sources de données se trouvent en annexe de ce chapitre.

48 l’ensemble, les coefficients de corrélation entre les différents déterminants des institutions de droit de propriété sont tous inférieurs à 0,50 à l’exception de la corrélation entre le PIB par tête et l’indice de démocratie. La faible corrélation entre les différents déterminants de la qualité des institutions de droits de propriété est dans une certaine mesure rassurant, car dans ce cas nos estimations économétriques ne pourraient pas être compromises par d’éventuelles multicolinéarités entre les différentes variables explicatives11.