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Adapter la formation et en revoir le pilotage

3. Propositions

3.4. Adapter la formation et en revoir le pilotage

La formation délivrée à l’entrée dans le corps assure l’articulation entre la politique de recrutement dans le corps et les parcours professionnels initiaux des IPEF. Les orientations retenues pour les parcours professionnels et pour les recrutements définissent ainsi des éléments de cahier des charges de la formation si on veut maintenir une cohérence d’ensemble.

La formation des IPEF a fait l’objet de diverses missions et de rapports récents. Il ne s’agit pas ici de reprendre ces travaux mais, seulement, de préciser quelles sont les conséquences à tirer, sur la formation des IPEF et sur le pilotage du dispositif de formation, d’une mise en œuvre par les ministères des recommandations du présent rapport.

Les recommandations relatives au niveau de recrutement ne conduisent pas à une réduction de la diversité des recrutements. Celle-ci demeurera, sauf modification profonde du recrutement des polytechniciens reportant leur entrée sous statut d’ingénieur élève à la fin de leur quatrième année de formation polytechnicienne. Et avec elle, la difficulté liée à la dualité des enjeux :

• pour une partie du recrutement seulement (les X et les normaliens), transformer des scientifiques en ingénieurs ;

• pour la totalité du recrutement, préparer des ingénieurs à exercer des responsabilités dans la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques.

Les recommandations du rapport maintiennent aussi l’hétérogénéité des débuts de carrière :

• formation doctorale dans un laboratoire de recherche accompagnée d’une inscription en thèse pour une part significative des concours externes ;

• prise d’un poste opérationnel dans un opérateur, une collectivité territoriale ou éventuellement un service de l’État pour la majorité des concours externes et pour les concours internes.

Enfin, de manière unanime, s’impose le constat de l’ampleur du spectre des disciplines scientifiques et des domaines techniques pertinents pour les nombreuses maisons d’emploi au sein desquelles les IPEF pourront mener leurs parcours professionnels. Il est impossible de concevoir un parcours de formation d’ingénieur couvrant la totalité de ces savoirs scientifiques et techniques. La pluralité des formations techniques offertes est la seule réponse possible à l’exigence de délivrer une formation d’ingénieur à ceux qui n’ont pas engagé ou achevé la leur au moment où ils sont recrutés.

La volonté d’utiliser la période de formation des ingénieurs-élèves et des ingénieurs de travaux reçus au concours interne pour fonder l’unité et l’identité du corps, ne peut pas ignorer les implications de cette triple hétérogénéité.

3.4.1. Les formations techniques

Les compléments de formations initiales devant être suivis par les X et les normaliens ne peuvent déjà pas faire l’objet de formations spécifiques faute d’effectifs suffisants.

La réduction des recrutements externes confirmerait, si nécessaire, l’absurdité économique et l’impossibilité pédagogique d’une telle idée. Les IEPEF X et normaliens doivent donc s’inscrire dans des formations techniques existantes, en France ou à l’étranger, dans lesquelles ils sont minoritaires et qui ont été conçues pour répondre aux besoins d’un ensemble d’employeurs potentiels privés et publics.

Les ministères de rattachement ne sauraient donc revendiquer à eux seuls la définition du cahier des charges de ces formations. Ils ont en revanche à vérifier la cohérence et à valider la pertinence des parcours de formations proposés par les ingénieurs-élèves.

Les deux ministères sont à juste titre attentifs au maintien d’un flux adapté de nouveaux entrants dans des filières professionnelles ayant des identités techniques affirmées (souvent ce sont celles qui avaient autrefois des corps spécialisés dédiés : météorologie, aviation civile, systèmes d’information géographique, foresterie) mais aussi des spécialités cruciales comme l’économie agricole par exemple pour lesquelles il peut y avoir un écart entre les vœux spontanés des élèves et les besoins des ministères.

La solution à ces questions se trouve sans doute dans le processus de recrutement, en amont du processus de formation, et des solutions de « marketing » de ces thématiques doivent être trouvées avec les écoles et les maisons d’emplois concernées.

10. En impliquant les écoles et les employeurs concernés très en amont, identifier les cinq ou six filières professionnelles spécialisées (par exemple : météorologie, information géographique, aviation civile, forêt) ou méritant un effort particulier (économie agricole) nécessitant de susciter particulièrement des vocations. Mettre en place, de façon spécifique à ces filières, des produits de communication à l’égard des candidats, puis des élèves (conférences, amphis, visites, stages) susceptibles d’éveiller ces vocations. Promouvoir quelques formations techniques françaises ou internationales particulièrement adaptées.

3.4.2. L’expérience professionnelle préalable à la prise de poste (ex-stage long)

La délivrance d’un diplôme d’ingénieur ne suffit pas à transformer un étudiant en ingénieur. L’exercice du métier d’ingénieur mobilise des connaissances acquises en formation initiale et une expérience qui ne peut être acquise que par la pratique. Le présent rapport recommande de fonder l’employabilité durable de chaque IPEF sur un fil rouge lui permettant d’entretenir et développer une expertise technique particulière.

Avant d’être un cadre supérieur ou un manager, l’ingénieur est un cadre. L’entrée dans le corps des IPEF signifie l’accès immédiat à un statut de cadre supérieur voire à une position de manager. Les contextes organisationnels et sociaux des employeurs

potentiels des jeunes IPEF ne sont plus aussi ouverts à leur reconnaître, en premier poste, une légitimité de cadre supérieur et de manager, sans expérience professionnelle préalable.

Pour toutes ces raisons, il convient que chaque IPEF, avant sa prise de fonction, bénéficie d’une expérience professionnelle d’ingénieur d’une année, confortant et complétant sa formation académique. Les raisons qui avaient conduit le corps des ponts et chaussées à faire effectuer cette expérience professionnelle (dénommée alors

« stage long ») en entreprise, et si possible à l’étranger, demeurent.

Cette année de stage ne concerne que les concours externes, les concours internes ayant exercé plusieurs années un métier d’ingénieur. L’inclusion de cette expérience impose de revenir à une prise de poste 3 ans après le recrutement pour les X et normaliens et 2 ans après pour les autres lauréats des concours externes, sauf si cette expérience a déjà été acquise dans leur cursus antérieur de formation d’ingénieur ou n’est pas cohérente avec le projet individuel (notamment recherche). Cette modification de calendrier ne correspond pas nécessairement à une prolongation de la période passée sous statut d’ingénieur-élève.

Ces durées peuvent être ramenées à 2 ans et demi et 1 an et demi si on peut combiner cette expérience avec la mission et la thèse professionnelle du mastère spécialisé dédié à la formation des IPEF, le MS PAPDD.

11. Inclure, dans les cursus de formation des IPEF concours externes qui n’en ont pas encore bénéficié, le principe d’une expérience professionnelle d’ingénieur, si possible en entreprise et à l’étranger, préalable à la prise du premier poste.

3.4.3. La formation aux enjeux et méthodes de l’action publique

Cette partie de la formation est actuellement délivrée conjointement par AgroParisTech-ENGREF et par l’ENPC dans le cadre du mastère spécialisé

« politiques et actions publiques pour le développement durable » (MS-PAPDD). Cette formation bénéficie d’une meilleure appréciation des étudiants qui y sont inscrits grâce aux efforts consentis par les deux établissements. Pour la rendre plus attractive il convient que les deux Écoles poursuivent leurs efforts de coordination pour offrir une organisation des lieux de délivrance de cette formation minimisant les déplacements pour les élèves.

Elle n’accueille pas que les IPEF mais aussi les ingénieurs des services techniques de la Ville de Paris et des officiers supérieurs des armées. Il convient d’étudier le moyen d’y accueillir plus largement d’autres fonctionnaires (fonctionnaires territoriaux ou fonctionnaires étrangers) afin d’augmenter la dimension formation par l’échange entre pairs de ce programme, et de le soumettre à une obligation d’amélioration continue pour conserver la satisfaction de clients non-captifs.

L’orientation, proposée par le rapport, vers des parcours professionnels s’effectuant, dès le début de la carrière des IPEF, dans un périmètre large multi-employeur et l’ouverture proposée ci-avant plaident pour une association, par les deux établissements concernés, d’un ensemble de représentants de ces employeurs, commanditaires réels ou potentiels de la formation, à son suivi, son évaluation et son évolution à travers le conseil de perfectionnement de la formation.

Les partenariats avec quelques grandes collectivités territoriales proposés au point suivant pourraient utilement se traduire par leur association à cette formation notamment via l’offre d’études de terrain ou de missions professionnelles.

Une autre modalité d’ouverture de la formation, par une conception modulaire permettant à des fonctionnaires en poste d’en suivre certains éléments au titre de leur formation continue mériterait d’être étudiée par les deux établissements.

12. Consolider la formation existante à l’action publique en l’ouvrant plus largement à d’autres participants et associer d’autres commanditaires à son conseil de perfectionnement et en intégrant certains de ses modules dans une offre de formation continue.

3.4.4. La formation doctorale

Les ingénieurs-élèves doivent continuer à être invités à s’engager dans une formation doctorale. Cet encouragement suppose que les candidats y accèdent le plus rapidement possible après avoir terminé leur formation d’ingénieur et continuent donc à bénéficier donc d’aménagements par rapport au schéma présenté ci-avant : formation d’ingénieur – expérience professionnelle d’ingénieur – formation à l’action publique.

On doit en effet considérer que le travail de recherche mené pour l’obtention du doctorat constituera une première expérience professionnelle préalable à l’accès à une position de cadre supérieur ou manager au cas où l’IPEF-docteur ne poursuit pas une carrière de chercheur et prend un poste en service, opérateur ou collectivité après l’obtention de sa thèse.

Pour ces mêmes IPEF, l’acquisition d’une partie des connaissances acquises par leurs collègues dans le cadre du MS PAPDD relève plus d’actions de formation continue en accompagnement de la prise de poste que du suivi intégral à temps plein d’un mastère. Une modularisation du mastère permettant son ouverture partielle à ce public, ainsi qu’à d’autres fonctionnaires en prise de postes, notamment des fonctionnaires territoriaux mériterait d’être étudiée par les deux écoles.

13. Continuer à faire bénéficier les IEPEF qui souhaitent s’engager dans une formation doctorale de dérogations au schéma de formation de référence. Celles-ci ne doivent pas aller jusqu’à exonérer les X ou les normaliens d’une formation technique en ingénierie.

3.4.5. Le pilotage de la formation

L’article 6 du décret n° 2009-1106 du 10 septembre 2009 portant statut particulier du corps des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts stipule que « Les ingénieurs-élèves reçoivent un enseignement qui est organisé conjointement dans le cadre de l’Institut des sciences et technologies de Paris par l’École nationale des ponts et chaussées et par l’École nationale du génie rural, des eaux et des forêts de l’Institut des sciences et industries du vivant et de l’environnement. »

L’arrêté du 27 novembre 2009 relatif à la formation des ingénieurs-élèves des ponts, des eaux et des forêts et au stage de perfectionnement organisé pour les lauréats du concours interne à caractère professionnel en vue de l’accès au grade d’ingénieur des ponts, des eaux et des forêts précise que : « La formation des ingénieurs-élèves des ponts, des eaux et des forêts est organisée dans le cadre de l’Institut des sciences et

technologies de Paris (ParisTech) conjointement par l’École nationale des ponts et chaussées et par l’École nationale du génie rural, des eaux et des forêts de l’Institut des sciences et industries du vivant et de l’environnement (AgroParisTech).

Les deux écoles définissent, dans le cadre d’une convention de coopération, les objectifs et les missions partagées ainsi que les moyens mis en commun pour organiser cette formation. Cette convention précise le rôle, en particulier concernant l’affectation administrative et la gestion des ingénieurs élèves, qu’elles souhaitent confier à l’Institut des sciences et technologies de Paris (ParisTech) au titre de cette coopération dans le respect des dispositions spécifiques aux projets communs prévus à l’article 3, 5° de l’annexe au décret du 21 mars 2007 susvisé. »

Or, l’Institut des sciences et technologies de Paris (ParisTech), constitué sous la forme d’un établissement public de coopération scientifique par décret en date du 21 mars 2007 semble voué à disparaître à brève échéance. Il conviendra donc de modifier le décret n° 2009-1106 du 10 septembre 2009 et l’arrêté du 27 novembre 2009 pour y supprimer toute mention relative à l’Institut des sciences et technologies de Paris (ParisTech).

Les ministères devraient exprimer, en tant qu’employeur principal prenant aussi en charge les intérêts des autres employeurs publics potentiels, leurs attentes en termes de compétences et d’expérience attendues à l’issue de la période de formation des ingénieurs-élèves et du stage de perfectionnement des lauréats du concours interne à caractère professionnel ainsi que les limites posées par les contraintes statutaires, sans s’immiscer dans l’organisation pédagogique de la formation.

Les écoles devraient délivrer les éléments de formation à leur charge et apporter aux ministères l’expertise académique requise pour évaluer les formations techniques alternatives à leurs formations d’ingénieur et les projets de formation doctorale, sans assurer la responsabilité d’employeur des ingénieurs-élèves.

Les attributions de l’employeur et du commanditaire de la formation sont :

• piloter et gérer les opérations administratives concernant le recrutement des ingénieurs élèves et les lauréats du concours interne ;

• assurer un conseil individuel aux candidats ;

• piloter le processus de validation des parcours individuels de formation ;

• formaliser les conditions préalables à la titularisation ;

• assurer le secrétariat du comité d'orientation et de validation (COV) pour ce qui relève de la formation des IPEF,

• piloter l’évaluation externe de la formation des IPEF.

Il conviendrait, dans les tâches dévolues au collège de formation des IPEF, de séparer ces missions de ce qui relève des prérogatives des écoles AgroParisTech et École des PontsParisTech :

• Préparer la convention de coopération entre les écoles pour la formation des IPEF ;

• Coordonner l'accompagnement personnalisé des élèves inscrits dans les deux écoles,

• Organiser l’évaluation interne de la formation.

14. Séparer l’exercice, par les ministères, de leurs responsabilités d’employeur et de commanditaire de la formation, et celui, par les écoles, de leurs responsabilités de prestataire de formation.

Si les recommandations ci-dessus étaient retenues, il y aurait lieu de modifier le décret n° 2009-1106 du 10 septembre 2009 et l’arrêté du 27 novembre 2009 pour y décliner les conséquences de l’ensemble des préconisations relatives à la formation et à son pilotage :

• durée de la formation,

• clarification des rôles entre l’employeur – commanditaire et les écoles prestataires – conseils,

• adaptation du vocabulaire (le décret ne parle que « d’enseignement » et de

« scolarité »).

3.5. Assurer des parcours multi-employeurs et de spécialités