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Calcul du délai de congé : revirement de jurisprudence? : Commentaire de l'arrêt du Tribunal fédéral, Ier Cour civile, du 14 avril 2005, recours en réforme (4CF.423/2004)

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Calcul du délai de congé : revirement de jurisprudence? :

Commentaire de l'arrêt du Tribunal fédéral, Ier Cour civile, du 14 avril 2005, recours en réforme (4CF.423/2004)

AUBERT, Gabriel

AUBERT, Gabriel. Calcul du délai de congé : revirement de jurisprudence? : Commentaire de l'arrêt du Tribunal fédéral, Ier Cour civile, du 14 avril 2005, recours en réforme (4CF.423/2004).

Droit du travail

, 2005, no. 3, p. 173-176

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:12188

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UxteilsbesprechllogenjCommeotaires d'arrêts

Urteilsbesprechungenj Commentaires dfarrêts

CalcuL du délai de congé: revirement de jurisprudence? ~W

Commentaire de l'arrêt du Tribunal fêdéral, I<e Cour civile, du 14 avril 2005, recours en réforme (4C.423/2004)

Prof. Dr. Gabriel Aubert

1. Question classique

La mise en œuvre du mécanisme de protection instauré par l'an. 336c al. 2 CO suscite une question classique, sur laquelle un récent arrêt du Tribunal fédéral nous donne l'occasion de revenir. Soit un salarié qui a commencé sa première année de service le 1" janvier 2005. Lemployeur a résilié le contrat le 10 août 2005 pour le 30 septembre 2005. Le travail- leur tombe malade du 12 au 25 août 2005. Lincapa- cité de travail sera-t-elle considérée comme survenue pendant le délai de congé, auquel cas elle entraîne la suspension de ce délai selon l'art. 336c al. 2 CO (pre- mière solution)? Ou ne tiendra-t-on compte, aux fins de cette disposition, que des périodes d'incapacité de travail qui pourraient se produire durant le mois de septembre 2005 (seconde solution)? Dans l'arrêt du 14 avril 2005 (cause 4C.423/2004), la première Cour civile a opté pour la première solution, en déclarant que, «soweit ersichtlich», le Tribunal fédéral ne se serait jamais prononcé sur ce point.

2. Jurisprudence bien établie

En réalité, le problème a fait l'objet d'une jurispru- dence de principe, qui consacre la seconde solution, appliquée constamment pendant les quinze derniè- res années.

En 1989, se fondant sur une étude attentive des divergences apparues dans la doctrine et dans la jurisprudence, le Tribunal fédéral des assurances s'est prononcé pour la seconde solution: le délai de congé se calcule rétroactivement à partir de l'éché- ance du contrat (soit, dans notre exemple, en sep- tembre 2005). Cette décision repose sur plusieurs motifs. Selon la volonté du législateur, le délai de congé a pour but d'aider le salarié à trouver un nou-

vel emploi; cette recherche est particulièrement compromise lorsqu'il tombe malade à la fin de son contrat; à ce moment, la suspension du délai de congé lui est particulièrement nécessaire. De plus, en l'absence de protection à la fin du contrat, le tra- vailleur perd en général tout droit à sa rémunéra- tion, car, généralement, le nouvel employeur n'a robligation de verser le salaire au travailleur empêché de travailler qu'à condition que les rapports de travail aient duré trois mois ou aient été conclus pour plus de trois mois (art. 324a al. 1 CO). Enfin, si le délai de congé pouvait expirer avant l'échéance du contrat, remployeur serait tenté de notifier la résiliation à ravance, pour écha~per à la prolongation du contrat, lorsque le travailleur annonce avec un long délai de prévenance une importante période d'absence, par exemple en raison d'une opération chirurgicale ou d'une obligation militaire (ATF 115 V 437 consid. 3).

En 1992, la l'' Cour civile a expressément fait sienne cette solution, en se référant à l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances (SJ 1993 p. 366). En 1993, elle a confirmé sa position dans un arrêt officielle- ment publié (ATF 119 II 449 consid. 2a). Elle l'a encore retenue en 1994 (SJ 1995 p. 801), puis en 1995, dans une décision officiellement publiée et comportant un calcul clair (ATF 121 III 107 consid.

2a). La jurisprudence précitée a encore été rappelée par la l'' Cour civile en 1998 (ATF 124 III 346 consid.

la), puis par la l'' Cour de droit public en 2001 (ATF lP.250/2000, du 26 février 2001, consid. 4b), et de nouveau par la I" Cour civile en 2002 (ATF 4C.331/

2001, du 12 février 2002, consid. 3d).

On ne saurait donc affirmer que la question exami- née par le Tribunal fédéral, dans l'arrêt du 14 avril 2005, n'a déjà été tranchée par lui. Au contraire, elle fait robjet d'une jurisprudence constante au sein de la 1" Cour civile (six arrêts, dont cinq publiés), qui

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ARV/DTA 2005 173 1

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se trouve partagée par le Tribunal fédéral des assu- rances (son initiateur) et par la l'' Cour de droit public.

3. Quatre précédents cités

Dans l'arrêt ici critiqué, la Ire Cour civile cite quatre précédents jurisprudentiels. Elle se réfère d'abord à un jugement zurichois paru au Jahrbuch des Schwei- zerischen Arbeitsrecht de 1985, p. 226s. En réalité, ce jugement retient la solution consacrée par la juris- prudence traditionnelle, perdue de vue par le Tribu- nal fédéral dans farrêt du 14 avril 2005. Cet arrêt se réfère probablement à une décision du Tribunal can- tonal de Zoug, paru dans le même volume (JAR 1985 p. 223), selon lequel, en effet. le délai de congé ) commence de courir dès la notification de la résilia-

tion (loc. cit, p. 224). ~arrêt zougois fait partie des décisions cantonales judicieusement étudiées par le Tribunal fédéral des assurances en 1989 (ATF 115 V 437 consid. 3a). Cette haute instance l'a expressé- ment désapprouvé. On ne peut attribuer qu'une importance minime à une ancienne décision canto- nale, contraire à une jurisprudence fédérale ulté- rieure et constante.

La l'' Cour civile cite aussi l'ATF 109 II 330 consid.

2a. Dans cette cause, datant de 1983, la résiliation fut notifiée le 31 août 1979. Le délai de congé de trois mois devait prendre fin le 30 novembre 1979.

Une incapacité de travail survint du 23 novembre au 10 décembre 1979. On le voit: il ne s'agissait nulle- ment de fhypothèse visée dans l'arrêt du 14 avril

~005, soit celle où, rappelons-le, l'incapacité sur- vient entre la notification du congé et le début du mois qui suit. Ce précédent manque de pertinence.

La Ire Cour civile s'appuie également sur un arrêt ATF 121 III 107 consid. 2, de 1995. Dans cette affaire, le contrat de travail fut résilié le 5 avril 1993 avec effet au 31 juillet 1993. Le Tribunal fédéral a expres- sément relevé que le délai de congé, de trois mois pour la fin d'un mois, a commencé de courir le 1"

mai 1993. Il a appliqué la méthode de calcul rétroac- tif à partir de l'échéance du contrat, conformément à sa jurisprudence. C'est ce qu'a perdu de vue l'arrêt du 14 avril 2005.

Enfin, la Ire Cour civile renvoie à un arrêt ATF 124 III 474 consid. 2. Il est vrai que, dans cette cause, les

Ilrtejlsbespœch"ogeo /Commentajres d'arrêts

parties avaient fait commencer le délai de congé à compter de la résiliation. Le Tribunal fédéral n'avait pas de raison d'examiner ce point qui, comme il l'a expressément relevé, n'était pas litigieux devant lui (ATF 124 III 474 consid. 1). La Ire Cour civile ne pou- vait rien en tirer quant à notre problème.

Ainsi, des quatre décisions citées par la Ire Cour civi- le, deux contredisent nettement la solution dernière- ment retenue par cette dernière, le 14 avril 2005, et les deux autres sont sans pertinence. Quant à l'arrêt zougois, auquel elle semble se référer, il est isolé parmi les décisions cantonales; de plus, il est large- ment dépassé par la jurisprudence ultérieure et supérieure.

4. Renvois

à

la doctrine

~arrêt du 14 avril 2005 comporte deux renvois à la doctrine. La référence à Favre/MunozjTobler est sur- prenante. En effet, ces auteurs, à l'endroit cité par la Cour, rappellent clairement la jurisprudence fédérale et renvoient aux arrêts 119 II 449 consid. 2a et 115 V 437 consid. 3 précités (FavrejMunozjTobler, Le contrat de travail, Code annoté, Lausanne 2001, n.

2.4 ad art. 336c CO, p. 193 en bas). Ils ne militent nullement pour la solution retenue par le Tribunal fédéral en 2005. La Ire Cour civile cite aussi ravis d'Eg/i, tout en admettant qu'elle s'en écarte (Eg/i, in Kren KostkiewiczjBertschingerjBreitschmidjSchwan- der, Handkommentar OR, Zurich 2002, n. 14 ad art.

336c CO et n. 1 ad art. 335a CO). C'est dire qu'aucu- ne des deux sources doctrinales visées dans l'arrêt ne conforte la nouvelle solution retenue par le Tribunal fédéral.

En vérité, toute la doctrine récente approuve la juris- prudence perdue de vue par la Ire Cour civile le 14 avril 2005 (8runnerjBühlerjW~eberjBruchez, Com- mentaire du contrat de travail, Lausanne 2004, n. 12 ad art. 336c, p. 269 et note infrapaginale 1, se fon- dent explicitement sur la jurisprudence inaugurée par le Tribunal fédéral des assurances, même si le schéma présenté par les auteurs paraît discutable;

Wyler, Droit du travail, Berne 2002, p. 430; Aubert, Commentaire romand, n. 3 ad art. 336c-d CO;

Portmann, Individualarbeitsrecht, Zurich 2000, n. 1108-1009; Duc/Subi/ia, Commentaire du contrat individuel de travail, Lausanne 1998, p. 446-447;

Tarnutzer-Münch, Kündigungsschutz, in Geiserj

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IJrteilsbesprechlJogen/Commeotaiœs d'arrêts

Münch, Stellenwechsel und Entlassung, Bâle 1997, n. 2.51 et note infrapaginale 63, p. 76; Staehelin, Commentaire zurichois, n. 21 ad art. 336c CO; Brüh- wiler, Kommentar zum Einzelarbeitsvertrag, Berne 1996, n. 7 ad an. 336c CO, p. 353 au milieu; Rehbin- der, Commentaire bernois, n. 7 ad art. 336c CO;

Streiff/von Koenel, Arbeitsvertrag, Zurich 1992, n. 3 ad art. 336c CO in Ane).

5. Revirement de jurisprudence?

On peut se demander si l'arrêt ici critiqué constitue un revirement de jurisprudence. A notre avis, tel n'est pâs le cas. En effet, soucieux de la sécurité du droit, le Tribunal fédéral n'a pas l'habitude de chan- ger sa jurisprudence sans le dire. S'il s'y résout, c'est toujours pour des motifs explicites, qu'il apprécie d'autant plus restrictivement que la jurisprudence est bien établie (ATF 129 V 289 consid. 3.2; 125 III 50 consid. 2a/cc; 122 1 57 consid. 3c; 121 III 184 consid. 2).

Or, le 14 avril 2005, le Tribunal fédéral n'a nullement déclaré ou expliqué un revirement: il a visiblement méconnu ses propres précédents, qu'il ne discute pas. Il faut donc admettre que l'arrêt de 2005 ne prête pas à conséquence, sur ce point, et qu'il con- vient de continuer à calculer le délai de congé rétro- activement, à partir de l'échéance du contrat. Ainsi, une incapacité de travail se produisant entre la noti- fication du congé et le début du délai de congé n'en- traîne aucune suspension de ce dernier.

6. Rejet du recours pour un autre motif

b) II a toujours été admis que la date déterminante, pour Axer la durée du délai de congé, est celle de la notiAcation de la résiliation; peu importe quand le délai échoit, c'est-à-dire s'écoule (Brunner/Bühler/

WaeberjBruchez, n. 2 ad art. 335c CO, p. 238 en haut; Aubert, n. 4 ad art. 335c CO; Stoehelin, Com- mentaire zurichois, n. 6 ad art. 335c CO; Rehbinder, Commentaire bernois, n. 3 ad art. 335c CO;

Streiff/von Kaenel, n. 3 ad art. 335c CO; Portmann, n. 1048). Cette manière de voir est celle de la déci- sion zurichoise, citée à contresens par le Tribunal fédéral dans l'arrêt de 2005: ce jugement distingue soigneusement entre la date de la notification du congé (le 24 avril 1984) et le début du délai de congé (1" maï 1984). Les juges zurichois s'appuient d'ailleurs sur l'avis de OserjSch6nenberger, n. 5 ad art. 348 aCO (JAR 1985 p. 227). Ainsi, supposons un travailleur engagé à compter du 1" janvier 2005, le délai légal de congé étant d'un mois pour la An d'un mois la première année de service et de deux mois pour la fin d'un mois la deuxième année de service (art. 335c al. 1 CO). Si l'intéressé reçoit son congé en décembre 2005, le délai de congé sera d'un mois pour la An d'un mois. Bien que la résiliation ait été notifiée durant la première année de service, le délai de congé s'écoulera pendant la seconde année de service. Il reste toutefois d'un mois pour la fin d'un mois.

c) De la même façon, dans l'arrêt ici critiqué, la rési- liation ayant été notiAée le 17 août 2000, c'est en fonction de cette date que se déterminait la durée du délai de congé. Etant, selon le contrat, d'un mois pour la fin 'd'un mois jusqu'au 31 août 2000, cette durée s'appliquait en l'occurrence, si bien que le contrat expirait le 30 septembre 2000. Il était dès lors inutile de rechercher si le délai de congé com- A vrai dire, dans l'arrêt du 14 avril 2005, le Tribunal mençait à courir le 17 août ou le 1" septembre 2000.

fédéral pouvait rejeter le recours pour un autre motif, sans aborder la question sur laquelle nous nous sommes appesantis.

a) La Ire Cour civile est partie de l'idée que si le délai de congé commençait à courir le 17 août, ce délai était d'un mois et que, s'il commençait à courir le 1" septembre, il serait de six mois. Ce faisant, elle a confondu deux questions: d'une part, celle de savoir quelle est la date déterminante pour fixer la durée du délai de congé (la seule décisive en l'occurrence) et, d'autre part, quand le délai commence à courir.

Ces questions sont indépendantes.

7. Conclusion

On pourrait songer à modifier (et à simplifier) l'ap- plication de l'art. 336c al. 2 CO en adoptant pure- ment et simplement la computation des délais pré- vue à l'art. 77 CO. Dès lors, un congé d'un mois pour la fin d'un mois, donné le 17 août, verrait le délai commencer le 17 août et expirer le 17 septembre, le terme étant reporté au 31 septembre. Seules entraî-

neraient une suspension les périodes d'incapacité de travail survenant durant le délai ainsi calculé.

ARV/DTA 2005 175

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Serait alors abandonnée la jurisprudence fédérale inaugurée en 1989 et appliquée constamment depuis cette date, sans opinion dissidente ni dans la juri- sprudence cantonale ni dans la doctrine. Encore fau- drait-il montrer que cette jurisprudence ne corres-

Ilrteilsbesprechuogeo /Commpntaires d'arrêts

pond pas à la volonté du législateur, telle qu'elle a été dégagée par le Tribunal fédéral lui-même. On cherche en vain cette démonstration dans l'arrêt du 14 avril 2005.

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