FRANCASTOR
OPÉRETTE
MM. ACHILLE EYRAUD ET LABOTTIÈRE
MUSIQUE
DEM. FRÉDÉRIC BARBIER
Heprésenléepourlapremièrefois,à Paris,surlothéâtre des Folies-Nouvelles, le22mai 1858.
PARIS
MICHEL LÉVY FRÈRES, LIBRAIRES-ÉDITEURS,
RUE VIVIENNE,2BIS1858
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-£5656
DISTRIBUTIONDE LAPIÈCE:
FRANCASTOR
SATURNIN...LOUISETTE.
.
MM.
Tissikx.Goimnom.
M
1'*Fehneï.Nota.S’adresser,pourlapartition,àM. Kelmcr, éditeur à Paris,rue de Rougemont,11.
Les personnages sontplacésentêtedechaque scènecommeils doiventl’êtreau théâtre:lepremieroccupelagauchedu specta- teur, etc.Leschangements sont indiqués par desrenvois.
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FRANCASTOR
Lascènesepassedansunvillage.Adroite,au premierplan,une maison près delaquelle estun banc;à gauche, au secondplan, unegrille;enface,untalus.Aufond,lacampagne.
SCÈNE PREMIÈRE
SATURNIN,
LOUISETTE.Louisetteestassiseetfilean rouet.
SATURNIN.
Est-cequevous croyez, Louisette,quecela peut se passer ainsi?
LOUISETTE.
Quevoulez-vous?11lefaudra bien!
SATURNIN.
Ilfaudraquevous n’épousiez personne... personne, excepté moi...Voilà cequ’ilfaudra.
LOUISETTE.
Sipourtant
mon
tuteurleveutabsolument?SATURNIN.
Mon
Dieu!Je respecte cevieillard:c'estvotre tuteur, mais ilestcomplètementidiot.Quelle diabled’idéeluiaprisde vousmarier àun tambour-major,sousprétexequ’ilestvotre cousinetquevotre oncleDanaelouvous afaitson héritière à conditiondeJ’épouserl...Je respectelamémoirede l’oncle Dandelou, maisc’étaitunfierimbécile!LOUISETTE,se levant.
Ilestcertainquecemaudittestamentfaittoutlemal,et que
mon
tuteurnetientàme
donneràmon
cousin Franscator qu’àcausedel’héritage.DigitizedbyGoogle
0 Fr.ANC\STOR~.
SATURNIN.
Oh
!je saisbienquecen’estpasparcequ’il esttambour....simajorqu’ilsoit;mais enfin,ilnestpointencore arrivé, et tantqu’ilne sera pasici...
LOUISETTE.
11ne tardera pas; jecrois
même
qu’ilviendra aujourd’hui, d’après cequ’ilnousmarquedansunelettre.SATURNIN.
Voyons-lacetteaffreuselettredel’affreuxcousin.
LOUISETTE.
Lavoici.(Elle luidonnelilettre.) SATURNIN,Usant.
«
Ma
chère cousine,—
Vousn’ètespas sans savoirquevotre» oncle,lepèreDandelou,afaituntestamentphotographe,
»avant sa mort.»
—
11paraîtquec’estavantsamort... «Ce»testamentdontauquelilvous a
nommée
locataireuniver-»micellc delafortunequ’il aamassée,avant sa mort, »
—
11 paraîtquec’esttoujoursavant samort—
«à laconditionque»vousm’épouserezmaritalement. Danscetteconcurrence,
»
comme mon
régiment passe dans quelques jours auprèsde»votrevillage,jeprofiteraidelapremière occasionpouraller
»vous trouver, en uniforme, aveccanneetplumet, à seule
»finde vous conduire àl’autelgarni de l’hyménée.
Va
sans» direquejeseraiz’enchanté devous voir aprèsle lapsqui
»s’estécoulé,carvoilàbienquéquechose
comme
quinzeans»queje vousaiperdue devue!» LOUISETTE.
J’avaisalors troisans!
* SATURNIN,lisant.
«Jeprésupposequevous devez être bien sangée de depuis,
»àvotreavantages’entend.
—
Agrégez,chèrecousine,la»compagnied’assurancesdes salutations respectaclesdecelui
»quise ditpourlavie,
—
Votre cousin,»Fràncastor. » Voilàunjolipetitpoulet!bien galant,biengentil... etquelle écriture! despattesd’éléphant.Ilauraécritça avecsonplu- met!(ilremettelettreàLouisette.)
LOUISETTE.
Vouslevoyez,Saturnin,si jerefuse,jesuisruinée; et
comme
vous n’avez rienvous-même...DigitizedbyGoogle
FRANCASTOR.
7 SATURNIN.Çafait
qua
nousdeux nousn’aurions guère...quedes en- fants...Cependant, à bien considérer,j'aiune sœurquigagne quelqueargentcomme
danseuseau Cercle Olympique...comme
elleestvenuepassersoncongéiciau village(hindiquelagrille), ellenousferabensûrunsuperbecadeaulejourde notre mariage. Car,iln’ya pas àdire,nous nousmarierons.Vous ne pouvezpasépouserun tambour-major, unhomme
habitué àse servirde sa canne,etquivous mènerait àlabaguette!voussibonne,sidouce,sibravounette...aulieuqu’avecmoi vousseriezsiheureuse!
ENSEMBLE.
Oh
!le jolipetitménage Queuous saurionsfairetousdeux!Quoique unis parlemariage, Nousserionstoujours amoureux.
LOUISETTE*.
L’été,souslaverte feuillée.
Nous nousredirionsnos amours.
SATURNIN.
L’iiiver,delalongueveillée Lesinstantsnous sembleraientcourts.
ENSEMBLE.
Oh
!le jolipetitménage Quenous saurionsfairetousdeux!Quoique unis parlemariage Nousserionstoujours amoureux.
SATURNIN.
Fnattendant,permcltez-inoiunepetitebrassade.(ilcourt
«prèsellepour l’embrasser.)
LOUISETTE,courant ver»leUlos.
Non,non...
Ah mon
Dieu!voyez-vous...là...surlamon- tagne?SATURNIN.
C’estlecousin!leFrancastor!(ilsdescendentta»ceue.)
H
faut pourtantquejetrouveun
moyen devousarracherde ses grilles!maislequel...voilàleentendent/comme*ditma
sœur...(ilréfléchit.)Ah!à proposde
ma
sœur...uneidée!LOUISETTE.
Quoi donc?
* Louisette,Saturnin.
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» FRANCASTOR, SATURNIN.
J’ai
mon
plan.Mais voiciletambour...venezavec moi.Je Vas VOUS COnterça.(ll«entrentvivement parlagrillaigauebe.)—
Muti']ne.
—
Francaslordescend mejeslueusen ent dutalur.)SCÈNE
IIFRANCASTOR.
AIR.
Le beau tambour-major!c'est ainsiqu’on
me
nomme.Six piedssansmonbonnet...Jesuisassurément, Jesuisleplusgrand
homme
Detoutlerégiment.Gradenoble,imposant;
Comme,en
me
regardant,On
connaît aisément Quejesuisné vraiment Pourlecommandement!Ilfaut
me
voirquandje lèvema
canne Pourcommander unroulement!Rapataplan
,
Rapataplan.
(Ilmarche ensedandinant.) Partons, compagnons, cheminons, marchons.
Avalons,guidons,clairon^, bataillons!
Auprèsdusesque quinousdamne.
Je connaisaussi l’artcharmant De commanderlesentiment;
Etquandjepasse,biensouvent Jevoisfemmejolie Qui soupireet s’écrie:
Ah!ah!
Le beau tambour-major!c’estainsiqu’on
me
nomme.Six pieds sansmonbonnet
;je suis,assurément, Jesuis leplusgrand
homme
Detoutlerégiment.(Vers la fin,Saturnin entre parlagauche,et resteau fond regardantb'rancastor.)
SCÈNE
IIISATURNIN, FRANCASTOR.
FRANCASTOR,setournantviraladroite.
Iln’yadoncpersonnedanscevillage.... (Apercevant saturnin.)
Ab
!jerencontre enfinunindividuel!DigitizedbyGoogle
FRANCASTOR.
9 SATURNIN,àpart.*Tàclionsd’attirerson attention,(ufeintde «angloler.) FRANCASTOR,àpart.
A-t-ill’aireffarécet
homme
champêtre!(asaturnin.)Jeunehomme
!SATURNIN.
Aou! Aou!Aou!
FRANCASTOR.
Comment
Aou!Aou!....(Avec untonemphatiquequ’ilcooaerredans 10tsonrôle.)Jeunehomme
delanature, tu m’asl’airuntant soitpeu vexé....tesyeuxsontouvertscomme
des portes écorchères!SATURNIN,à part.
Qu'est-cequ’ilparledoncd'écorcher?
FRANSCATOR.
?ie tegênepas....Telquetu
me
vois, jesuisfun bonen- fant.Dis-moilesujetdetespleurs.SATURNIN.
Aou! Aou!
FRANCASTOR.
Comment,encore
Aou
!...Serais-tu fracturé danstesamours?Tabelleaurait-elledes rapports inqualifiablesavecquelque autre imbécile de cet endroit?
SATURNIN.
Ah
non!...tambour.FRANCASTOR.
Major.
SATURNIN.
Tambourmajor.
FRANCASTOR.
Tant mieux,
nom
d’unepeau d’âne!Carunrival,vois-tu,on doit Véplatircomme
unincestequivousincommode,(u frappe parttrreavecsacanne.—
Saturnin,effraye,s’enfuit.)Comment,tllte sauves!...Avanceàl’ordre.SATURNIN,arançant.
Oui... laissonsmes affaires,tambourmajor,etparlonsde vous.Quoidonc quevousvenezfairedans ce village?
FRANCASTOR.
Telquetu
me
vois,éleveur de légumes,jeviensme
jeter*Francastor, Saturnin.
I.
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10
FRANCASTOR.
danslesbrasd’uneépouse légitime;jeviensluiapporter
ma
grâce,
ma
beautéetmon
esprit, letoutz’avantagé parune inruditionpeuCommune,(illuidonne un coup d'épaule.)SATURNIN.
Lefait est,tambour... majot...quevous paraissez fistrement instruit,(ile*say*de ponsier dun coup<1épauleFnncanorquinebouge pas.
—
apan.)Quépeuplier!FRANCASTOR.
Que veux-tu?letambour-major aimeàdominerparl’intel- lect
comme
parla taille.Lalectureestunedemespassions.Jeconnaisl’iiistoire,lamystrologie,oh!lamystrologic surtout, etpasmald’autres choses.Maisrevenonsà la bellequi m'at- tend avecla
même
impatiencequeCalypso attendait dans son lie lefameuxJupiter sousles traitsde Mercure.SATURNIN.
Ah!...Mercure...Quel Mercure?
FRANCASTOR.
Comment,tuneconnais pas Mercure...ledieu delaguerre...
lefilsdeMinerveetdeCarton d'Utique?
SATURNIN.
Jene connais pointnonplus tous ces gens-là.Aprèsça,il n’yapaslongtempsqueje suis danslepays.
FRANCASTOR.
Dis-moi, pourrais-tuau moinsm’indiqueroùgîteune jeune
fillelépondant au
nom
de LouisetteVercheux?SATURNIN.
Louisette..maisc’est lameilleurcamaradede
ma
sœur...ma
sœurqu’estdanseuse àParis,(a pan.)Çaservira!FRANCASTOR.
Ah
!tuasune sœurqu’estdanseuse àParis... maisçaneme
ditpasoùperche Louisette.SATURNIN,lutmontrantlaporteàdroite.
C’est-là,major,danscettemaison.
FRANCASTOR,sedirigeantrertlamaison.
Très-bien.
SATURNIN.*
Seulement,elle estauxfoinspourlequart d’heure...Sivous voulez,jevasallervouslaqu’ri.
*Saturnin, Francastor.
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FRANCASTOR.
11 FRANCASTOR,teretournantetvenantàloi.Hein ?quedis-tu ? SATURNIN.
Jedisquejevasallervouslaqu'ri.
FRANCASTOR.
Comment,vouslaqu’ri?vousla sercher,imbécile!Ap- prends doncà parler,(apan.)
On
voitbienqu’iln’apasfaitsa ristorique!SATURNIN.
Lasercheroulaqu’ri, c’esttoutcomme.
FRANCASTOR.
Telquetu
me
vois!...c’estmoiquiseraison chefdelile.Dansquarante-huit heures, heuremilitaire,ilfautque M.le maire sesoit écharpéànotreintention... Tiens, tu
me
plais,tu seras
mon
témoin,et lepremierinvitéaurepas qui rappellerapar l’abondancelesnocesdeGanache.SATURNIN.
Ou’est-cequec’estque Ganache?C’est-yuntambour....
major?
FRANCASTOR.
Maisnon,c’estungénéralgrec.... (a pan.)Ce quec’estquand onneconnaît pas sa mystrologie!(a saturnin.)Allons, tu n’es pas encoreparti?(illemenace desacanne.)
SATURNIN,«esauvantidroite(deuxième plan).
On
yva. (Appelant.)Hé!Louisctte! Louisette!SCÈNE IV FRANCASTOR
>eoi.Maintenant, attendonslacousine...etpréparons-nousàla subjuguer. Je présupposequecenesera pas long.(Avecfatuité.) 11yadesgensqu’illeursuffitdesemontrer...lesfemmesai- menttantlesbel-hommesetl’uniforme!Maisjene
me
trompe pas,j’entendslefrou froud’une robe... faisonsmon
effetde taille.(cbaDlanlettournantledo».)Tld, la,la,la.DigitizedbyGoogle
12
FRANCASTOR.
SCÈNE y
LOUISETTE,
FRANCASTOR
LOUISETTEentrant parfagrilleAgauche, un bouquetAlamain.Elleporle un chapeau depailleélégantetuner<be de garegonfléedectinoline.
C’esttoutde
môme
unedrôle d’idéequ'a eue Saturnindeme
fairepasserpoursa sœur.FRANCASTOR.
Hum!
iium!LOUISETTE,l’apercevant.
Ah!
FRANCASTOR,Apaît.
Elleestz’emue
!(Haut.)Petite!(Aperceront Louiieiie.)Tiens,ce n’estpas Louisette...(saluant.)Pardon, madame!...
LOUISETTE,faitantune grande révérence.
Monsieur!j’aibien l’honneur.* (apart.)Tâchonsde prendre aussisesmanières.
FRANCASTOR,à part.
Quelle architecture!...Cherchonsun moyenorlhodoxed’cn- gagerlaconversation,(a Louisette.)
Madame
habite ce local agreste?LOUISETTE.
J’ypassequelquefoisl’été,prèsde
mon
frèrequiestde ce village.FRANCASTOR.
Ah
!oui,jeme
rappelle.Vousôteslasœurdontm'aparlé lelourdaudquej’aivutout à l’heure.11estbienlaid!...vous luiressemblez...(sereprenant.)Vousluiressemblez,maisen, beau!LOUISETTE.
Vous
me
flattez,monsieur!FRANCASTOR,avec transportetmettantlamainsursoncoeur.
A
peine assez,madame,à peine assez!(lui présentant sonbrar.)Madame
vasepromener?Ilfaitun tempssuperbe!LOUISETTE.
Un
peuchaud, pourtant.FRANCASTOR.
Oh
oui!... surtout à votre alentour!femme
phosphorique!
*Francastor,Louisette.
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Monsieur...
FRANCASTOR.
LOllSETTE.
13
FRANCASTOR.
Telquetu
me
VOIS... (a part.)Ah,sapristi!(Sereprenant, Loaisetir^Telquevous
me
voyez,permet)ez-moi(levousréité- rer quevous méritez cethommage,car vous avezlescheveuxde
Pliaétonet la tailledelàVénusde Milon... déesse del'agri- cultureetdu commerce.LOL'ISFTTE.
QuelleestcetteVénus?
FRANCASTOR.
C'estuneestatue defemme.
LOUISETTE.
EtMilon?
FRANCASTOR.
C'estunbonnetierquien aune danssonescalier...pour quoil’ondit laVénusdeMilon... (apart.)Quelle
femme
etÎ
uellemise!(aLoniwtu.)Madame,voushabitezlhunerobe 'unfiercalibre!
LOUISETTE.
N’est-ce pasquec’estgentil,beautambour?
FRANCASTOR.
Beau tambour!Elleestvraimentespiritucllel LOUISETTE,prenantdegrandsairs.
Quand ona,
comme
moi, dix mille francs d’appointements...onpeutsepermettre cespetitesdépenses.
FRANCASTOR,àpart.
Dix mille francs touslesans...Crelotte!c’estça qui mettrait
du
beurre dans mesho....non,jeme
trompe:(sereprenant.) C'estça qui mettraitdufoindansmesépinards!LOllSETTE.
Aussi,leluxeest
ma
vie,mon
seulbonheur!CODPLETS.
I.
J’aimel’éclat et ta toilette.
J’aidesbijoux,desdiamants, Linecalèchefortcoquette.
Les parfumslesplus enivrants.
Jeliaisla tristesse sévère, Touslesplaisirssontdemongoût.
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FRANCASTOR.
14
Mais ce quej'aim’par-dessustout, C’est d’êtreadmiréeetdeplaire.
(Ellepasse devant Francastor enluifaisant sentirsonbouquet.) IL
J’aimelamusiqueet ladanse;
J’aime à chanter ungai refrain, Ilfaut
me
voirquandjem’élance Enfincorsagedesatin.J’aimeà valser,viveet légère, Dansuntourbillongracieux;
Mais,ceque j’aime encor bien mieux, C'est d’étreadmiréeetdeplaire.
FRANCASTOR,ipart.
Délirante! enivrante! subjuguante! Ellem’a complètement
ému
z’etfacciné!Deson côté particulier,elleneparaîtpas éloignée d’avoirunecorrespondance analogue...ilfautsedé- clarer... (Arec ud grand gésir.)Madame!...(Louiseltepasse àdroite.)LOUISETTE.
Mais,monsieur!...(a pan.)Et Saturnin qui ne vientpas....
quelerilbaras!(Eutie Saluruiu appelantson cousin;Louiseltesortparla grille,Francastorlasuit,mais Saluruiularrête.
—
Ilestdéguisé en paysanne. grandecoiffe,robetiès-coorte,largetablier,bas bleusetsabots.Iltientàla main unetartinedefromage mou.)SCÈNE VI FRANCASTOR, SATURNIN.
SATURNIN.
Mon
cousin,mon
cousin!FRANCASTOR,laregardant.
Quelestcemeuble champêtre?
’ SATURNIN.
C’est-y vous qu’êtes
mon
cousin?FRANCASTOR,à part.
Grand Dieu!est-cequeceserait là
ma
future!(Haut.)Seriez- vous, par hasard,lacousine Louiselte, dont à laquelle je viens afinque...SATURNIN.
C’estmoitout demême.SouffriSSeZ...(ilrenl l’embrasser,«l lui touchelaligurearecsatartine.)
FRANCASTORlerepoussant.
Allonsdonc!du fromageàlacrème!...(ils’essuielenetet
*Louhette, Francastor.
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FRANCASTOR.
15 goûlelefromage.)11Il’estpas mauvais.(Satnrninsemnucliebrujam- ment.)Crelotte!Jen’aime paslesfemmesqui fontdelatrom- pette avec leur nez.(n eonaîdère saturnin.)Physiquepeuagréable, et bienmaldéveloppé danssesaménagements.Eh
bien!vousme
croirezsituvoudras:telquetume
vois, jene vous auraisnullementreconnueàlapremière revue.SATURNIN.
Dam
!Vous m’avezquittéesijeune,sipetite!(itregardeFran- catlor donairpiteux.)FRANCASTOR.
11estdefait.Et,malheureusement, vousn’avez pasbeau- coupgrossi,niembellide depuis.
SATURNIN.
Comment,
je n’ainibelli,ni grossi?FRANCASTOR.
A
peine assez,petite,à peine assez!SATURNINmontranttajambe.
Mais regardez-moicettejambe,etcepied...C’est-yça
un
pied?FRANCASTOR.
J’avouequecen’estpaslataillequiluimanque...
On
dirait uneboîteà violon.SATURNIN.
Et puis,je n’aipasde Caroline,moi...C'estnaturel, ça,
mon
grOStrognon!(ilseparancetmontresataille.)FRANCASTOR.
Cristi!quellesurface!C'est droit
comme ma
canne.L’autre- étaitbigrementplussoufflée!(aLouisette.)Enfin,c’estvotre taille,vous nepouvezpasm’en montrerplusquevous n'en avez individuellement.SATURNIN.
Bédam
!FRANCASTOR.
C’estégal,çava
me
chiffonner d’avoirau brasunefemme
d’unsimincecalibre,moiVictor-Anténor Francaslor, sur-nommé,
toutd’abord,lebeautambour-major... c’est-à-dire, leplusbeaudeshommes,letambour-majorétantlacrèmede l’espèce.SATURNIN.
Ah! VOUS aimezlaCrème; ehben...(illuiprésentelatartinede minièreàluibarbouillerlenez.
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16
FRANCASTOR.
FRANCASTOR.
Allons, bien, encore delacrcme!(il»’«««««et i*goûte.)Point mauvaisedutout.
SATURNIN.
Dites-moi,cousin,est-cequevousallezvous marier avec ça là-haut?
FRANCASTOR.
Quoi,ça, là-haut?
SATURNIN,détigoantleplumet.
, Eliben,l’affairequiremue...leplumeau?
FRANCASTOR.
Quelleestgrue,cettenaïade!
SATURNIN.
Comment,je suisgrueetnaïade!Est-cequevous nevou- driez plusdemoi, maintenant?
FRANCASTOR.
Maissifait,puisque ça m’estordonnéparletestamentpho- tographe del’oncleDandelou.(nlireunpapierdesapoulie.)
SATURNIN.
Ah
!voyons...défrichez-moiça.FRANCASTOR.
Iliende plusfacile...(u tournei«tettament .u toutsons.)Est-ce quevous pourriezlirece papier,vous?
SATURNIN,
Moi?(apaît.)Finassons!(Haut.)Jenesais pas...onnem’a jamaisappris...
FRANCASTOR.
C’estpourtantpasbiendifficile...Tenez,par exemple, voyez-vouscette lettrequiestentète etplusgrandequeles autres...
comme
cfui diraitun tambour-major?SATURNIN,regardant.' Cette grandelettrequia troisjambes?
FRANCASTOR.
Juste.Voulez-voussavoir...
SATURNIN.
C’est-ypasun
O?
FRANCASTOR,riant.
Ça, unO!...c’estunIscpie,ignorante.
SATURNIN.
Allons,défrichez-moiça..., lephotographe.
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FRANCASTOR.
17 FRA.NCASTOR.Tout desuite,(ap»it,tetonroantlepapier.)Siencore je savais lire!Leslivres,çavaencore...mais,pourlespapiers,j’aide lapeine...Par bonheur queje
me
suisfaitapprendrecelui-ci parmon
amilecaporal, quime
faitmeslettres, (nleretomne«ncçrc.)
SATURNIN.
C’est peut-être votre trique quivousgêne... passez-moila trique,(ilprendlacanne parlemilieu.)
FRANCASTOR,lareprenant.
Laissez donc...Vous yavez encore fourrédelacrème!(n. pore(es.cires.)Heureusementquelleestbonne.
SATURNIN.
Voyonsce testament.
FRANCASTOR.
Voici:«Moi, Pierre-Ignace-PantaléonDandelou,donne- z-etlèguesixmille francs à
ma
nièce Louisette...»SATURNIN.
C’estmoilanièce Louisette.
FRANCASTOR.
Hélas oui!(rc>' nrnnntletestament.
)«Sousconditionqu’elle épousera soncouslitFrancastor,» c’estmoi,»àmoinsqu’ilno refuse,(n metletestamentdansiapoebe.)Mais jenerefuse point...
passibêle:ily asixmille francsà encaisser,etilnesiérait pas àun tambour dedédaignerlacaisse. (Riant.)Ob!ceciest unemanière decalombourdeà l’usagedes gensd’esprit,appe- lée, jenesaistrop pourquoi,lecoqet t’àne. (n ut.)
saturnin.
Comme
çac’estmoiqui suislecoq,et c'estvous quiêtes...FRANCASTOR.
Allons, pas de comparaisons inconsidérées!
SATURNIN.
N’empêchepas quevous paraissezaimerdiantremeiitla fortune.
FRANCASTOR.
A
peineassez, petite.L’orn’estpointunechimère,..,comme
ditFigaro dansGuimauveTell,...musiquede Scribe.
SATURNIN.
Ainsidonc, pourquelques écus, vous m'épouserezmalgré
mon
ignorance?(Louisetteparaît àlagrille.)D'KjitizedbyGoogle
18
FRANCASTOR.
FRANCASTOR.
11estvrai,nymphedeschamps, quevous êtespassable- mentincultez’etagreste...Mais,tantpis...telquetu
me
vois,j’aidel’espritpourdeux,(apan,pendantqueLouisetteet SatlirniDseconcertentaninstant. )*C’est égal.Cephysique ne
me
sé- duitpoint...Moiquime
faisaisuneidéesuperbe dema
cou- sine,etquime
plaisaisàlacompareràunegravurequenous avonsdanslachambrée,etquireprésente labelleJudith tranchantla têtedeRoméo
!Jetrouvedudéchet.SATURNINluifrappantsur l'épaule.
J’ypense,
mon
cousin,ilfaitchaud;vous voudriezpeut- êtrebienvous rafraîchirunbrin?...FRANCASTOR.
Çan’estpasde refus!
SATURNIN.
Ily alepuits, àcôté...
FRANCASTOR.
Allonsdonc!lepuits!est-cequetu
me
prendspourun canard...sauvage?LOUISETTE,descendanttascène,àSaturnin.
Louisette!
FRANCASTOR,àpart.
Dieu,
ma
belle!...attention,(il«aposersonbonnetet sacanne surlebanc.)SCÈNE VII SATURNIN, LOUISETTE, FRANCASTOR.
LOUISETTE,àSaturnin.
Louisette,allezchercherdu
rhum
,etdumeilleur.SATURNIN.
Bien,mademoiselle.(a Francastor.)Adieu, cousin!(nluienvoie desbaisers qu’ilfaitsurlapaumedesamaiu,etilsoiten gambadanteten criant)
Mon
cousinestarrivé!mon
cousinestarrivé!SCÈNE VIII LOUISETTE
,FRANCASTOR.
FRANCASTOR,apart.
Quel concombre!Maisjeconçois l’apologe:labelle a voulu renvoyerlapaysanne.
* Louisette,Saturnin,Francastor.
DigitizedbyGoogle
FRANCASTOR.
,19 LOUISETTE.Vous aimezlerhum,jesuppose.
FRANCASTOR.
Je1adore.(Déclamant.)
Rhum!
l’unique objet demon
conten- tement!...comme
ditau Théâtre-FrançaislefameuxGrassot...Le
rhum
etma
pipec’estmon
bonheur!(iltire Pipede»
P och*«•tlaP ré«enteàLôimr-tte.)Flairez-moiun peuça...quelbou- quet!...depuisseulement deuxmoisqueje lafume.
LOUISETTE^souriant etrepoussantlebraide Francaitor.
Jevouscrois.
FRANCASTOR.
Vousavez bien raison!
AIR:
Lapipe culotée Estun creusetdivin D’oùs’envoleenfumée Le plus sombre chagrin.
Négociants encrise, Notaires en danger.
Femmesqu’on tyrannise.
Maris qu’onfaitrager;
Pour guérirvotremal
,
O
i'!rienne vousretarde, 1»n.rrezvotrebouffarde, Fumez ducaporal,Rienn’est égal Aucaporal!
{Louisette,ensepromenant,va verstefond àdroite.)
Sacrebleu!qu’elle est belle!
Quelobjetséduisant!
Tout
me
ravitenelle.Et physiqueet talent.
Efforçons-nous deplaire, Jeseraitropchançard Si.pour
ma
ménagère, Jel’obtiens tôtz-outard.De
ma
prpstance.Et demonélégance, Ilfaudra,je le dis.
Quesoncœursoit épris.
Bonneaventure, Non,jamais,jelejure.
Non, jamais,jenevis objetplus séduisant, Plus charmant.
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20
FRANCASTOR.
louisette s’avançant.*(Apart.) Desa prestance.
De«a noble élégance, Etdesesmotsfleuris Ilcroitmon cœurépris.
Quelleaventure!
Non, jamais,je le jure.
Jamaisjeneconnus unfatplusamusant, Plus pédant.
FRA.NCASTOR,àpart.
Décidément,c’estl’angedemesrêves!Ilfautqueje
me
re- déclare!(liant*»ec pinbarrat)Madame!...pour quantàmoi...tel quetume
vois... j’aiuneAme
sincèreetfranche deport, etje vousfaisà savoirquelesentiment.. .dontuncœurqui soupire...
etl'amOUr,lapassion philosophale...VOilA. (Eu\réede Saturninpar ta grille.Ilposetabouteille sur lebanc etilécoute.)
LOUISETTE.
Monsieur, votre franchise
me
plaît...et,àmon
tour,sije n’étaispointunetimidejeunefdle, jevous avouerais...FRANCASTOR.
Avouez!avouez!madame!
LOL'ISETTE.
Quesijamaisjedonne
mon
cœuretma
main,ce sera àunhomme
dontlesavantages physiques...FRANCASTOR.
Assez,madame,sulcifU!(a pan.)Elleestprise!(a L
ooiætto.) Moiaussi,jesuislibre,etdèslorsconséquemmentnous pou- vonsvisitercettemurnicipalitél
LOUISETTE.
Permettez!Ilfautd’abord savoirsinos caractères, nos goûts seconviendronten tout point.
FRANCASTOR.
C’est juste,mais nousavonsles
mêmes
goûts...j’aimela pipeetvousaussi...LOUISETTE.
Moi?
FRANCASTOR.
Puisque vousm’avezditquevous aimiezlesparfums. Ainsi donc,puisquejevous concorde autantquevous
me
concordez,1affaireestconsumée...*’(ilsemetigenouxelveut embrasserlamain de Louiselte;Saturnins’interposeetInlmet
n
tartinasouslenez.) AllOllS donc!toujoursdelacrème!(Ilsertlère.)
*Francastor,Louisette.
**Francastor,Saturnin,Louisette.
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FRANCASTOR.
21SCÈNE IX FRANCASTOR, SATURNIN,
LOUISETTE.SATURNIN,portantlerhumet unferre.
V’iàlerlmm,
mon
cousin Castor.FRANCASTOR,en colère.
l’rancastor...(a part.)Dieu!quelle oie!(titeverteuo verre.A Louiutte.)
A
lavôtre,madame,(iiboh.)' SATURNIN.
J’aiannoncévotre arrivée à
mon
tuteur,etilm’adit qu’il seraitcontentde vousparleraprès safenai...ai...son.FRANCASTOR,l’imiuntet teversantun autre verre.
Safenai...ai...son!Crelotte! quelleestlaide,
mon
Dieu!(lidéposelabouteille etlevcrreetpasseau milieu.)*Riennepresse,pe- tite,car,
comme
vous savezquenous n’avons pointlamême
conformation de goûts ni detaille,pournotrebonheuràvous et àmoi, j’épouse mademoiselle.SATURNIN,pleuranl.
Ah!Comment,
mon
cousin,quandvous m’aviez promis!...LOUISETTE.
J’auraisunerivale!
FRANCASTOR,mettantlamainsur labouchede Saturninquisanglote.
Noil,non,
madame!
(ASaturninquipleure en ouvrant une grande bouche.) Chut!...Fermezlecaisson.SATURNIN,p'enranttoujours.
Mais est-cequecen’élaitpasmoi quevous aviez d’abord choisiepour votre motié?
FRANCASTOR.
Ma
moitié...allonsdonc! vousferiezmon
tierstout au plus, etencore à peineassez,à peineassez.(Gémissements de Situm.n.) Fermez donclecaisson!SATURNIN.
Maisletestament de votre oncleDandelou vous ordonnede vous marier avecmoi!
FRANCASTORsortantletestament desapoche.
Ça m’importepeu.(a Louisette.)Tenez,
madame!
levoilàle testamentde l’oncleDandelou,je ledéchireen mille millions depièces,(ui.déchireetlance le.morceaux.)J’enfaisdelaneige.(SaturninetLouisetterientauxéclats.)
*Saturnin, Francastor,Louisette.
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22
FRANCASTOR.
SATURNIN,(Uount.
Ah!quelbonheur!vousv’Ià héritière,maintenant,mam’zelle Louise!te!
FRANCASTOR.
Comment, mam’zelle Louisette!... où donc?... (Dengoant Louiwtie.) Ici?
SATURNIN.
Oui.
FRANCASTOR
.
Ehbien... ettoi?
SATURNIN.
Aou
!aou1aou!FRANCASTOR.
Aou!aou! Dieu!cette
femme
estun homme...(aupublic.)Je suis refait, telquetume
vois!SATURNIN,t:panl«urleventrede Francailor.
Apeineassez,tambour,àpeine assez1
FRANCASTORaveccolère.
Ah
!coquin!ilfautqueje tecassema
cannesur tonhoméo- pathe'.(Ilvapicuüicsacannesurlubancàdroiteetmenace Saturnin.)*SATURNIN,ï’iibploraot.
Comment, tambour!vous frapperiezunefaible
femme?
FRANCASTOR,Apari.
Aliça!voyons... est-ceune femme, ouun homme...ou nn Auvergnat?
SATURNIN,allantvers lui.**
Nevous fâchezpas... c’estunefinasserie...nousnousaimions depuislongtemps, Louisetteetmoi... fautnouspardonner!
FRANCASTOR.
Comment,tepardonner!etlessixmillefrancs...crois-tu queça separdonne?
SATURNIN.
Elibien!ça va-t-y?noussommestrois,partageons:untiers chacun.
FRANCASTOR,à part.
Deuxmillefrancs...sans
me
marier...j'ygagneencore.(h.«i.)J’accepte,etjeretourne au régiment,(uv»pr-nürs»n bonnet.)
saturnin.
Un
instant! vousrestezà dîner avec nuus.•Saturnin,Louiseito,Francastor.
”
Louisette,Saturnin, Francastor.D'KjitizedbyGoogle
FRANCASTOR.
23 FRANCASTOR.Jedîne avec vous,c’est dit!Donne-moitamain,etrestons unis
comme
DaphnisetCléopâtre,PollusqueetFrancastor!ENSEMBLE.
j®
j
resteau régimentpour qu’ons’écrieencor:
Le beau tambour-major!
C'est ainsiqu'on
|
™
e jnomme;
Jesuisi
assurément Ilest )
îfest' 8
}
*e Plus hel
homme
Detout lerégiment!FIN.
N.t
d’Invent:
Paris,
—
ImprimerieMorrisetComp., rue Amelot,64.DigitizedbyGoogle
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