Anneaux, Corps, Idéaux
O.G.
06 Novembre 2015 (mise à jour)
Anneaux
Définitions
Un anneau (A,+·) est un ensemble (non vide) muni de deux lois de composition interne telle que
• (A,+) groupe commutatif (loi appelée addition)
• la loi “·” est associative (loi appelée multiplication)
• la multiplication est distributive à droite et à gauche par rapport à l’addition,
a(b+c) =ab+ac(b+c)a=ba+ca . . .
L’anneauAest dit commutatif si “·” est commutative; unitaire si la loi “·” admet un élément neutre.
Notations
• on note−ale symétrique deapar rapport à la loi +, et l’on appelle opposé dea.
• 0A désigne le neutre (0) pour la loi +
• 1A désigne le neutre pour la loi ·
Règles de calculs
∀a∈Aon a 0A·a=a·0A= 0A. L’élément 0A est ditabsorbant. On écrit a·b=a·(b+ 0A) =a·b+a·0A
d’oùa·0A= 0a. On fait de même (ba=· · ·) pour démontrer 0Aa= 0A
. . .
∀a, b∈Aon a (−a)b=a(−b) =−(ab) et (−a)(−b) =ab. On écrit quea+ (−a) = 0A et on “multiplie à droite” parb:
ab+ (−a)b= 0A d’où −(ab) = (−a)b.
De même en multipliant à gauche paral’égalitéb+ (−b) = 0Aon obtient 0A=a(b+ (−b)) =ab+a(−b) d’où −(ab) =a(−b).
Pour la dernière égalité on écrit (−a)(−b) = (a)(−(−b)) =ab car−(−b) =b
Règles de calculs (suite)
• Pour toutn∈N\ {0}on note (−x)n=
(xn sinpair,
−xn sinimpair.
• Pour toutn∈Non notena=a+a+· · ·+a, on sommen foisa. Pour des valeurs négatives, on définit (−n)a=−(na).
• SiA est unitaire (−1A)x=−x=x(−1A)
• SiAunitaire et non réduit à{0A}(anneau trivial) alors 0A6= 1A. En effet sia∈A\ {0A} on a
a·0A= 0A·a= 0A6=a=a·1A= 1A·a d’où 1A6= 0A.
Règles de calculs (suite)
Comme la multiplication est distributive par rapport à l’addition (commutative et associative) on peut écrire les sommes : si (p, q)∈N∗×N∗,∀a1, . . . , ap∈A,
∀b1, . . . , bq∈A
(
p
X
i=1
ai)·(
q
X
j=1
bj) =
p
X
i=1
(
q
X
j=1
aibj) =
q
X
j=1
(
p
X
i=1
aibj) = X
1≤i≤p 1≤j≤q
aibj
. . .
SiA est commutatif (la loi “·”) alors on dispose de la formule du binôme de Newton
(a+b)n=an+
n−1
X
k=1
n k
akbn−k+bn Attention : en général (si les élémentsaet bne commutent pas)
(a+b)2=a2+ab+ba+b26=a2+ 2ab+b2
Exemples
Exemples
• (Mn(C),+,·) (opérations usuelles) : anneau unitaire non commutatif
• (R,+,·) anneau unitaire commutatif
• (2Z,+,·) anneau non unitaire commutatif
• (Z/nZ,+,·) anneau unitaire commutatif
Morphisme d’anneau
Définitions
Soit (A,+,·) et (B,+,·) deux anneaux. Une applicationf deAdansB est un morphisme d’anneau sif vérifie, pour touta, b∈A
f(a+b) =f(a) +f(b) f(ab) =f(a)f(b).
Si de plus les deux anneaux sont unitaires, un morphisme d’anneauf est dit unitaires’il vérifie de plusf(1A) =f(1B)
• Un morphisme d’anneau bijectif est appeléisomorphismeet on dit que les anneauxAet B sontisomorphes.
Exemples
Voici deux exemples de morphisme d’anneau unitaires
• (Z,+,·)7→(Z/nZ,+,·) k7→k˙
• (Z,+,·)7→(A,+,·) n7→n1A
(avecAunitaire)
Sous anneau
Définition
Soit (A,+,·) un anneau. Une partie non videC deAest appelée sous-anneau deAsiC est stable par addition et multiplication et siC est un anneau pour l’addition et la multiplication induites. De façon équivalente :
• (C,+) sous groupe de (A,+)
• sia, b∈C alorsab∈C
Si (A,+,·) est unitaire le sous anneau est dit unitaire s’il contient l’élément 1A.
Proposition
Soit (A,+,·) et (B,+,·) deux anneaux etf un morphisme d’anneau deAdans B.
• SiC est sous-anneau deA alorsf(C) est un sous-anneau deB
• SiC0 est un sous anneau deB alorsf−1(C0) est un sous-anneau deA
• Preuve : exercice
Diviseurs de zéro, anneau intègre
à partir de maintenant les anneaux seront commutatifs et unitaires
Définition
Soit (A,+,·) un anneau commutatif unitaire. Un élémenta∈Anon nul est un diviseur de zéros’il existeb∈Aavecb6= 0A vérifiantab= 0A
Proposition
Un élémentaest régulier pour la loi “·” si et seulement sian’est pas diviseur de zéro
Preuve :
• Supposonsarégulier. Commeab=a·0Aentraîneb= 0A alorsan’est pas diviseur de zéro
• supposons quean’est pas diviseur de zéro. Soitb, c∈Avérifiantab=ac. On en déduit queab−ac= 0A, d’oùa(b−c) = 0A. Ane possédant pas de diviseur de 0,b−c= 0A.
Exemples
• (Z,+,·) ne possède pas de diviseur de zéro
• (C([−1,1],R),+,·) l’espace des fonctions continues de [0,1] dansRpossède des diviseurs de zéro. Il suffit de construire une fonction nulle sur [−1,0]
et une fonction nulle sur [0,1]. Avecf(x) =x− |x|etg(x) =x+|x| ça marche !
Définition
Un anneau (A,+,·) est dit intègre s’il est unitaire commutatif, non réduit à {0A} et s’il ne possède pas de diviseur de zéro.
Conséquence
Dans un anneau intègre sia6= 0Aalorsax=ay entraînex=y.
Preuve : si ax =ay alors ax−ay = 0A, soit a(x−y) = 0A. Comme A ne possède pas de diviseur de zéro on obtientx=y.
Corps
On précise que dans un anneau commutatif unitaire (A,+,·) un élementaest dit inversible s’il admet un symétrique pour la multiplication, c.-à-d. il existe b∈A tel queab= 1A
Définition
SoitK un anneau commutatif unitaire. On dit queK est un corps si
• K non réduit au singleton{0K}
• tout élément non nul est inversible
Conséquence
Dans un corps il n’existe pas de diviseur de zéro. Sia, b∈Ket vérifientab= 0K. Supposons quea6= 0K,aétant inversible on écrit
0K =a−10K =a−1ab= 1Kb=b
Sous corps
De la même façon que les sous anneaux, un sous corpsLde (K,+,·) est un sous anneau deK qui est un corps et de façon équivalente :
• L6={0K}
• (L,+) sous-groupe de (K,+)
• ∀a, b∈L, on aab∈L
• ∀a∈ Lsi a6= 0 alors a−1 ∈L (comprendre le symétrique de adansK appartient àL).
Idéaux - anneau quotient
Définition
Soit (A,+,·) un anneau commutatif unitaire. Un idéalI deA est une partie non vide deAvérifiant
• (I,+) sous groupe de (A,+)
• ∀x∈I,∀a∈A on aax∈I.
Exemple
• 2Zidéal de (Z,+,·)
• {0A}et Asont des idéaux deA(idéaux triviaux)
• fonctions nulles en 0 est un idéal de l’ensemble des fonctions
Proposition
Soitf :A7→B un morphisme d’anneau unitaire et soitJ un idéal deB. Alors f−1(J) est un idéal deA. En particulier kerf ⊂f−1(J) et kerf idéal deA. Preuve
• Nous savons déjà (partie du cours sur les groupes) quef−1(J)(6=∅) est un sous groupe de (A,+) carf morphisme de groupe de (A,+) dans (B,+). Soitx∈f−1(J) eta∈A. On af(x)∈J, commeJ est un idéal on en déduit quef(a)f(x)∈J. Comme f morphisme d’anneau, cela donne f(ax) =f(a)f(x)∈J soit ax∈f−1(J).
• Comme{0A} ⊂J, clairement kerf ⊂f−1(J).
Remarque
L’image d’un idéal n’est pas en général un idéal, mais sif est surjective c’est vrai (exercice)
Idéal engendré
Proposition
L’intersection d’une famille d’idéaux deAest un idéal deA
Preuve : (exercice)
Soit (Iα)α∈E une famille d’idéaux
• Nous savons que l’intersection d’une famille de sous groupes est un sous groupe.
• l’autre propriété passe bien (c’est une intersection) : soitx∈ A eta∈
∩α∈EIα. Pour toutα∈E,Iαest un idéal, donc par définition,ax∈Iα. Ainsiax∈ ∩α∈EIα.
Idéal engendré
De la même façon que l’on définit le sous groupe “engendré par”, on peut définir l’idéal “engendré par”
Définition
SoitS une partie deA. On appelle idéal engendré parS l’intersection des idéaux contenantS.
Anneau quotient
SoitA un anneau commutatif unitaire etI un idéal deA. Notonsa≡b(modI) ssia−b∈I.
Proposition
“a≡b(modI)” est une relation d’équivalence surAcompatible avec l’addition et la multiplication (les 2 l.c.i surA)
Preuve
• Comme (A,+) groupe abélien et (I,+) sous groupe de (A,+), d’après le cours sur les groupes “a ≡ b(modI)” est une relation d’équivalence compatible avec la loi ‘+’.
• Montrons la compatibilité avec la loi ‘·’. Soit a, b, a0, b0 ∈ A tels que a≡b(modI)a≡b(modI) eta0≡b0(modI). On écrit
aa0−bb0=a(a0−b0) +b0(a−b).
Preuve(suite)
aa0−bb0=a(a0−b0) +b0(a−b).
Commea0−b0 ∈Ion en déduit (définition idéal) quea(a0−b0)∈I. De mêmea−b∈I, b0∈A etI idéal entraînentb0(a−b)∈I.
Comme (I,+) sous groupe : aa0−bb0∈IOn a doncaa0≡bb0(modI), la relation d’équivalence est compatible avec la loi ‘·’.
Théorème
L’ensemble quotientA/I est un anneau commutatif unitaire pour les lois
˙
a+ ˙b= ˙a+b a˙ ×b˙= ˙ab où ˙adésigne la classe deapour la loi “≡(modI)”
Remarque
Ici on prend le même symbole ‘+’ et ‘·’ surA etA/I.
Preuve
1)(A/I,+) est un groupe commutatif (voir cours sur les groupes quotients) 2) Comme d’habitude, il faut montrer l’indépendance par rapport aux choix des représentants
Preuve (suite)
ab˙ = ˙a×b˙ indépendant du choix ?
Nous savons (loi ‘·’ compatible) que si ˙a= ˙a0 et ˙b = ˙b0 alors ab≡a0b0(modI).
Donc ˙ab= ˙a0b0.
3)loi ‘·’ : associative, commutative, élément neutre, distributive ?
• ˙a·(˙b·c˙) = ˙a·( ˙bc) = ˙a(bc). La loi ‘·’ surAest associative, donc ˙a·(˙b·c˙) = (ab˙)c= ˙ab·c˙= (˙a·b˙) ˙c
• ˙a·b˙= ˙ab= ˙ba car loi ‘·’ surAcommutative. Donc ˙a·b˙= ˙b·a˙
• élt neutre : ˙1A·a˙ = ˙1Aa= ˙a
Preuve (suite)
• En utilisant la distributivité dans l’anneau (A,+,·) :
˙
a·(˙b+ ˙c) = ˙a·(b+˙ c) =a(b˙+c) =ab+˙ ac= ˙ab+ ˙ac
= ˙a·b˙+ ˙a·c˙ 4)C’est un anneau !
Remarque
En général on noteπle morphisme surjectif canonique de (A,+,·) dans (A/I,+,·) définie par
π:A7→A/I a7→a
Exemple
Sin∈N,nZest un idéal deZ. On construit donc l’anneau quotient (Z/nZ,+,·).
Il correspond “au calcul modulon”.
Divisibilité – anneau principal - Z
Définitions
Dans la suite (A,+,·) est un anneau intègre.
Définition
Soitaetbdeux éléments deA. On dit que adiviseb dansA s’il existex∈A tel queb=ax et on écrita|b.
Proposition
∀a∈A, (a) =aA. (rappel : (a) est l’idéal engendré par la partie{a}) Preuve (rapide) :
• aAidéal
• a∈aA(c’est clair : a= 1Aa)
SiIidéal contenanta. Par définition de la notion d’idéal, commea∈I, six∈A alorsax∈I. DoncaA⊂I. Ainsi aAplus petit idéal contenantA.
Proposition
a|bsi et seulement si (b)⊂(a)
Preuve
• Supposonsa|b. Par définition soitx∈A tel queb=ax. Comme (a) idéal, on en déduit queax∈(a), doncb∈(a). Par définition de l’idéal engendré : (b)⊂(a)
• Réciproquement supposons que (b)⊂(a). On ab∈(b)⊂(a), doncb∈(a).
D’après la proposition précédentb∈aA, donc bs’écritb=axavecx∈A. Ainsia|b.
Définition+Proposition
Sia|betb|a(équivaut à (a) = (b)) les éléments aetb sont dits associés. De plus il existeuinversible dans Atel quea=ub.
Preuve
• b|a: soit utel quea=ub.
• a|b: soit u0 tel que b=u0a.
Ainsi a = uu0a, comme l’anneau A est intègre, on obtientuu0 = 1A, soit u inversible.
Anneau, idéal principal
Définition
Un idéalI est dit principal s’il existea∈Atel que I=aA= (a).
Définition
Un anneau (A,+,·) est dit principal siAest un anneau intègre dans lequel tout idéal est principal.
Exemples
• (Z,+,·) anneau principal
• Mais (C(R,R),+,·) anneau mais I = {f;f(0) = 0} est un idéal non principal (exercice)
Remarque
On peuts’amuserà définir une notion de pgcd, de ppcm dans un anneau intègre avec les idéaux. Cependant c’est un peu plus compliqué et le pgcd (ou le ppcm) n’existe pas nécessairement.
Mais dans un anneau principal, c’est plus facile !
PGCD, PPCM, élément irréductible dans un anneau intè- gre
Six∈A, notons Div(x) l’ensemble des diviseurs dex.
Définition - proposition
SoitaetbdansA(anneau principal). Un élémentd∈Aest un pgcd deaetbsi Div(a)∩Div(b) = Div(d)
ce qui veut dire
( d|a et d|b
tout diviseur commun àaetb est un diviseur ded
Le pgcd existe, est unique à une association près, et il existeuetv dansAtels que
d=au+bv (revoici Bezout!)
Preuve
ConsidéronsI l’idéal engendré par {a, b}. CommeAestprincipalsoitd∈A tel queI= (d) =dA.
Montrons quedest un pgcd dea, b. 1) ?? d|aetd|b?? Oui
a∈(d)⇒ amultiple de d ⇒ d|a b∈(d)⇒ · · · ⇒d|b
2) PosonsJ ={ax+by; x∈A, y∈A}et montronsI=J.
• a, b∈I⇒J ⊂I
• J idéal (à vérifier) : (J,+) sous groupe et on vérifie que z(ax+by) = a(xz) +b(yz)∈J
DoncI= (d) =J et commed∈J il existeuetv tels qued=au+bv.
Preuve (suite)
3) Montrons quedest un pgcd deaetb. Soitd0 un diviseur commun àaet b. Commed=au+bv
d0|a⇒d0|au d0|b⇒d0|bu d’oùd0|au+bv=d
4) Sid0 est un pgcd deaetb alorsd|d0 et d0|d, doncdet d0 sont associés.
Définition-proposition
Soitaet bdeux éléments deA. m∈Aest un ppcm deaetbsi (a)∩(b) = (m).
L’élémentmexiste et est unique à une association près.
preuve
(a) et (b) idéaux : (a)∩(b) idéal. Aétantprincipalsoitmtel que (a)∩(b) = (m).
Ainsimexiste.
Simet m0 sont deux ppcm alors (m) = (m0) impliquentmet m0 associés.
Définition
Deux éléments sont premiers entre eux si 1A est un PGCD.
Définition
aest irréductible si 1) a6= 0A
2) an’est pas inversible
3) tout diviseur deaest soit inversible, soit associé à a
Alors on peut refaire le Lemme de Gauss, Euclide, etc
Lemme de Gauss
Soit a, b, c∈ A (toujours (A,+,·) anneau principal). Sia|bc et si aet b sont premiers entre eux alorsa|c.
Preuve
1A est un pgcd deaetb: soitu, v ∈Atels que 1A=au+bv. Ainsi on écritc=acu+bcv.
Clairementa|acuet comme a|bcon obtienta|bcv. D’oùa|acu+bcv=c.
Lemme d’Euclide
Soitp, b, c∈A. Supposonspirréductible et p|bc. Alors nécessairement p|b ou p|c.
Preuve
Sipne divise pas b, commepest irréductiblepetb sont premiers entre eux. Le lemme de Gauss permet d’en déduirep|c.
Remarques
• Pour définirlepgcd il faut ajoute un critère Z: le représentant positif R[X] : le polynôme unitaire
• Et le calcul ? Il faut une division euclidienne.