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4.2 Les travaux du comité international et du comité intergouvernemental de

4.2.2 Examen de l’élaboration des principes liés au modèle retenu

4.2.2.3 Évolution du texte sur l’autonomie

Lors de sa première réunion le groupe de rédaction avait déjà inscrit l’autonomie dans les principes généraux apparaissant dans l’ébauche291. La première consultation des états membres confirma qu’il était important d’inscrire un tel principe dans la déclaration. Mais, étonnamment, il n’apparaît pas comme telle dans la première ébauche du texte.

Lors de sa troisième réunion, le Groupe de rédaction examina des principes qui pourraient être inclus dans la déclaration dont celui d’autonomie et l’inclura dans sa deuxième ébauche du texte dans la section Implication des principes généraux [fondamentaux]292.

Durant la onzième session du CIB, monsieur Avraham Steinberg, Directeur du Centre médical d’éthique de l’Université juive – École médicale de Hadassah (Jérusalem, Israël),

« a présenté des commentaires sur la deuxième ébauche de texte d’après la perspective judaïque. De manière générale, la religion juive privilégiant l’approche casuistique, M. Steinberg a souhaité que la déclaration ne limite pas à un énoncé de grands principes absolus mais tienne compte de leur valeur relative, qui découle du contexte

290 Rapport de la quatrième session du Comité intergouvernemental de bioéthique (CIGB), Paris, 24-25 janvier 2005, Réf. SHS/EST/CIGB-4/05/CONF.202/3, paragraphe 18.

291 Rapport de la Première réunion du Groupe de rédaction du CIB pour l’élaboration d’une déclaration relative à des normes universelles en matière de bioéthique, Paris, 20 avril 2004, Ref. SHS/EST/04/CIB-Gred-1/1.

292 Rapport de la troisième réunion du Groupe de rédaction, du CIB pour l’élaboration d’une déclaration relative à des normes universelles en matière de bioéthique, Paris, 8-9 juillet 2004, Ref. SHS/EST/04/CIB-Gred-3/2.

multiculturel dans lequel la déclaration s’inscrit. Ainsi, la déclaration devrait prévoir un mécanisme permettant de trouver un équilibre quand des principes apparemment opposés sont en jeu. Par ailleurs, M. Steinberg a estimé que si la future déclaration devait affirmer la suprématie de la vie humaine et le principe d’autonomie, elle devait également reconnaître les limites de l’autonomie qui, selon la tradition juive, sont basées sur le respect envers les autres êtres humains ainsi que sur la solidarité et les devoirs partagés293 ».

Le compte-rendu de cette onzième session du CIB rapporte qu’« Une des questions ayant suscité la discussion a été l’équilibre à trouver entre le principe d’autonomie, par lequel seul l’individu est apte à prendre une décision le concernant directement, et la place accordée à la famille et à la solidarité entre les êtres humains par certaines traditions religieuses et culturelles. Ainsi la future déclaration devrait-elle refléter davantage cette dichotomie294 ».

Durant la quatrième réunion du Groupe de rédaction qui suivit cette réunion, il fut décidé ce qui suit :

« Dans le cadre de la discussion sur le principe d’autonomie, il est ressorti des débats que cet article vise à traduire l’équilibre à trouver entre l’autonomie et la responsabilité de l’individu envers les autres. Cette disposition reflète donc le droit et la liberté de chaque personne de prendre des décisions individuelles tout en respectant l’autonomie des autres. Dans la note explicative, un paragraphe devrait être consacré aux différents degrés d’importance attachée à l’autonomie individuelle suivant les cultures en raison de la place accordée à la famille et à la communauté295 ».

L’article 10 de la troisième ébauche mise au point durant cette quatrième réunion reflète cette discussion et se lit comme suit : « Autonomie et responsabilité : Toute décision ou pratique relevant de la présente Déclaration doit respecter

293 Comité international de bioéthique de l’UNESCO, Actes de la onzième session, Paris, 23-24 août 2004, page 9, [En ligne] : http://unesdoc.unesco.org/images/0013/001395/139549f.pdf, (Page consultée le 15 mars 2010).

294 Ibid., pages 9-10. 295 Ibid., page 76.

l’autonomie de la personne comme étant l’expression de sa liberté de prendre des décisions sans porter atteinte à l’autonomie d’autrui296 ».

La deuxième consultation des états membres (octobre-décembre 2004) reflète la complexité de la rédaction de ces principes. Ainsi les États-Unis dans leurs commentaires souligne que :

“In upholding bioethical principles, there is often a need to counterbalance competing ethical norms. As such, the language of the declaration must maintain the strength of the commitment to fundamental principles while concurrently acknowledging that in practice these principles require reflection and a balancing of the relevant ethical demands. For example, the primacy of the human person is an important and fundamental concern, deriving from basic human rights and respect for human life, dignity and autonomy. However, there are also times when the protection of the public health and safety might need to take precedence over the rights of individuals. Societal decisions such as these must be made with great care and deliberation; in fact, they are the subject of extensive debate in literature on public health ethics and human rights. If the declaration is to have validity and credibility among the diverse Member States, the drafters will have to achieve a greater complexity and nuance in articulating the basic principles, each of which are, in practice, complicated by their interrelationship with other important moral concerns297”.

Certaines remarques formulées par les États membres sont le reflet de la complexité de concilier les points de vue de différentes régions du globe. La note explicative sur la déclaration voudra expliciter le point de vue du groupe de rédaction en démontrant qu’autonomie est étroitement relié à responsabilité et ne signifie pas totale liberté. La note explique que :

« Le respect de l’autonomie personnelle est étroitement lié à la notion de dignité humaine dont, selon certaines interprétations, il découlerait.

296 Ibid.Rapport de la quatrième réunion du Groupe de rédaction du CIB pour l’élaboration d’une déclaration relative à des normes universelles en matière de bioéthique, page 22.

297 Résultats de la consultation écrite sur la troisième ébauche de texte d’une déclaration relative à des normes universelles en matière de bioéthique, Paris, 25 janvier 2005, Réf. SHS-2005/WS/15, [En ligne] : http://portal.unesco.org/shs/fr/files/7190/11062331771Consultation_fr.pdf/Consultation_ fr.pdf, (Page consultée le 10 mars 2010).

Il procède directement du droit international des droits de l’homme qui a pouvoir contraignant. Les individus ne sauraient être instrumentalisés ni traités comme de simples moyens à des fins scientifiques ; on doit leur permettre de prendre, pour tout ce qui concerne leur vie, des décisions autonomes dans la mesure où elles ne nuisent pas à autrui.

Le respect de l’autonomie ne se caractérise pas seulement par une attitude respectueuse, il exige aussi des actes respectueux. Toutefois, dans cette interprétation, l’autonomie n’est pas simplement un droit attribué, elle comporte aussi une dimension de responsabilité envers autrui.

L’article 9 exprime le droit qu’a toute personne de prendre des décisions individuelles tout en respectant dans le même temps l’autonomie d’autrui. Certains experts souhaitaient encore insister davantage sur la responsabilité en ajoutant dans l’article 9 une référence au devoir d’assumer cette responsabilité. Mais cette formulation a paru trop énergique et risquait de susciter une interprétation erronée de l’autonomie qui n’est pas synonyme de ‘liberté’. L’autonomie renvoie à la notion d’actes conformes à des principes volontairement acceptés, mais elle ne dispense pas l’individu d’assumer la responsabilité de ses actes298 ».

Lors de sa sixième réunion, après examen des résultats de la consultation, le Groupe de rédaction a rédigé l’article 11 sur Autonomie et responsabilité individuelle comme suit : « Toute décision ou pratique doit respecter l’autonomie des personnes pour ce qui est de prendre des décisions et d’en assumer la responsabilité tout en respectant l’autonomie d’autrui299 ».

La réunion du CIGB des 24 et 25 janvier 2005 a demandé que le principe d’autonomie soit approfondi mais le Groupe de rédaction ne l’a pas modifié dans son avant-projet finalisé le 28 janvier 2005 (voir le texte de cet avant-projet à l’Annexe 2).

298 Note explicative sur l’élaboration de l’avant-projet d’une déclaration relative à des normes universelles en matière de bioéthique, Paris, 21 février 2005, Réf. SHS/EST/05/CONF.203/4, paragraphe 60-61, [En ligne] : http://unesdoc.unesco.org/images/0013/001390/139024f.pdf, (Page consultée le 15 mars 2010).

299 Élaboration de la déclaration relative à des normes universelles en matière de bioéthique : quatrième ébauche du texte, Paris, 15 décembre 2004. Ref.SHS/EST/04/CIB-Gred-2/4 Rev. 3, [En ligne] : http://portal.unesco.org/shs/fr/files/7052/11048563131PublicOutline4_fr.pdf/PublicOutline4_fr.pdf, (Page consultée le 10 mars 2010).