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œuvrer frontalement dans cette sphère interne »675 Clôturant fort probablement non

définitivement - le débat, le Traité de Lisbonne a réitéré ce critère transfrontière du litige, sans toutefois en donner une définition.

b. Essais de définition du litige transfrontière

143. L’article 61 du Traité d’Amsterdam a donné compétence à la Communauté en

droit de la procédure civile pour adopter des instruments qui, conformément à l’article 65, doivent avoir une « incidence transfrontière ». Cette condition a été reprise à l’article 81-1 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Dès lors, la question de l’appréciation de cette incidence se pose676. En effet, concernant le règlement Bruxelles I, même si la difficulté n’a pas été immédiate, les critères du litige ont soulevé des difficultés, aussi bien au niveau interne, qu’international677. Si ses règles ont réalisé l’intégration par le critère de domiciliation du défendeur dans un État membre, elles ont eu des incidences externes678. De même, le règlement Bruxelles II bis a délimité l’espace en fonction des règles de compétence. Or celles-ci sont diverses et permettent de saisir des situations dont le rapport avec l’espace judiciaire européen est faible. Dès lors, en édictant des procédures européennes, l’incidence du critère transfrontière se pose avec acuité. Effectivement, de ce critère dépend le type de droit de la procédure civile voulu par l’Union européenne.

144. Ayant saisi la difficulté liée au litige transfrontière, le législateur européen le définit

dans les règlements instituant une procédure civile européenne comme « un litige dans lequel au moins une des partie a son domicile ou sa résidence habituelle dans un État membre autre que l’État membre de la juridiction saisie », dont le caractère est apprécié au moment de l’introduction de la demande679. Cette définition s’articule donc autour de la localisation des parties et de la temporalité de la demande.

Si par cette définition, des précisions sont données, il n’en reste pas moins qu’aucune définition générale n’existe en droit de la procédure civile de l’Union européenne entrainant

      

675

C.NOURISSAT, « La codification de l’espace judiciaire civil européen », », in La justice civile européenne en marche, op.

cit., p.180. 676

Sur la distinction du litige transfrontalier, intracommunautaire, international et transnational, C. NOURISSAT, « L’aide judiciaire et l’accès à la justice dans les procédures civiles transfrontalières de l’Union européenne », in Le visage inconnu de

l’espace judiciaire européen, op. cit., p. 33, spéc. n°78 à 85. 677

E. PATAUT, « Qu’est ce qu’un litige « intracommunautaire » ? Réflexions autour de l’article 4 du Règlement Bruxelles I », in

Justice et droits fondamentaux. Études offertes à Jacques NORMAND, op. cit., p. 365 ; H. GAUDEMET-TALLON, « Les frontières extérieures de l’espace judiciaire européen : quelques repéres », in E Pluribus Unum: Liber Amicorum Georges A.L.DROZ. Sur l’unification du droit international privé, op. cit. p. 85.

678

La reconnaissance et l’exécution des décisions concernent les décisions des États membres. Cette délimitation réalise l’intégration du litige dans l’Union européenne

679

Art. 2 (principe) et 3 (définition) règlements instituant une procédure européenne d’injonction de payer et instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges. Dans la directive relative à l’aide judiciaire, le litige transfrontalier est « tout litige dans lequel la partie qui présente une demande d’aide judiciaire au titre de la présente directive a son domicile ou sa résidence habituelle dans un État membre autre que l’État du for ou que l’État dans lequel la décision doit être exécutée » (art.2). La directive médiation définit ce litige comme « tout litige dans lequel une des parties au moins est domiciliée ou a sa résidence habituelle dans un État membre autre que l’État membre de tout autre partie »(art.2).

 

 

« d’importantes difficultés d’applications » des instruments procéduraux européens680. Ce qui peut être affirmé est qu’en droit de la procédure civile de l’Union européenne, une « double internationalité existe »681. Le droit de la procédure civile de l’Union européenne concerne les litiges dont le rapport juridique met en cause au moins deux États, qui peuvent indifféremment être deux États membres, ou un État membre et un État tiers. Dès lors, la double internationalité évoquée renvoie d’une part à un litige interne à l’Union européenne et d’autre part à un litige entre un État tiers et l’Union européenne. À la règle d’applicabilité doit obligatoirement être associé un critère d’internationalité du litige. La problématique se situe alors dans la détermination de ce critère qui est variable, amenant une délimitation de l’espace procédural européen propre à chaque règlement.

De surcroît, même si les procédures européennes ont donné une définition, celle-ci n’est pas exempte de critiques682. La première est d’ordre temporel. Rien n’exclut une internationalisation du litige postérieurement à la demande683. Dès lors, des manipulations procédurales peuvent être encouragées. Cette première remarque accentue la seconde critique. Alors que les procédures européennes sont axées sur une volonté de recouvrer rapidement les créances, il est fait fi du patrimoine du débiteur dans le déclenchement des dites procédures684. Or, si deux parties sont domiciliées sur le territoire de la juridiction saisie, aucune corrélation sur la présence du patrimoine dans l’État de la juridiction saisie ne peut être avancée685. La notion du litige transfrontière complexifie donc l’application du droit et est source d’inégalité. Elle s’oppose tant à l’accessibilité du droit due aux justiciables, qu’aux objectifs défendus par l’Union européenne.

De ces remarques et envisagé par rapport aux rapports d’autorité européens générés par le droit de la procédure civile de l’Union européenne, un critère pourrait être suggéré s’articulant autour de l’objectif initial du droit de la procédure civile de l’Union européenne de libre circulation des décisions. Ce critère pourrait reposer sur le lieu envisagé de

      

680

Proposition de règlement instituant une procédure européenne pour les demandes de faible importance, COM(2005) 87 final, 15 mars 2005, pt. 2.2.1, disponible sur www.europa.eu.

681 J.-S. B

ERGÉ, « La double internationalité interne et externe du droit communautaire et le droit international privé », Trav.

com. fr. DIP 2004-2006, p.29. 682

V. entres autres : E. GUINCHARD, « L’Europe, la procédure civile et le créancier : l’injonction de payer européenne et la procédure européenne de règlement des petits litiges », art. préc., n°5 ; E. JEULAND,« Les développements procéduraux récents de l’espace judiciaire européen : la naissance d’un ordre processuel interétatique », art. préc., p.62 ; M. LOPEZ DE

TAJADA, La disparition de l’exequatur dans l’espace judiciaire européen, op. cit., p.191, n°225 et p.202, n°249 ; S. AMRANI- MEKKI, « Règlement (CE) n°1896/2006 du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer », in

Droit processuel civil de l’Union européenne, op. cit., p.253, n°687. M. LOPEZ DE TEJADA et L. D'AVOUT, « Les non-dits de la procédure européenne d'injonction de payer », Rev. crit. DIP 2007, p.717, spéc. p.739.

683

E. GUINCHARD, « L’Europe, la procédure civile et le créancier : l’injonction de payer européenne et la procédure européenne de règlement des petits litiges », art. préc., n°5.

684

M. LOPEZ DE TEJADA et L. D'AVOUT, « Les non-dits de la procédure européenne d'injonction de payer », art. préc., p.739.

685

Ainsi, un autre aspect transfrontalier peut se révéler au moment de l’exécution, par exemple par l’existence de biens dans un autre État membre. Des discriminations à rebours sont donc à craindre, confirmant toute la difficulté tant théorique que pratique de ce critère. De ce point de vue, l’obligation d’une incidence transfrontière ne semble pas devoir faire obstacle à l’élaboration d’une procédure civile européenne applicable en interne. Dans cette optique, G. PAYAN avance une définition du litige transfrontière propre aux procédures d’exécution forcée reposant « sur le lieu de la mise en œuvre des mesures d’exécution ou des mesures "préparatoires" », Droit européen de l’exécution en matière civile et commerciale, op. cit. p.598, n°334

 

 

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