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Représentation du corps, fonctionnement du système nerveux central et douleur centrale : études chez le blessé médullaire

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-02893384

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Submitted on 8 Jul 2020

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Représentation du corps, fonctionnement du système nerveux central et douleur centrale : études chez le

blessé médullaire

Thomas Osinski

To cite this version:

Thomas Osinski. Représentation du corps, fonctionnement du système nerveux central et douleur centrale : études chez le blessé médullaire. Physiologie [q-bio.TO]. Université Paris Saclay (COmUE), 2019. Français. �NNT : 2019SACLV091�. �tel-02893384�

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Représentation du corps, fonctionnement du système nerveux central et douleur centrale : études chez le blessé médullaire

Thèse de doctorat de l'Université Paris-Saclay préparée à l'Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines

École doctorale n°568 signalisations et réseaux intégratifs en biologie (Biosigne) Spécialité de doctorat : Recherche clinique innovation technologique, santé publique

Thèse présentée et soutenue à Garches (92), le 13 Décembre 2019 par :

Thomas Osinski

Composition du Jury :

Dr Luis Villanueva

Directeur de recherche, CPN/INSERM U894, Rapporteur Pr Giandomenico Iannetti

Neuroscientifique, GM06 University College of London

Rapporteur Pr François Genêt

Médecine Physique et Réadaptation, INSERM U1179

Président du jury Dr Thomas Rulleau

Masseur-Kinésithérapeute, CHD La Roche sur Yon Examinateur Dr Didier Bouhassira

Neurologue, directeur unité INSERM UMR987 Directeur de thèse Pr Valéria Martinez

Anesthésiste, unité INSERM UMR987 Co-Directrice de thèse

NNT : 2 0 1 9 S A C L V 0 9 1

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Titre : Représentation du corps, fonctionnement du système nerveux central et douleur centrale : études chez le blessé médullaire

Mots clés : Douleur, Représentation du corps, Lésion médullaire.

Résumé : Nos deux hypothèses étaient que les patients blessés médullaires souffrant de douleurs neuropathiques sous-lésionnelles (DNSL) présentent des modifications du système nerveux central (SNC) et des altérations de la représentation du corps.

Pour tester ces hypothèses nous avons mis en place une revue systématique sur la plasticité du SNC induite par la douleur post-lésionnelle. Nos résultats ont permis de mettre en avant que les patients présentant des DNSL montrent des signes de plasticité maladaptative au niveau de ladite

“neuromatrice de la douleur” et une dysrythmie thalamo-corticale déjà décrite dans d’autres pathologies. Dans une seconde étude nous avons étudié le lien entre DNSL, représentation du corps et

phénotypes pyschologique et sensoriel. Le paradigme du jugement de latéralité (TJL) nous a permis de mettre en avant une altération de la représentation du corps des membres inférieurs par rapport aux membres supérieurs chez les patients paraplégiques. Cette altération est corrélée à l’intensité de la douleur des patients et particulièrement son caractère neuropathique mais non au phénotype sensoriel ou psychologique des patients. Les données apportées confirment nos hypothèses et ouvrent vers la possibilité d’explorer ces phénomènes plus en avant et de déterminer quels moyens de rééducation peuvent être utiles pour aider les patients avec des DNSL

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Title : Body representation, central nervous system function and central pain: studies on spinal cord injury

Keywords : Pain, Body representation, Spinal cord injury.

Abstract : Our two hypotheses were that spinal cord injured patients with sub- injurious neuropathic pain (SNP) have changes in the central nervous system (CNS) and changes in the representation of the body. To test these hypotheses, we set up a systematic review on the plasticity of the CNS induced by post-injury pain. Our results have shown that patients with DNSL show signs of maladaptive plasticity in the so-called "pain neuromatrix" and thalamocortical dysrhythmia already described in other pathologies. In a second study we studied the link between DNSL, body representation and

pyschological and sensory phenotypes. The Laterality Judgment Paradigm (LJR) has allowed us to highlight an alteration in the representation of the body of the lower limbs relative to the upper limbs in paraplegic patients. This alteration is correlated with the intensity of the patients' pain and particularly its neuropathic character but not with the patients' sensory or psychological phenotype. The data provided confirm our hypotheses and open up the possibility of exploring these phenomena further and determining which rehabilitation methods can be useful to help patients with DNSL

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Table des matières

Table des matières ...4

Remerciements ...6

Liste des figures ...9

Liste des tableaux ...10

Liste des abréviations ...11

1. Introduction générale : ...12

2. La représentation corporelle ...14

2.1. Image corporelle ... 15

2.2. Schéma corporel ... 18

2.2.1. L’imagerie motrice implicite et le jugement de latéralité ... 22

2.3. Synthèse sur la représentation du corps ... 29

3. Incarnation de la douleur ...32

3.1. Altération de la perception du corps dans la douleur ... 32

3.1.1. L’image du corps dans la douleur ... 32

3.1.2. L’altération du schéma corporel dans la douleur ... 36

3.1.3. Perturbation de la représentation spatiale dans la douleur ... 38

4. Le modèle de la désafférentation douloureuse des blessés médullaires ...43

4.1. Les lésions médullaires principes et définitions. ... 43

4.1.1. Classification des lésions médullaires ... 43

4.1.2. Épidémiologie des lésions médullaires. ... 47

4.1.3. La douleur chez les patients lésés médullaires. ... 49

5. L’image du corps et la perception de soi dans les lésions médullaires ...62

6. Problématique et Hypothèses ...65

7. Première étude : Revue systématique sur la réorganisation corticale chez les patients blessés médullaires en lien avec la présence de douleurs neuropathique sous- lésionnelles. ...69

7.1. Objectif ... 69

7.2. Méthode : ... 71

7.2.1. Population cible ... 71

7.2.2. Intervention ciblée ... 71

7.2.3. Comparateur ... 71

7.2.4. Résultats escomptés ... 72

7.2.5. Conception de l'étude ... 72

7.2.6. Stratégie de recherche... 72

7.2.7. Évaluation du risque de biais ... 73

7.2.8. Extraction des données ... 74

7.2.9. Analyse ... 74

7.3. Résultats : ... 75

7.3.1. Sélection des études ... 75

7.3.2. Caractéristiques des études ... 76

(6)

7.4. Synthèse des résultats de la première étude ... 85

8. Deuxième étude : Altération de la perception corporelle et douleur sous lésionnelle. ...87

8.1. Objectifs ... 87

8.2. Méthode ... 88

8.2.1. Sujets ... 88

8.2.2. Évaluation de la douleur ... 89

8.2.3. Profil psychologique ... 93

8.2.4. Tests sensoriels quantifiés ... 93

8.2.5. Tests de perception corporelle ... 95

8.3. Analyse statistique... 98

8.4. Résultats ... 99

8.4.1. Caractéristiques des participants ... 99

8.4.2. Représentation corporelle ... 101

8.5. Synthèse des résultats de l’étude 2. ... 106

9. Discussion ... 107

Bibliographie ... 118

10. Publications ... 133

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Remerciements

Comprendre comment nous percevons notre corps par le biais de l’étude de la douleur est au cœur de ce qui nourrit mon intention de réaliser ce travail de recherche. Travail qui a été réalisé au sein de l’équipe INSERM UMR987 « Physiologie et pharmacologie clinique de la douleur », dirigée par le Docteur Didier Bouhassira.

Je tiens par ces quelques lignes à remercier sincèrement les nombreuses personnes qui m’ont accompagné et permis de concrétiser mon projet.

En premier lieu je tiens à remercier Monsieur Didier Bouhassira qui m’a offert la possibilité d’intégrer son équipe dans le cadre de mon Master 2 et a dirigé mon travail de thèse. Son encadrement m’a permis de mieux comprendre le domaine passionnant de la recherche clinique avec des patients douloureux et de développer mes compétences dans ce champ. C’est une chance d’avoir pu côtoyer l’exigence d’un tel expert dans le monde de la douleur.

Je remercie particulièrement, madame le Professeur Valéria Martinez qui m’a encadré lors de mon Master 2 et m’a suivi lors de cette thèse. Sa gentillesse et sa disponibilité ont été de précieuses aides dans mon travail et mon développement en tant que chercheur. Son soutien représente beaucoup plus que ces lignes ne peuvent dire.

Naturellement, mes remerciements vont à l’ensemble de l’équipe INSERM UMR 987 qui m’a accueilli chaleureusement et avec laquelle j’ai pu avoir d’agréables échanges. J’ai une pensée pour Madame Frédérique Poindessous-Jazat pour son aide dans ma formation technique et Madame Claire Franchisseur pour son aide administrative précieuse.

Je tiens à remercier les équipes du service de médecine physique et réadaptation de l’hôpital

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et Monsieur Lansamann qui m’ont offert la possibilité de mener ma recherche auprès des patients dont ils prennent soin.

Mes remerciements vont aussi naturellement à madame le Professeur Samar Hatem qui nous a soutenus dans la construction de ce travail. Son expertise a été précieuse et sa gentillesse appréciée.

Je remercie sincèrement mes proches qui m’ont tous, à un moment ou un autre, apporté une aide inestimable, surtout face aux nombreuses embûches que peut représenter un tel travail. Ma famille m’a motivé pour la réalisation de ce travail et pour sa concrétisation finale et mes amis et collègues m’ont offert leur soutien pour avancer. Je les remercie tous bien plus que je ne saurais leur dire. Je pense à Madame Karine Langlois dont la confiance et le soutien m’apportent tellement et à Madame Céline Bonnyaud dont l’enthousiasme, la jovialité et le soutien m’ont été précieux.

Ma femme Flora Devos a été présente plus qu’on ne peut l’espérer. Sa patience, son amour et nombre d’autres choses qu’elle peut m’apporter me rendent redevable envers elle au-delà de ce qu’il m’est possible d’exprimer dans ces remerciements.

Sincèrement je tiens à remercier les membres du jury qui ont accepté de consacrer du temps pour juger mon travail alors que je les sais tous très occupés ; obtenir leurs critiques pour grandir est une chance.

Monsieur le Professeur Iannetti, vous êtes un spécialiste de la douleur dont les études me passionnent et dont la sagacité des réflexions et l’humilité m’impressionnent et m’inspirent.

Bénéficier de votre regard sur mon premier travail de recherche me fait profondément plaisir.

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Monsieur Villanueva c’est un honneur de pouvoir bénéficier de votre expertise dans la douleur.

La profondeur de votre analyse m’aidera sans nul doute. Je tiens aussi à vous remercier pour votre gentillesse lors de nos échanges et votre disponibilité.

Monsieur le Professeur Genêt, je vous remercie d’avoir accepté d’être membre de mon jury.

Votre parcours dans le monde de la rééducation me semble emblématique, c’est un honneur d’échanger avec vous et de bénéficier de vos lumières.

Monsieur Rulleau, je me permets de vous vouvoyer ici, c’est un plaisir de pouvoir vous compter parmi les membres de mon jury. Vous êtes l’un des pionniers dans le développement de la recherche en kinésithérapie. Je suis heureux de pouvoir de nouveau échanger avec vous et de pouvoir en apprendre davantage.

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Liste des figures

Figure 1 : Substrats cérébraux de la perception du corps ... 15

Figure 2 : Réseaux corticaux impliqués dans la représentation du corps. ... 20

Figure 3 : Exemples de jugement de latéralité ... 23

Figure 4 : Lien entre image du corps et schéma corporel et douleur : données cliniques, méthode de modulation et d’évaluations. ... 42

Figure 5 : Standards d’évaluation neurologique dans les lésions médullaires ... 45

Figure 6 : Topographie des douleurs neuropathiques ... 53

Figure 7 : Modifications neurophysiologiques participant à la douleur neuropathique post lésion médullaire ... 58

Figure 8 : Diagramme de flux de la revue systématique. ... 76

Figure 9 : Données démographiques des études de la revue systématique. ... 78

Figure 10 : International spinal cord injury pain basic data set (V 2.0) ... 90

Figure 11 : Questionnaire Douleur Neuropathique 4. ... 92

Figure 12 : Moyenne des ratios des temps de réaction au jugement de latéralité ... 103

Figure 13 Corrélation entre la tâche de jugement de latéralité et le phénotype douloureux ... 104

Figure 14 : Comparaison des résultats lors de la tâche d’atteinte du nombril... 105

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Liste des tableaux

Tableau 1 : Différentes propositions de représentation du corps dans la littérature. ... 30

Tableau 2 : Classification des lésions médullaires selon l’AmericanSpinal Injury Association (ASIA) ... 47

Tableau 3 : Taxonomie des douleurs suivant une lésion médullaire ... 52

Tableau 4 : Traitements pharmacologiques recommandés pour les douleurs neuropathiques ... 60

Tableau 5 : Caractéristiques démographiques et cliniques des sujets ... 100

Tableau 6 : Résultats des tests sensoriels quantifiés ... 101

Tableau 7 : Performance aux tests de représentation corporelle ... 102

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Liste des abréviations

BM : Blessé Médullaire

BM-D : Blessé médullaire douloureux

BM-noD : Blessé médullaire non-douloureux

DMF : Douleur du membre fantôme

DNSL : Douleur Neuropathique Sous-Lésionnelle

GMI : Graded Motor Imagery = Imagerie Motrice Graduelle

SDRC : Syndrome de douleur régional complexe

SHBM : Subjective Horizontal Body Midline, pour Ligne médiane horizontale du corps

SVBM : Subjective Vertical Body Midline, pour Ligne médiane verticale du corps

TJL : Tâche de jugement de latéralité

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1. Introduction générale :

Il existe des liens profonds entre la représentation que nous avons de notre corps et la douleur.

Un membre douloureux ou une zone corporelle douloureuse occupe la conscience d’une façon différente d’un membre non douloureux. Les personnes souffrant de douleurs chroniques décrivent fréquemment leur membre douloureux comme étrange, détaché de leur corps ou au contraire omniprésent. Il est reconnu que la douleur est une expérience multidimensionnelle complexe (Adler, 2009; Engel, 1977). L’International Association of Study of Pain (IASP) définit la douleur comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable en lien avec une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite en de tels termes » (IASP, website consulté en octobre 2018.). Cette définition montre que la douleur a ceci de particulier qu’elle est une perception qui a le corps comme objet contrairement aux autres sens tel que la vue ou l’ouïe qui ne nécessitent pas de faire référence au corps pour faire sens (Haggard et al., 2013).

L’approche neurophysiologique de la douleur propose de définir les expériences douloureuses par les mécanismes qui la sous-tendent. Trois grands types de mécanismes sont actuellement proposés : 1) la douleur neuropathique, 2) la douleur nociceptive et 3) la douleur nociplastique.

Les douleurs de type neuropathique sont définies comme des douleurs en lien avec une affection du système somatosensoriel. Elles sont réputées particulièrement difficiles à traiter et très invalidantes. Les lésions médullaires sont un type d’affection du système somatosensoriel qui est fréquemment associé à des douleurs récalcitrantes. Bien que la douleur neuropathique associée à une lésion médullaire représente un enjeu de santé important, il existe peu de données dans ce domaine comparativement aux autres étiologies de douleurs neuropathiques.

Il a été proposé d’attribuer à la douleur l’intérêt d’orienter le corps vers sa propre protection (Moseley, 2007a). Si la perception douloureuse permet la mobilisation de l’organisme vers un

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profond entre représentation corporelle et douleur. La compréhension des interactions entre ces deux phénomènes a permis le développement de nouvelles approches thérapeutiques prometteuses telles que l’imagerie motrice graduelle (GMI, pour Graded Motor Imagery en anglais), la réalité virtuelle ou encore la thérapie miroir. Les données préliminaires sur ces techniques sont principalement issues d’études dans des affections périphériques et actuellement peu de données existent dans le domaine des lésions médullaires.

Ce travail de thèse reprend les données de la littérature sur la représentation du corps et son lien avec la douleur de façon générale, afin d’introduire ces concepts pour expliciter les recherches menées. Ces concepts ont été appliqués aux patients blessés médullaires (BM) dans l’objectif de mieux comprendre la douleur de ces patients et de pouvoir évaluer s’ils pouvaient bénéficier des nouvelles thérapeutiques développées autour du lien entre perception du corps et douleur.

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2. La représentation corporelle

L’expérience que nous faisons de notre corps est unique et complexe. Les premiers travaux d’Head et Holmes ont démontré l’existence d’au moins deux représentations corporelles distinctes au niveau cérébral, l’une dédiée à la localisation des stimulis sur la peau et l’autre à la localisation du corps dans l’espace (Head et Holmes, 1911). Depuis l’émergence de cette idée d’une représentation fragmentaire du corps, plusieurs études ont été réalisées dans le domaine (de Vignemont, 2010; Gallagher, 1986; Pitron et al., 2018; Schwoebel et Coslett, 2005; Sirigu et Duhamel, 2001, Longo 2016). La grande variabilité des cas rapportés et des méthodes utilisées permet à de Vignemont de faire remarquer qu’ : « (…) il n’y a pas un seul système de représentation du corps, celui-ci pouvant être décrit selon différentes perspectives (sémantique, émotionnelle, spatiale, motrice, tactile, visuelle, proprioceptive etc.) » (De Vignemont, 2007). Malgré la grande complexité de la question, il a été proposé à l’instar de la vision, que la représentation du corps puisse s'intégrer dans un modèle perception-action. Cette division comprendrait, une modalité perceptive du « quoi » que serait « l’image corporelle » et une modalité du « comment » orientée vers l’action « le schéma corporel ». Cette proposition reprend le principe de deux voies parallèles d’intégration comme, avec la voie dorsale de la perception et la voie ventrale de l’action décrites pour la vision (cf Figure 1) (Dijkerman et de Haan, 2007). Cependant, ces deux termes et les phénomènes que ces derniers visent à décrire restent sujets à débats ou du moins, à une utilisation peu stricte, certains auteurs utilisant les deux termes de façon indifférenciée (de Vignemont, 2010; Gallagher, 1986).

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Figure 1 : Substrats cérébraux de la perception du corps selon Dijkerman et al., 2007 2.1. Image corporelle

La notion d’image corporelle renvoie à une construction accessible à la conscience de ce qu’est le corps que nous habitons. Elle serait la voie perceptive de la représentation du corps, le

« schéma » utilisé par l’organisme pour comprendre les informations qu’il reçoit. L’image corporelle a été divisée, par certains auteurs, en plusieurs parties distinctes. Ces composantes comprennent : i) un aspect lexical de dénomination du corps et de ses parties (mon bras, ma main…), ii) un aspect structurel de représentation de la relation des parties entre elles (la main est au bout du bras), iii) une carte visuo-spatiale, de l’aspect du corps (sa forme, ses limites…) et iv) une représentation de la superficie du corps, visuo-tactile de localisation des stimuli sur le corps (Medina et Coslett, 2010; Schwoebel et Coslett, 2005; Sirigu et Duhamel, 2001).

Sur le plan neurophysiologique, la construction de l’image du corps semble impliquer principalement le cortex somatosensoriel secondaire (SII) ; le cortex pariétal antérieur et l’insula (Dijkerman et de Haan, 2007). Ce circuit a été proposé comme substrat de l’apprentissage perceptif et de la mémorisation avec une analogie avec la voie visuelle ventrale de la perception des objets. L’activité du cortex insulaire serait principalement en lien avec

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l’aspect émotionnelle de l’image du corps, l’activité du cortex pariétal en lien avec l’aspect de la forme du corps (Dijkerman et de Haan, 2007). Les études faites chez les patients atteints d’anorexie mentale, maladie prédominée par une forte altération de l’image corporelle, indiquent qu’un réseau plus complexe intervient dans la perception du corps. Ce réseau comprend le lobe pariétal inférieur, le précunéus, le cortex fusiforme et l’aire extrastriée du corps (Gaudio et Quattrocchi, 2012). Dans un paradigme d’illusion basé sur une combinaison de stimulations tactiles et proprioceptives, chez des sujets sains, Ehrsson et al (2005) ont montré que la modification de la perception de la largeur des hanches est corrélée à l’activation du sulcus post-central gauche et de la partie antérieure du sulcus intrapariétal. Ces activations semblent spécifiques de l’illusion touchant l’image du corps car elles ne sont pas retrouvées lors d’une illusion du mouvement qui fait intervenir le schéma corporel (Ehrsson et al., 2005).

L’image du corps peut ainsi être considérée comme une construction mentale, émergeant de l’interaction de multiples afférences et de constructions sociales langagières, qui permet l’identification perceptive consciente des sensations liées au corps. Cette construction se distingue d’une représentation pouvant guider l’action qui n’a pas nécessité d’être consciente comme chacun peut l’observer dans les réflexes coordonnés permettant de se gratter ou de récupérer son équilibre après avoir trébuché (Paillard, 1999). Ainsi, par analogie avec l'organisation du système visuel, il a été proposé que l’image corporelle permettrait la reconnaissance du « quoi », alors que la reconnaissance du « comment » se ferait davantage via une autre représentation que nous allons détailler, à savoir le schéma corporel (Dijkerman et de Haan, 2007).

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L'image corporelle est la représentation que nous avons de notre corps permettant la perception consciente des différents aspects de celui-ci. Cela regroupe :

Un aspect lexico-sémantique de l’image corporelle correspondant à la désignation des parties du corps en cas d’altération, le patient a une anomie spécifique au corps (incapacité à nommer les zones corporelles) (Dennis, 1976).

Un aspect structurel de position des parties du corps entre elles en cas d’altération, le patient a une atopagnosie et ne saura pas indiquer où se situe une zone corporelle (Head et Holmes, 1911; Sirigu et al., 1991).

Un aspect émotionnel qui peut se retrouver perturbé comme dans les mésoplégies, désir d’amputation (Blanke, 2012; First et Fisher, 2012).

Un aspect de forme du corps et de ses délimitations qui peut être perturbé comme dans le cadre de membre fantôme ou après une anesthésie (Bromage et Melzack, 1974; Gandevia et Phegan, 1999; Melzack et Loeser, 1977).

Un aspect de représentation superficiel du corps permettant l’intégration des informations tactiles (Medina et Coslett, 2010; Paillard, 1999).

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2.2. Schéma corporel

Le concept de schéma corporel évoque une construction autour du modèle utilisé par le cerveau pour organiser la motricité du corps. Cette représentation sensorimotrice est basée sur une intégration visuo-proprioceptive qui permet une localisation des différentes parties du corps entre elles afin d’organiser la gestuelle du corps. Elle est orientée vers l’action à l’inverse de l’image corporelle qui est davantage impliquée dans la perception (de Vignemont, 2010)

Cette représentation semble principalement inconsciente. En effet lorsque nous marchons ou attrapons un objet nous n’avons pas conscience de l’ensemble des mouvements de nos articulations. En cas de détérioration du schéma corporel, l’on observe un défaut dans l’estimation du « où » est le corps comme suggéré par Paillard (Paillard, 1999) cela a été montré dans des cas emblématiques de patients souffrant d’une atteinte proprioceptive avec une épargne de leur sensibilité tactile superficielle (Head et Holmes, 1911; Paillard, 1999; Anema et al., 2009). Ces patients parviennent à distinguer quelle partie de leur corps est touchée où à l’indiquer sur un dessin du corps, mais ne parviennent pas à venir toucher l’endroit stimulé par faute d’un schéma cohérent des relations entre les différentes parties de leur corps.

Le schéma corporel est considéré comme le pendant somatosensoriel du « comment » proposé dans le modèle action-perception dans le domaine visuel. Il a été proposé qu’une voie connectant le thalamus, le cortex somatosensoriel secondaire et le cortex pariétal postérieur soit le substrat de cette représentation à l’instar de la voie ventrale décrite dans la perception visuelle (Dijkerman et de Haan, 2007). Les performances en imagerie mentale, reflet de la préparation d’un geste (Jeannerod et Decety, 1995), sont grandement amoindries chez des patients ayant une lésion du cortex pariétal postérieur, ce qui souligne son importance dans la construction du schéma corporel (Sirigu et al., 1996). D’autres aires sont aussi importantes dans la construction

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tendineuse. En effet cette illusion induit une activité cérébrale principalement centrée sur les gyri pré- et post-central gauches, le lobe pariétal inférieur et le gyrus frontal médial ainsi que le gyrus cingulaire (Kenzie et al., 2018). Une récente méta-analyse portant sur 21 études impliquant 927 participants, indique que le substrat du schéma corporel engloberait de façon plus large les aires temporales et occipitales inférieures, les aires motrices au niveau frontal, les aires somatosensorielles et les circuits d’intégration multimodale pariétaux (Di Vita et al., 2016). Quand l’on soustrait les aires également activées lors de tâche impliquant une représentation du corps non dirigée vers l’action, l’on observe l’activation d’un réseau qui implique davantage les aires motrices primaires et l’aire exstrastriée du corps de l’hémisphère droit (cf Figure 2). Ce dernier réseau serait ainsi le réseau dédié au schéma corporel, la représentation du corps pour l’action, alors que celui impliqué dans la représentation du corps non dirigée vers l’action activerait principalement les aires somatosensorielles primaires (Di Vita et al., 2016). Il est proposé que l’activation du cortex pariétal reflète l’accès à la conscience de la sensation de mouvement lors de mobilisations passives ou lors de l’imagination explicite d’un mouvement (Hardwick et al., 2018; Kenzie et al., 2018).

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Figure 2 : Réseaux corticaux impliqués dans la représentation du corps selon Di Vita et al., 2016.

En teintes chaudes le réseau spécialisé dans la représentation du corps dirigée vers l’action, en teintes froides le réseau spécialisé dans la représentation non orientée vers

l’action.

La représentation de notre corps pour l’action est fortement malléable. Ainsi, l’utilisation

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comme une modification de notre schéma corporel (Martel et al., 2019, 2016). L’analyse de la qualité du mouvement est un moyen d’évaluation de choix pour l’étude du schéma corporel pour certains auteurs (Cardinali et al., 2016, 2009).

Pour autant, d’autres tâches sont considérées comme utiles pour analyser le schéma corporel.

En particulier, il est possible d’étudier les capacités d’imagerie motrice d’un sujet. L’imagerie motrice regroupe différents types de tests dont le principe est de simuler une action à la demande sans la réaliser (Jeannerod et Decety, 1995; Jeannerod et Frak, 1999). Ce type de tâche est considérée volontaire ou explicite quand la personne simule le geste demandé avec un contrôle conscient de la simulation. (Decety, 1996; Decety et Grèzes, 2006).

Lors de l’imagination d’un geste, on observe généralement que la durée nécessaire à la simulation est directement corrélée à la durée nécessaire à la réalisation du geste (Decety et Jeannerod, 1995). On parle alors, d’isochronie ou concordance temporelle. Une perte de ce phénomène est décrite dans différentes lésions neurologiques qui affectent la motricité, ce qui indiquerait une altération du schéma corporel (Guillot et al., 2012). Ce qui rend la simulation interne de l’imagerie motrice si intéressante est le fait qu’elle peut être considérée comme un accès conscient à une part généralement inconsciente de la préparation motrice (Decety, 1996).

En effet, les tâches d’imagerie motrice permettent d’activer les mêmes zones cérébrales que celles activées lors de la réalisation d’un mouvement, certaines avec une plus faible intensité, mais avec la même finesse d’organisation de l’activité neurologique (Hétu et al., 2013; Munzert et al., 2009). En outre, simuler un geste facilite l’activité des muscles agonistes normalement mis en jeu lors de la réalisation de ce geste et inhibe les muscles antagonistes, comme c'est le cas lors de la réalisation de n'importe quel mouvement (Guillot et al., 2012). Mais les changements fonctionnels dans le système nerveux central ne produisent pas d’activité cliniquement perceptible, ou d’activité détectable à l’électromyogramme. Néanmoins, selon

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certaines données il semblerait qu’une faible activité soit perceptible en microneurographie et puisse suffire à créer un retour sensoriel périphérique (Gandevia et al., 1997). L’imagerie motrice représenterait ainsi l’élaboration centrale de la commande motrice qui, elle, serait inhibée (Guillot et al., 2012).

2.2.1. L’imagerie motrice implicite et le jugement de latéralité

Une des tâches d’imagerie motrice implicite les plus utilisées est la tâche de jugement de latéralité ("laterality judgement task" en anglais que nous abrégerons par le sigle TJL dans le reste du texte), encore appelée discrimination gauche/droit. Cette tâche consiste à décider si l’image que l’on voit d’un membre représente un membre gauche ou droit, ou, pour les parties axiales du corps comme le rachis, si cette partie est tournée vers la gauche ou vers la droite (Cooper et Shepard, 1975.; Parsons, 1987). La figure 3 montre des exemples d’images utilisées lors d’une tâche de jugement de latéralité pour les mains. Lors de la TJL, l’on demande au sujet d’indiquer le plus vite et précisément possible la latéralité du membre dessiné ou pris en photo.

Il semble que pour réussir cette tâche, le sujet commence par une identification inconsciente de la latéralité selon la forme du membre, ensuite il simule involontairement un mouvement efficient pour faire coïncider mentalement la position de son membre avec la position du membre présenté, ensuite confirme le jugement initial s’il a réussi à faire coïncider les deux positions, l’on parle alors de stratégie de confirmation (Parsons, 2001, 1987).

L’estimation de la performance se fait alors par l’analyse de la précision des réponses et du temps de réaction nécessaire pour prendre la décision. Il est proposé par certains auteurs que le temps de réaction reflète l’attention spatiale et la précision l’exactitude du schéma corporel (Hudson et al., 2006). Sans qu’il y ait de consensus sur cette proposition, l’on peut penser que ces deux indicateurs reflètent des éléments différents car, la précision et la vitesse de réponse

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ralentissement au profit de la précision ou inversement. Chez le sujet sain on peut même observer qu’une plus grande rapidité s'accompagne d'une meilleure précision (Ravat et al., 2019).

Figure 3 : Exemples de jugement de latéralité

Les photographies a) et c) représentent des mains gauches, les photographies b) et d) des mains droites. L’image a) représente une main en position naturelle facile à identifier, l’image b) une main qui a été tournée dans une position non naturelle ce qui augmente en généralement le nombre d’erreur et le temps de réponse (principe de contrainte biomécanique). Les images c) et d) illustrent l’effet de la position articulaire du membre. Plus celle-ci est compliquée, plus le temps de réaction augmente, reflétant le temps nécessaire pour imaginer positionner son membre dans la position présentée. L’image c) cumule position articulaire complexe (pronation, flexion et déviation ulnaire), absence de visualisation du pouce qui est un repère fréquent et orientation dans l’espace non naturelle.

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Les premiers travaux concernant cette tâche ont mis en avant différents marqueurs de la sollicitation du schéma corporel pour sa résolution. En premier lieu, le ressenti subjectif a posteriori de la majorité des personnes est d’avoir simulé intérieurement ou d’avoir eu envie de bouger leur corps afin de simuler la position du membre vu (Cooper et Shepard, 1975; Parsons, 1987). Il est même fréquent de voir des sujets réaliser un mouvement pendant le test, quand cela ne leur a pas été interdit, afin de comparer la position de l’image avec une position que peut prendre leur membre. Il a par ailleurs été montré que le temps nécessaire à la simulation mentale du mouvement est très proche de celui nécessaire pour réaliser le geste (Parsons, 1987).

Ceci, se retrouve lors de la tâche de jugement de latéralité avec une augmentation du temps de réponse et du nombre d’erreurs commises lorsque le membre représenté est dans une position considérée comme étrange ou non naturelle (Parsons, 1994). Cet effet de la position du membre visualisé lors de la TJL est appelé « contrainte biomécanique » et est un des marqueurs importants de la mobilisation du schéma corporel dans cette tâche. Outre ces éléments, il est reconnu que la position dans laquelle se trouvent les membres lors de la TJL influence la performance. Ainsi, si le membre du sujet est dans une position congruente avec celle du membre visualisé, la performance s’améliore et inversement elle se détériore si la position du membre est éloignée de celle du membre représenté (Conson et al., 2015; Lorey et al., 2009;

Vannuscorps et al., 2012). Par exemple, La Figure 3a sera plus facilement identifiée comme l’image d’une main gauche si la personne qui passe le test a ses mains posées devant elle. Par contre, si elle a les mains dans le dos, ses performances se dégraderont pour ce type d’image mais s’amélioreront pour des images comme la Figure 3b, qui deviendraient alors congruentes avec sa position corporelle (Lorey et al., 2009; Sirigu et Duhamel, 2001).

Un autre aspect qui influence les performances lors de la TJL est la consigne donnée au sujet.

En effet, en fonction du point de vue adopté par la personne, l’effet de l’orientation de l’image

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un point de vue à la troisième personne (« imaginez que la main que vous voyez est la mienne ») multiplie par trois le temps de réaction par rapport à l’utilisation d’un point de vue à la première personne (« imaginez que la main que vous voyez est la vôtre) lorsque, les sujets ont leurs mains posées sur une table devant eux. A l’inverse, l’adoption du point de vue à la troisième personne améliore leurs performances si les sujets ont les mains dans le dos (Sirigu et Duhamel, 2001).

La tâche de jugement de latéralité permet une exploration aisée de la représentation mentale des mains et pieds mais, plus difficile pour ce qui est des articulations plus proximales, comme le genou ou le coude, qui ne présentent pas de fortes dissymétries dans le plan frontal. Mais, comme le mouvement imaginé pour mettre la main ou le pied dans la position de l’image implique un mouvement de tout le membre, il a été proposé par exemple chez les patients gonarthrosiques, d’utiliser des images de pieds pour explorer l’altération du schéma corporel en lien le genou (Stanton et al., 2012).

L’analyse du schéma corporel du rachis pose la même difficulté liée à la symétrie du dos ou du cou. Dans le but d’explorer le schéma corporel de ces régions, la TJ est alors modifiée pour que le sujet réponde cette fois en fonction de la direction du mouvement du rachis. Ainsi, pour l’exploration du schéma corporel lombaire l’on présente des images de dos de personne se penchant ou se tournant d’un côté ou de l’autre (Bray et Moseley, 2011). Toutefois, il y a encore des discussions quant à la mise en jeu du schéma corporel lorsque ce test porte sur des images du rachis. En effet, les personnes réalisant cette tâche ne semblent pas ralentir en fonction de l’importance de l’inclinaison ou de la torsion du tronc (Alazmi et al., 2018). Ce qui est en contradiction avec ce qui est retrouvé pour les membres et représente une signe de la simulation interne du mouvement (Parsons, 1994).

Au-delà des études réalisées chez des sujets sains, il a été montré que certaines atteintes spécifiques de la motricité peuvent impacter les performances d’un sujet lors de la TJL. Ainsi,

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certaines lésions corticales lors d’un accident vasculaire cérébral (AVC) vont induire une perturbation du schéma corporel qui s’accompagne de moindres performances lors du test d'identification de la latéralité des images correspondant au membre parétique (augmentation du temps de réponse et diminution de la précision) (Sirigu et al., 1996) même quand cette atteinte est congénitale (Steenbergen et al., 2007). Cet effet est aussi retrouvé dans les cas d’amputations (Nico et al., 2004) ou d’agénésie (Funk et Brugger, 2008) avec des performances moindre pour la reconnaissance des images correspondant au membre absent. A noter que des troubles psychiatriques de la perception de soi comme la schizophrénie induisent une diminution de performance lors de la TJL avec une préservation du phénomène de contrainte biomécanique (de Vignemont et al., 2006). Nous pouvons ainsi considérer que l’incapacité motrice quelle qu’en soit la cause (périphérique ou centrale, acquise ou congénitale) affecte le schéma corporel et donc les capacités d’imagination d’un geste.

Il peut exister aussi des réponses paradoxales comme chez les patients atteints du «Locked-In Syndrome » (LIS) qui semblent insensibles au phénomène de contrainte biomécanique (Conson et al., 2010, 2008). Cela met en avant l'idée qu’une perte complète de motricité va empêcher la mobilisation du schéma corporel. Cela se retrouve aussi dans le cas de lésion médullaire où l’on voit aussi une insensibilité à la contrainte biomécanique (Fiori et al., 2014). Il semble ainsi, que l’impossibilité de conduire l’efférence influence la possibilité de mobiliser notre schéma corporel (Di Rienzo et al., 2014).

Quand le schéma corporel ne peut être sollicité ou quand la tâche est trop simple l’autre stratégie pour résoudre la tâche de reconnaissance des membres est dite « visuelle », car alors les sujets ne tentent pas de simuler intérieurement la position du membre visualisé mais utilisent des repères visuels, tels que la position du pouce ou le galbe du mollet, afin d’identifier le membre.

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requiert pas de simulation interne du mouvement. En effet, globalement une tâche d’imagerie mentale sollicite un réseau complexe comprenant : les lobes pariétaux inférieur et supérieur bilatéralement, le gyrus précentral gauche, les gyrus frontal inférieur et moyen bilatéralement, l’aire motrice supplémentaire, l’insula gauche, les gyrus occipitaux inférieur et moyens bilatéralement et le cervelet bilatéralement (Tomasino et Gremese, 2016). Par contre, lorsque la stratégie est visuelle l’activité sensorimotrice s’estompe (Tomasino et Gremese, 2016).

Le schéma corporel peut donc se définir comme une construction mentale complexe comprenant une représentation somatosensorielle, une représentation de la forme du corps et une représentation proprioceptive ou posturale du corps (Medina et Coslett, 2010). Nous considérerons ici une définition globale dans laquelle le schéma corporel est considéré comme la représentation inconsciente du corps utilisée par le cerveau pour le mouvement corporel (Baccarini et al., 2014).

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Le schéma corporel est une représentation corporelle centrée sur l’action motrice (posture et mouvement du corps).

Le schéma corporel interagit avec l’aspect structurel de l'image du corps pour déterminer la position des membres dans l'espace.

Atteindre une partie de son corps met en jeu l'image corporelle et le schéma corporel.

L'analyse de la cinématique des mouvements permet de voir des altérations de la qualité du mouvement signant une potentielle atteinte du schéma corporel.

La tâche de jugement de latéralité permet l’étude du schéma corporel par la précision et la rapidité à reconnaître un si un membre est gauche ou droit.

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2.3. Synthèse sur la représentation du corps

La littérature dans le domaine de la représentation du corps est riche mais beaucoup reste encore à faire pour mieux comprendre ce phénomène. Les principales propositions sont résumés dans le tableau 1.

Perception Action

Image corporelle Schéma corporel Head &

Holmes (1911)

Représentation consciente, visuelle et descriptive

Représentation inconsciente, posturale et proprioceptive

Gallagher (1986)

Représentation consciente dans laquelle le corps devient « sien » et est articulé de

façon abstraite et désintégrée

Représentation inconsciente qui agit comme performance

posturale du corps dans l’environnement et détermine partiellement l’image du corps Paillard

(1999)

Représentation corporel du « quoi » basée sur l’exteroception

Représentation du « où » basée sur la propioception Sirigu &

Duhamel (2001)

Représentation lexicale et sémantique, visuospatiale du corps et de ses parties

Représentation concrète et symbolique pour la performance motrice

Schwoebel

& coslett (2005)

Image corporelle Structure corporelle Schéma corporel

Représentation léxicale et sémantique

Représentation de la forme et des composantes du corps

basée sur la vision

Représentation dynamique et motrice basée sur la

proprioception

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Djikermans (2007)

Représentation impliquée dans

Représentation interne pour l’action

Tableau 1 : Différentes propositions de représentation du corps dans la littérature.

La littérature est encore hétérogène en ce qui concerne la représentation du corps. De nombreuses pathologies pourraient être liées à des problèmes de représentation corporelle, sans qu’il ne soit toujours aisé de déterminer quel aspect est principalement affecté (cf de Vignemont, 2010 pour une énumération de différentes pathologies).

Plusieurs moyens d’évaluation de ces représentations ont été utilisés dans la littérature. L’image du corps est étudiée dans son aspect sémantique par une description du corps, comment il le sujet le perçoit dans son aspect, mais aussi dans la part d’affect qu’il a envers lui. La structure corporelle peut être évaluée en demandant au patient de nommer une zone corporelle qui lui est montrée ou que l’on stimule sur son propre corps. Il est aussi possible d'analyser l’image corporelle au moyen d'un dessin, ou la reconstruction d’une silhouette corporelle. Nous dissocierons ici les troubles de compréhension liés à des déficits cognitifs plus généraux entraînant des difficultés dans la dénomination d’animaux ou d’objets. Le schéma corporel peut être étudié dans son aspect purement inconscient par l'analyse de la cinématique des mouvements du corps du patient, de ses performances dans une tâche de jugement de latéralité ou imagerie motrice implicite. Dans l’imagerie motrice implicite, on peut étudier non seulement l’isochronie entre une tâche réelle et simulée, mais également la capacité à reconnaitre un membre dans différentes positions. L’imagerie motrice dite explicite explore quant à elle la capacité d'un sujet à s’imaginer volontairement réaliser un mouvement.

Il existe donc plusieurs façons de concevoir la représentation corporelle et de l’explorer. Nous

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Ainsi, nous parlerons d’image corporelle au sens large pour l’aspect perceptif conscient dans la représentation corporelle et de schéma corporel pour ce qui a attrait à l’aspect action de la représentation corporelle.

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3. Incarnation de la douleur

Il peut être attribué à la douleur l’intérêt d’induire un comportement orienté vers la protection d’une partie du corps en danger (Moseley, 2012, 2007b). Ainsi, l’expérience de la douleur est intimement liée à l’expérience que nous avons de notre corps. La douleur est dite incarnée (embodied en anglais) dans le sens où, la façon que nous avons de percevoir et de nous représenter notre corps peut influencer notre perception de la douleur et la manière de protéger notre corps (Haggard et al., 2013; Tsay et al., 2015). L’inverse est aussi vrai, la douleur va changer notre relation au corps en le rendant omniprésent à l’esprit chez certains patients douloureux chroniques ou au contraire, induire une sensation de rejet et désappartenance (disownership en anglais) comme par exemple dans le SDRC (Lewis et al., 2007).

3.1. Altération de la perception du corps dans la douleur 3.1.1. L’image du corps dans la douleur

Suite à une anesthésie locale, les patients peuvent rapporter la perception d’un corps déformé, généralement dans le sens d’un gonflement de la partie anesthésiée (Paqueron, 2003). Un exemple simple est le gonflement de la lèvre après une anesthésie pour un soin dentaire. Le vécu douloureux peut lui aussi, induire une altération de la représentation du corps. Cela a été largement étudié dans différentes syndromes douloureux chroniques. Le syndrome douloureux régional complexe (SDRC) est emblématique de ce genre de perturbation, en effet de nombreux patients atteints de cette pathologie décrivent leur membre douloureux comme difforme, le plus souvent anormalement gros (Lewis et al., 2007). Ces anomalies perceptives concernent également les représentations du membre douloureux. Ainsi, ces patients ont tendance à

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moyenne 6% par rapport à sa taille réelle (Peltz et al., 2011). Pour autant, les altérations de la perception du corps ne se retrouvent pas uniquement dans le SDRC mais aussi, dans d'autres pathologies comme l’arthrose. Dans ce cas, les patients ont tendance à plus fréquemment identifier leur membre douloureux comme rétréci par rapport à sa taille réelle (Gilpin et al., 2015). Les changements d'image corporelle sont aussi présents chez les patients lombalgiques dont environ un tiers perçoivent le bas du dos grossi ou anormalement gonflé et un autre tiers comme rétréci (Nishigami et al., 2015). Ces altérations de l’image du corps vont de pair avec des altérations de l’acuité tactile testée par le test de discrimination de deux points (Nishigami et al., 2015). Ce test consiste à rechercher quelle est la plus petite distance entre deux stimulations tactiles simultanées avant que le sujet n’arrive plus à discerner deux points distincts. La performance à ce test est corrélée à l’activité des somatosensorielles lors de la stimulation (Pleger et al., 2006) ou au repos (Haag et al., 2015), plus grande est la précision tactile plus intense est l’activité cérébrale et plus grande est la zone cérébrale activée lors de la stimulation (Debowska et al., 2016). L’altération de l’acuité tactile se retrouve aussi perturbée dans plusieurs syndromes douloureux chroniques non neuropathiques (pour revue : Catley et al., 2014; Lewis et Schweinhardt, 2012). Ce déficit pourrait indiquer l'existence d’une altération de l’image du corps chez de nombreux patients douloureux chroniques.

Depuis les travaux de Flor et al., à la fin des années 1990 de nombreux travaux ont confirmé l'existence de remaniement du cortex somatosensoriel dans différentes douleurs chroniques, DMF (Flor et al., 1995), SDRC (Di Pietro et al., 2013), lombalgie, fibromyalgie, arthrose (Apkarian et al., 2011). Ces modifications sont réversibles comme l’a montré Maïhofner et al., (2004) chez des patients atteints d’un SDRC, dont la représentation corticale de la main douloureuse initialement plus petite et décalée latéralement au niveau de S1 retrouvait un aspect normal après une anesthésie efficace. Ces modifications cérébrales observées chez les patients

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douloureux représentent peut-être un des mécanismes de la perturbation de l’image corporelle de ces derniers.

Des modifications de l'image corporelle existent également dans les douleurs neuropathiques.

La douleur du membre fantôme est un exemple marquant du lien entre douleur et image du corps. La plupart des patients amputés décrivent une sensation d’un membre fantôme qui est souvent douloureux. Ce membre qui persiste dans la représentation corporelle du patient est généralement décrit comme bloqué dans une position et le plus souvent avec une longueur anormale, soit allongée soit au contraire rétrécie (Giummarra et al., 2007). Ce type de modifications existent également dans les douleurs neuropathiques centrales. En effet, les patients paraplégiques peuvent décrire aussi des sensations fantômes dans la zone qu’il ne sentent plus (Bakheit, 2000; Melzack et Loeser, 1977).

Il est aussi intéressant à noter que les patients avec des troubles de l'image du corps comme les patients atteints d'anorexie mentale présentent des seuils de perception douloureuse différents des sujets sains (Papezová et al., 2005; Raymond et al., 1999).

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La douleur et l’image du corps entretiennent des relations étroites

L’anesthésie locale donne une sensible de membre gonflé

Les patients avec une perception déformé de leur corps comme dans les troubles alimentaires ont des seuils douloureux anormalement élevés.

La douleur chronique s’accompagne fréquemment d’altération de l’image du corps tant sur l’aspect de la forme ou de l’émotion liée au corps.

Des remaniements dans les aires corticales somatosensorielles accompagnent certaines douleur chroniques. Ces changements sont corrélés à une diminution de l’acuité tactile et des altérations de l’image corporelle.

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3.1.2. L’altération du schéma corporel dans la douleur

La douleur va perturber plusieurs aspects des capacités motrices de la personne douloureuse et ces changements touchent tous les systèmes de la commande motrice et varient que la douleur soit aigue ou chronique. Dans les modifications induites par la douleur on retrouve des altérations du schéma corporel.

Chez le sujet sain, l’induction d’une douleur nociceptive, par injection d’une solution saline hypertonique au niveau de la main, provoque un changement dans le temps de réaction lors d’une TJL (Hudson et al., 2006; Moseley et al., 2005). La douleur induit alors, un ralentissement spécifique pour la reconnaissance de la main non-douloureuse. Ceci se produit alors que, le temps de réaction reste inchangé pour le côté douloureux (Hudson et al., 2006). De façon intéressante cet effet se retrouve aussi dans l’anticipation de la douleur (Hudson et al., 2006).

La douleur semble induire une hyper-attention vers la zone du corps douloureuse pour laquelle plus de ressources sont allouées au détriment du côté non douloureux (Hudson et al., 2006).

Quand la douleur devient chronique au contraire on observe le plus souvent le schéma inverse avec une baisse des performances (augmentation du temps et/ou baisse de précision) pour la reconnaissance du membre douloureux (pour revue Breckenridge et al., 2019; Ravat et al., 2019). La plupart des données existantes proviennent d’études sur les membres supérieurs (Breckenridge et al., 2017; Hudson et al., 2006; Magni et al., 2018; Moseley, 2004; Moseley et al., 2005; Nico et al., 2004; Pelletier et al., 2018; Reinersmann et al., 2010, 2012; Schmid et Coppieters, 2012) ou inférieurs (Coslett et al., 2010; Stanton et al., 2013, 2012). Elles vont toutes dans le même sens indiquant une baisse de performances pour la reconnaissance d’images de la même latéralité que le membre douloureux. Par contre les études sur les affections du rachis sont moins concluantes (Bray et Moseley, 2011; Elsig et al., 2014; Linder

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baisse de performances voir une amélioration (Ravat et al., 2019). Cela peut s’expliquer par le fait que l’adaptation de la TJL au rachis ne semble pas refléter les même mécanismes que pour les membres (Alazmi et al., 2018). En effet, les images utilisées dans la TJL pour le rachis n’induisent pas une contrainte biomécanique l’on observe même le contraire, les positions extrêmes du rachis étant plus facilement identifiées (Alazmi et al., 2018). Il est à noter que la majorité des données proviennent de patients avec des douleurs nocicpetives ou nociplastiques de type SDRC. Peu d’études ont apportés des données spécifiques en lien avec les douleurs neuropathiques et elles ont portés sur des affections périphériques à savoir le syndrome du canal carpien (Schmid et Coppieters, 2012) ou chez des patients amputés (Nico et al., 2004). Aucune donnée n’a porté sur les douleurs neuropathiques centrales ni même sur les douleurs neuropathiques des membres inférieurs. Il existe des données sur les atteintes neurologiques centrales qui indiquent déjà une altération du schéma corporel en lien avec la perte de commande motrice (Di Rienzo et al., 2014) mais pour lesquelles la douleur n’a pas été analysée.

Actuellement, aucune donnée n’existe sur les modifications du schéma corporel en lien avec des douleurs neuropathiques centrales.

Les patients douloureux chroniques montrent une baisse de performance à la tâche de jugement de latéralité

La douleur aigue impacte la reconnaissance du membre non douloureux contrairement à ce qui est observé dans la douleur chronique

Références

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