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1.2 Modification des propriétés du substrat

1.2.2 Évolution des propriétés mécaniques

La formation d’un nouveau composé en surface du matériau et l’évolution de la concentration des éléments dans le substrat induits par l’oxydation conduisent à une modification des propriétés mécaniques du matériau oxydé [37]. D’une part, l’oxyde en surface subit des contraintes mécaniques lors de sa formation et induit, en l’ab- sence de sollicitations extérieures, des contraintes à la surface de l’alliage. D’autre part, le changement de composition chimique locale de l’alliage modifie son com- portement mécanique face aux sollicitations extérieures. Les différents mécanismes à l’origine des contraintes lors de l’oxydation sont détaillés par Birks et al. [12] ; les contraintes induites par la différence de volume entre l’oxyde et le métal duquel est formé l’oxyde, et celles induites par les changements de compositions dans l’alliage sont plus particulièrement décrites ci-dessous.

Lors de l’oxydation d’un alliage, il se développe des contraintes internes dans l’oxyde, qui peuvent conduire à la formation de porosités à l’interface alliage/oxyde et à son décollement. Au niveau de l’interface alliage/oxyde, des contraintes de com- pression dans l’oxyde induisent des contraintes de traction dans le substrat. Ainsi, l’état de contrainte dans l’oxyde permet de connaître l’état des sollicitations internes dans les deux phases. Young fait remarquer l’importance de séparer les contraintes induites en deux catégories [27] : les contraintes développées pendant l’oxydation et celles développées pendant les changements de température. Considérons ici uni- quement les contraintes développées pendant l’oxydation.

La différence de volume entre le métal oxydé et le métal qui est consommé de l’al- liage est une première source de contrainte si l’expansion de l’oxyde est limitée par sa géométrie [38]. Le coefficient de Pilling et Bedworth P BR (rapport des volumes des mailles élémentaires de l’oxyde par celui du métal, Équation (1.2)) permet de comprendre la présence de contraintes de traction ou de compression dans la couche d’oxyde. En effet, Pilling et Bedworth [16] ont montré, pour les métaux purs dont l’oxyde croit au niveau de l’interface métal/oxyde par diffusion anionique de l’oxy- gène, que si P BR > 1, l’oxyde formé se retrouve sous contraintes de compression, alors que si P BR < 1, l’oxyde se retrouve sous contraintes de traction et peut être discontinu (les coefficients P BR des couples oxyde/métal les plus courants sont donnés dans le Tableau 1.2 [15]). Par ailleurs, dans le cas où l’oxyde se forme à l’ex- térieur au niveau de l’interface oxyde/gaz non-contrainte par diffusion cationique, aucune contrainte de croissance n’est induite dans l’oxyde même si P BR > 1 [27].

Tableau 1.2 – Coefficient de Pilling et Bedworth pour quelques systèmes oxyde/métal

[15].

MgO/Mg ZrO2/Zr NiO/Ni FeO/Fe TiO2/Ti Cr2O3/Cr

18 Oxydation à haute température des métaux et alliages

La déformation de l’oxyde εox, lors de la croissance de l’oxyde à l’interface avec

le substrat peut s’exprimer en fonction du coefficient de Pilling et Bedworth (Équa- tion (1.2)) :

εox = P BR1/3−1 (1.3)

Si l’oxyde a un comportement purement élastique, les contraintes de croissance dans l’oxyde sont généralement exprimées [27] :

σox =

−Eox

1 − νox

εox (1.4)

où Eox est le module d’Young et νox le coefficient de Poisson de l’oxyde.

Le niveau de contrainte donné par ces équations est une première approximation, mais ne s’applique qu’au cas limite où la formation de l’oxyde s’effectue entière- ment au niveau de l’interface métal/oxyde ; croissance anionique de l’oxyde (détails dans la Partie 2.2). En réalité, le niveau de contrainte dans l’oxyde n’est jamais aussi élevé que celui donné par l’Équation (1.4) [27]. En effet, peu d’oxydes ont une croissance purement anionique ; il faut considérer un double mécanisme de diffusion dans l’oxyde, anionique et cationique, pour le calcul des contraintes [39]. Ainsi, la contrainte dans l’oxyde varie en fonction des paramètres qui affectent le transport dans l’oxyde : T , pO2, taille des grains dans l’oxyde pour prendre en compte la diffu-

sion intergranulaire, et l’état de surface du matériau oxydé [28]. On notera également qu’à la température d’oxydation, l’oxyde présente généralement un comportement viscoplastique qui conduit au relâchement des contraintes de croissance [40].

L’évolution de la concentration du substrat suite à l’oxydation sélective de cer- tains éléments d’alliage (cf. Partie 1.2.1) peut conduire à des changements de vo- lume du substrat. Ainsi, les déformations induites dans l’alliage par la différence de volume élémentaire des éléments d’alliage sont transmises à l’oxyde tant que la couche d’oxyde est intacte et parfaitement adhérente. Mais la plupart du temps, les contraintes induites par les changements de volume dans l’alliage sont négli- geables devant celles induites par l’oxyde lors de sa croissance [27]. Le changement de composition chimique du substrat modifie en revanche les propriétés mécaniques locales de l’alliage et son comportement sous sollicitations mécaniques extérieures. La prévision de l’appauvrissement du substrat est donc importante pour anticiper ces changements de propriétés mécaniques.

Remarque : Les méthodes les plus efficaces pour déterminer les contraintes in-

duites par l’oxydation sont celles basées sur les mesures de déformation qui per- mettent d’évaluer directement les contraintes, généralement au sein de l’oxyde, comme la diffraction des Rayons X (DRX) [41]. Les essais mécaniques ne sont pas très adaptés pour mesurer les déformations induites par l’oxydation car les épaisseurs mises en jeu sont trop fines [12].