A359 – Quod abundat non vitiat
Par convention, le degré d’abondance d(n) d’un entier naturel n > 0 est égal au rapport σ(n) / n où σ(n) désigne la somme des diviseurs de n, y compris 1 et n.
Q₁ Déterminez les plus petits entiers dont les degrés d’abondance sont respectivement ≥ 2, 3, 4 et 5. Justifiez votre réponse.
Q₂ Un entier k > 1 étant fixé à l’avance, prouvez qu’on sait toujours trouver au moins un entier (pas nécessairement le plus petit) tel que son degré d’abondance est au moins égal à k.
Q₃ Un entier n > 1 étant fixé à l’avance, prouvez qu’on sait toujours trouver une suite S strictement croissante de n entiers positifs telle que la suite S’ constituée par la somme des diviseurs de chacun des n termes de S est strictement décroissante.
Solution proposée par Patrick Gordon Q1
Si n se décompose en facteurs premiers pa qb…, alors d(n) est le produit des : d(pa) = (pa+1 – 1) / pa (p – 1)
Or (pa+1 – 1) / pa (p – 1) = (pa+1 – 1) / (pa+1– pa) tend en croissant vers p / (p – 1)
Si l'on augmente de 1 un des exposants, c’est-à-dire si l'on passe de n = pa qb… à n' = pa+1 qb… d(n) passe à d(n') = d(pa+1) d(qb)… et est donc multiplié par :
d(pa+1) / d(pa) = (pa+2 – 1) / (pa+2 – p)
Ce multiplicateur pas à pas tend vers 1 quand a croît.
Le multiplicateur depuis a = 1 est :
[(pa+1 – 1) / pa (p – 1)] / [(p + 1) / p]
Il tend vers
[p / (p – 1)] / [(p + 1) / p] = p² / (p² – 1), lequel tend vers 1.
On ne peut donc pas compter seulement sur l'augmentation des exposants pour faire croître d(n).
Si maintenant on ajoute un facteur premier, soit tc, on multiplie d(n) par d(tc) qui, pour c croissant depuis 1, croît de (p + 1) / p à p / (p–1), soit un coefficient légèrement supérieur au précédent.
Pour déterminer les plus petits entiers dont les degrés d’abondance sont respectivement ≥ 2, 3, 4 et 5, nous disposons donc de deux outils, desquels il faut "jouer" au plus juste, c’est-à-dire, en partant d'un n donné, soit augmenter ses exposants, soit ajouter des facteurs premiers.
À l'évidence, le plus petit entier dont le degré d’abondance est ≥ 2 est 6, dont les diviseurs sont 1, 2, 3, 6 (de somme 12).
Partant de 6 = 21 × 31, on constate que l'on ne dépasse pas d = 3 en jouant sur les seuls exposants.
En ajoutant les facteurs premiers 5, 7 et 11, on arrive à d = 2,9922.
Là il faut faire un choix. En ajoutant le facteur premier 13, on arrive à d = 3,224. En augmentant de 1 l'exposant de 11, on arrive à d = 3,0149.
Nous retiendrons cette valeur et donc que le plus petit entier dont le degré d’abondance est ≥ 3 est 25.410.
Pour d ≥ 4, on trouve par tâtonnements une solution qui pourrait être la bonne : n = 2² 3 5 7 11 13² 17 = 13.273.260, qui donne d = 4,02455
Pour d ≥ 5, on trouve par tâtonnements une solution qui pourrait être la bonne : n = 23 33 5² 7² 11 13 17² = 10.935.124.200, qui donne d = 5,0048.
Q2
Une condition suffisante pour que la propriété soit établie est que, si l'on considère le produit Pn
des n premiers nombres premiers 2, 3, 5… pn tous à la puissance 1, la suite d(P) = d(2) d(3) d(5)… d(pn) diverge, c’est-à-dire que la série ln[d(2)] + ln[d(3)] + ln[d(5)] + …+ ln[d(pn)] … diverge.
Or, d(pn) = 1 + 1 / pn. Son logarithme, pour n grand, est donc de l'ordre de 1 / pn. Or la série des inverses des nombres premiers diverge (théorème de Paul Erdős) Q3
Pour n = 2, soit p et q deux nombres premiers et considérons les nombres p et q². On a : σ(p) = 1+p; σ(q²) = 1+q+q²
Peut-on avoir q² < p et 1+q+q² > 1+p ? Oui car p > q² implique 1+q+q² > 1+p > 1+q².
Exemples :
q² = 4 σ(q²) = 7 p = 5 σ(p) = 6
q² = 9 σ(q²) = 13 p = 11 σ(p) = 12
Pour n > 2, on peut trouver des solutions en tâtonnant, par exemple (n = 7) :
k σ(k) d = σ(k)/k 540 1680 3,111111111 560 1488 2,657142857 570 1440 2,526315789 572 1176 2,055944056
581 672 1,156626506
583 648 1,111492281
589 640 1,086587436
Les d vont naturellement décroissant, mais cela ne suffit pas pour que les k croissent et les σ(k) décroissent. Par exemple, si l'on complète cette liste avec les nombres premiers qui suivent 589, σ(k) se remet à croître.
Une idée pourrait être de compléter la liste "par le haut" (c’est-à-dire, ici, en partant d'un k < 540 dont le σ serait > 1680). Mais jusqu’où peut-on aller? Il faudrait "ajuster" le premier terme en fonction de la longueur n de la suite à atteindre.