• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3. Usages et conservation de la flore et de la végétation

3.4. Résultats sur les usages et la conservation de la biodiversité

3.4.2. Analyses globales des Niayes et du Bassin arachidier

ces informants, en dehors des plus âgés, visitent les savanes-parcours pendant la saison sèche pour la collecte de produits divers ou pour la conduite des troupeaux.

Le facteur village renvoie à l’importance socio-économique des sites en termes de tailles de populations, d’activités économiques, de relations avec l’extérieur, etc. Chacun des villages choisis dans une zone donnée est habité par un groupe ethnique. Les effets du facteur village sont doublement évalués dans ce chapitre, à travers d’abord la fréquence de répondants enregistrés sur une catégorie donnée, et ensuite avec le score réalisé par chaque facteur par rapport à la même catégorie étudiée à travers la fréquence des indices d’importance retenue. Cela permettra de contrôler les petites différences qui pourraient être dissimulées dans les fréquences de répondants et probablement mises en évidence par le score des facteurs.

3.4.2. Analyses globales des Niayes et du Bassin arachidier

Les résultats de la DCA (Detrended Correspondant Analysis) sur la matrice 124 espèces x 6 villages montrent globalement une longueur de gradient supérieure à 2 et un taux de variance expliqué de 76,7 % pour les deux premiers axes factoriels (tableau 3.1). L’axe 1 pourrait être interprété comme représentant un gradient décroissant de continentalité et de pluviométrie. L’axe 2 signifie clairement un gradient de dégradation fondé sur les différences ethniques. Cela laisse supposer une structure évidente dans le tableau de données même si l’écart entre Keur Mary et Keur Alpha semble réduit. Mais de façon générale, la variance globale du tableau de données est relativement faible puisqu’elle n’atteint pas 0,5. Cela semble lié au nombre d’individus limité à 6, c’est-à-dire les 6 villages. Cependant, les 4 premiers axes expliquent presque 80 % de la variabilité totale du tableau de données. Cela est suffisant pour justifier le choix, parmi ces 4 axes, de ceux à utiliser pour représenter les données.

Tableau 3.1. Valeurs propres et pourcentages de variance représentée par chaque axe factoriel

Axes 1 2 3 4 Total

Valeurs propres 0,27 0,03 0,01 0,001 0,40

Longueur de gradient 1,46 0,57 0,53 0,49

Pourcentage de variance cumulée 68,60 76,70 78,90 79,10 79,10 des données espèces

En effet, l’analyse globale des effets des facteurs village ou ethnie sur l’importance des espèces ligneuses montre une séparation nette entre les deux zones (figure 3.2) sur le plan des axes 1 et 2. L’axe 1 distribue les villages de la grande côte (zone des Niayes le long de l’océan atlantique) vers la zone continentale au centre du pays dans le Bassin arachidier. L’axe 2 expliquerait un gradient ethnique. Les villages wolofs sont situés vers l’origine de l’axe 2 et les villages peuls vers l’extrémité supérieure du même axe dans les deux zones. Les villages sérers occupent une position intermédiaire entre villages peuls et wolofs, surtout dans les Niayes.

Usages et conservation de la flore et de la végétation

   

Représentation de la carte des villages : les villages des Niayes à droite bien séparés de ceux du Bassin arachidier à gauche.

Figure 3.2. Analyse factorielle de correspondances redressée (DCA) sur la matrice 124 espèces x 6 villages. L’examen de la figure 3.3 montre globalement une plus forte évaluation quantitative des catégories dans le Bassin arachidier que dans les Niayes. Dans les Niayes, cette évaluation augmente du village peul de Toula au village wolof de Diambalo. Cela correspond à une valeur maximale enregistrée dans le village wolof de Diambalo entouré par les deux autres villages. Dans le Bassin arachidier, l’évaluation est beaucoup plus importante. Elle est plus élevée à Keur Mary, suivi de Keur Alpha et enfin de Diaoulé. Il apparait donc à travers cette analyse des homologues deux constats :

¾ d’abord une évaluation ethnobotanique de la diversité végétale plus importante dans la zone du Bassin arachidier comparée aux Niayes ;

¾ ensuite au sein de chaque zone, une évaluation plus faible de l’ethnie peul, derrière l’ethnie sérer encore plus marquée dans le Bassin arachidier ; le terroir wolof des Niayes présente la plus forte évaluation des espèces mais pas celui du Bassin arachidier. L’examen de ce deuxième résultat au regard des densités de population des villages révèle que l’évaluation augmente avec la densité dans les Niayes comme dans le Bassin arachidier excepté dans son terroir wolof.

Usages et conservation de la flore et de la végétation

   

TOU/DIAO = Toula/Diaoulé ou villages peuls ; DA/KM = Darou Alpha/Keur Mary ou villages sérers ; DIAM/ KA = Diambalo/Keur Alpha ou villages wolofs

Figure 3.3. Evaluation globale de l’importance des espèces (indice 2) comparée entre deux villages homologues des zones des Niayes et du Bassin arachidier sur la base des scores cumulés des catégories Les villages homologues sont significativement différents dans l’évaluation globale des catégories dans les deux zones (tableau 3.2), vue la probabilité très faible. Cela confirme le caractère séparé de ces zones sur le plan ethnobotanique.

Tableau 3.2. Résultats du test de Wilcoxon sur données appariées.

Variables T z

Toula / Diaoulé 1457,50 5,33

Darou Alpha / Keur Mary 791,50 7,81

Diambalo / Keur Alpha 1793,00 4,61

z = approximation T dans le cas de grand échantillon au seuil α 0,05 ; N ( nombre de différences non nulles) = 124 ;

Usages et conservation de la flore et de la végétation

   

Globalement, sur les 124 espèces étudiées dans les deux zones, une trentaine est communément bien appréciée comme importante. La centaine d’espèces restantes connaît des fortunes diverses suivant la zone. Ces espèces font certainement la différence interzonale. Parmi les 30 espèces bien appréciées, 16 sont très importantes pour l’ensemble des zones (figure 3.4). Parmi ces 16 espèces, seules 4 sont mieux appréciées dans les Niayes : Neocarya macrophylla, Grewia bicolor,

Combretum micranthum, Dialium guineense. Les 11 autres espèces sont dominantes dans les

Niayes. Tamarindus indica bénéficie de la même importance dans les deux zones.

Acacadan = Acacia adansonii, Faidalbi = Faidherbia albida, Adandigi = Adansonia digitata, Tamaindi = Tamarindus indica, Zizimaur = Ziziphus mauritiana, Neocmacr = Neocaria macrophylla, Guiesene = Guiera senegalensis, Detamicr = Detarium microcarpum, Grewbico = Grewia bicolor, Boraflab = Borassus flabellifer, Combmicr = Combretum micranthum, Ficusyco = Ficus sycomorus, Detasene = Detarium senegalensis, Dialguin = Dialium guineense, Zizmucr = Ziziphus mucronata, Combglut = Combretum glutinosum.

Figure 3.4. Appréciation des espèces dans les Niayes et le Bassin arachidier : représentation des 16 espèces les plus importantes (indice 2) pour les populations.

Conclusions partielles

La configuration obtenue avec la DCA (figure 3.2) suggère une séparation nette entre les zones d’études du point de vue de l’évaluation des 9 catégories étudiées pour apprécier l’importance de la

Usages et conservation de la flore et de la végétation

   

biodiversité ligneuse dans la vie des populations. Cela confirme la structure évidente des données annoncée au tableau 3.1. En abordant cette analyse à l’échelle de l’utilisation des espèces ou échelle spécifique, la séparation interzonale est encore plus nette avec la confirmation du caractère transitoire des villages sérers dans une augmentation des scores d’évaluation suivant la densité sauf dans le village wolof du Bassin arachidier (figure 3.3). En plus, cette séparation interzonale est corroborée par le test de rang de Wilcoxon appliqué sur les données d’évaluation quantitative des deux zones (tableau 3.2) en confirmant la séparation nette des villages homologues. Enfin, la majorité de la diversité ligneuse étudiée a été mieux évaluée dans le Bassin arachidier que dans les Niayes. Cela apparaît clairement dans la figure 3.5 où sur les 16 espèces les plus importantes dans les deux zones, 11 l’emportent au niveau du Bassin arachidier. La différence interzonale et le caractère transitoire des villages sérers de Darou alpha et de Keur Mary est réaffirmé. Il semble alors plus pertinent, pour la suite du travail, d’analyser séparément les deux zones d’étude afin d’augmenter les chances de perceptions des ressemblances ou dissemblances intra-zonales. Il semble aussi pertinent de se focaliser sur les effets villages au détriment des effets genre et âge. En effet, les travaux de Kristensen et Lykke (2003), Lykke (2004) et Faye (2005) ont montré respectivement au Sénégal et au Burkina Faso comme dans le présent travail (non représenté), l’absence des effets genres et âges dans l’évaluation de l’importance de la biodiversité. Tout au plus, quelques différences significatives apparaissent lorsque l’âge est combiné à l’ethnie (Faye, 2005) pour subir un test de corrélation de rang Spearman. Ce présent travail mettra alors l’accent sur l’analyse des effets villages, c’est-à-dire l’équivalent des effets ethniques. Les informations relatives aux classes d’âge et de sexe ne sont pas présentées.