• Aucun résultat trouvé

Dans ce débat, qui ne reprend aucun dispositif particulier, l’enseignant n’a pas de rôle clairement défini. Il s’agissait d’une première expérience autant pour les élèves que pour l’enseignant, professeure des écoles stagiaires.

Au cours de ce débat, l’enseignante est intervenue quarante fois avec une durée globale d’intervention de 4 minutes et 35 secondes, ce qui représente approximativement 21 % du temps total du débat (cf. annexe n°9). Si on s’intéresse à la nature de ses interventions, on peut voir qu’une majorité est liée à la bonne mise en place du débat et au rappel des règles de prise de parole. En effet, c’est l’enseignante qui ouvre le débat à l’item 1 où elle précise les règles de prise de parole, ainsi que le sujet du débat qui est posé sous forme de question, ce qui sous-tend un choix binaire, à savoir : est ce qu’il vaut mieux naître fille ou garçon ? Nous avons déjà observé lors de l’analyse des élèves, les effets que pouvait engendrer la forme de la question sur leurs réponses (cf. analyse de Paul). C’est également l’enseignant qui clôture le débat à l’item 130 en indiquant qu’il est l’heure d’arrêter et de remettre en place la disposition spatiale de la classe. De plus, l’enseignante est obligée de rappeler à de nombreuses reprises au cours du débat que seul celui qui tient la règle a le droit de s’exprimer, comme à l’item 30 : “n’a la parole que la personne…”, ou encore à l’item 44 : “c’est celui qui a la règle, qui à la parole”. L’enseignante finit par montrer son agacement à l’item 79 “non vous ne respectez pas les tours de parole, c’est pas possible on peut pas faire un débat comme ça”. Nous pensons que ceci vient du fait que les élèves expérimentent pour la première fois ce genre d’exercice et n’ont donc pas l’habitude de disposer d’un tel espace de parole pour exprimer leurs pensées. Ainsi, leur envie de dire ce qu’ils pensent et surtout de réagir instantanément aux propos de leurs camarades prend le pas sur le respect de la prise de parole. En effet, les élèves doivent apprendre à gérer la frustration de ne pouvoir réagir sur le moment et d’attendre leur tour, d’autant plus qu’ils se sentent très concernés par le sujet et la formulation de la

Mémoire MASTER MEEF 1 degré

- FDE -

mieux être, alors qu’ils sont déjà tributaires de cette identité. Ceci explique en partie les réactions souvent animées du groupe lors de certaines interventions. On peut espérer que la répétition d’un tel exercice finisse par canaliser ce genre de débordements, s’ajoutant à la nouveauté de l’exercice avec des codes non encore maîtrisés. L’enseignante intervient également à plusieurs reprises pour tenter de réguler au maximum les tours de parole et éviter que les mêmes interviennent toujours comme par exemple à l’item 114 où l'enseignante signale que “ça fait un moment que Léna et Clara lèvent la main”, ou encore à l’item 118 : “Elina ça fait un moment qu’elle veut parler”. C’est sur ce point que le dispositif de Michel TOZZI apparaît intéressant car il permet de décharger l'enseignant d’une partie de l’autorité. En effet, en attribuant des rôles aux élèves, eux-mêmes deviennent responsables du bon déroulement du débat et ceci leur permet donc de développer des compétences civiques comme on a pu le comprendre dans la partie théorique. Ce nouveau partage de l’autorité aura pour effet de finir de bouleverser les codes scolaires dans le sens où le maître ne se positionne plus comme le seul garant de l’autorité et donc du bon déroulement du débat. L’enseignante s’adresse parfois directement à un élève dans le but d’aider celui-ci à formuler sa pensée ou pour l’encourager à aller plus loin dans sa réflexion. Nous avons notamment déjà relevé l’échange entre Léna et l’enseignante, où cette dernière essaie de pousser Léna à préciser et développer sa pensée en lui demandant à l’item 86 : “toi, tu penses qu’une fille peut jouer au foot ?”. Elle lui répond simplement oui. On peut noter un phénomène similaire lors de l’échange entre Paul et l’enseignant à l’item 69 où là encore, l’élève ne développe pas ses idées. Nous pensons donc qu’il serait plus judicieux pour l’enseignante d’intervenir avec des questions ouvertes, auxquelles l’élève ne peut pas répondre juste de façon binaire par oui on par non, afin de le contraindre à argumenter et à favoriser sa réflexion. Par exemple, il serait intéressant d’utiliser des formules telles que “pourquoi”, “est ce que tu peux préciser”... L’enseignante tente également à un moment de relancer le débat autour de propos tenus par Victor à l’item 32, propos qui n’ont pas été repris par les autres. Ainsi, à l’item 55 l’enseignante demande à Victor de redire son intervention, ce qu’il fait à l’item 56 “ le rose c’est pas que pour les filles, il y a les garçons qui aiment le rose”. Cette précision a pour effet de permettre à chacun de donner son avis sur la couleur qu’il aime mais cela ne permet pas d’aller plus loin dans la discussion. Il semble que si les élèves n’ont pas exploité une intervention de leur camarade même si celle-ci est soulignée par l’enseignante, c’est qu’elle ne fait toujours pas écho chez eux. Ceci autorise à penser que c’est principalement en interagissant avec le groupe, que les élèves dépassent leur centration sur leur personne pour tendre vers le général et accroitre ainsi leur réflexivité.

Mémoire MASTER MEEF 1 degré