CONSEIL DES CINQ-CENTS.
GROSCASSAND
-DORIM'OND
Député de PA in
?
Contre
leprojet de
laeommijjion \ concernant
r augmentation du tarifde
lapofte aux
lettresEPP.ÉSEN TANS DU PEUPLÉ
mu
a
j’étois forcé d’établir des principes dont les conféquendes doivent réveiller votre attention fur les dilapidations de la fortune publique
; mais le fentiment
de mon
devoir adû
1emporter fur quelquesconflderations particulières; jedirai
donc ma
penfée avec la franchife d’un républicain,
&
je la dirai toute entière , duffé-je , hors de cette augufte en- ceinte, entendre aboyer cent bouches lâchement vendues&
chèrement
payées pour calomnigrmes
intentions, perfifler, torture*: ôc dénaturer
mon
opinien.Jai la plus haüte efiime
comme
laplus grande confiance pour lé Directoirey
mais
il apu
etretrompé)
Sc je crois qu’il la été furla qiieftion qui nous occupe.Je rends
dommage
à Inexpérience&
aux talens financiersde mon
collègue Villers;maisje nelecrois pasinfaillible,
&
jepenfe qu’admettre parconfiance
&
fans difcufiîonun
pro- jetde
loi générale , feroit autorifer lesennemis du gou- vernement
républicain à direque
larepréfentation nationale n’eft qu’unemachine
a légiflation.Je ne viens pas combattre le
nouveau
tarifqui vous elt préfentépourlapolie auxlettres :jecrois ce tarifbon
, non- feulement parce qu’il préfenteune
augmentation de revenus publics,& une
contribution librequipèfe peu fur lepeuple,
mais
encore parce qu’il eltfagement coordonné
aveclefyf-tème
desmonnoies
, mefures&
poids républicains.Je foutiens
que
le projetde votrecommifiion
elt inconlli- tutionnel, erronné dans fes bafes, incohérent dansfes difpo- fitions,&
qu’il doitêtreécarté parlaqueftion préalable.Pour
leprouver
5je ne>fortiraiprefquepas
du
rapportde
votrecom-
mifiion,
&
j'examinerai rapidement les queftio^s fuiva'ntes.i°.
Le
produit netde
la pçlte auxlettres eft-iiune
con- tribution, publique?vous eft préfenté?
4
°.Quel
feroitlebénéficepréfumé
des fermiers régifteursde
la pofte aux lettres en rétabliffànt le tarifde
17.59?5
°. Quelle feroit ce bénéficeen
adoptantle tarif propofé par le Directoire?6°.
Le Cbrps
légifiâtifipeut-il, fans violer la conftitution, admettreune
augmentation de contribution dont partiedu
produit net ne tourneroir pas au profit
de
la chofe publique,
mais de quelquesindividus ?
Dans
une matièreaufti aride,quoique
très-importante, j’ai befoin,
mes
collègues, de votre attention&
de votreindulgence
; je réclame l’une 8c l’autre; je
ne
ferai paslon<*.O
Pour
fe convaincreque
le produit netde
la pofteaux
lettres eft une contribution publique , il fitffit
de
rappeler qu’unimpôt
, de quelque nature qu’il fait , eft une taxe pu- blique crééefurun
objetquelconque
parla loi, qui appelle tous lescitoyens à concourir, chacunen
raifon de leurs fa- cultésau maintiende
lafociété, dontilsfontmembres. Notre
collègue Villers aylonc fait uneerreurdeprincipe, îorfque, dans fou rapport, il vous a clit qu’il ne s’agiffoit pasd’un impôt y mais déune taxe volontairey d'une indemnité duepar
les citoyens pour le tranfport de leur correfpondance.Le
produit brut des poftes aux lettres doit fe divifer en
deux
parts eftentiellement diftincftes : l’une, deftinée aux frais
&
dépenfes de manutention
&
d’adminiftration,8cl’autre, for-mant
branchede
revenus publics.La
première n’eft qu’une jufteindemnité,que
leprixdu
A 2
4
portdes correfpondances; mais lafécondé,quieftl’excédant
de
ce prix, eft néceftairement
un impôt
, Si c’eftcomme
tel
que
vous l’avez dalle dans les recettes de la préfente année,&
affeété àune
dépenfe qui n’a paspour
objet lamanutention
des poftes.Examinons
maintenant ceque
produiraitcet
impôt
dans1hypothèfe
où
1on
rétabliraitpurement & fimplement
le tarif: deiy
5 ^: je trouve la folutionde
cette queftion dans le rapportmême
de notre collègue Villers. Il nous a ditquen 1790, époque
à laquelle letarif précité étoit fiiivi ,
le produit net des polies aux lettres, tous frais prélevés>
etoir
de 12,400,000
francs.Depuis
lors le territoire Sc la population de laRépublique
ontaugmenté
aumoins d un
quart j ce quidonne
en augmentationpréfumée 3
,ioo,ooo francs. Aiiifi ,d
après le tarif de1769
j leproduit net
&
total , tous frais prélevés , feraitde 16,000,000
francs»Notre
collègue Villers nous a ob- ferve, il eft vrai,
que parmi
lesmaux
inféparables d*une grande révolution,ilfalloircompter
celuide
la diminutiondu commerce
, Sc parconféquentdes correfpondances adives êt multipliéesque
cecommerce
entretenoit.A
cetteobjedion
je réponds, 10.que,
fi les correfpon- dances des particuliersfontdiminuées fous les rapportscom-
merciaux , elles ont bienaugmenté
fous les rapportspo-
litiques
; 2.0
.
que
nous avons à calculer pour dix ans,terme du nouveau
bailde
la pofte aux lettres.Or
je penfe qu’il n’eftaucun
Français qui reculelapaix&
la reftaurationdu commerce
jufqu’en l’an 17.Je paftè à
ma
troifième queftion , celle de favoir quel pourrait être le produit netde
la pofte aux lettres en fui- vanclenouveau
tarif qui nous eft propofé.tances; lavoir, lalettre (impie} depuis
4
fousjufqua 14; la lettreàenveloppe, depuis5
fousjufqua 15
; enfinla lettre double depuis le poidsde demi-once ou
quinzegrammes,
depui 7 fous jufqu’à 26.Ces mêmes
lettres, d’après le tarifqui vouseftpmpofé
aujourd hui . ferment taxées,favoir, la lettrefimple.depuis
4
fous jufqua20
J différence en excédant d'un tiers fur letarifde1y
5
9;J
La
lettre à enveloppe, depuis6
fous jufqu’à22
, diffé-,rence en excedant encore
d
3un
tiers*Enfin la lettre double
&
jnfqu’àdemi -once ou
quinzegrammes,
depuis6
fous jufqu’à trent^différence enexcédantdun
jeptieme.Audi
lenouveau
tarif qui vous eft préfenta feroit préfumet ,comparativement
à celuide
i7
5n un8
augmentation de produit au.moins du
quart: or
nous
avons vu
que
le produit netdu
tarifde
i75o
devroic etre de i5
,5oo,ooo
francs: le produit netdu nouveau
tarifdevroit
donc
être aumoins de
i9,375,ooo
fr.Examinons
actuellement quel feroit le bénéfice net des fermiers régilTeurs dans l’hypothèfede
l’unou
l’autre tarifde îyëg ou
de celui qui vouseft préfenté.*
Nous
avons vuque,
d’après le tarifde
i75o
le produit net de la poite aux lettres devroitêtre au
moins de i5,5oo
3ooo
fr.Or
, daprès le bail, les fermiers auroient
en
bénéfice ner*^ A V O
IR
9Surle
onzième
million....
OpiniondeGrofcajjand-
Dorimond,
200,000
A 3
6
Sur
ledouzième
.... 3oo,ooo Sur
le treizième. . ....
. . .400,000 Sur
lequatorzième,
pareilleforrsme
de
. .4 00
>0a0 Su
lequinzième,
la moitié, ceft-àdire,600,000 Enfin
furles5 oo,coo
fr.reliant,encorelamoitié, c’ell-à-dite 2.00,000
Total
. . . . . . . * .2
,o5 o,ooo
fr.Ainfi
donc
,en
rétabliffantpurement & fimplement
letarif
de 1759
, lesfermiersrégifïèurs auroient, pendantdix ans,un
bénéfice annuel&
netde 2,060,000
fr.; j’ai dit bénéficenet, car vous avezvu que
je n’ai calculéque
fur le produitnet,&
tousfraisprélevés.Si nous reportons maintenant nos regards fur le produit
préfumé
ôc netdu nouveau
tarif propofé, produit qu’en- cavant au plus bas, nous -avons évalué à
19,376,000
fr.,nous
verronsque
le bénéfice annuel&
net des fermiers ré- gilTeurs feroit; favoir,Sur le
onzième
million ,de 200,000
fr.Sur
Jedouzième
,de
. . . . . . . .3 o©,ooo
,
Sur
les treize&
quatorzième,de
. . .800,000 Sur
lesquinzième,
feizième, dix-feptième,
dix huitième
&
dix-neuvième,de
. . . .2,600,000 Et
enfinfur les376,000
fr. reliant , de .187,600
,
Total
3,987,500
Or
je ledemande
:n
etes-vouspaseffrayés,mes
collègues,de
la propoficion d’accorder annuellement&
en bénéficeJ’aiprouvé
que
le produit net de la porte aux lettres étoit le réfultat d’une véritable contribution • or l’art.XVI
des droits del’homme
pofe en principe que toute contribution ejl établiepour
l utilité générale; vousne
pouvezdonc
per- mettre qu’une grande partiede lacontribution référante des portsde
lettre tourne au profit particulier des fermiers ré- gifleurs.,
On me
dira peut-être qu’il sagit icinon
d’une fimple régie, maisdun
bail,
d un
forfait^ d’un jaélus retis *que
fi les fermiers courent la chance d’un grand bénéfice3 ils
courent au/ÏÏ celle d'une grande perte.
Une
pareilleob-
jeaion nepourroitêtrepréfentée debonne
foi parquiconque
aüra lu, foie le bail, foit le cahier des charges, foie le rapport de notre
coHègue
Villers, dont le but&
l’unique but eftde
porter le produit net de la porte aux lettres au-8
Ilfallut l
3apprécier d
fa
jufle valeur.Or
le bail en a étépade
avantque
leCorps
légidatif eût cladé fon produit pour dix millions dans les recettesde
l’an7
: c’eftdonc
le bail antérieur au budget de l’an7
, qui en a fait placer leproduit dans les recettes de ladite
année
; ce n’eftdonc
pas ceplacement
qui doit faireaugmenter
le produitde
lapoûe
aux lettres.Ici fe préfente lagrande objection tiréed’une des claufes
du
bailLes
fermiers, dit-on
, n’ont accepté le bailque
fousla
promede
faite par le Dire&oirede demander au Corps
légidatif le rétablidement du
tarifde 1759
.;d donc on ne
rétablitpas ce tarif fur lequel ils ont
compté, on
ne peut Jes forcer à lamaintenue
de leur bail.Je réponds i°.
que
les fermiers n'ontpu
contracterque
fous l’empire des lois exiftantes; qu’ils n’ont
pu compter
furun
futurcontingent; qu’avant defe rendre fermiers, ilsont
du
avoir desdonnées
pour apprécier la chofe àfajufte valeur;
Que
ce n’eft point le tarif de1759
qu’on nous pro- pofe d’adopter, maisun
tarifabfolument
différent,& dont
le produitferoit plus fort
;
3
°.Que
le Directoire, en fe chargeant dedemanderait Corps
légidatifle rétablidemencdu
tarifde 17^9
, apu
le faire; mais qu’il ne s’eft pas chargé de faire décréter ce ré- tabîidement; qu’en ledemandant
il a remplifapromette,que
nous remplirons notre devoir en refufant l’adoption d’un projetqui enrichiroit quelques particuliers au détrimentdu
tréforpublic
;
40.
Que
dedeux
chofes l’une,ou
lesfermiersdemandent
la réfiliation
de
leur bail,eu
ils veulent e maintenir.Dan*
adopter le
nouveau
taritdont tout le produit net lera verfé au tréfor national} dans le fécond cas, les fermiers n’auronî pas à feplaindrej ils veuferont les
10
millions, prixde
leur bail, dans le tréfor public, &r nous n’aurons ni à enrichir quelquesindividus, ni àcraindreun
déficit dans cettepartie des recettesde
l’an 7.Notre
collègue Villers nous dit, dans fan rapport, qu’il elt
démontré
qu’avec le tarif actuellement exiftant ,on ob^
tiendroitdifficilement
7,000,000
fr.,d’où je tire pour lui laconféquence que ledéficit feraitde
3
,000,000
fr.;cependant
il nous dit ailleurs,
&
dans lemême
rapport,que
le dé-ficit actuellement exiftant n’eft
que
dei,444>^9^
^r- 5&
5toujoursdans le
même
rapport, ilnous
ditque
le produitdu nouveau
tarif produiroitune
augmentation de2,000,000
fr.Or
, dans la fuppofiiionde
fo11 premier déficit, qu’il porte à3 ,ooo,ooo
fr. , l’augmentation qu’ilpréfume du nouveau
tarif ne fuffiroit j car il ne l’évalue qu’à
2,000,000
fr.,&
il refteroitencore
1,000,000
fr.de
déficit,d’aprèsfespropres calculs.Dans
la fuppofition de fop fécond déficit,
qu’il
ne
porte qu’à i;
444
>59
<} fr. , lenouveau
tarif produiroitun béné-
fice
de 5 oo,ooo
fr., dont100,000
fr. pour les fermiers- régiflfeurs. Voilà desdonnées
bien contradictoires ,&
j’avoue
que
je ne puis tout-à-la-fois ,&
avec lemême
tarif, admettre
un
déficit d’un million , 8cun
excédantde 5 00,000
fr.Je- finirai par rappeler au Confeil
deux
faits qui lui ont déjàétéexpofés àcettetribune : le premier , c’eftque, dans Ja diffiibütion des fornmes deftinées aux frais démanu-
10
tentîon
&
dépenfesd
’adminiftration de la pofteaux lettres, les fermiers-régifleurs fe font adjugé a chacun 4°>000
fr-de
traitement annuel : c’eft fans doutecomme
adminif- trateurs , ôc c’eft pour leur qualité de fermiers qu’on vousdemande
poureux des bénéfices confidérables. jeledemande
,>mes
collègues, n’eft-ce pasune
monftruofité qu’uneferme
régie, dont les agens font très-chèrement payés
comme
régilfeurs
ou
adminiftraceurs , Scdemandent comme
fer-miers,
&
fans courir aucune chancede
perte ,un béné-
fice annuel
de 3 ,ooo,ooo
fr. fur les deniers publics qu’ils adminiftrent?Le
fécond fait qui vous a également étéannoncé
à cette tribune, eftque
, lorsdu
dernier baildont
nousnous occupons,
il fe préfentaune compagnie
quioffrit i million annuellement, ôc en fus
du
prix de toutes les fourmilions faites&
à"fairej plus ,une
refponfabilité en biens fondsdey
millions* eçifin lanomination du
caiflier, Ôc l’épuration desmembres de
cettecompagnie
à la dif- politiondo
Dire&oirc• ôc le tout fans exiger la conditiondu
rétabliffementdu
tarif de 1759.Je
me réfume
Sc jedemande
:î°.
La
queftion préalable fur le projetde
votrecommif-
yfion,
comme
erronné dans fes bafes, incohérent ôc inconf- tkutionnel dans (es difpofitions à l’égard des fermiers régilfeurs; 2.0
. L’ajournement de la difaifilon
du nouveau
tarif qui vous eft propoféÿ