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Alliance des ADI et de la pharmacie clinique dans l’optimisation de la qualité des soins

1. ELÉMENTS DE THÉORIE

1.6 P ERTINENCE DES AIDES À LA DÉCISION INFORMATISÉES DANS L ’ ACTIVITÉ DE PHARMACIE CLINIQUE

1.6.2 Alliance des ADI et de la pharmacie clinique dans l’optimisation de la qualité des soins

1.6.2.1 Impact des ADI sur l’activité de pharmacie clinique

Bien qu’il ait été mis en évidence que le recours à l’informatisation des prescriptions, peut être à l’origine de nouvelles problématiques pour les PC, telles que les erreurs générées par le système lui-même ou consécutives à son mésusage 170, il a parallèlement été mis en évidence que les systèmes d’aide à la décision bien conçus optimisent la qualité des prescriptions. Le recours aux ADI dans l’activité clinique des pharmaciens peut donc s’avérer fort utile.

Tout d’abord, les connaissances dans le domaine de la santé ne cessent de s’accroitre au fil du temps. Il est difficile pour des pharmaciens, professionnels généralistes, de maitriser toutes les données liées à la thérapie médicamenteuse. Ils ont donc souvent recours à des recherches de littérature. A titre d’exemple, il a d’ailleurs été démontré que tant les pharmaciens que les médecins ont un savoir limité quant aux interactions médicamenteuses

171-172

. De ce fait, les ADI apparaissent utiles aux PC car elles leur facilitent l’accès aux informations dont ils ont besoin pour analyser les OM. Miller et al. ont d’ailleurs démontré dans leur étude que le groupe de PC secondés par des ADI consultaient moins la littérature que le groupe naïf d’ADI 173. Ils ont ainsi établi que les ADI permettaient aux PC de diminuer le temps passé au contrôle de la conformité des OM au profit des conseils pharmaceutiques.

Par ailleurs, le gain de temps apporté par les ADI à l’activité de pharmacie clinique ne se limite pas à la recherche des connaissances médicamenteuses, mais impacte aussi la recherche de données propres aux patients. Les alertes non-interruptives facilitent par exemple l’accès aux résultats des examens de laboratoire 49.

En outre, il a été démontré que l’implémentation des ADI dans les SPI/DPI favorise la détection des EIM. Les ADI sont par conséquent à l’origine d’une augmentation du nombre d’interventions pharmaceutiques. Silverman et al. ont ainsi pu mettre en évidence que sur une période d’une année, le nombre d’interventions réalisés par les PC a augmenté de 15%

en passant de 500/mois à 550-600/mois après implémentation d’un système d’ADI 49. Ces résultats ont été confortés par ceux d’une autre étude au cours de laquelle il a été défini que les ADI permettaient, probablement du fait de leur grande sensibilité, d’identifier plus d’EIM graves que les PC. Sur une période de 3 mois, Wang et al. ont établi que les PC interceptaient 78% des erreurs de prescriptions potentiellement dangereuses, contre 93% pour les systèmes d’ADI (p<0.002) 174.

Enfin, forts de leur capacités à améliorer l’efficience de l’activité du PC, les systèmes d’ADI optimisent l’implication du PC dans la prise en charge thérapeutique des patients. Plus rapides et pertinents dans leur analyse 175, les PC se positionnent grâce au soutien des ADI comme des professionnels de la sécurité des patients aux yeux des autres acteurs de la santé

49.

1.6.2.2 Plus-value apportée par le PC sur l’impact des ADI

Parallèlement au fait que les ADI apportent une plus-value dans l’activité de pharmacie clinique, l’analyse des ADI par des PC améliore leur impact clinique.

En premier lieu, il a été largement débattu et démontré que les prescripteurs ignorent la majorité des alertes, dont des alertes justifiées et pertinentes, du fait d’un manque de spécificité. Les pharmaciens, bien que conscients du manque général de pertinence des alertes, semblent a priori y prêter plus de temps et d’attention que les médecins. De ce fait, ils aident les prescripteurs à appréhender correctement les alertes adéquates en les

avertissant de leur pertinence clinique 176. Comme précédemment discuté, les ADI implémentées à ce jour dans les SPI présentent, dans leur grande majorité, un manque évident de spécificité et donc de pertinence. Ce manque de spécificité est souvent dû à un défaut de contextualisation. Lors de leur analyse des OM, les PC évaluent les facteurs contextuels tels que ceux liés au patient. Ainsi dans l’étude sur les IM conduite par Cornu et al. portant sur 50 patients, grâce à la prise en compte du contexte du patient (à savoir : analyse de l’International Normalised Ratio, de la glycémie, de la kaliémie, de la fréquence cardiaque ou de la tension artérielle et des intervalles d’administration), 13 des 16 interventions réalisées par les PC ont été acceptées par les prescripteurs. A l’inverse aucune des alertes n’a été prise en compte par les médecins 177.

Deuxièmement, l’analyse pharmaceutique des OM permet de générer des interventions dans des domaines où les systèmes d’ADI sont insuffisants. Ce phénomène concerne principalement les ADI dites « avancées », c’est-à-dire les ADI liées à des paramètres autres que l’ordonnance médicamenteuse à proprement parler 178. C’est le cas par exemple des réconciliations des ordonnances lors de l’entrée et de la sortie des patients dans les établissements de santé 179-181. Il a été mis en évidence que les PC identifient des PRP non détectés par les ADI « basiques », tels que ceux en lien avec les indications, les incohérences avec de précédentes admissions, ou les insuffisances de monitoring biologique 182. Zaal et al.ont établi dans cette étude analysant 1’206 OM, qu’alors que les PC identifiaient 442 PRP potentiels, dont 286 pertinents présentant un taux d’acception de 56%, le système ne générait des alertes que pour 8 % des PRP détectés en pharmacie clinique.

Enfin, il semble évident que l’intervention personnelle d’un PC sera plus facilement étudiée par un prescripteur et aura donc plus d’impact qu’une alerte aussi bien conçue soit elle. En

effet, comme souligné par Kaboli et al., une interface homme / homme est toujours plus complète et efficace qu’une interface homme / machine 168.

1.6.2.3 Synergie d’action : impact conjoint de la pharmacie clinique couplée aux ADI

L’informatisation des prescriptions et l’implémentation des ADI dans les SPI et DPI se généralisant dans les établissements de soins, le recours au soutien des ADI dans l’activité de pharmacie clinique se « démocratise » peu à peu. Ainsi les nouvelles études portant sur la sécurité des prescriptions médicamenteuses se focalisent sur l’impact conjoint de ces deux approches en matière de prévention de survenue d’EIM 183.

L’utilisation en routine des ADI par les PC permet d’optimiser la sécurité des prescriptions médicamenteuses 169, et donc des patients hospitalisés en facilitant l’identification et les causes des PRP, par exemple lors de la validation pharmaceutique ou de la préparation du suivi de la visite médicale 184, 185. Il a également été démontré qu’elle facilitait la réduction des OM inappropriés 186, 187 et améliorait la qualité des prescriptions 188-189.

Comme précédemment discuté, la qualité des ADI actuellement déployées dans les SPI et DPI n’est globalement pas satisfaisante. Du fait d’un défaut conséquent de spécificité et de contextualisation, elles présentent une valeur prédictive largement insuffisante pour être pertinentes. Etant donné l’état actuel de leur développement, il semble qu’à ce jour, les ADI facilitent principalement l’activité des PC en couvrant les domaines en lien avec la sécurité des OM (tels que par exemple les erreurs de posologie ou les IM), leur permettant ainsi de se concentrer sur des tâches plus complexes comme notamment les interactions médicament-diagnostic 182. Dans un avenir proche, les développements structurés des bases de données et des DPI, conduira à l’implémentation d’alertes avancées, cliniquement

pertinentes, dans les établissements de santé. Ainsi, les ADI seront en mesure d’apporter un soutien de grande qualité aux PC, qui impactera probablement leur activité de manière conséquente.