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Chapitre 3 Distribution de l’autorité

4. Les actes usuels de l’autorité parentale

« …dans les actes usuels ça va être par exemple l’inscription au centre de loisirs, à la colonie, la coupe de cheveux… c’est là que l’on peut préciser ce qu’est la parentalité de la famille d’accueil ou de l’établissement, et c’est le lieu où peuvent se prendre les décisions en lieu et place de l’autorité parentale… »

« Les actes usuels de l’autorité parentale »57 sont les actes de la vie quotidienne qui n’engagent pas l’avenir de l’enfant, mais étroitement liés à sa vie. Ces actes touchent l’exercice de l’autorité parentale. Lorsque l’enfant est confié à l’ASE, le partage des actes usuels se décide avec les parents et les professionnels. « Cela a notamment pour conséquence l’aménagement de l’exercice de l’autorité parentale des parents, qui ne peuvent plus exercer certains attributs de l’autorité parentale inconciliables avec la mesure de placement ».58

En application de l’article 373-4 du code civil, ces dispositions légales permettent ainsi au service où l’enfant est confié, considéré comme tiers, de prendre les mesures nécessaires à la vie quotidienne de l’enfant sans l’approbation spécifique des parents. Certaines demandes systématiques, peuvent s’avérer difficiles ou néfastes avec des parents. Aussi, pour certaines demandes des assistants familiaux, le service peut décider seul, sans concertation des parents si cela est nécessaire. Ce fonctionnement n’est pas sans soulever des tensions : associer les parents comme le prévoit la loi, tout en les écartant de certaines demandes... « Le service gardien peut donc, comme un couple parental, considérer qu’il bénéficie d’une présomption légale

55 Code civil art 372-2 56 Art. 373-7 du code civil 57 Art. 375-2 du code civil 58 Idem rapport DGCS, p. 7

d’autorisation des actes usuels, qui ne pourraient être remis en cause que par une manifestation d’opposition des titulaires de l’autorité parentale. Ainsi, dans le référentiel des enfants confiés d’un service de l’ASE, il est mentionné que la règle concernant les actes usuels vaut à la fois dispense de preuve de l’accord des parents ou de l’autre parent et d’échange de responsabilités au profit du tiers de bonne foi ».59

Cela nous conduit à penser que les actes graves nécessitent l’accord des deux parents détenteurs de l’autorité parentale, mais les actes usuels du quotidien peuvent en être dispensés...

Le code civil ne définit pas les critères permettant d’identifier les actes usuels. Dans un arrêté, la chambre des mineurs de la cour d’appel d’Aix en Provence a précisé « …les actes qui ne donnent pas lieu à une appréciation de principe essentielle et ne présentent aucun risque grave apparent pour l’enfant, ou encore, même s’ils revêtent un caractère important, des actes s’inscrivant dans une pratique antérieure non contestée … ».60

Le partage des actes usuels peut être de façon partielle ou totale. Les parents peuvent adhérer, y concourir pleinement, ou affirmer leur opposition. Ils peuvent aussi la refuser ou s’abstenir et se retirer de la vie de leur enfant.

Si les parents remettent en cause régulièrement le partage des actes usuels, le chef de service de l’ASE aura à travailler avec eux leur positionnement vis-à-vis de l’accueil de l’enfant. Sur ce sujet, « l’intérêt de l’enfant, ses droits, la prise en compte de ses différents besoins, doivent guider toutes décisions le concernant »61.Seul le juge peut prendre la décision d’une mise à

distance effective des parents si ceux-ci entravent le placement.

Les actes « usuels du quotidien » sont accessibles aux personnes assurant une fonction parentale : beau-parent, grand-parent, éducateur, j’ajouterai l’assistant familial.

Les différentes lectures sur ce sujet montrent que chaque situation est à apprécier au cas par cas. Des ajustements sont donc permanents, suivant les circonstances ou les moments de la vie des parents, comme de l’enfant.

Les actes usuels de l’autorité parentale sont annexés au projet de l’enfant, ou inscrits dans le contrat d’accueil,62 document signé par les parents.

Enfin, l’ensemble des actes usuels se réalise dans le respect des droits de visite et d’hébergement, et dans le respect des informations données au sein des différents services internes de l’aide sociale à l’enfance ou externes à ceux-ci.

Sans chercher à dresser une liste exhaustive des actes usuels et non usuels, à partir d’un tableau, je reprends les actes qui ont été principalement évoqués lors des entretiens :

59 ONED, « Famille, parenté, parentalité et protection de l’enfance : quelle parentalité partagée en protection de

l’enfance » intervention de JM. PERMINGEAT (magistrat), in Dossier thématique, 2013, p.58 60 ONED, Idem, p. 54

61 Art. 112-4 du CASF

62 Ce travail de contractualisation écrit permet de sortir des enjeux « de possession de l’enfant » pour être dans une coéducation et reconnaître la pluralité des figures parentales autour de l’enfant, et son inscription au sein du système familial pluriel composé de : l’assistant familial, de la famille biologique, du référent de l’enfant et autres professionnels de l’équipe.

Actes usuels

Signature du lien d’accueil Assistant familial ou établissement

Actes non usuels

Signature des détenteurs de l’autorité parentale  Scolarité : inscription administrative

 Carnet de correspondance : suppression d’un cours, heure de retenue…

 Inscription à la cantine  Transport scolaire

 Activités sportives et culturelles, avec hébergement et centre de vacances  Vêture habillement

 Coiffure pour coupe entretien  Nuit chez un copain

 Nuitée sur le territoire national avec

l’assistant familial  Suivi médical

 Conduite d’un deux-roues motorisé si le jeune le possédait déjà avant le placement

 Carnet de correspondance (état civil et contacts)

 Photos scolaires

 Sorties scolaires avec hébergement  Orientation scolaire ou professionnelle

 Coiffure pour autre coupe, couleur, mèches,  Sortie du territoire, à défaut c’est le juge pour

enfants

 Suivi médical pour traitement, psychologue, psychiatre ;

 Hospitalisation, intervention chirurgicale et anesthésie

 Piercing, tatouages

 Conduite d’un deux-roues motorisé si le jeune possédait déjà avant le placement, avec autorisation de l’inspecteur.

Ainsi, le cadre législatif est posé lors d’une mesure d’assistance éducative… Il s’agit de procurer à l’enfant un environnement éducatif favorable à son développement, de soutenir les parents dans leur fonction parentale, tout en identifiant les éléments de danger justifiant la séparation. L’autorité parentale est entièrement dévolue aux parents et exercée par eux, puisque la loi ne prévoit pas de partage, et leur préserve une place centrale, mais sous contrôle de l’autorité du juge. Celui-ci peut imposer aux parents des procédures d’aménagement, ou limiter l’exercice de l’autorité parentale en fonction de la situation. En revanche, si les actes usuels ou « actes du quotidien » sont dispensés par les assistants familiaux, les parents sont sollicités pour obtenir leur accord et sont informés de la situationde leur enfant.Ceci signifie que les assistants familiaux dans le quotidien ont une responsabilité auprès de l’enfant, reposant sur la gestion du quotidien, la gestion des actes usuels, sans détenir l’autorité parentale.

Aussi, quelle autorité est accordée aux assistants familiaux pour remplir une fonction éducative auprès de l’enfant, si l’autorité est le fait de l’exclusivité des parents ?