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Chapitre 4 : Élaboration de barrières thermiques sol-gel multicouches

1. Dimensionnement de systèmes de BT fonctionnalisées

1.3 Dimensionnement d’architectures de BT capteurs sol-gel

1.3.2 Agencement des couches dopées

L’approche la plus simple pour la conception d’une BT capteur arc-en-ciel con-tenant l’un des triplets d’activateurs X-Er-Y décrit au paragraphe précédent (X= Tm, Dy, Y= Eu, Sm) consiste à répartir les couches fonctionnalisées à la surface (couche

supé-rieure), à mi-épaisseur (couche intermédiaire), et au contact de l’interface céra-mique/métal (couche inférieure). L’agencement des activateurs dans ce type de

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ture peut être optimisé en fonction des propriétés optiques des matériaux et des sources d’excitation disponibles, dans le cas présent une lampe UV à vapeur de mercure et un laser Nd:YAG doublé en fréquence (532 nm, cf. Chapitre 2).

i. Transmission des BT sol-gel dans le domaine UV-visible

La Figure 4.4 (a) ci-dessous présente les spectres de transmission mesurés sur des écailles de BT sol-gel et EB-PVD dans le domaine visible 400-650 nm. Tout comme les BT standards (cf. Figure 4.1 p. 151), les BT sol-gel transmettent peu aux courtes longueurs d’ondes (transmission <10% en dessous de 460 nm, et <1% à 400 nm), tandis que la transmission dans le domaine 500-650 nm est largement supérieure à 20 %, avec un maxi-mum à environ 70% à 610 nm. Malgré son épaisseur plus importante (200 μm contre 150 μm), la transmission de la BT EB-PVD est plus élevée dans le domaine visible (jusqu’à + 14 % à 600 nm) du fait des différences de microstructure entre les deux systèmes. En effet, les BT sol-gel présentent une porosité équiaxe très importante [195] diffusant davantage les photons que la structure colonnaire des BT EB-PVD.

Figure 4.4: Spectres de transmission mesurés sur des écailles de BT EB-PVD et sol-gel pour une distance lentille de collection/échantillon (a) minimale (au contact), (b) d’environ 5 mm.

La diffusion des photons par la microstructure des deux types de revêtement rend également les résultats des mesures de transmission très dépendants des conditions expéri-mentales, i.e. de la distance entre la lentille de collection du détecteur et l’échantillon. Ceci est illustré sur la Figure 4.4 (b) où l’on constate qu’un éloignement supplémentaire d’environ 5 mm de la tête de collection a pour effet de diviser par deux la valeur de la transmission dans le domaine 500-650 nm. Ces spectres renseignent néanmoins qualitative-ment sur les domaines spectraux favorisant la transmission d’un signal d’excitation ou d’émission de fluorescence. Ainsi, la transmission au travers d’une épaisseur de

zir-cone YSZ du signal émis par la source laser à 532 nm et des émissions de fluo-rescence dans la plage 540-620 nm des activateurs Er3+, Eu3+, Sm3+ et Dy3+ est

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bien favorisée par rapport aux émissions de la lampe UV (350-405 nm) et des activateurs Tm3+ et Dy3+ (440-500 nm).

ii. Spectres d’excitation des luminophores YSZ:Ln3+

La Figure 4.5 montre les spectres d’excitation correspondant aux pics d’émissions principaux des activateurs mesurés sur des pastilles de poudre d’aérogel frittée. Chaque spectre présente un pic d’excitation large entre 200 et 250 nm ainsi qu’une série de pics étroits dans les domaines UVA-visible. Le premier correspond à l’énergie nécessaire au transfert d’un électron du ligand oxygène vers l’ion lanthanide (transfert de charge Ln3+ -O2, charge transfer state ou CTS). Les autres pics correspondent aux transferts d’électrons des orbitales 4f vers certains états excités de la structure électronique de l’ion activateur concerné (transitions 4fn - 4f’n). La connaissance de ces derniers est utilisée en particulier pour la sélection de sources d’excitation spécifiquement adaptées à chaque activateur (laser ou LED par exemple).

Tous les activateurs étudiés présentent des pics d’excitation dans le domaine 350-405 nm couvert par les émissions de la lampe UV à vapeur de mercure, dont la profondeur de pénétration dans la zircone est néanmoins limitée (%T < 1%, cf. Figure 4.3). Il s’agit cependant de l’unique plage d’excitation (en dehors de celle correspondant au CTS) des

émissions de fluorescence dans le domaine 450-500 nm des activateurs Tm3+ (453 et 461

nm) et Dy3+ (458, 484 et 498 nm). Cet état de fait limite l’utilisation de ces deux activa-teurs à la fonctionnalisation de la couche supérieure de la BT afin de garantir une excitation suffisante avec le dispositif expérimental disponible.

Les activateurs Er3+ et Eu3+ (Figure 4.5 (c) et (e)) possèdent tous deux un pic d’excitation relativement large à 524 et 535 nm respectivement, pour lesquels la longueur d’onde du laser Nd:YAG doublée en fréquence (532 nm), relativement bien transmise par la matrice YSZ (cf. Figure 4.4), est particulièrement bien adaptée. L’europium et

l’erbium sont donc mieux adaptés à la fonctionnalisation de la couche intermé-diaire et inférieure du revêtement. Le samarium possède également un pic d’excitation

à 535 nm (Figure 4.5 (a)). Cependant, compte tenu de sa très faible intensité et de l’efficacité quantique peu élevée du luminophore YSZ:Sm3+ en comparaison de YSZ:Er3+ et YSZ:Eu3+ (cf. Figure 4.3), il reste préférable de limiter son utilisation à la couche en sur-face de manière à pouvoir utiliser la source d’excitation UV. Enfin, il est intéressant de no-ter que l’emploi d’une source Nd:YAG triplée en fréquence (355 nm), classiquement utilisée en thermographie par fluorescence, se révèle assez peu adapté à l’excitation de ces trois ac-tivateurs, qui ne possèdent pas de pics d’excitation véritablement appropriés à cette lon-gueur d’onde.

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Figure 4.5 : Spectres d’excitation mesurés sur des pastilles de poudre d’aérogel frittée de (a) YSZ:Sm3+ (1.63 mol%), (b) YSZ:Dy3+ (1.5 mol%), (c) YSZ:Er3+ (1.47 mol%), (d) YSZ:Tm3+ (1.5 mol%), (e) YSZ:Eu3+ (2 mol%) ; et (f) sur une BT sol-gel de YSZ:Eu3+

(2 mol%) de 130 μm d’épaisseur.

La longueur d’onde d’émission à laquelle a été mesuré chaque spectre est indiquée dans la lé-gende de chaque figure, et les annotations sur les spectres indiquent les transitions

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Il est important de noter que les spectres des Figure 4.5 (a) à (e), mesurés sur des pastilles de 2.5 mm d’épaisseur, ne renseignent pas en revanche sur l’efficacité relative des différents pics d’excitation. En effet, le volume de matériau sondé varie avec la longueur d’onde, et est plus important au-delà 500 nm (cf. Figure 4.4). Ainsi, l’intensité relative du pic d’excitation à 535 nm de la zircone YSZ:Eu3+ vis à vis du pic correspondant aux transi-tions vers le CTS est fortement réduite lorsque la mesure est réalisée sur un revêtement de 130 μm d’épaisseur (Figure 4.5 (f)). L’efficacité moindre de ce pic d’excitation, et des pics d’excitation dans le visible en général, est néanmoins compensée, pour des couches situées sous une épaisseur de zircone, par une meilleure transmission de la longueur d’onde d’excitation [13,15,27] et le moindre coût à puissance transmise équivalente des sources vi-sibles (lasers et LED) par rapport aux sources UV [15,27].

iii. Agencement optimal des couches fonctionnalisées

L’agencement permettant de maximiser à la fois le signal d’excitation reçu et le si-gnal émis qu’il est possible de collecter consiste à positionner préférentiellement les couches dopées Sm3+, Dy3+ et Tm3+ en surface et les couches dopées Eu3+ et Er3+ dans l’épaisseur. Dans le cas d’une BT arc-en-ciel X-Er-Y (X= Tm, Dy, Y= Eu, Sm), la nécessité de posi-tionner l’activateur émettant dans le bleu retenu (Dy3+ ou Tm3+) dans la couche supérieure en surface privilégie donc le choix des ions Eu3+ par rapport aux ions Sm3+ en tant qu’activateurs émettant dans le rouge (cf. paragraphe 1.3.2.ii précédent).

Les ions Dy3+ et Tm3+ constituent donc les deux choix possibles à

privilé-gier pour la fonctionnalisation de la couche supérieure. Le dysprosium présente

l’avantage d’avoir des pics d’émissions à 584 et 598 légèrement mieux transmis par la ma-trice et plus intenses que les pics à 453 et 461 nm du Tm3+ (cf. Figure 4.3 et Figure 4.4). En revanche, le thulium serait plus intéressant dans la couche supérieure si sa plage de sen-sibilité à la température potentielle entre 1000 et 1200°C, estimée d’après ses performances reportées dans la matrice YAG [22,123], était confirmée.

En ce qui concerne les couches plus enfouies de la BT, plusieurs éléments justifient

le choix du dopage de la couche intermédiaire par les ions Er3+ et de la couche à

l’interface céramique/métal par les ions Eu3+, bien que les luminophores YSZ:Er3+ et YSZ:Eu3+ émettent avec une intensité équivalente (cf. Figure 4.3). La transmission de la zircone YSZ aux longueurs d’onde d’émission de l’europium (589 et 606 nm) est plus élevée qu’à celles des émissions de l’erbium (544 et 562 nm, cf. Figure 4.4). D’autre part, la sensi-bilité à la température de l’europium reportée dans la littérature est également plus élevée que celle de l’erbium sur la plage 500-1100°C [94], ce qui assurerait une plus grande préci-sion des mesures de la température à l’interface céramique/métal, facteur clé dans les pro-cessus d’endommagement du revêtement. Enfin, il est préférable de positionner la couche dopée Er3+ au-dessus de la couche dopée Eu3+ afin d’éviter l’absorption éventuelle d’une partie du signal émis par les ions Er3+ en direction de la surface par les ions Eu3+.

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L’europium Eu3+ possède en effet un pic d’excitation large à 535 nm recouvrant partielle-ment le pic d’émission des ions Er3+ à 544 nm (Figure 4.5 (e)).