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procédé NanoAp-EtOH

3. Matériels et méthodes

5.2. Adhésion et prolifération cellulaires

Des modifications de l’adhésion et la prolifération des cellules ont cependant été observées sur les échantillons en présence du revêtement. Liu et al. expriment un principe selon lequel la compatibilité cellule-matériau peut être évaluée par le temps nécessaire à l’adhésion, l’étalement et la prolifération des cellules sur l’échantillon : plus le temps requis est long, moins le matériau est compatible (Liu et al. 2007a). En ce basant sur ce principe, il semblerait donc que les matériaux revêtus présentent une compatibilité plus faible que les céramiques de BCP.

Comme nous l’avons mentionné dans la partie introductive, beaucoup de paramètres peuvent être reliés à l’adhésion et la prolifération des cellules sur des biomatériaux : la composition chimique, l’énergie de surface, la rugosité, les micro- et nano-topographie, la taille des cristallites, le pourcentage de porosité, notamment, sont susceptibles d’induire des modifications de la réponse cellulaire à l’égard d’un biomatériau. Dans notre étude, tous ces paramètres sont modifiés en présence du revêtement et plusieurs hypothèses peuvent être formulées pour expliquer les différences observées.

La présence de micro-environnements particuliers à l’intérieur des pores des céramiques pourrait fournir une première explication. En effet, dans notre étude, les cellules sont ensemencées directement à l’intérieur des pores des matériaux et sont cultivées dans des conditions statiques. Le renouvellement du milieu est par conséquent assez limité et les conditions locales de culture (à l’intérieur des pores) peuvent s’avérer très différentes en présence ou absence du revêtement. Quelques auteurs ont suggéré que les concentrations ioniques en calcium et phosphate pouvaient être modifiées à l’intérieur des pores de céramiques phosphocalciques (Duan et al. 2004, Habibovic et al. 2005). Or, les ions calcium et phosphate sont connus pour avoir une action sur la prolifération, la différenciation ostéoblastique et la mortalité cellulaires. Dans une gamme donnée, l’addition de calcium dans le milieu s’accompagne d’une augmentation de la prolifération et de la différenciation ostéoblastique (Yamaguchi et al. 1998, Chang et al. 2000). Par contre, une diminution de la

concentration en calcium dans le milieu tout comme un excès d’ions calcium et phosphate peuvent limiter la prolifération cellulaire et même s’avérer toxique pour les cellules aussi bien

in vitro qu’in vivo (Midy et al. 2001, Le Nihouannen et al 2007, Yuan et al. 2001a.). De par

leur nature, il est possible que les nanocristaux de notre revêtement puissent se dissoudre plus facilement dans le milieu de culture ou induire des échanges ioniques importants, modifiant ainsi de manière significative la composition ionique locale du milieu de culture et ayant un effet délétère sur l’adhésion et la prolifération cellulaires.

De même, les pH locaux pourraient être différents entre les deux types de matériaux. Nous avons, en effet, constaté que les nanocristaux présentaient à leur surface un pH plutôt acide après immersion dans le milieu de culture. Une pré-incubation des échantillons dans du milieu avant l’ensemencement des cellules a été effectuée afin d’équilibrer la surface des échantillons. Toutefois, et bien que nous n’ayons pas distingué de différence globale de pH dans le milieu de culture, il est possible que lors des premiers temps d’incubation, celui-ci soit différent à l’intérieur des pores des céramiques témoins ou revêtues.

D’autre part, un des principaux enjeux de l’ingénierie tissulaire concerne l’apport en nutriments et oxygène nécessaires à la survie, prolifération et différenciation ostéoblastique des cellules progénitrices cultivées au sein d’un matériau. Dans notre cas, la forte réactivité de surface des céramiques revêtues peut s’accompagner d’une adsorption importante des protéines sériques, nécessaires à la survie et à la prolifération cellulaires et donc contribuer à un appauvrissement du milieu de culture, notamment lors de la phase d’ensemencement au cours de laquelle le volume de milieu ajouté est faible.

De telles modifications du milieu de culture pourraient donc être responsables d’une cytotoxicité apparente des matériaux.

Une autre hypothèse concerne l’adsorption de protéines impliquées dans l’adhésion cellulaire à la surface des céramiques. Dans leurs études, la majorité des auteurs attribuent, en effet, les différences d’adhésions, de prolifération et même de différenciation observées entre plusieurs types d’échantillons à des modifications de l’adsorption de certaines protéines du sérum dont la fibronectine ou la vibronectine. Les différents facteurs cités précédemment (topographie, énergie de surface, composition…) sont, en effet, susceptibles d’influencer l’adsorption de protéines par les matériaux. Dans notre étude, nous avons mis en évidence que la présence du revêtement augmentait de manière significative l’adsorption de BSA ou de BMP-2 ; nous n’avons cependant pas étudié l’adsorption de protéines contenues dans le milieu de culture sur

protéines du sérum soit favorisée en présence du revêtement ; une adsorption sélective différente entre les deux types de matériaux ne peut cependant pas être exclue. Quelques études ont montré que la composition chimique ainsi que la taille des cristallites pouvaient en effet conduire une adsorption préférentielle de certaines protéines du sérum au détriment d’autres, et modifier ainsi la réponse cellulaire obtenue (Webster et al. 2000b, Zhu et al. 2007). D’autre part, il peut être suggéré que, bien que présentes en plus grandes quantités, les protéines d’adhésion s’associent plus difficilement aux intégrines sur les granulés revêtus en raison de leur pénétration dans les pores de dimension nanométrique ou de modifications conformationnelles, consécutives à leur adsorption, limitant leur interaction avec les récepteurs (Garcia et al. 1999).

D’autres auteurs ont montré toutefois que l’adsorption de protéines telles que la fibronectine à la surface des échantillons ne semblait pas être l’élément discriminant des différences d’adhésion observées entre différents échantillons. Dos Santos et al. n’ont pas trouvé de corrélation directe entre l’adsorption de fibronectine sur des échantillons d’HA ou β-TCP, revêtus ou non d’un film d’or, et l’adhésion ou l’étalement de cellules d’ostéosarcomes humains (dos Santos et al. 2008). De même, dans leur étude sur des échantillons de titane présentant différentes échelles de nanoporosités, Lim et al. suggèrent que l’adsorption de protéines influencerait peu l’adhésion cellulaire pour des surfaces de même composition chimique et qu’un effet direct de la topographie de surface sur les cellules jouerait un rôle plus important (Lim et al. 2007). Une influence de la topographie de surface sur les réponses cellulaires (adhésion, prolifération et différenciation) est maintenant clairement admise et ce paramètre, différent pour nos échantillons témoins et revêtus, pourrait par conséquent intervenir dans les différences d’adhésion et de prolifération cellulaires observées.