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Les actions exercées dans un intérêt exclusivement individuel

Délégué du personnel (ci-après, « DP ») et délégué syndical (ci-après, « DS »), deux institutions complémentaires qui agissent dans un intérêt exclusivement individuel. Porte-parole des réclamations des salariés qui l’ont élu pour le premier (§ 1), relais des revendications du syndicat qui l’a désigné pour le second (§ 2), il s’agira de savoir si ces deux instances concourent ensemble à l’exercice d’un contre-pouvoir au pouvoir de direction.

§1. Le Délégué du Personnel, un porte parole puissant des salariés ?

L’institution des délégués du personnel est historiquement la plus ancienne. Instituée après les accords de Matignon des 7 et 8 juin 1836, elle est non pas un organe collégiale mais un « groupement de fait »281 obligatoire dans les entreprises de plus de 10 personnes dans le but de présenter à la direction les réclamations individuelles non satisfaites portant notamment sur l’hygiène et à la sécurité.

Par la suite, les lois du 16 avril 1946282 et du 28 octobre 1982 relative au développement des instances représentatives du personnel283 et du 20 décembre 1993 relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle et offrant à l’employeur un nouveau genre de délégation unique dans les entreprises de moins de 200 salariés284 ont confirmé son rôle de médiateur. D’ailleurs, dans ses conclusions relatives à l’arrêt du Conseil d’Etat du 1er juin 1979, M.-D Hagelsteen précisait la nature de cette médiation. Elle est une « médiation directe entre le personnel syndiqué ou non et les représentants de l’employeur »285. Ces délégués du personnel

281

CATALA (N.), L’entreprise, Dalloz, 1980, spéc. n° 543

282 n° 46-730, D. 1946, p.188 283 n° 82-915, D. 1982, p. 456 284 n° 93-1313, D. 1994, p. 11 285 Dr. Soc. 1979, p. 369

font donc le lien entre le personnel et l’employeur.

Qu’en-est-il de ces derniers lorsque, sur un même sujet, des conflits ou frictions viennent bouleverser la relation employeur/salariés ? A quel point, l’opinion du délégué est-elle considérée par l’employeur de sorte que sa mission de médiation soit un réel pouvoir permettant l’expression des intérêts tous les salariés ?

Dans un contexte aussi difficile que celui imposé par les risques psychosociaux, tout devrait être mis en œuvre pour favoriser l’établissement de cette instance dans l’entreprise.

Se faisant, notre analyse juridique devra porter sur le caractère contraignant ou non de ses fonctions de représentation (A), de contrôle (B), et de collaboration (C) même si la seule lecture de la formule « Attributions »286, dans le chapitre III du Code du travail dédié à l’activité de ces délégués, est déjà un indice capital sur la qualification juridique de ses prérogatives.

A) La fonction de représentation des salariés

Parce qu’élus par les salariés, les délégués du personnel sont leurs porte-paroles auprès du chef d’entreprise. Ainsi, le recours à un système d’élection renforce et légitime leur représentation auprès de l’employeur. Est-ce à dire que cette représentation contraint ce dernier au point que ces délégués en deviennent un véritable contre-pouvoir ?

Pour en savoir davantage, nous porterons notre réflexion à la fois sur leur faculté à présenter des réclamations auprès de l’employeur (1) et sur leur droit à assister le salarié lorsque celui-ci est susceptible d’être sanctionné ou licencié (2) ; deux pendants permettant d’assurer, en principe, l’effectivité de leur représentation.

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1. Droit de présenter des réclamations

Selon l’article L. 2313-1 du Code du travail, les délégués du personnel ont pour première mission « de présenter aux employeurs toutes les réclamations individuelles ou collectives relatives notamment aux salaires, à l’application du Code du travail et autres dispositions légales concernant la protection sociale, la santé et la sécurité ainsi que des conventions et accords applicables dans l’entreprise ».

Encore faut-il savoir ce que signifie le terme « réclamations » ? Plus encore, réclamer est-ce exiger à un point tel, que l’employeur est contraint d’assouvir les volontés des délégués du personnel ?

D’après la définition donnée par le dictionnaire Le Robert, réclamer est synonyme du verbe « revendiquer »287. Plus loin, cette encyclopédie explique que ces deux notions « se rejoignent autour de l’idée de demander instamment quelque chose ». Selon ses termes, on réclame ce que l’on considère comme justifié et on revendique ce à quoi on peut effectivement prétendre mais, en tout état de cause, revendiquer exprime plus fortement une demande que réclamer. En revanche, les juges réfutent cette idée et opèrent une véritable distinction en définissant expressément une revendication et par différence une réclamation. Réclamer n’est pas revendiquer, affirment-ils. De plus, il semble que l’idée de réclamer renvoie à « l’action de demander la reconnaissance d’un droit »288, collant ainsi, au sens donné par la loi qui elle se réfère à « l’application des dispositions du Code du travail et autres dispositions légales ou conventionnelles existantes ». Ainsi, s’il avait été question de revendication, la loi aurait trait à l’amélioration des règles en vigueur. Or, cette action ne relève que du domaine de compétence des délégués syndicaux, les délégués du personnel étant exclus. Ainsi, leur activité consiste à appliquer strictement le droit et travailler sur la loi elle-même.

Toujours d’après le même article, les réclamations interviennent dans divers domaines

287

Le Robert, dictionnaire des synonymes et nuances, nouvelle édition enrichie, collection Les Usuels, p. 982

288

notamment ceux de la santé et de la sécurité. Nécessairement en rapport avec les conditions de travail de chaque salarié,289 ces délégués sont, par voie de conséquence, compétents en matière de risques psychosociaux.

Dès lors, s’offrent à eux deux possibilités d’action : soit ils agissent de leur propre chef lorsqu’il s’agit de traiter plus généralement des réclamations collectives et plus particulièrement des questions en matière d’hygiène et de sécurité des travailleurs et en cas de danger imminent ; soit ils requièrent l’accord expresse du salarié lorsqu’il s’agit de traiter des réclamations individuelles.

Toutefois, ils peuvent être écartés de toute réclamation. En effet, la présence des DP dans l’entreprise ne fait pas disparaitre le droit des salariés à présenter eux-mêmes les réclamations à l’employeur ou à ses représentants290. Dans cette configuration, les DP sont évincés de toutes réclamations, ne disposant plus d’aucun monopole. Ainsi, leur intervention reposant sur le seul bon vouloir du salarié, elle n’est plus que nécessaire mais pas indispensable. Indiscutablement, c’est à une place secondaire voire accessoire que ces délégués sont réduits affaiblissant considérablement leur position dans l’entreprise. Partant de ce postulat, il semble que « réclamer » c’est effectivement « demander instamment quelque chose » sans pour autant contraindre l’employeur à l’assouvir.

Il s’en déduit que ce droit à présenter des réclamations ne peut être qualifié de réel pouvoir permettant ainsi à l’employeur de continuer à exercer son pouvoir de direction. Toutefois, ce pouvoir de direction n’est pas sans limite. En effet, la loi l’encadre en exposant l’employeur au délit d’entrave si celui-ci était amené à obliger ses salariés à présenter eux-mêmes leurs réclamations et, par ce biais, écarter délibérément les délégués du personnel291 ou à instituer des circuits parallèles de règlement des difficultés des salariés292.

On aurait plutôt tendance à croire qu’au moyen du délit d’entrave, le pouvoir de direction

289

Cass. Crim., 9 Avril 1975, n° 74-91.981

290

C. trav. Art. L. 2313-10 ; Cass. Soc. 1er Juillet 1985 : Juri-social 1985, F83 ; V. circulaire DRT n° 5 du 28 Juin 1984 confirmant que les réclamations des salariés peuvent toujours être directement présentées par un salarié à son employeur

291

Cass. Crim., 3 Juillet 1968, n° 67-93.637, Bull. crim, n°216 ; Gaz. Pal. 1968, 2, 232 et Cass. Crim. 10 Mars 1970, n° 69-90632 et Cass. crim. 20 Mars 1984, Bull. crim, n° 118

292

de l’employeur s’atténue au profit d’une plus grande protection du droit à présenter des réclamations conféré aux DP. Pour autant, certains auteurs ne sont pas du même avis. En effet, Pascal Lockiec considère que garantir un respect et une protection de ce droit conduit vraisemblablement à reconnaitre un pouvoir patronal au travers du contrôle dont il fait l’objet. En outre, le Professeur Savatier voit dans l’obligation de répondre de façon écrite et motivée, pour l’employeur aux demandes faites par les DP, « une application de l’exercice unilatéral de son pouvoir de direction » spécifiant qu’il pourra y répondre « sans avoir à rechercher d’accord avec eux »293.

En se rapportant à la signification du terme « réclamation » et à ce qu’affirment ces auteurs, il semble évident que les DP ne puissent être en mesure de présenter librement des réclamations, raison pour laquelle nous qualifierons cette prérogative de droit-fonction et non de véritable pouvoir entravant ainsi une représentation efficace des salariés.

Si le droit de présenter des réclamations auprès de l’employeur est limité, cela signifie-t-il nécessairement que le droit d’assister les salariés l’est aussi ?

2. Droit d’assister les salariés

L’assistance que prête le délégué au salarié est une aide294. Mais, on peut s’interroger quant à la valeur contraignante de cette aide à savoir si, elle est imposable au salarié, et de facto, à l’employeur ?

La Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 11 février 2003 s’est penchée sur la question et a jugé qu’il n’y avait aucune raison valable à ce qu’un délégué du personnel exige d’assister à un entretien demandé par le salarié à son employeur295. D’ailleurs, cette jurisprudence fait écho à la loi laquelle réserve l’application de ce droit uniquement dans

293

SAVATIER (J.), « Les attributions des DP », Dr. Soc. 1993, p. 746

294

Le Robert, Dictionnaire des synonymes et nuances, nouvelle édition enrichie, collection Les Usuels, p. 84

295

deux situations : en cas d’un entretien préalable à un projet de licenciement ou de sanction. Cela signifie qu’en dehors de ces faits, ce représentant du personnel ne saurait spontanément exercer son assistance destinée à voir et à entendre tout ce qu’il se passe et se dit au cours de l’entretien.

D’après les différentes approches, légale et jurisprudentielle, la réponse est évidente à la question posée initialement : le recours à un assistanat salarial n’étant donc pas automatique, le délégué ne saurait contraindre ni imposer sa présence directe au salarié, et de facto à l’employeur296. Ainsi, à ce droit d’assistance ne peut lui être reconnue la qualification de pouvoir. Il est un droit-fonction.

Toutefois, l’idée selon laquelle il est un droit-fonction reste à nuancer au regard notamment de la protection relative dont il fait l’objet : il s’agit du délit d’entrave.

En effet, lorsque cette assistance entre dans les cas prévus légalement, il est interdit pour l’employeur de refuser d’entendre ou de laisser parler le délégué sous peine de commettre une entrave au bon fonctionnement de la procédure d’entretien. Mais, qu’en est-il, alors, lorsque le salarié le réclame au cours de l’entretien ? A l’inverse, dans le même arrêt du 11 février 2003297, la Chambre criminelle précisait sans équivoque que l’employeur avait parfaitement le droit de refuser la présence du délégué du personnel au cours de l’entretien « dès lors que le salarié a présenté lui-même sa demande d’entretien à l’employeur ». Ainsi, en considérant que le délégué n’avait pas pris l’engagement de saisir l’employeur, la Cour de cassation a justifié sa décision de dire que le délit d’entrave n’était pas établi. Par cette décision, le juge montre le caractère limitatif de ce droit d’assistance affaiblissant ainsi la fonction de représentation de cette catégorie de représentants du personnel.

Cette prise de position est critiquable. En effet, son choix de limiter cette fonction parait étonnant même surprenant étant entendu que le juge tranche habituellement dans le sens favorable des salariés surtout lorsque, à l’initiale, la fonction de représentation fut spécialement

296

Cass. Crim 11 Février 2003, Dr. Soc. 2003, 635 ; Cass. Soc. 11 Février 2003, n° 01-88014, Bull. Crim, n° 32, Dr. Soc. 2003, p. 631, note DUQUESNE (F.), « Les contours de la mission d’assistance du DP », Dr. Soc. 2003, p. 631, préc.

297

conçue pour favoriser l’intérêt des salariés. Or, en l’espèce, il délibère dans le sens contraire. Si, à l’évidence, le sort de la fonction de représentation est de ne pas pouvoir contraindre l’employeur à se soumettre aux volontés des délégués du personnel, reste encore à savoir s’il en est de même pour la fonction de contrôle.

B) La fonction de contrôle

Le contrôle se réalise à travers l’exercice de plusieurs droits mis à la disposition des délégués du personnel. Si, après analyse, ces droits se révèlent de véritables pouvoirs alors la fonction de contrôle sera l’expression absolue de leur « domination » sur l’employeur298.

En revanche, s’ils apparaissent comme de simples « droits-fonctions », alors le contrôle sera ineffectif et le placeront sous l’emprise patronale.

Pour se faire, il s’agira d’étudier les droits suivants : - celui d’être informé (1);

- celui d’être consulté (2); - celui de saisir l’employeur (3);

- et, celui de saisir l’inspecteur du travail (4).

1. Droit d’être informé

Pour mener à bien leur mission en tant que représentants du personnel, ces délégués doivent savoir à quelle réalité font face les salariés dans une entreprise. C’est la raison pour laquelle doivent leur être transmises toutes sortes d’informations relatives, notamment, aux

298

Le Robert, Dictionnaire des synonymes et nuances, nouvelle édition enrichie, Coll. Les Usuels, p. 242, sens 4

conditions dans lesquelles ils travaillent.

L’effectivité de ces informations s’exprime au travers de moyens matériels. D’abord, elles trouvent appuie dans des supports papiers tels que les exemplaires des textes conventionnels applicables dans l’établissement, les contrats conclus entre employeur et entreprises de travail temporaire, les documents attestant de l’hygiène et de la sécurité via des contrôles et des vérifications effectués dans les locaux et sur le matériel. Accessibles en permanence, cette documentation facilite considérablement l’information. Ensuite, être informé consiste, pour ces délégués, à pouvoir se déplacer librement dans et hors de l’entreprise, selon l’article L. 2315-5 du Code du travail. Cette grande liberté leur est accordée pour leur permettre de prendre contact directement avec les salariés à leur poste. Toutefois, l’article atténue cette liberté en y apportant une réserve. En effet, elle est soumise à une obligation : celle de « ne pas gêner les salariés dans l’accomplissement de leur tâche »299, et ainsi, de « ne pas perturber l’exécution du travail »300. De plus, pour garantir jusqu’au bout une bonne information, ils ont la possibilité de se réunir au moyen d’un local mis à leur disposition par l’employeur301. Ce local doit être « adapté » à l’exercice de leur mission, obligation faite à l’employeur excepté lorsqu’il se trouve confronté à un cas de force majeur rendant impossible la mise à disposition d’un tel local302.

Enfin, assurer une bonne information signifie avoir le droit d’afficher les renseignements dont ils ont été les destinataires ou de distribuer des tracts303. Ainsi, ils font savoir au personnel des situations ou évènements en cause dans l’entreprise304. Comme la liberté de circulation dans

299

C. trav. Art. L. 2315-5 : « Pour l’exercice de leurs fonctions, les DP peuvent durant les heures de délégation se déplacer hors de l’entreprise. Ils peuvent égalent tant dans les heures de délégations qu’en dehors de leurs heures habituelles de travail, circuler librement dans l’entreprise et y prendre tous contacts nécessaires à l’accomplissement de leur mission, notamment auprès d’un salarié à son poste de travail, sous réserve de ne pas apporter de gêne important à l’accomplissement du travail des salariés »

300

Cass. Soc. 3 Juillet 1963 : Dr. Soc. 1964, 44, obs. SAVATIER (J.)

301

C. trav. Art. L. 2315-6 : « l’employeur met à la disposition des DP le local nécessaire pour leur permettre d’accomplir leur mission et notamment de se réunir »

302

Cass. Crim. 25 Septembre 2007: JCP C 2007, 1944, note KERBOUCH’ (J-Y) ; RJS 12/07, n° 1304. - Adde, Cass. Crim. 26 Mai 2009 : RJS 10/09, n° 809

303

Cass. Soc. 2 Février 1972 : Bull. V, n° 87, p. 82

304

C. trav. Art. L. 2315-7 : « les DP peuvent faire afficher les renseignements qu’ils ont pour rôle de porter à la connaissance du personnel sur des emplacements obligatoirement prévus et destinés aux communications syndicales, ainsi qu’aux portes d’entrée des lieux de travail »

l’entreprise, le libre affichage et la libre distribution des tracts sont assortis d’un tempérament : ne pas porter de troubles dans l’entreprise et ne pas perturber l’exécution du travail305.

De toute évidence, ces moyens matériels permettent de préserver une information efficace dans une atmosphère de travail relativement libre. De ce fait, nous pourrions considérer qu’à ce droit d’être informé, doit lui être reconnue la qualification juridique de « pouvoir ». Il lui serait parfaitement possible et encore plus, lorsqu’au moyen du délit d’entrave, l’employeur s’expose à être sanctionné. En effet, il est de jurisprudence constante de constater que l’employeur se rend coupable d’entraves à l’exercice des fonctions de représentants du personnel dans les cas suivants : en refusant l’autorisation de pénétrer dans les locaux de travail pour vérifier la régularité des mesures de sécurité306 ; ou en empêchant les délégués à occuper le local qui leur était habituellement affecté pour tenir des réunions organisées par la direction ; ou encore, en leur refusant l’affichage de communications307.

Certes, à cette catégorie de représentants leur est offert une liberté non négligeable sans pour autant être contraignante pour l’employeur. Quand bien même, ce dernier s’exposerait à un délit d’entrave dans l’hypothèse où il entraverait cette liberté, la jurisprudence demeure silencieuse quant à la question suivante : l’employeur se rendrait-il coupable d’un délit d’entrave s’il venait à outrepasser une décision prise par les délégués du personnel ?

Logiquement, la contrainte s’exprimerait à travers les décisions prises à l’issue d’une réunion organisée entre employeur et délégués. Selon l’article L. 2315-8 du Code du travail, le chef d’entreprise est dans l’obligation de recevoir mensuellement les délégués du personnel ou sur leur demande en cas d’urgence, aucune dérogation à ce principe n’étant possible308.

305

Cass. Soc. 2 Février 1972 : Bull. V, n° 87, p. 82, préc.

306

Cass. Crim. 4 Novembre 1981 : D. 1982, inf. rap. 119 ; Cass. Crim. 17 Novembre 1966 : D. 1967, 201 : « se rend coupable d’entraves, le directeur d’une usine qui a plusieurs reprises a contraint à l’improviste les DP à déguerpir du local qui leur était habituellement affecté pour tenir des réunions organisées par la direction »

307

Cass. Crim. 8 Mai 1968 : Bull. Crim. n° 145, p. 353

308

Cass. Crim. 25 Septembre 2007 : JCP S 2007, 1944, note KERBOUCH’ (J.-Y); RJS 12/07, n° 1304 : « L’Art. L. 2315-8 n’instituant aucune dérogation au principe de la réception mensuelle exigée par ce texte lorsque l’entreprise ne comporte qu’un seul DP, l’inobservation de cette obligation ne peut être justifiée, hors le cas de force majeure, que si elle a pour cause le refus ou la défection du délégué lui même »

D’ailleurs, le manquement à cette obligation caractérise à la charge du chef d’établissement le délit d’entrave « sauf si elle trouve son origine dans un cas de force majeure ou dans le refus ou la défection des délégués eux-mêmes »309. Si le juge s’est prononcé sur l’obligation de réception, il est resté muet sur la tenue des réunions. En effet, rien n’a encore été affirmé quant à la prise des décisions qui ont lieu au cours de ces réunions. Ce silence jurisprudentiel nous amène à penser que les représentants rendent des avis310 mais ne prennent aucune décision, l’employeur exerçant ainsi son pouvoir de direction au sein même de ces réunions. En ce sens, les décisions sont prises verticalement et, c’est à l’employeur que revient le dernier mot. La contrainte naît de la décision patronale. Quoiqu’il en soit, ces informations sont nécessaires pour leur permettre de donner un avis en connaissance de cause (2).

2. Droit d’être consulté

Aux termes de l’article L. 1226-10 du Code du travail, lorsque le salarié est déclaré inapte suite à d’un accident du travail ou une maladie professionnelle, l’employeur doit lui proposer un autre emploi approprié c’est-à-dire adapté à ses capacités, « après avis des délégués du personnel ». Est-ce à considérer que, lorsqu’un salarié faisant l’objet d’un état de stress sérieux, de harcèlement moral, de violence, voire de suicide, l’entremise des DP est indispensable ? D’après l’esprit de la loi, il nous faut répondre par l’affirmative. Dès lors, des mesures devant être prises pour reclasser au mieux un salarié victime de son travail, la consultation des délégués du personnel devient obligatoire311.