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Analyse spatio-temporelle 1 Les cartes anciennes

4. LES ENJEUX NATURELS D'UN MARAIS : La baie de Kamouraska

4.5 Analyse spatio-temporelle 1 Les cartes anciennes

4.5.1.1 Époque pré-coloniale

Les battures de Kamouraska sont reconnues et décrites depuis longtemps par ceux qui les ont fréquentées. Ce n'est pas par hasard si le toponyme amérindien « Kamouraska », qui signifie « Il y ajonc au bord de l'eau », a été choisi pour nommer la région (Gravel, 1993 : 2). Cette appellation vient de la quantité d'herbes ou de joncs qui poussent en quantité dans les marais de Kamouraska. Toutefois la représentation spatiale des zones intertidales du territoire n'apparait clairement que sur les cartes produites au régime anglais.

Durant le régime français les documents (plans, cartes) mettant en relief les battures de Kamouraska sont en effet rares (Hatvany, 2003 : 54). Malgré tout, il est possible de représenter schématiquement l'environnement naturel de la baie de Kamouraska pour la période pré-coloniale grâce aux sources secondaires (Figure 4.6). L'agronome Aubert Hamel (1963 : 79), en parlant de l'environnement naturel passé des battures de Kamouraska mentionne d'ailleurs que « ces terres, très jeunes au point de vue géologique, n'avaient vraisemblablement pas réussi à se couvrir de forêt avant l'arrivée des colons français ». On peut affirmer sans doute que la limite supérieure du marais rejoignait alors la couverture forestière. À propos de cette forêt voisinant le marais, elle était principalement à caractère boréal (épinette blanche, épinette noire, sapin, mélèze, bouleau jaune, cèdre) (Laberge, 1993 : 38).

Figure 4.6 Carte hypothétique de la baie de Kamouraska avant 1680

Légende

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Tene boisée et rocheuse

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Source : Carte réalisée par C. Careau et M. Hatvany, 2009, Laboratoire de géographie historique, Département de géographie, Université Laval, basée sur les écrits de Hamel, 1963 : 79.

Notes : 1. Limite inférieure du marais 2. Limite supérieure du marais

4.5.1.2 La carte de McCarthy, 1781

C'est à partir de 1781, sous le Régime anglais, qu'on voit illustré pour la première fois le marais de la baie de Kamouraska. En 1781, l'arpenteur anglais Jeremiah McCarthy produisit un plan où se distinguent plusieurs détails de l'occupation humaine autour de la baie de Kamouraska. Il indiqua la limite des terres concédées aux censitaires lors de l'établissement de la seigneurie de Kamouraska, incluant la portion des battures de la baie de Kamouraska (Hatvany, 2009 : 60). McCarthy traça les limites supérieures du marais et par surcroît la fin des terres, en dessinant la limite des hautes marées (Figure 4.7).

McCarthy identifia la limite des hautes marées ordinaires - « High water mark of the common ordinary tides » - et la limite des hautes marées printanières et la fin des terres - « High water mark of the spring or high tides, shown me to be the limits of the land in the first concession» - (McCarthy, 1781). Dans cette carte, on peut voir que la forme du marais de la baie est en demi-lune, et que le chemin du roi (The King's road of Kamouraska) suit parallèlement le tracé de la limite supérieure du marais dans la partie nord-est de la baie.

Figure 4.7 Le marais de la baie de Kamouraska, 1781

Source : McCarthy, 1781.

Notes : 1. Limite des hautes marées moyennes (High water mark of the common ordinary tides)

2. Limite des hautes marées printanières (High water mark of the spring or high tides, shown me to be the limits of the land in the first concession) 3. Chemin du Roi - construit parallèlement à la limite des hautes marées

4.5.1.3 La carte de Hamel, 1826

En 1826, l'arpenteur Joseph Hamel offre une carte seigneuriale détaillée du milieu naturel et humain de la baie de Kamouraska. La carte montre que le marais occupait une vaste étendue qu'il a été possible d'estimer à 310 hectares (3,1 km2) sur la baie de Kamouraska,

en 1826. Sur cette carte sont visibles les numéros et les limites des censives. De plus, Hamel indique les limites des hautes marées moyennes ainsi que des hautes marées printanières et trace l'étendue du marais de ce qu'il appelle « Prairies de Grève ». Il faut également noter que le Chemin du Roi est parallèle à la limite supérieure du marais (Figure 4.8). La carte de Hamel ne laisse aucun doute sur la forme en demi-lune du marais, aucun changement avec la carte de McCarthy.

Figure 4.8 Le marais de la baie de Kamouraska, 1826

Source : Hamel, BAnQ, 1826.

Notes : 1. Ligne des hautes marées moyennes 2. Ligne des hautes marées printanières

Avec l'aide du système d'information géographique, il a été possible de calculer la longueur du marais sur la carte de Hamel ce qui donne 6,8 km. Le marais a été divisé en trois parties (trois transects) d'égales distances. Une partie occidentale (A), une partie centrale (B) et une partie orientale (C), et ce, afin de déterminer la largeur moyenne du marais (Figure 4.9). Elle est de 536,3 mètres (Tableau 4.1). Ces mesures donnent une excellente idée du profil du milieu naturel en 1826.

Figure 4.9 Superficie du marais de la baie de Kamouraska, 1826

Légende — Transed * r~ W»i» A . J .J J i J* \ \ '-

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Tableau 4.1 Mesures de la largeur du marais intertidal en 1826

Transect Largeur (en mètres)

A 523,4

B 615,8

C 469,8

Moyenne 536,3

Données de : C. Careau et M. Hatvany, 2009.

Pour la période comprise entre 1826 et 1929, il n'existe pas de cartes précises de la baie de Kamouraska. Ce passage d'un contexte colonial à un contexte industriel est marqué par de profondes mutations socio-économiques où l'endiguement des marais est une réponse à la pression importante exercée sur les terres arables et à contrer la forte vague d'émigration touchant le Kamouraska. Par le biais des photographies aériennes, c'est à partir des années 1929 que plusieurs changements principalement de nature anthropique sont observables sur le marais. Le milieu naturel étant alors utilisé pour la récolte de foin salé, le pâturage des animaux, la chasse et la pêche, peu de perturbations anthropiques sont notables à cette époque (Hatvany, 2003 : 140).

4.5.2 Les photographies aériennes 4.5.2.1 Photographie aérienne de 1929

La première photographie aérienne représentant la région de la baie de Kamouraska parut en 1929. Sur cette image se distingue nettement la limite entre le schorre et la slikke de la partie ouest et centrale du marais (Figure 4.10). On doit préciser que la partie ouest de l'image rend difficile l'analyse après la géoréférence dans le système d'information géographique. Afin d'avoir une bonne idée de la superficie du marais, trois transects d'égale distance ont permis de mesurer sa largeur moyenne en 1929, qui s'est avérée être de 633.3 m (Tableau 4.2). En comparant les mesures avec celles de 1826, on peut affirmer

avec confiance que le marais semblait relativement stable entre ces deux dates, mais qu'il présentait un léger accroissement pour la portion analysée en 1929.

Figure 4.10 Limite inférieure du schorre, marais de la baie de Kamouraska, 1929

Source : Photographie aérienne, 1929.

Tableau 4.2 Mesures de la largeur du marais intertidal en 1929

Transect Largeur (en mètres)

A 480,4

B 768,6

C 650,9

Moyenne 633,3

4.5.2.2 Photographie aérienne de 1948

C'est en 1948 que la première photographie aérienne représentant l'entièreté de la baie de Kamouraska est publiée. On y distingue l'aboiteau construit en 1937-1938, mais également un aboiteau secondaire qui a été construit après qu'une tempête ait fait une brèche à plusieurs endroits dans l'aboiteau en 1941 (Hatvany, 2003 : 120). Le cliché de 1948 met en évidence le dense tapis de spartine alterniflore permettant de tracer la limite inférieure du schorre (Figure 4.11). Prise peu de temps après la construction de l'aboiteau secondaire, la photographie de 1948 démontre que le marais a repris du terrain au-delà des vestiges de l'aboiteau principal (1937-1938). La photo-interprétation a permis de repérer des espèces végétales caractéristiques d'un marais supérieur, la partie du marais atteinte par les marées de vives eaux. La superficie totale du marais pour l'année 1948 est de 254,1 hectares (2,5 km ). A partir des mêmes trois transects de 1826, identifiés par un trait rouge, il fut possible de calculer la largeur du marais pour les mêmes endroits en 1948 (Tableau 4.3). Les résultats confirment que la largeur moyenne du marais était à cette date de 431,1 mètres.

Figure 4.11 Limite inférieure du schorre, marais de la baie de Kamouraska, 1948

Source : Photographie aérienne, 11659-11660, 124 à 127 et 288 à 290, Energie, Mines et Ressources du Canada, 1948.

Tableau 4.3 Mesures de la largeur du marais intertidal en 1948

Transect Largeur (en mètres)

A 381,6

B 583,4

C 328,2

Moyenne 431,1

Données de : C. Careau et M. Hatvany, 2009.

4.5.2.2.1 Comparaison de la limite inférieure du schorre (1929 et 1948)

En superposant les limites inférieures du schorre pour 1929 et 1948, il est possible de noter deux dynamiques pendant la période de 19 ans sur le marais de la baie de Kamouraska (Figure 4.12). Pour les points de repères B et C, une progression a été mesurée, alors que pour le point de repère D, une régression importante de l'ordre de 84,5 mètres a été notée (tableau 4.4).

Figure 4.12 Carte schématique de l'interface entre la slikke et le schorre, 1929-1948, baie de Kamouraska

Source : Carte réalisée par C. Careau et M. Hatvany, 2009, Laboratoire de géographie historique, Département de géographie, Université Laval.

Tableau 4.4 Dynamique comparative de l'interface entre la slikke et le schorre, 1929-1948, baie de Kamouraska

Repère A Repère B Repère( Repère D Repère) Repère F

Auées (Mitra) Émisa Accn_M (Mitra) (Mitra) - r a t a i A c c r a - * (Mitra) (Mitra) - r a t a i A a r a i H (Mitra) (Mitm) - r a t a l Aecmtai (Mitra) (Mètml LrMWR Aecmtai (Mètra) É r a t a l (Mitra) AccrMio. (Mètra) 1929-1948 nd nd - 36 - 16,2 -84,5 - nd nd nd nd

Données de : C. Careau et M. Hatvany, 2009.

4.5.2.3 Photographie aérienne de 1974

La photographie aérienne qui était disponible à la suite de 1948 est celle de 1974. La photo-interprétation a notamment rendu possible l'identification de l'aboiteau secondaire construit avant 1948 (figure 4.13). La superficie totale du marais calculée pour l'année

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1974 était de 191,1 hectares (1,9 km ), ce qui signifie une perte de 63 hectares de marais entre 1948 et 1974, principalement liée aux activités agricoles. De plus, à partir des trois transects de 1826 et 1948, le calcul de la largeur moyenne du marais a été mesuré à 393,7 mètres (Tableau 4.5).

Figure 4.13 Limite inférieure du schorre, marais de la baie de Kamouraska, 1974

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Source : Photographie aérienne, Q74316-94 à 96 et Q74313-133 à 135, Ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec, 1974.

Tableau 4.5 Mesures de la largeur du marais intertidal en 1974

Transect Largeur (en mètres)

A 377,1

B 449,6

C 354,5

Moyenne 393,7

4.5.2.3.1 Comparaison de la limite inférieure du schorre (1948 et 1974)

Lorsque sont superposées sur une carte schématique les limites de l'interface entre le schorre et la slikke de 1948 et de 1974 deux dynamiques différentes de celles comparées entre 1929 et 1948 sont observées sur le marais de la baie de Kamouraska (Figure 4.14). En effet, les points de repères A et B dans la partie du marais à l'ouest du ruisseau des Bras montrent une régression, alors que les points de repères C, D, E et F illustrent une progression du marais (Tableau 4.6).

Figure 4.14 Carte schématique de l'interface entre la slikke et le schorre, 1948-1974, baie de Kamouraska

Légende

■ Limite ntereure du schotie 1948 - Limite Inférieur* du schorre 1974 ■ Aboiteau 1937-1938 I Aboiteau 1979-1980 ■ Rouit

Ruoseau i Estran

Terre ferme et agricole 1 Terre boisée et rocheuse

C a p a u Diable >

Source : Carte réalisée par C. Careau et M. Hatvany, 2009, Laboratoire de géographie historique, Département de géographie, Université Laval.

Tableau 4. 6 Dynamique comparative de l'interface entre la slikke et le schorre, 1948-1974, baie de Kamouraska

Repère A Repère B Repère C Repère D Repère E Repère F

Années Érosion |U.tr..| Accretion (Métras) Érosion (Mètres) Accretion (Mètres) Érosion (Métras) Accretion (Métras) Érosion (Métras) Accretion (Mètres) Érosion (Métras) Accretion (Métras) Érosion (Métras) Accretion (Métras) 1948-1974 _ _ _ _ _ -81,1 - -7,2 - - 5,8 - 4,8 - 28,9 - 72,2

Données de : C. Careau et M. Hatvany, 2009.

4.5.2.4 Photographie aérienne de 1985

La photographie aérienne en infrarouge de 1985 met en évidence à plusieurs endroits sur le marais, l'assèchement de celui-ci et par le fait même l'exploitation des nouvelles terres faisant suite à la reconstruction de l'aboiteau principal en 1979-1980. Sur cette photographie, il est possible d'observer que l'aboiteau principal de 1937-1938 a été rebâti et que, dans l'ouest, l'aboiteau a été relocalisé plus haut sur le schorre supérieur (Figure 4.15). La superficie du marais a été calculée à 115,3 hectares (1,15 km2) en 1985, ce qui

confirme des changements anthropiques importants depuis 1974. Cela dit, la perte du marais au profit des terres agricoles se constate dans les mesures des différents transects. En effet, la largeur moyenne du marais en 1985 est de 163,9 mètres (Tableau 4.7).

Figure 4.15 Limite inférieure du schorre, marais de la baie de Kamouraska, 1985 _§_s ' i_B__i_^S__i_E_B

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— Transect

0 0 5 1 kilometre 1 > 1 m l x W Ï J U I L . S ■ ■ : - ,

Source : Photographie aérienne, Q85913-143 et 147, Ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec, 1985.

Tableau 4.7 Mesures de la largeur du marais intertidal en 1985

Transect Largeur (en mètres)

A 253,4

B 103,1

C 135,2

Moyenne 163,9

4.5.2.4.1 Comparaison de la limite inférieure du schorre (1974 et 1985)

Les deux dynamiques de progression et de régression du schorre sont encore vérifiables entre ces deux années. En effet, le phénomène de régression s'accélère dans le fond occidental de la baie, tel que noté aux points de repères A, B et C, tandis que vers l'est une progression a eu lieu aux points de repères D, E et F positionnés à l'est du ruisseau Paradis (Figure 4.16). L'érosion est particulièrement importante autour du repère A alors qu'autour du repère F, c'est l'accrétion qui est très importante (Tableau 4.8).

Figure 4.16 Carte schématique de l'interface entre la slikke et le schorre, 1974-1985, baie de Kamouraska

Kamouraska (Saint-Louis)

0.5

_ l _

Source : Carte réalisée par C. Careau et M. Hatvany, 2009, Laboratoire de géographie historique, Département de géographie, Université Laval.

Tableau 4.8 Dynamique comparative de l'interface entre la slikke et le schorre, 1974-1985, baie de Kamouraska

Repère A Repère B Repère C Repère D Repère E Repère F

— Érosion Accretion Érosion Accretion Érosion Accretion Érosion Accretion Érosion Accretion Érosion Accretion (Métras) (Métras) (Métras) (Métras) (Métras) (Métras) (Métras) (Métras) (Métras) ("stras) (Métras) (Métras)

1974-1985 -68,8 - -32,9 - -15,3 - - 20,6 - 40,3 - 73,7

Données de: C. Careau et M. Hatvany, 2009.

4.5.2.5 Orthophotographie de 2001 et les coordonnées GPS de 2008

Les prochaines sources géographiques analysées datent de 2001 et 2008. Il s'agit d'une orthophotographie aérienne de 2001 où les coordonnées GPS acquises durant l'été 2008 ont été superposées afin de faciliter l'interprétation. En 2008, toutes les terres gagnées suite à l'endiguement des marais en 1980 sont en cultures (Figure 4.17). La superficie totale du marais intertidal est de 87 hectares (0,87 km ). Les trois transects mesurés dans le marais confirment une importante réduction de celui-ci. Le calcul de la moyenne des trois transects confirme en effet que la largeur moyenne du marais intertidal était en 2008 de

Figure 4.17 Limite inférieure du schorre, marais de la baie de Kamouraska, 2008 a_c__ /

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Limite mtèneure du schorre § \ Aborteau phnopal 1937-1941 Aboiteau principal 1979-1980 « 0 1 Transect 0 5 1 kilometre

Source : Orthophotographie, Ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec, Q01800-022-F07, 2001.

Tableau 4.9 Mesures de la largeur du marais intertidal en 2008

Transect Largeur (en mètres)

A 119,8

B 88,9

C 134,8

Moyenne 114,5

4.5.2.5.1 Comparaison de la limite inférieure du schorre (1985 et 2008)

t

La carte schématique des limites inférieures du marais mesurées pour les années 1985 et 2008 suggère la continuité des deux dynamiques de régression et de progression. En effet, l'érosion est observable autour des points de repères A, B, C et D (Figure 4.18). À noter que l'érosion est importante autour du point de repère C entre les ruisseaux des Bras et Paradis se chiffrant à 47,8 m. Aussi, il faut spécifier qu'il y a l'apparition d'érosion autour du point de repère D localisé entre les ruisseaux Paradis et Derrière-le-Cap. Toutefois autour des points de repères E et F, le marais est en progression tel qu'illustré par les mesures enregistrées qui confirment une accretion allant jusqu'à 58,6 m. autour du point de repère F (Tableau 4.10).

Figure 4.18 Carte schématique de l'interface entre la slikke et le schorre, 1985-2008, baie de Kamouraska

- Limite extérieure du schorre 1985 ■ Lvnae _4érieure du schorre 2006 ■ Aboteau 1937-1938 ■ Aboieau 1979-1980 ■ Route

A

cap-

Source : Carte réalisée par C. Careau et M. Hatvany, 2009, Laboratoire de géographie historique, Département de géographie, Université Laval.

Tableau 4.10 Dynamique comparative de l'interface entre la slikke et le schorre, 1985-2008, baie de Kamouraska

R e p è r e A R e p è r e B R e p è r e C R e p è r e D Rer. è r e E R e p è r e F

A n n é e s Érosion (Mètre») Accretion (Métré.) (Métras) Érosion Accretion (U«tr..) {Métrés) Érosion Accretion (Métras) (Mètres) Érosion Accretion (Métras) (Métras) Érosion Accretion (Métras) (Métras) Érosion Accretion (Métr-.)

1 9 8 5 - 2 0 0 8 . , - -52,2 - -47,8 - -5,2 - - 37,6 - 58,6

Données de : C. Careau et M. Hatvany, 2009.

4.6 Discussion

En superposant les différentes limites inférieures du schorre sur une longue durée de presque 80 ans (1929-2008), les résultats révèlent deux différentes dynamiques dans le même milieu: croissance et érosion (Figure 4.19A). Au sujet de cette dynamique des schorres, Verger (1968) a noté que « dans une même région, leur progression et leur recul peuvent être simultanés, parfois même associés » (Verger, 1968 : 277). Entre 1948 et 2008, les mesures prises aux sites de repères E et F dans l'est de la baie présentent en effet un accroissement constant du marais, un processus qui est toujours en cours (Figure 4.19B). L'accrétion mesurée dans cette partie du marais est de l'ordre de 2,6 m par année en moyenne depuis 1948, toutefois un autre processus géomorphologique est également actif depuis 1948, soit celui de l'érosion. Celle-ci est nettement observable dans le sud-ouest du marais, précisément autour des sites de repères A et B. En effet, l'érosion calculée est en moyenne de 2,2 m par année depuis 1948. Selon les résultats de l'étude à cet endroit, le calcul d'érosion est de l'ordre de plus de 40 m depuis 1985 (Tableau 4.11).

Figure 4.19A Carte schématique de l'interface entre la slikke et le schorre, 1929-2008, baie de Kamouraska

Figure 4.19B Carte schématique de l'interface entre la slikke et le schorre, 1948-2008, baie de Kamouraska

Source : Cartes 4.19A et 4.19B réalisées par C. Careau et M. Hatvany, 2009, Laboratoire de géographie historique, Département de géographie, Université Laval.

Tableau 4.11 Dynamique comparative de l'interface entre la slikke et le schorre, 1929-2008, baie de Kamouraska R e p è r e A R e p è r e B R e p è r e C R e p è r e D R e p è r e E R e p è r e F ^ Érosion (Métras) Accretion (■MM.) Érosion (Métras) Accretion

(M*tr..) |M.lr..} _ro.ton Accretion (Mètnw) (Mètre.) Érosion Accretion (Métras) Érosion

(Métras) Accretion (Mètre.) Éro.ton

(Mètre.) Accretion (Mètre.)

. 9 - 9 - 1 9 4 8 1 9 4 8 - 1 9 7 4 - - - 36 - 16,2 -84,5 " - - - " . 9 - 9 - 1 9 4 8 1 9 4 8 - 1 9 7 4 -81,1 " -7,2 - " 5,8 - 4,8 - 28,9 - 72,2 1 9 7 4 - 1 9 8 5 -68,8 " -32,9 - -15,3 - 20,6 - 40,3 " 73,7 1 9 8 5 - 2 0 0 8 T O T A L " -52,2 - -47,8 - -5,2 - - 37,6 - 58,6 1 9 8 5 - 2 0 0 8 T O T A L -161,6 - -92,3 36 -63,1 22 -89,7 25,4 - 106,8 " 204,5 D i f f é r e n c e t o t a l * - 1 6 1 , 6 - 5 6 , 3 - 4 1 , 1 - 6 4 , 3 1 0 6 , 8 2 0 4 , 5

Données de : C. Careau et M. Hatvany, 2009.

Paradoxalement, certaines études antérieures portant sur la dynamique sédimentaire de la baie de Kamouraska, par exemple Sérodes et Dubé (1983), avaient mentionné la possibilité que la partie centre et ouest du schorre de la baie de Kamouraska progresse vers le large alors que cette étude démontre que le contraire s'est produit. Cette hypothèse de Sérodes et Dubé se basait sur le fait que les parties du schorre des secteurs à l'ouest et au centre de la baie possèdent des pentes plus douces et sont plus protégées des vents dominants d'ouest et du nord-est (Sérodes et Dubé, 1983 : 23).

De plus, d'autres travaux, c'est-à-dire ceux de Champagne et al. (1983), font abstraction de l'érosion qui était en cours au moment même de la réalisation de leur étude sur la baie de Kamouraska. Ils ont noté la progression vers le large de la zone de spartine alterniflore de l'ordre de 0,75 m/an dans l'ensemble de la baie de Kamouraska pour la période entre 1961 et 1980 (Champagne et a l , 1983 : 35).

Suite à la vérification du terrain en 2008, il a été possible d'observer que le marais subissait nettement de l'érosion dans sa portion occidentale entre le ruisseau Paradis jusqu'à la limite de l'aboiteau, vers le cap au Diable. Une micro-falaise assez importante

marque ce recul du schorre (Figure 4.20). Toutefois, dans la partie orientale située à l'est du ruisseau Paradis jusqu'au cap Blanc, la sédimentation est nettement verifiable. Le tapis de spartine alterniflore est en effet dense et la présence de touffes de spartine alterniflore semble indiquer une colonisation de la slikke et la progression du schorre vers le large (Figure 4.21). D'ailleurs, les transects de végétation pris dans ce secteur (vers le cap Blanc) confirment une longueur allant jusqu'à 200 m de la zone de spartine alterniflore.

Il semble que la baie de Kamouraska comporte un cycle sédimentologique approximativement en équilibre entre l'érosion et la sédimentation depuis les derniers 200 ans. Les données enregistrées entre l'érosion et l'accrétion pour les différents repères des années à l'étude présentent un bilan total pour la baie, équivalant à une régression de l'ordre de 12 m depuis 1929 (tableau 4.11). Malgré l'évolution des deux dynamiques d'érosion et de sédimentation du marais de la baie de Kamouraska, il faut spécifier que la baie a toujours conservé sa forme de demi-lune. À titre d'exemple, en comparaison avec l'évolution d'autres marais comme celui de Barnstable, Massachussetts (Redfield, 1972), à cet endroit les changements dans la forme du marais furent radicaux.

Figure 4.20 Érosion observée sur la portion ouest du marais salé, baie de Kamouraska, été 2008

Source : Collection privée, Hatvany, 2008.

Figure 4.21 Portion est du marais salé en croissance, baie de Kamouraska, été 2008

La signification de ces résultats indique que l'évolution du marais de la baie de Kamouraska n'est pas unidirectionnelle, comme la littérature actuelle le laisse croire, mais