• Aucun résultat trouvé

Analyse descriptive des données

2. RÉSUMÉ DE THÈSE

2.5 C ONTEXTUALISATION INSTITUTIONNELLE DES AIDES À LA DÉCISION

2.5.2 Identification des patients à risque

2.5.2.4.1 Analyse descriptive des données

L’analyse du PC a conduit à l’identification de 523 PRP avec une moyenne de 3.8 PRP par patient (intervalle 1-12, SD 2.2). 137 (91.3%) patients inclus dans l’analyse présentaient au moins 1 PRP dans son ordonnance. 34% des PRP identifiés présentaient un degré de sévérité de niveau 1, 40% de niveau 2 et 26% de niveau 3. Les PRP les plus fréquemment

retrouvés au cours de cette étude étaient en lien avec les effets indésirables des traitements, les interactions médicamenteuses, des médicaments non indiqués / doublons et avec une absence de conformité aux référentiels / contre-indication thérapeutique.

La comparaison des caractéristiques cliniques, démographiques et médicamenteuses, des patients ayant présenté des interventions pharmaceutiques par rapport à ceux qui en ont été exempts, est détaillée dans le tableau 14.

Tableau 14: Caractéristiques cliniques, démographiques et traitements des patients inclus dans l’étude

Caractéristiques Patients avec interventions

pharmaceutiques, n=137

P : Antiparasitaires, insecticides et répulsifs 10 (7,3%) 0 (0,0%)

R : Système respiratoire 52 (38,0%) 6 (46,2%)

VHC+ 6 (4,4%) 0 (0,0%)

VHB+ 2 (1,5%) 0 (0,0%)

VIH+ 6 (4,4%) 0 (0,0%)

Alcoolisme 32 (23,4%) 3 (23,1%)

Tabagisme actif ou passé 75 (54,7%) 7 (53,8%)

ATC, Anatomique Thérapeutique Chimique ; AVC, Accident Vasculaire Cérébral ; BPCO, Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive ; Cl.

créat, Clairance de la créatinine selon Cockroft ; SD, écart-type ; VHB+, Virus de l’hépatite B : virologie positive ; VHC+, Virus de l’hépatite C : virologie positive ;VIH+, Virus de l’immunodéficience humaine : virologie positive

2.5.2.4.2 Développement du modèle de priorisation des patients

2.5.2.4.2.1 Identification des paramètres de priorisation des patients

69 % des 150 patients inclus dans l’analyse ont fait l’objet d’interventions de pharmacie clinique de niveau 1. Ces 103 patients comptabilisaient 179 interventions: 56 (54%) d’entre eux présentaient 1 PRP, 30 (29%), 9 (9%), 5 (5%), 2 (0.2%) et 1 (0.1%) patients présentaient respectivement 2, 3, 4, 5 et 6 PRP.

2.5.2.4.2.1.1 Analyse des caractéristiques démographiques

L’analyse comparative de l’âge et du sexe des patients présentant des OM, sujets ou non à des interventions pharmaceutiques, ne semblait pas révéler de lien entre ces facteurs et le risque de survenue de PRP.

2.5.2.4.2.1.2 2.5.2.4.2.1.2 Analyse des médicaments prescrits

La moyenne du nombre de médicaments prescrits chez les patients ne présentant pas de PRP était de 9.89 (SD 5.31) contre 11.36 (SD 4.29) chez les patients ayant fait l’objet d’au moins une intervention pharmaceutique de niveau 1. L’analyse comparative de la moyenne du nombre d’OM prescrits et du nombre d’interventions pharmaceutiques réalisées révèlait que ces deux variables étaient corrélées (Figure 7). La polymédication apparaissait donc être un facteur de risque de PRP.

Figure 7: Moyenne de médicaments prescrits en fonction du nombre de problèmes reliés à la pharmacothérapie (PRP) de niveau 1 identifiés par un pharmacien clinicien

Sur la base d’une spécificité recherchée de 0.8, nous avons donc arbitrairement considéré qu’une prescription d’au moins 14 médicaments (Se=0.26, Sp=0.81) était un facteur de risque d’intervention pharmaceutique.

Parmi les 179 PRP identifiés, 56 ont été exclus de cette analyse car corrélés à des recommandations d’initiation de traitement ou ciblant des problèmes non médicamenteux.

Certaines interventions incriminaient 2 à 5 médicaments. Ces médicaments (n=81) ont été pris en compte dans cette sous-analyse, qui comptabilisait ainsi 204 interventions et 94 patients faisant l’objet d’interventions de pharmacie clinique.

Les 204 interventions analysées ciblaient 91 molécules différentes. Aucun médicament des groupes ATC D, P, S et V n’ont fait l’objet d’intervention de pharmacie clinique de niveau 1 et n’ont donc été considérés comme facteurs à risque.

L’étude des médicaments faisant l’objet d’interventions pharmaceutiques a révèlé que les fréquences d’intervention calculées les plus importantes concernaient les immunosuppresseurs (50%), les analgésiques (43.2%), les antiépileptiques (40.9%) et les thérapies cardiaques (34.8%) (Tableau 15).

Tableau 15: Analyse par sous-groupe thérapeutique (ATC de niveau 2) des ordres médicaux ayant fait l’objet d’une intervention pharmaceutique de niveau 1

ATC de niveau 2

C09 : Agents intervenant sur le système

rénine-angiotensine 58 (38,7%) 4 (4.2%) 6,9%

M01 : Anti-inflammatoires et antirhumatismaux 17 (11,3%) 1 (1.0%) 5,9%

A03 : Médicaments des troubles fonctionnels

gastro-intestinaux 41 (27,3%) 2 (2.1%) 4,9%

A06 : Laxatifs 82 (54,7%) 3 (3.2%) 3,7%

R03 : Médicaments des maladies respiratoires

obstructives 48 (32,0%) 2 (2.1%) 4,2%

C07 : Bêta-bloquants 54 (36,0%) 1 (1.0%) 1,9%

B05 : Antihémorragiques 110 (73,3%) 2 (2.1%) 1,8%

ATC, Anatomique Thérapeutique Chimique

2.5.2.4.2.1.3 Analyse des comorbidités

Cette analyse a révèle que certaines comorbidité ne semblaient a priori pas liées à un risque accru de survenue de PRP: l’AVC, le diabète de type 2 et la cardioischémie. En revanche, les fréquences d’interventions et la proportion de patients ayant fait l’objet d’interventions était plus importante pour les patients greffés, présentant une virologie positive aux VIH et VHC, insuffisant rénaux et hépatiques et les patients alcooliques (Tableau 16).

Tableau 16: Analyse des comorbidités retrouvées chez les patients ayant fait l’objet d’une intervention pharmaceutique de niveau 1 Cockroft ; SD, écart-type ; HBB+, Virus de l’hépatite B : virologie positive ; HBC+, Virus de l’hépatite C : virologie positive ; VIH+, Virus de l’immunodéficience humaine : virologie positive

2.5.2.4.2.2 Etablissement d’un modèle de priorisation des patients considérés à risque de présenter des PRP

Les potentiels facteurs liés à un risque accru d’intervention pharmaceutique identifiés, sur la base de leur fréquence de survenue chez les patients présentant des PRP (patients greffés, présentant une virologie positive aux VIH et VHC, insuffisant rénaux, hépatiques et cardiaques, alcooliques, atteints de fibrillation auriculaire, présentant au moins 14 OM et traités par immunosuppresseurs), ont été pris en considération dans le développement du modèle de priorisation des patients à risque d’interventions de pharmacie clinique.

La moyenne du facteur de priorisation des patients calculé semble augmenter proportionnellement au nombre de PRP détectés par le PC et donc au risque d’être sujet à des interventions de pharmacie clinique (Figure 8).

Figure 8: Moyenne du facteur de priorisation calculé des patients en fonction du nombre de problèmes reliés à la pharmacothérapie (PRP) de niveau 1 identifiés par un pharmacien clinicien

2.5.2.4.2.3 Entérinement du modèle développé

Comme précédemment énoncé, le modèle n’a pu être entériné dans cette étude pilote. Il sera important d’évaluer sa pertinence sur un échantillon de patients contrôle lors de l’étude finale.

2.5.2.5 Discussion

Cette étude visait à identifier, sur la base de l’analyse de leurs données démographiques, cliniques et médicamenteuses, le profil des patients du SMIG à risque de présenter des PRP. Ses résultats ont mis en évidence que certains paramètres-patient étaient a priori susceptibles d’influer sur le risque de développer des PRP comme notamment le nombre de médicaments prescrits, la greffe, des virologies positives aux VIH et VHC, l’insuffisance rénale modérée et l’insuffisance hépatique.

Etant donné que les profils des patients diffèrent d’un service ou d’une institution à l’autre, et que le nombre d’études similaires à la notre disponibles dans la littérature est relativement faible, il est difficile de comparer nos résultats à ceux déjà publiés. Toutefois, on peut noter que, contrairement à Zopf et al. et Urbina et al., qui ont démontré un risque accru pour les femmes de présenter des PRP, nous n’avons pas trouvé de lien entre le sexe des patients et le risque de développer des PRP 49-50. Notre analyse a par ailleurs identifié la polymédication comme facteur de risque de développer des PRP, résultat retrouvé largement dans la littérature 50-55. D’autre part, les résultats de notre analyse ont mis en évidence qu’une insuffisance rénale ou hépatique serait un facteur de risque d’intervention pharmaceutique. Ce résultat a également été décrit dans la literature 51, 53, 56-58

. Concernant

l’analyse des médicaments liés à un risque accru de survenue de PRP, dans la mesure où nos résultats, probablement à cause d’un manque de puissance, n’étaient pas très pertinents, il est difficile de les comparer à ceux d’autres études. Néanmoins, les classes médicamenteuses incriminées dans les études comparables à la notre ne semblaient pas correspondre à ce que nous avons mis en evidence 40, 54-55, 57

. Cette différence était probablement liée à la différence de la population de patients étudiés. Par ailleurs, il ressortait de la comparaison de notre analyse aux études similaires publiées dans la littérature, que de nombreux autres paramètres auraient été intéressants à étudier comme par exemple : les résultats biologiques 49, 58, la température corporelle 49 ou les données administratives liées au patient 50, 52, 57.

Stevenson et al. ont conclu que l’ensemble des études inclues dans leur revue systématique présentaient des règles de priorisation de performance modeste à inexistante 59. Outre les méthodologies qui ne sont pas considérées d’une grande robustesse par Stevenson et al., la limite principale des études publiées jusqu’alors est que les règles de priorisation définies ne prennent pas en considération la sévérité potentielle des effets indésirables. La prise en considération dans notre étude de la sévérité clinique du risque encouru par les patients dans la sélection des PRP apparait donc pertinente et apportait une réelle plus-value à notre modèle.

Cette étude pilote présentait toutefois des limites. Premièrement, le nombre de patients inclus était insuffisant pour permettre d’entériner, par vérification de sa réciproque, le modèle de priorisation établi, mais aussi pour définir de manière robuste ce modèle. Pour cette raison, nous avons renoncé à conduire des analyses statistiques à ce stade de cette investigation. Deuxièmement, il aurait été plus pertinent de réaliser cette étude de manière

prospective. Une telle approche aurait permis de renseigner sur le devenir des interventions du PC. Ainsi, cette analyse aurait pu être concentrée sur les PRP réellement pertinents pour le prescripteur. Le nombre de PRP analysés aurait probablement été inférieur et leur répartition par degré de sévérité aurait vraisemblablement été modifiée. Une étude prospective aurait donc permis de prendre en compte l’ensemble des PRP, identifiés par le PC et validés par les prescripteurs, quelque soit leur niveau de sévérité. Troisièmement, les comorbidités étudiées dans cette analyse étaient limitées à celles recherchées pour l’activité d’analyse pharmaceutique des OM. Le choix des comorbidités étudiées dans cette analyse pilote ayant été basé sur un jugement clinique, il pouvait manquer d’objectivité et d’exhaustivité. Pour l’étude finale, il serait plus pertinent d’extraire du DPI l’ensemble des diagnostiques et résultats de laboratoire liés aux patients considérés, de manière à étudier tous les paramètres pouvant potentiellement influer sur le risque de survenue de PRP. Enfin il aurait été plus pertinent, si le nombre de patients inclus dans l’étude avait été supérieur, de réaliser l’analyse médicamenteuse sur les niveaux ATC3, voire ATC4, plutôt que sur le niveau ATC2.

Bien que cette étude pilote nécessite des recherches supplémentaires, que ce soit en termes de nombre de patients inclus, de récolte de données patients ou d’analyse statistique, elle ouvre de nouvelles perspectives. Après établissement et validation d’un modèle dans une étude de plus grande ampleur, les règles de priorisation des patients à risque d’interventions pharmaceutiques dans le SMIG, pourraient être implémentées sous forme d’ADI dans le DPI.

Préalablement à leur implémentation, il serait opportun de les stratifier en différentes catégories de priorité croissante, facilement identifiable dans le DPI. En effet, différencier les alertes en fonction de la criticité de l’effet clinique qu’elles ont pour objectif de prévenir, a montré un impact positif sur les taux d’acceptation par les prescripteurs 60-61. Enfin, étant

donné la nécessité de contextualisation des ADI, sur la base de la méthodologie développée dans l’étude finale, cette analyse pourrait être répétée pour d’autres services de l’établissement, de manière à identifier leurs profils de patients les plus à risque de développer des PRP.

2.5.2.6 Conclusion

Cette étude pilote a permis de mettre en évidence qu’il est envisageable d’identifier les profils de patients les plus à risque d’être la cible d’interventions pharmaceutiques. Elle a également permis de suggérer certains paramètres-patients a priori susceptibles d’influer positivement sur le risque de développer des PRP, comme par exemple la polymédication, la greffe, des virologies positives aux VIH et VHC, l’insuffisance rénale modérée et l’insuffisance hépatique. Toutefois, en raison d’un manque de puissance évident, de plus amples recherches sont nécessaires pour développer et valider un outil permettant de prioriser de manière hiérarchisée, les patients pour lesquels une analyse pharmaceutique de leurs OM serait la plus profitable.