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Centrale Maths 2 PC 2018 — Corrigé
Ce corrigé est proposé par Loïc Devilliers (ENS Cachan) ; il a été relu par Clément Mifsud (professeur en CPGE) et Sophie Rainero (professeur en CPGE).
Ce sujet a pour objet la fonctionζde Riemann, définie par la somme de la série de fonctions
ζ:x7−→
+∞
P
n=1
1 nx
Cette fonction est importante en mathématiques ; elle intervient notamment en arith- métique dans l’étude des nombres premiers.
• Dans la première partie, on étudieζ sur son ensemble de définition. Cela peut sembler facile ; néanmoins, il faut rédiger de manière rigoureuse.
• La deuxième partie introduit la fonction auxiliaire f :x7−→
+∞
P
n=1
1 n+x− 1
n
L’ensemble de définition def n’étant pas un intervalle, l’étude de la fonctionf demande un peu de prudence. Ensuite, on fait le lien entre le développement en série entière de f et la fonctionζ. Il en découle une expression sous forme intégrale deζ(k)pour k∈Netk>2.
• Enfin, la troisième partie allie, avec élégance, les probabilités, l’arithmétique et la fonctionζ. Comme il y a très peu d’arithmétique au programme de PC, le sujet introduit toutes les notions et propriétés nécessaires. Après avoir défini deux variables aléatoires, on s’intéresse à la probabilité que deux entiers tirés au hasard soient premiers entre eux (c’est-à-dire que 1 soit leur seul diviseur positif commun). On établit un lien entre la fonctionζet les nombres premiers.
La dernière question, point d’orgue du sujet, montre que si on tire deux entiers de manière uniforme dans [[ 1 ;n]], alors la probabilité qu’ils soient premiers entre eux tend vers1/ζ(2)lorsquen→+∞.
Ce sujet est un beau problème d’analyse. Certaines questions assez techniques – comme la dérivation des intégrales à paramètre–sont à faire très méticuleusement, mais cet effort sera récompensé en fin de problème par l’obtention de jolis résultats.
On peut ainsi proposer ce sujet d’une part comme outil de révision des séries de fonctions, des intégrales à paramètre, des fonctions développables en série entière et des probabilités, et d’autre part, pour être émerveillé par les mathématiques.
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Indications
Partie I
2 Montrer la convergence normale sur tout segment deDζ. Partie II
10 Déterminer l’ensemble des réelsxtels que pour toutn∈N∗,n+x6= 0.
11 Montrer quef est décroissante sur tout intervalleItel que I⊂Df. 12 Pourm∈N∗, exprimerf(m)en fonction de f(m−1).
13 Utiliser la question précédente pour trouver un équivalent def(M)quandMtend vers +∞. En déduire un candidat naturel pour un équivalent de f(x) quand x tend vers+∞, puis prouver que ce candidat est bien un équivalent.
14 Pourm∈N∗, écriref(x+m)en fonction def(x+m−1).
15 Dans la relation trouvée à la question 14, isoler le terme(x+k)−1. 16 Utiliser le critère de d’Alembert.
17 Appliquer le théorème de dérivabiliték-ième des séries.
19 Utiliser la formule de Taylor avec reste intégral.
22 Appliquer le théorème de dérivabilité k-ième des intégrales à paramètre pour dériverkfois la fonctionf, puis utiliser la question 19.
Partie III
27 Calculer la variance deXgrâce àV(X) = E(X2)−E(X)2.
29 Utiliser l’équivalence de l’énoncé sur les nombres premiers divisant un entier ainsi que la question 28.
30 Appliquer le théorème de continuité monotone pour l’intersection d’événements, puis utiliser la question 28.
31 Montrer que les n événements (X ∈ piN∗)∪(Y ∈ piN∗), pour i ∈ [[ 1 ;n]], sont mutuellement indépendants.
33 En utilisant la question 32, majorer, pour tousm, n∈N∗, P
+∞
T
k=m+1
(Wn =k)
!
par une quantité qui ne dépend pas de n.
35 ComparerWavec une variable aléatoire de loi ζde paramètre2.
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I. Fonction zêta
1 Soitx∈R. La série P
1/nxest une série de Riemann de paramètrex. D’après le cours, cette série converge si et seulement six >1. Ainsi,
Dζ = ] 1 ;+∞[
2 Pour toutn∈N∗, notonsζn:x7−→n−x définie sur] 1 ;+∞[. Ainsi
∀x∈] 1 ;+∞[ =Dζ ζ(x) =
+∞
P
n=1
ζn(x) Appliquons le théorème de continuité des séries de fonctions.
• Pour toutn∈N⋆, la fonctionζn est continue surI.
• Soient α, β ∈ ] 1 ;+∞[ avec α < β. Montrons la convergence normale de la série de fonctions P
ζn sur I = [α;β]. Pour toutn∈N∗, ζn est une fonction positive et décroissante surI, ainsi
sup
x∈I
|ζn(x)|= sup
x∈I
ζn(x) =ζn(α) Commeα∈Dζ, on en déduit quePsup
x∈I
|ζn(x)|converge. Par conséquent,Pζn
converge normalement donc uniformément surI. Ainsi, la sérieP
ζn converge uniformément versζ sur tout segment deDζ.
Le théorème de continuité des séries de fonctions permet de conclure que La fonctionζ est continue surDζ.
3 Soientx, y∈] 1 ;+∞[et n∈N∗. On suppose que x < y etn>2. Alors1x= 1y etn−x> n−y. Par combinaison de séries convergentes, on en déduit que
ζ(x)−ζ(y) =
+∞
P
n=1
1 nx − 1
ny
= 1 2x − 1
2y +
+∞
P
n=3
1 nx − 1
ny
> 1 2x − 1
2y car pour toutn∈N∗, 1 nx− 1
ny >0
ζ(x)−ζ(y)>0 car 1
2x − 1 2y >0 La fonctionζest strictement décroissante surDζ.
Attention à ne pas raisonner de la manière suivante :
∀M∈N∗,
M
P
n=1
n−y<
M
P
n=1
n−x donc par passage à la limite lorsqueMtend vers+∞
ζ(y)< ζ(x)
En effet, les inégalités strictes ne passent pas à la limite. C’est pour cela qu’un terme strictement positif a été isolé dans l’expression deζ(x)−ζ(y).
4 Grâce à la question 3, on sait que la fonction ζ est décroissante sur ] 1 ;+∞[.
De plus, la fonction ζ est positive, car pour tout x ∈ Dζ, ζ(x) est une somme de
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termes positifs. On en déduit que ζ est minorée par 0. D’après le théorème de la limite monotone, on a montré que
La fonctionζadmet une limite finie en +∞.
L’énoncé ne précise pas s’il veut qu’on démontre l’existence d’une limite finie ou pas. Dans le doute, on recommande de démontrer que la limite est finie.
5 Soitx∈Dζ = ] 1 ;+∞[. Considéronsn∈Ntel quen>2. La fonctiont7−→t−x étant décroissante sur ] 0 ;+∞[, elle est décroissante sur [n−1 ;n+ 1 ] ⊂] 0 ;+∞[.
On en déduit que pour tout t ∈ [n;n+ 1 ], t−x 6 n−x donc par croissance de l’intégrale, il vient
Z n+1
n
t−xdt6 1 nx
La majoration s’obtient de même en intégrant sur[n−1 ;n]l’inégalité t−x>n−x.
∀x∈Dζ ∀n∈N n>2 =⇒
Z n+1
n
1
txdt6 1 nx 6
Z n
n−1
1 txdt
6 Soient x ∈ Dζ = ] 0 ;+∞[ et M ∈ N avec M > 2. En sommant les inégalités obtenues à la question précédente pourn∈[[ 2 ; M ]], on a
M
P
n=2
Z n+1
n
1 tx dt6
M
P
n=2
1 nx 6
M
P
n=2
Z n
n−1
1 txdt En utilisant la relation de Chasles, il vient
Z M+1
2
1 txdt6
M
P
n=2
1 nx 6
Z M
1
1 tx dt
Ajoutons 1 = 1x à chacun des membres de la ligne ci-dessus, puis calculons les intégrales des membres de droite et de gauche. Commex∈Dζ, en particulier,x6= 1, on obtient
1 +(M + 1)1−x
1−x − 21−x 1−x6
M
P
n=1
1
nx 6 M1−x 1−x − 1
1−x+ 1
LorsqueMtend vers+∞,M1−xet(M+1)1−xconvergent vers0carx >1. Par passage à la limite, on en conclut que
∀x∈Dζ 1 + 1
(x−1)2x−1 6ζ(x)61 + 1 x−1
7 Lorsquextend vers1+, par continuité dex7−→(x−1)2x−1 en1+, (x−1)2x−1 tend vers0+, donc
(x−1)2x−1−1
tend vers+∞. D’après la question 6, la fonctionζ est ainsi minorée par une fonction tendant vers+∞en1+. On en déduit que
La fonctionζ tend vers+∞en1+.
8 Lorsque x tend vers +∞, x−1 et 2x−1 tendent vers +∞. Ainsi, (x−1)−1 et
(x−1)2x−1−1tendent vers0lorsquextend vers+∞. En appliquant le théorème d’encadrement au résultat de la question 6, on en déduit que
La fonctionζ tend vers1en+∞.
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