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2.5 
 Amendements de 2006 76

2.5.1 
 Amendements au Règlement de liaison 76

Tel que nous l’avons indiqué, ce n’est qu’en 2006 que le gouvernement canadien a amendé le Règlement de liaison afin de limiter les pratiques d’evergreening des compagnies novatrices résultant de l’imprécision de la rédaction de ce règlement213. Les

amendements de 2006 ont essentiellement clarifié l’article 4 du règlement qui est relatif aux délais et aux conditions d’inscription des brevets au registre tenu par le Ministre. En ce qui concerne les délais d’inscription, les amendements (apportés aux alinéas (5) et (6) de l’article 4 du Règlement de liaison) ont ainsi précisé qu’une compagnie novatrice

examen de son contenu, des développements et des commentaires à son égard, voir le site du Réseau juridique canadien VIH/SIDA, www.aidslaw/publications/interfaces/downloadFile.php?ref=1579. De plus, plusieurs membres de la communauté internationale se questionnent sur l’efficacité de cette mesure prévue à l’art. 6 de la Déclaration de Doha. À ce sujet, voir OMC, « Les membres demandent : est-ce que le système prévu au paragraphe 6 sur la propriété intellectuelle et la santé fonctionne? » Nouvelles 2010, 2 mars 2010, ADPIC, en ligne : WTO http://www.wto.org/french/news_f/news10_f/trip_02mar10_f.htm.

213 Voir p. 74 de notre thèse pour des exemples de ces pratiques. Le REIR, supra note 187 à la p. 1613, en

atteste l’existence :

Le Gouvernement a constaté qu’un certain nombre de décisions judiciaires récentes portant sur l’interprétation du Règlement de liaison ont donné lieu à la nécessité d’apporter des précisions quant aux exigences relatives à l’inscription des brevets décrites ci-dessus. Ces décisions, qui concernent les exigences relatives au délai et à la pertinence, ne découlent pas d’erreurs de la part des tribunaux, mais plutôt d’une lacune dans le libellé du Règlement lui-même. Plus précisément, le libellé du Règlement de liaison ne tient pas pleinement compte de l’éventail de types de demandes d’avis de conformité possibles en vertu du Règlement sur les aliments et drogues, des différentes revendications relatives aux brevets pharmaceutiques qui peuvent être formulées en vertu de la Loi sur les brevets et, surtout, de la foule de scénarios qui peuvent découler du lien entre les deux lois résultant du Règlement de liaison.

Voir aussi les décisions suivantes : Eli Lilly Canada Inc. c. Canada (ministre de la Santé), 2003 CAF 24; Ferring, supra note 204; Hoffmann-La Roche, supra note 205. Mentionnons que des modifications avaient aussi été apportées en 1998, mais ces dernières visaient essentiellement à confirmer l’état jurisprudentiel voulant que le ministre de la Santé ait le pouvoir d’inscrire mais aussi de supprimer des brevets inscrits au registre. Voir Règlement modifiant le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), (D.O.R.S. 98/166).

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doit déposer sa liste de brevets au moment du dépôt de la PDN ou du SPDN et que cette liste doit être pertinente à sa demande (c’est-à-dire, par exemple, que la liste de brevets jointe à une SPDN ne peut concerner des brevets relatifs aux allégations visées dans la PDN). Si la compagnie ne dépose pas sa liste de brevets au même moment que sa demande, elle dispose de la possibilité de le faire dans la mesure où les brevets mentionnés sur la liste ont fait l’objet d’une demande de brevets préalable et que leur délivrance n’excède pas un délai de trente (30) jours suivant le dépôt de la PDN (ou du SPDN) à laquelle ils se rattachent214.

Avant 2006, le Règlement de liaison stipulait plutôt que la date de dépôt du brevet devait simplement précéder la date de la « demande d’avis de conformité » sans préciser si cette exigence s’appliquait à la date de la PDN, du SPDN ou des deux. Jusqu’en 1999, on avait considéré que l’exigence relative au délai s’appliquait uniquement à la PDN215. Or, en 1999, une décision de la Cour fédérale du Canada, Apotex c. Canada (ministre de la

Santé)216 a élargi l’interprétation du Règlement de liaison. Il a en effet été statué dans cette affaire que « les brevets qui n’étaient pas déposés dans les délais prescrits à l’égard de la PDN pouvaient néanmoins être ajoutés au registre, pourvu qu’ils respectent l’exigence relative au délai d’un SPDN déposé subséquemment »217. Cette interprétation a nécessairement eu pour conséquence d’élargir considérablement les circonstances dans

214 Supra note 185, art. 4(3).

215 REIR, supra note 187 à la p. 1613.

216 [1999] A.C.F. 458, confirmé [2001] A.C.F. 143. 217 REIR, supra note 187 à la p. 1614.

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lesquelles des nouvelles listes de brevets pouvaient être déposées par les compagnies novatrices. Les amendements de 2006 ont donc corrigé cette dernière interprétation. Les amendements de 2006 ont également apporté des précisions importantes quant aux conditions d’enregistrement d’une liste de brevets prévues au règlement. Ainsi, afin de limiter les pratiques d’evergreening de certaines compagnies novatrices qui profitaient de leur SPDN pour déposer une nouvelle liste de brevets, le gouvernement a apporté des conditions d’enregistrement plus restrictives et limitées quant à la possibilité de soumettre une liste de brevets lors du dépôt d’un SPDN218. Ces restrictions évitent, notamment, qu’une nouvelle liste de brevets soit déposée avec un SPDN qui ne vise, par exemple, qu’un changement de couleur du médicament.

Compte tenu que l’objectif des amendements de 2006 apportés au Règlement de liaison était de corriger sa mauvaise rédaction ayant mené à des difficultés d’interprétation, nous ne pouvons considérer ces amendements comme équivalant à l’imposition de limites aux droits de l’industrie novatrice. Jusqu’en 2006, cette dernière a, en fait, bénéficié d’une interprétation judiciaire large qui n’aurait jamais été possible si le libellé du Règlement de

liaison avait été, dès 1993, bien rédigé219. Néanmoins, afin de conférer une image

218 Supra note 185, nouvel art. 4(3). Ces restrictions confirment essentiellement les décisions judiciaires qui

avaient notamment rejeté l’enregistrement de telles listes lors de SPDNs destinés à des modifications autres que celles relatives au composé médicinal du produit. Voir REIR, supra note 187 aux pp. 1611 et s.

219 À cet égard, le REIR, à la p. 1611, fait clairement état de l’objectif sous-jacent à ces amendements :

Le Gouvernement a constaté qu’un certain nombre de décisions judiciaires récentes portant sur l’interprétation du Règlement de liaison ont donné lieu à la nécessité d’apporter des précisions quant aux exigences relatives à l’inscription des brevets décrites ci-dessus. Ces décisions, qui concernent les exigences relatives au délai et à la

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d’équilibre à sa politique, le gouvernement a tout de même, en « échange » des modifications au Règlement de liaison, conféré des droits additionnels à l’industrie novatrice en prolongeant de cinq à huit ans la période de protection des données prévue au RAD220.