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Au temps de Lavoisier

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(1)

Article

Reference

Au temps de Lavoisier

WENGER, Paul Eugène Etienne

WENGER, Paul Eugène Etienne. Au temps de Lavoisier. Alma Mater: revue universitaire , 1944, no. 3, p. 143-157

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:106549

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1 / 1

(2)

ALMA MATER

I

No 3 - FR. I,20

REVUE UNIVERSITATRE

DE LA SUISSE ROMANDE

DÉCEMBRE T944

(3)

M. et Mme Lavoisier, par David

(4)

AU TEMPS DE LAVOISIER'

P.-8. Wpxcnn

Prolesseur à l,'Uni'aersi'té d'e Genèao

Il n'est pas

dans nos

intentions de parler

d.es sciences contempo-

raines,

des cliverses tendances philosophiques actuelles.

Nous

rappelle-

rons

néanmoins

que les

spécialisations

à outrance, résultant

d'u déve-

loppement

considérable des d,isciplines scientifiques,

ont

créé une sorte

d.e cloisonnement d.ans lequel ehatlue chercheur

travaille

comme

au

fond

d'un puits,

ne

pouYânt

contempler qutune

petite portion

d-u

ciel' IIeu- reuseÀent,

ces cloisons commencent

à clâquel

d,e

toutes parts et lton

tencl vers

la

même

fin, Punité,

quelle que

soit la

philosophie

à

laquelle

on

se

rattache, et

pour' nous autres chimistes, que

lton soit

atomiste ou énergéliste.

Guye, dans son remârquùblc ouvrage,

< I-r)ér'olution physic0-chi- mique >, évoque le mouvement

qui

se manifeste,

tendant

à

itintroduction ae ptus en plus large d'un

déterminisme

statisticlue dont la

précision

d.épend

de la loi

d.es

grands

nombres

et

laisse

prévoir les

cas excep- tionnels,

soit

les

fluctuations. Ainsi, par

exemple, c'est grâce au principe thermo-dynamique d.e

carnot,

d.epuis les

travaux

d.e

Gibbs

el, cle

Boltz-

mânn,

et

grâce aussi

à la relativité,

que

l'on peut trouver la

possibilité dtun

trait

d.,union entre des sciences qui semblent complètement séparéesr I si

l,on

abordc sculement les

notions qui

se

trouvent

à Jelrr hase. Cepen- , d"ant,

il serait puéril d'imaginer que les travaux et

d.écouvertes des savants d.u siècle passé

n'ont point contribué à cette évolution'

Nous

irons

même

plus loin et

nous

dirons qutil faut

se

réjouir

que certaines théories,

qui

nous paraissent actuellement vieillies ou entachées dterreur,

aient

été prises comme rigoureuses à

un

moment donné. I',e savant

doit

se servir d.u matériel

dont il

dispose pour

montel

d''un échelon

et il doit

- à côté

d.,un

don d'observation tïès

marqué,

- prévoir,

c'est-à-dire se transformer en une sorte cle prophète. IJne hypothèse n'est pas juste

ou

fausse

;

elle est fécond"e

si

elle

permet

de

faire

d-évelopper

la

science que I'on étutlie ;

il faut

la rejeter si elle nous amène d.ans d'es chemins sans issue. Peut-on

nier le rôle positif

de

la notion

de

I'atome,

de

la

nomen-

I

'L" -ême sujet a été traité à Genève dans le cadre des grandes conlérences universitaires' lo 25 février 1944.

(5)

-t44-

clature

chimique, de

la loi

d,es

proportions

définies dans

le

développe- ment de notre science ? Mendetéev

aurait-il établi

son magniflque système

périodique,

basé

sur les poids

atomiques

relatifs, s'il avait connu

les isotopes

? Dt

réciproquement,

aurait-on trouvé ces

d,erniers

sans

le système périodique des éléments ?

Au XVIII.

siècle, moment épique de

la

science expérimentale, les encyclopédistes,

tout en se partageant la

besogne,

travaiilaient

en commun ; nous n'en voulons pour pïeuve que re

lotissemenl,

tle l'ancienne

acad.émie

d.tArcueil oir

r-.,avoisier, r-,aplace, Monge,

Berthollet et

rltautres

ont

élaboré

le statut

moclerne d.es sciences physiques.

Parmi

ces savants, r-,avoisier

a eté

passionnément discuté.

Néanmoins,

cette grande figure,

disparue

il y a cent

cincluante ans, onnnr#i^-l À Itl,,,*^.^:LA +^--L ^-r:!-^ ^r

@yIJat urluu 4 r rrurrl4[ruU uuLttr tiLIUIUIU eU UU $gf i.tf L Vt'AIIIleltU e[l'OILeSSg

d'esprit

que d.e faire du nationalisme à son sujet.

Reportons-nous à I'époque dans laquelle

il

évolue, voyons res maté-

rjaux dont il

dispose,

et pour

cela, faisons une

rapide revue du

passé.

Comparés aux physiciens, les chimistes semblent les véritafules inven-

teurs de I'expérimentation.

r-:'observation d,es phénomènes chimiques,

l'art

de les coord.onner dans un certain

but et

de les reprod.uire à volonté,

datent

des premiers âges

du

monde.

De

les difficultés pour

situer l'époque précise à laquelle

il faut

placer

la

naissance de ra chimie. Nous nôllvôns q,alTnafirp /nq,r asnriî Âo evnt-lrÀao\ nrrn lrnrl nl"i*i^',^ / Yuv r @ru uurrurYuv, wvuuç ^^++^ ^r.*'-wurJ-

salide assez

informe

d.'où

sortit notre

science,

a

puisé

à trois

sources

la

force de traverser d.e nombreux siècles puis de s'épanouir splendidement

au XVIIIe

siècle sous Itinfluence d.,hommes remarquables.

Nous concevons

I'influence prépond.érante des EgyTtti,ens, d.e Ia Grèce

et

des Arabes.

rl

n'est pas

douteux

d.'ailleurs que ces civilisations

ont

elles-mêmes collaboré

entre

elles

et que l'orient, avec sa

culture, n'est pas étranger aux philosophies que nous

ont

téguées ces peuples.

L'Egyqtte d'abord. Ses artisans étaient très avancés

d.ans les industries. cependant

la

nature

du

sol d.e

leur

pâys essenl,iellement agri- cole nous obiige à admettre que ces gens ont reçu des lumières cle certaines nations, en

particulier

de I'rnd.e, des chaldéens

qui apprirent aux

habi-

tants

de

la

vallée du

Nil la

cuisson de

I'argile et

des émaux.

Il

nous reste comme souvenirs

les

termes

: alcool, borax, alcali,

tous d.'origine chal- déenne.

Fait

surprenant

: Ie fer ne servait qutà r'ornementation.

r.ie

premier

utilisé provenait

de météorites

et

les Dgyptiens se

figuraient

le ciel

tel

une immense voûte en

fer. on

ne

peut

s,empêcher d.e

trouver

une curieuse analogie entre cette conception

et la signification

d,u

mot

grec sideros

et

d.u terme

latin

sidus. T')or,

le cuivre étaient

employés dans

divers

domaines. lvralheureusement

la chimie égyptienne était un art

sacré, réservé

aux prêtres qui ont apporté un rare degré

d,e perfec-

tion, mais qui par contre ont celé de précieux

renseignements. Les

(6)

-145-

minerais

venaient bien

souvent d.e

Nubie et du

SinaÏ

et

leurs monnaies présentaient

I'effigie

d.e

bestiaux.

Serait-ce encore

I'origine de

pecus et d.e pecunia ?

Puis vinrent' les

Grecs.

Selon

Taine,

<

un

peuple

reçoit toujours l'empreinte du pays qu'il

habite

r.

I-,a d.ouceur

du climat, l'harmonie

d.es beautés d'e

la nature

ont

fait

d.u Grec

un

incomparable

artiste, ayant

assez de bien-être

pour qu'il aime

sa

vie, et

pâs assez

pour qutil

stamollisse.

On peut

d'onc

prévoir une culture

expérimentale

absolument nulle, En effet, pour la

Grèce '

antique, appliquer la

science c'est

la

dégrad.er.

Illte

d.oit

rester

dans le d.omaine cte

i'icléal. A la

trase d.es systèmes philosophiques d.e

la

Grèce

on retrouve le principe

d.e

la

conseïYation d.e

la matière. Rien

ne

vient

d.e

rien. suivant un

témoignage

d,'aristote, il cloit

,être

attribué

non pas

âux

Eléates mais

à

Thalès cle IVliIet,

I'un

des

Sept

Sages' On assiste encoïe

à la

naissance de

la notion

de

ltatome. Les

penseurs ad.mettent I'existence d.u

vide et Ia d.ivisibilité

de

la

matière. I-:eucippe en est

I'ini- tiateur, Démocrite en

est

le

d.isciple

fervent, et il n'est

pas

indifférent

de se souvenir de ses voyages

qui

démontreraient I'influence de

l'Orient'

Toutes les propriétés d.es corps

doivent être

expliquées

par la

quantité,

la

grandeur,

la forme et la siluation

réciproque cles atomes. Démocritc cepend.ant dénie

la

pesanteur à

l'atome,

mais Epicure, plus

tard, l'aurait

admise.

Il

est certain que cet atomisme grec est tïès

original

comme système philosophique, mais

il nta rien de

commun avec

la notion

mod.erne de

l,atome, car à

celui-ci

Daiton

déjà

y a

attaché

la notion

d.e poids.

La

science de

la

Grèce

enfin a

envisagé

la notion

cl'élément

et

on

peut dire que c'est Aristote qui

concrétise

cette notion en admettant quatre

éléments

(env.

384

av. J.-C.).

Ces corps simples,

âu

nombl.e de qual,rc, se manilestent

et

se

forment lorsqu'on

combinc d.cux

à

deux ce qu'alors

on

appelait les modes contrailes d.e

la qualité,

ainsi

le

chaud- et

sec d.onnent

le feu, le

chaud.

et l'humide

d.onnent

l)air, le froict et

le sec

donnent la terre, Ie froid et

ithumid.e clonnent

l'eau. Nous

voyons alors que ces éléments ne peuvent résister à I'expériencer

et

si les philo- sophes d'alors avaient eu 1tidée de se servir d-tune balance ou s'ils avaient

moins

méprisé

l'expérimentation, ils

seraient

arrivés

certainement très

loin. Mais,

comme

le rapporte Taine,

<

ils n'ont voulu cueillir que

la

fleur

d.es choses

et

c'est

pour

cela

qu'ils ont

été les

plus

grand.s artistes d.u mond.e r.

L)Ecole

d)alenand,rie,

plus tard,

développe

les

sciences naturelles

et

géographiques.

on y rencontre une

pléiade d.e savants

et

d.e philo- sophes, Euclide, Archimècle, Dratosthène, Théophraste. Mais

il

nous

faut

(7)

*t46-

reconnaître que, dans

I'histoire

de

la

chimie, cette école

fut

plus curieuse

qu'importante. une érudition dénuée d.'esprit critique s'efforce

de

rapprocher les

doctrines sans grand. succès.

Au VIIIe

siècle

de notre ère,

Ies Arabes

enfin,

champions

de

la science expérimentale,

pratiquent ltindustrie,

fabriquenl, les faTences, la maroquinerie, et c'est enfin I'invention des chinois: le papier. Geber (Giavar

ou

Giaber)

est le fondateur de

I'école des chimistes aratres,

auteur

d.u

<

summa

Perfectionis

l, le plus

ancien ouvrage d.e

chimie qui

nous soit

pâr\renu

I ctest un expérimcntatcur cxccllent, observateur

perspicace,

il

décrit les métaux, trouve les acides minéraux. Ecoutons-le

:

< r_.,'arsenic

est

composé d.)une

matière subtile et d'une

nal,ure analogue

à

celle c1u

soufre et on Ie reiire

cle

ia caicination

des minerais.

u conrme

l'éclat

métallique lui sert de critère, il

incorpore

âux métaux la

galène

et

la

pyrite. or,

de ces corps, on retire Ie soufre, on les

purifie

d.onc et peut-être

arrive-t-on

à la

transmutation,

à la production de

I'or,

bien clue lui-même

reste

sceptique,

la nature ayant

consacré

des millions

cl'années

à

la

formation

des

métaux. c'est

cle

cette

époque

que date l,alchimie,

la recherche

de la pierre

philosophale, de

l'élixir philosophal,

1,<

âme

du monde rl

qui

clevait assurer richesses

et

honneurs.

rl

a

fallu pourtant

quinze siècles

pour

que de ces

trois

sources vives anrln l- ^Li*;^ +^II^ ^,-t^.- r- ^^- ^^:r ^^--- !^-^-^^ - -r - -l

Dvr uv r@ vuruuE uErru qu ull lal UUIrçUltr SUIIN IUI'IIIU (It] NUIeIlLie III0Oefne.

Ltinfluence des Ba,rbare,s,

les traditions et le

dogmatisme

romains,

ne

pouvaient apporter

les

vraies

bases d.e

la

science expérimentale,

et

si nous voulons comprendre

l'æuvre

cle lravoisier, c'est cle celle-Ià surtout

qu'il faut

parler.

Nul

événement mieux que les Croisades,

par

contre,

n'était

capable

d.e provoquer f

interpénétration

de

i'orient et

de

l'occident ;

ce sont les croisés

qui

nous

valurent I'alchimie

eû, pend.ant

la

longue

période

du moyen âge,

le feu était

regardé comme

un

agent

universel. Rien ne

se

faisait

sans

Iui.

Avec

lui,

au contraire,

tout était

possible. Les alchimistes concluaient que le

feu devait

amener les

métaux à un état plus parfait.

De là,

I'idée cle

leur

conversion en

or ou

en

argent. si lton fait un iour pour la

chimie

du

moyen âge, ce que les archéologues

ont fait pour

les cathédrales,

on apprendra à la regarder

comme

logique mais

fausse,

au lieu

d"e

la

consid,érer comme absurde.

on retrouvera la

source de toutes ses e reurs dans

l'antiquité

clui prétenclait se pâsser des révéIations de la nature et fond,er la science d.'après I'harmonie étatrlie dans la pensée d,es philosophes.

Betenons simplement

qu'au milieu

d.e leurs illusions, res alchimistes

ont

rend.u constamment service à

la

chimie en

pubtiant

sans détours les observations qui leur semblaient utiles au

but

constant de leurs

travaux.

Ils

se réservaient, au contraire, â,vec un soin jaloux, les opérations relatives

(8)

--

r47

--

\

l

i I ti :

t

au

gra,nd cpuvïe, l,a pierye phi,tosophate.

Ils s'appropria'ient les

iclées

fausses

et les

cachaient

: ils

semaient,

par contre, les

iclées

vraies

et

nécessaires

au

progrès d'e

l'humanité.

cependant, avec

le

temps, d.es forces nouvelles se

font jour,

comme

ItUniversité, par

exemple, ou

l)apparition

des novateurs. Ce serait

sortir

d.u cad.re de

notre sulet

que cte

Iaire l'histoire

de cette périocle

et

de celle cle

la

Renaissance

qui

présentent

le plus vif intérêt.

Cepend-ant, c'est avec regret que nous ne pouyons

citer

qu'en passant les noms

d)tn

Boger

Bacon qui

lutte

contre ltautorit,é cttAristote et d.épense une somme énorme

pour

Ses recherches expérimentales,

au XIIIe

siècle

; d|ul

Paracel,se, ce

fameux méd.ecin d.u

XVe

siècle, né à Einsied,eln,

qui pouvait

être regardé comme

la

d.ernière grande

figure

d.e

la

périotle

philosophique; enfin

d-e

l'artiste et du

savant Bernard, Pal,i,ssy,

au XVIe

siècle' Les personnalités d.e

van

Eal,mont

of

de Boyte

montrent

clue

Ie

XVTe

et le xYIIe

siècles

tenclent

à mettre

les préjugés philosophiques hors

la

science

et

que

I'on

se

trouve

cléjà

en

présence

de

novateurs.

Dtautres

encore.''

Au XVIIe siècle, nous arrivons à une

époque

d.es vues plus saines commencent

à

se

répandre. On continue

cepend'ant

à

admettre les quaLre élémenbs

cl'Aristole, jusqu'à l'apparition

ctu célèbre inventeur

tle

ta,

théorie

clu

phiogistique,

BtahZ d.'Anspach

et

de son maître Becher'

ce

dernier, précurseur d.e

stahl, introd.uit cette notion du

phlogi'sti'que

; iI

est intéressant d.e

rapporter

I'iclée

qu'il

se

fait

d.e

Ia

flamme. Pour

lui,

1a flamme se compose d.,une

inflnité de

corpuscuies

qui pénètrent

d.ans

tous les corps opaques et compacts.

II

d.it aussi

qu'il n'y

a rien d'étonnant

à

ce que

le feu liquéfie

les corps,

étant

clonné que

le feu

est lui-même

rrn

liquide.

stahl vouail, une

grand.e ad.miration

à

Becher.

Il

possédait

ce

quil

manquait à

ce d.ernier

et,

reprenant ses id.ées,

il flt

clu phlogistique une

véritable théorie qui

d.evait

jouir pendant un

siècle d-e

la faveur

d.es savants

et

d.u

public. ll établit une distinction entre Ia

rnaÛière

ùu

feu.

et Ie feu lui-même.

C'est

la

base

de

sa

théorie. Trouvant les

éléments

d'Aristote

inapplicables

aux

phénomènes cle

Ia chimie, iI lei rejette

et cherche

ailleurs

d,es corps indécomposables.

Il

connaissait

bien

les rap-

ports qui lient

ies

métaux

à leurs oxycles.

S'il eût pris

comme éléments les

métaux et s'ileût

consid.éré les oxyd.es comme des composés d"érivés

de

ces corps simples, sa

théorie efrt été

conforme

aux

principes fonda- mentaux de

la

chimie mod.erne. l\[ais,

hélas,il flt

I'inverse.

(I:efeu, tlit-ilt

se présente sous d.eux formes, comme composé

et à ltétat libre. Le

feu

à i,état libre,

c,est

le feu ordinaire,

clui

apporte

chaleur

et lumière.

Le feu à

l'état

de combinaison ou phlogistique se trouYe contenu en quantité

plus ou

moins grand.e d.ans les substances combustibles.

La

combustion

est la transformation

clu

phlogistique en feu libre.

>

Il

reconnaît enfln

(9)

-I48-

que

la

combustion est conditionnée par Ia présence cle

I'air

ou de quelque chose

de

semblable. r-,a

variation

de

poids, qui,

d.ans

nos

conceptions, est

primordiale,

no

lo frappait

pas,

il n'avait

pas égard

aux

indications de

la

balance. r,.ra

notion

d.e forme

était

son seul guide. Néanmoins,

il

a

consommé d.ans les iclées cette

révolution qui a fait rejeter

ies éléments

d'Aristote et fut par là le

précurseur nécessaire d.e I_,avoisier.

Nous voici arrivés à

l'époque (1779) où.

parurent sur la

scène du monde

trois

hommes

qui

d.evaient

modifler la face

d.es sciences. rrrun, La'uo'isier,

riche,

elûuuré de

l'élite

d.es savants, domine toutes les gloires contemporaines.

Le

d.euxièmo, Pri,estl,ey, ecclésiastique

sâns

fortune,

mais

soutenu

par

quelques

amis

d.es sciences,

jette un vif éclat,

mais passager.

Le

troisième, Bcheel,e, élève en pharmacie,

pauvïe et

modeste,

inférieur au premier, mais

supérieur

au

second-,

maîtrise Ia nature

à

force d.e patience

et

d.e génie,

et lui

arrache ses secrets, s,assurant ainsi

une

grande renommée.

Entre eux stétablit une lutte animée et pourtant leurs

apports tendent au même

but;

au

bout

d.e quelques années, leur tâche commune

est

accomplie,

une

destinée

implacable vient s'apesantir sur eux,

Ies

brise, et la nature qutils ont

tant

tourmentée, semble en éprouver quelque repos.

r\aheel,e,

Suédois, naquit à Stralsung le g

d.écembre 1242. Après quelques étud.es,

il fut

placé comme étève pharmacien.

Il n,a

presque

rien

appris d.es hommes.

La nature fut pour ainsi dire

son seul maître.

au

début, rien ne d.écelait en

lui

ce

qu'il

devait être un

jour. Dt

cepend.ant,

il

résoud

les

problèmes

les plus

obscurs

à l'aid.e

d.es moyens res plus simples.

Fallait-il recueillir

des gaz,

par

exemple,

iI attachait

une vessie

au col

d.e

la fiole

où" s'effectuait

leur

dégagement

;

puis

la

vessie pleine, attachée avec

une

ficelle,

permettait

d"'utiliser

son contenu à

volonté.

Parmi

les corps simples,

il

en est plusieurs que scheele

a

isolés.

c'est

à

lui qu'appartjent la

d-écouverte d.u chlore

; il

connaît I'oxygène presque en même

temps

que Priestley.

son travail sur le fluorure

de calcium et I'acid.e fluorhyclrique

le

cond"uit

à admettre un

corps,

Ie fluor, qui

sera d.écouvert plus

tard. on lui doit la

connaissance d-'une

murtitude

d.,acides

tant

organiques

que minéraux.

<

on ne saurait trop l'admirer,

écrit

< Dumas 1,

tant qu'il

se renferme d.ans les

faits qu'il a

observés

et

dans

<< les conséquences prochaines

qui en

découlent

; en un mot, toutes

les

<

fois qu'il ne s'agit

que d.e

faits,

scheele est

infaillible.

Mais

il

n,en est

< pius de même quand.

iI arrive

à poser des théories générares.

Alors,

on

<

voit

avec

regret

que son imagination ltemporte, qutelle

I'entraîne

à des

I u Leçons sur la philosophie chimique ), par M. Durnas

(10)

--

149

-

( écarts que

I'on était loin

d.'attend.re

d'un esprit

si d.roit,

et I'on

ne peut

< méconnàître

le

secours

que des

études mathématiques préparatoires

<<

auraient fourni pour

ses recherches d.e philosophie naturelle.

I

Priestley,

d-e

son côté, en Angleterre,

se

livrait à

d.es

travaux

du

même genre. Priestley, d.ont le nom lappelle

la

découverte d'es

principaux g^r,

"rt, né en

1733

d'un père fatrricant de drap. Il était destiné

au

"o*rrr"".",

mais,

par vocation, il

se

voua à ia

carrière ecclésiastique'

Il

eut à subir

des controverses, ne

voulant

pas

admettre

certains d'ogmes,

et il forma un

schisme.

II

professa aussi

la littérature et les

langues anciennes. Ctest seulement

vers 32 ans qutil

clébuta

dans l'étud'e

d'es

sciences.

Il fut

en

rapport

avec

Franklin

et eut f id-ée d.'étud'ier les phéno- mènes électriques.

I1 conçut ainsi la

première pensée

de

son <

Ilistoire

d.e

i,Electricité r. À

I-.ieetls,

iI

logea près d.'une brasseric,

ct

co voisinage

Itinvita à

s'amuser, comme

il le dit, à faire

quelques expériences sur I'acid.e carbonique dégagé

par la fermentation

d-e

la trière' Plus tard, il

invente le

clispositif

pour produire lui-même

ce

g^z ainsi que

d-'autres.

Ses

travaux

sont résumés d.ans les volumes < Expériences

et

Otrservations

sur les

d.ifférentes espèces

d'air

>.

Quant Priestlcy

commença

ses ttâvauxr scheele stoccupait

cles mêmes

sujets et

l-]avoisier, d.e

son côté, se livrait à de

semblables

recherches. L,e phlogistique

était

admis

paltout, et parmi

les gaz

on

en

connaissait

d.eux seulement,

l'acid.e carbonique que l'on appelait air

fixe, et I'hydrogène,

air

inflammatrle, découverts par Btack

et

caaend'i'sh.

Priesiley,

lui,

découvritYazoter le

bioxytle

d)azote,le gaz chlorhydriquet Itammoniac,

le

protoxyd.e d.'azote,

etc., et enfin

ltoxygène,

le

1er août

7774. Ce

n'est

que I'année suivante

qu'il lui

reconnut

ia propriété

d'en-

tretenir la respiration et qu'il

constata son

action sur le

sang veineux' Plus tard. encore,

il

prépara Ie gaz oxyd.e cle carbone, I')hyd'rogène sulfuré et,le guz

fluorhydrique. ce qui

est curieux chez Priestley, c'est l'obstina-

tion

avec laquelle i1 prétencl que ses clécouvertes sont d-ues

au

hasard ot

qu'il n'est

pas chimiste. Ileureusement, ses plopres

travaux

d'émentent

liaction

unique d.u hasard., ce

qui

serait

navrant

d"ans

ltét'rle

des sciences expérimentales.

Au

contrâiïe,

il a parfaitement

bien raisonné

et surtout bien

observé.

Par

contre,

pour

coord.onnel les

faits qu'il

observait, pour imaginer

la

théorie générale à laquelle

iI préparait

d'e si riches matériaux,

it faitait

cette logique puissante qui

lui

a manqué,

il fallait un vrai

génie'

Et

ce génie, ce

fut

Laao,is,ier. c)est en 1770 que ce jeune savant

fait

paraître son prem;er mémoire

:

< I-,'eau possècle-t-elle ou non

la

propriété

d.e

se transforme en terre

?

I

Quand.

iI

entreprend.

cette

expérience,

Lavoisier

procède comme

iI le fera toujours : il

se

prépare

d.e longue

main.

<

on voit qutil ne veut

consulter

la nature en vain, qu'il

prencl

<r ses dispositions d.e manière

que la vérité, quelle qu'elle

puiss'e être,

(11)

_150_

(

soit

nécessairement mise

à jour.

r 1

rl fait

donc construire une balance

-

et nous insistons sur ce

fait

-

d.'une parfaite précision,

instrument

qui,

avant lui, n'avait

jarnais

été

sérieusement employé dans les recherches chimiques.

Pour lui, tous

les phénomènes de

ia chimie sont

d.us

à

des d.éplacements de matière,

à l'union ou

à ra séparation des corps. a Rien ne se perd.,

rien

ne se crée >,

telle

est sa devise.

Et voici enfln la

grand.e

loi

générale

qui va permettre à la

chimie d.e se classer

âux

côtés cle la physique. c'est en 1772 qlu'1il consigna, dans une note déposée à I'acactémie des sciences 2, les

faits qui lui ont

servi dc

point

de

depart pour la

for-

mation de I'admirable théorie qui a rendu

sou

nom si

célèbre.

Il

alit notamment

:

<

Depuis

cluelques

jours, j'ai découvert que le

soufre en

<

brûlant

d.onne naissance

à un

acide en augmentant d.e poids,

il

en est

< d-e même

du

phosphore.

cette augmentation de poids vient de

la

<<

flxation d'une

prodigieuse

quantité d'air. si

res

métaux

calcinés aug-

<r

mentent

également de

poids, c'est qu'il y a

également

fixation

d,air,

<r

et par une vérification

certaine,

je puis démontrer quril en est

ainsi.

<

En effet,

si

je

prends une chaux métallique

et

si

je la

calcine avec du

< charbon, en vaisseaux clos,

au

moment

où elle

se

réduit, au

momenl,

<<

où la litharge

se change

en plomb, on voit reparaître I'air

clui s'était

<i

fixé lors de la calcination et I'on peut recueillir un procluit

gâzeux

zr rlnnf Ja rrrilrrma act orr mnino '-il.l^ f^:^ *1..^ --^-l uruurD .ruruv rurù ljruj:, Ëri1)[|t qu(j U€fUl (lg ^,--^ ^^r--i -a - rIAJ f],Inafge n employée. >

Lavoisier admet d.onc

la fixation

d.e

|air. Il établit

que les corps, en

brûlant,

augmentent

de

poicls

par suite d'une

combinaison,

et

qu'on

peut ensuite faire reparaître celle-ci

sous

la forme première.

<

cette

<r d.écouverte,

dit

Lavoisier,

me paraît une

d.es

plus

intéressantes qu'on

<

ait faites depuis stahl. r Jugement auquei la postérité donne

une

ratification

éclatante.

r-.,avoisier ét'ait né à Paris Ie 16

août

1743

d'un père riche

commer-

çant. rl

étuclia

au

collège Muzarin,

flt

son d"roit, puis

il

se consacïa aux mathématiques, à I'astronomie,

à Ia

botanique,

puis à la

chimie, sous la

direction du maître

G.-F. Roueile (1703-1??0).

Il

hésite

avant

d.e savoir

la

voie

qu'il doit

suivre.

rl fait

encoïe de

la

théologie. Mais on

lui

confiê une étude de l'éclairage de

Paris et

c'est €n somme ce

qui le

ctécicle du

côté chimique.

(

Après

quelques expériences,

il

s'aper'çoit clue

sa

r,ue ( manque de

la

délicatesse nécessaire

pour

apprécier les intensités rela-

<

tives

des d.iverses flammes

qu'il voulait

comparer dans

cette

étude ile

< itéclairage.

En

conséquence,

il fait

tencrre

une

chambre

en noir et

sry

< enferme

pendant six

semaines d,ans

une

obscurité

parfaite. Au

boul,

l Dumas loc. cit.

, Cette Compagnie I'accueillit en 1768 ; il en devint président cn 17gb

(12)

-r51-

( de ce temps, sa vue

avait

acquis une sensibiiité extrême et les moind.res

< différences

ne lui

échappaient

plus. Quel

clévouement

à Ia

science ne

<

faut-il

pâs

pour

se cond.amner,

à 22

ans,

à une

réclusion aussi longue

<

et

aussi sévère ! > 1 L'Acad.émie

lui

d.écerna

une

médaille d,'or (1776).

vous

comprend.rez, grà,ce

à ce trait de caractère, que

l-,avoisier n'hésite pas

à

sacrifier sa

vie à

refaire

une

science

qui ntexistait

encore .que de nom.

Pour

atteind.re ce

but, il lui fallait

une

vie

arrêtée

et

calme,

car il avait

tresoin d.e

tranquillité. Il lui fallait une

grand.e

fortune,

car

iI avait trcsoin

d.e collaborateurs,

de produits et d'appareils

coûteux.

C'est

pourquoi il

cherche dans les fînances une place de

fermier

général

qui

ctoit

lui procurer le

revenu nécessaire,

et

se

marie

avec

la fille

d''un

fermier

général.

Il peut ainsi

consacrer

à

ses

travaux une

somme de Six

mille à dix mille francs,

comme

on

a,

pu

S'en âssurer aprèS sa

mort

dans scs comptes d.e

laboratoire, qui étaient tenus

a,vec a'utant dtexac-

titucte que

ses comptes d,e

fermier général.

Ses habitucles d.'ord're se

portaient sur

les moindres d.étails. Tous

les matins et tous ies

soirs,

il

clonnait quelques heures

à Ia chimie. Le milieu

d.u

jour était

consacré aux affaires. Mais Ie d.imanche

était

pour

lui

un

jour

de bonheur complet.

Il

1e

sorlail

pas c1e son laboratoire

et

c'est

qutavaicnt

liou

ces réunions or)

jl

receva,it tous les jeunes gens

qui, par

leurs connaissances en chimie, pouvaient

profiter

de sa conversation.

Ii attirait

ainsi

autour

de

lui

tous les savants de son époque, français ou étrangers.

Il sut

dtailleurs inspirer le respect d.e sa profqssion

et il affirma

même

une

certaine

bonté.

ctest

à tui

que les

Juifs

de

Metz

d,urent

I'abolition d'un impôt

od.ieux, vieux reste d.es temps de

barbarie (voir

Dumas, loc. ci't).

II

met aussi Ia science

au

Service des humbles. Ctest

ainsi qu'il

se

livre à un travail

d.ont peu d,e chimistes voud.raient se charger,

ayant pour objet

de reconnaître la

nature des gaz

prod,uits

par les

matières fécales corlompues,

ce

qui

l'amena à découvrir quelque moyen de

secours

pour les

malheureux

ouvriers qui

périssaient

si souvent,

asphyxiés

ou brtlés par

suiLe cles explosions.

Rien

n'égale

l'activité

d.e l-lavoisier comme savant. Pendant

quatorze

ânnées,

les

mémoires académiques

n'ont jamais manqué

cle stenrichir de quelques-uns de ses écrits.

<

En lisant

ces mémoires,

on

éprouve quelque étonnement

à voir

< alliée

à Ia plus

grande hard.iesse d.e pensée une extrême prudence, une

( excessive réserve dans

le

d.iscours.

Il

existe

un tel

enchaînement entre

<

les écrits de ce grand homme, que le premier mémoire conduit

au

< second-, clue

le

second. est indispensable au troisième

et

qu'ainsi d-e suite

<

tous

ses

tlavaux

se command.ent, les

faits

cond.uisant

à

d-e nouvelles

l Dumas, loc. cit.

(13)

-t52-

<r iclées

et

les idées nouvelles cond.uisant à

leur tour

à étuclier avec atten-

<

tion

des

faits

négligés jusqu'alors ou

à

d.écouvrir des

faits

inconnus. D 1

On

éprouve

un rare plaisir à la lecture de ces

mémoires,

en voyant

comment

une

science se

fait,

se

fonde à I'aide

des expériences les plus simples,

pourvu

qu'elles soient remplies avec précision

et

liées

par

un raisonnement sévère.

Lavoisier

commence

par établir

que

si I'on

chauffe c1e

l,étain

dans

ull

vâsë .temré, une

portion

de

I'air

se

fixe sur ltétain qui

passe

ainsi

à

l'éta,t

d'oxyr1e. Mais lorsclu'une certaine

quantité d'étain est

oxyd.ée, le

reste

d.u

métai

clemeure

intact, quoique le

vase

renferme

encore une

grande quantité

d.e

gaz clui ne peut plus s,unir au métal. Ainsi,

une h^-+i^ /J^ It^:- À:^'^--^a+ +^.^i:^ ^,-^ 1^ -^lr^r ^----^^^-^a^ -r- -- -r f -

Irdr urv uu I dll urùIrarlalu Uiauulù quu rrj IrIUùiiI arUgllrtjlltrU Ue pOfUS paf CAICI-

nation, et la fixation

de cet

air

explique

I'augmentation

observée.

C'est en 1777 qlodil exécute son analyse de

I'air si

célèbre.

profltant du fait que le

meroure possède

la facutté

d.e s'oxyd.er

à une

certaine température

et

d.e perd.re son oxygène

à

une température

plus

haute,

il

parvient à

enlever

Ia plus

grand.e

partie de

son oxygène

à un

volume déterminé

d'air. Âyant

isolé

le

gaz azote,

il

chauffe

I'oxyde

de mercure

produit et recueille alols l'oxygène. En mêlant enfin

les

deux gaz, il

reconstitue I'air

atmosphérique, d.oué

de toutes

ses

propriétés et

en wrrltrrna doâ,I À, nalrri nrrtil q.rrq.ii amnlnrrd

Cette expérience

le conduisit à

s'occuper d.e

la respiration

des ani- maux. Non seulement iI reconnut la

formation

de

l'anhydride

carbonique, mais

il

stâssura clue

la quantité

d'oxygène absorbée

était plus

grande que celle

qui était

nécessaire pour former

I'anhydride

carbonique obtenu.

A

cette époque,

la

uature cle I'eau

n'était

pas connue.

Il

ne

pouvait

aller plus loin. Il

pressent néanmoins

que le

sang

est

susceptible de stoxyd.er en passant de

la

couleur bleue

à la

couleur rorge.

Nous ne pouvons

ici relater

toutes les expériences que

frt

Lavoisier.

Mais elles

lui prouvent toutes que la quantité

de

matière

employée se

retrouve toujours dans les prod.uits, sous une autre forme, sâns d.oute, mais avec

le

même poicls.

Il

congoit

la

possibilité

d'étatrlir

une équation dans laquelle,

en mettant

d.'un côté

toutes

les matières

du

clébut, d.e 1,autre toutes les matières produites, on

ait toujours i'égalité

des poids.

Et

non seulement

il

conçoit cette

vue

nouvelle, mais

il

en

tire

immédiatement

tout ie parti qu'on peut

en

obtenir.

<

En effet, dit-ii, je puis

consid.érer

< les matières mises en présence et le résull,at obtenu comme une équation

< aigébrique

et en

supposant successivement

chacun des

éléments d.e

<

cette

équation inconnu,

j'en puis tirer une valeur et rectifler

ltexpé-

< rience

par le calcul et le

calcul

par

ltexpérience >.

r Dumas, loc. cit.

(14)

-

153

--

<

J'ai

souvent

ptofité rle cette

méthode

pour corriger

les premiers

<

résultats

d.e mes expériences

et pour me

guider dans les précautions

< à prendre

pogr

les recommencer. D

Tel est le premier essai d.e ces équations atomiques que nous écrivons

si

communément aujourd.thui.

La formation

de I'eau est si fréquente, sa décomposition se présente

si

souvent d.ans nos phénomènes,

qu'il est clifficile de

comprendre que

Lavoisier put

pend.ant des années

travailler au

d.éveloppement

de

sa théorie sans

connaîtrela

nature d.e I'eau. Mais enfin

paraît

Ie mémoire où

it établit la

composition d.e l'eâu, expérience céIèbre

qu'il

exécuta conjoin-

tement

âvec Meunier.

Il put

se

rendre

compte

ainsi de

ce

qui

se pâ,sse clans la respiration, d.ans

la

combustion,

partout

enfin où

il y

a

formation

d'eau. Ctest

ainsi qu'il

est

conduit à établir

une méthod.e d'analyse élé- mentaire

qui

consiste à

transformer le

carbone

et

l'hyd.rogène en eau et

en anhydride carbonique en les brûlant

d.ans

un courant

d.'oxygène, méthod.e d.ont le principe est resté Ie môme d.e nos jours. En J-783, I-,avoisier se

livre à une

discussion approfond.ie

et

décisive d.e

la théorie tle

Stahl

et

d.ès

le

d.ébut

il

caractérise les d.écouvertes

du

chimiste allemand. avec une noble

impartialil,é.

< De ùe que cluelclues colps

blûlaient et

s'enflam-

< maient,

dit-il,

Stahl en a, conchr

qf il existait

en eux un principe inflam-

<

mable. s'il s'était borné à cette

simple observation, son système ne

<r

lui aurait

pas mérité sans doute

la

gloire de devenir

un

des patriarches

<

de la chimie et

d.e

faire une sorte

d.e

révolution dans cette

science.

<r Rien

n'était

plus

naturel,

en

effet,

que de dire que les corps combustibles

( s'enflamment

parce qu)ils contiennent un principe inflammable.

Mais

<

on doit à Staht deux

découvertes importantes, indépenclantes cle

tout

< système, d.e

toute

hypothèse,

qui

seront d.es

vérités

éternelles. I-,a pre-

< mière, ctest que IeS métaux sont d.es corps combustibles, que

la

calcina-

<

tion

est une

véritable

combustion

et

qu'elle en présente tous les phéno-

r mènes.

La

seconde, c,est que

la

propriété de brîrler, d"'être inflammable,

<r

peut

se

retransmettre d,'un corps à un

autre. >

Plus loin il

ajoute :

< Toutes ces réflexions confirment ce que

j'ai

a'vàplcé,, ce que j)avais pour

<

objet

d.e

prouver,

ce que

je vais

répéter encore, que les chimistes ont

<

fait du

phlogistique

un principe

vague,

qui

n'est

point

rigoureusement

<

ctéfini et qui en

conséquence s'ad.apte

à toutes les explications

dans

< Iesquelles on

veut

le faire entrer.

Tantôt

ce principe est pesant et

tantôt

<

il

ne

I'est

pas

; tantôt il

est

le feu libre et tantôt iI

est

le feu

combiné

(( avec ltéIément terreux

; tantôt il

traverse

les

pores d,es vaisseaux et

<

tantôt ils

sont impénétrables

pour lui. II

explique à 1a fois

la

causticité

<r et

la non-causticite,la

cliaphanéité et i'opacité, les couleurs et I'absence

< d.e

couleur.

C'est

un véritable protée qui

change d.e

forme à

chaque

<

instant.

>

(15)

-t54-

Le

d,ernier mémoire de l-,avoisier est

un

résumé

plein

cle

vie

d.e ce vaste ensemble et

il

offre un

parfait

modèle

cl'impartialité

et cte bon goût.

Il

est impossible de

triompher

avec plus de mod.estie

et

de

simplicité. Et pourtant le triomphe avait

cotrté de bien grand.s efforts cle génie

et

pro-

mettait à la

science

un avenir dont I'imagination

d.e

Lavoisier

mieux qutaucune autre

pouvait

se former un tableau aussi magnifique qutexact.

Pour

se

faire

une idée

juste

des

travaux

de

llavoisier, il faut

encore envisager dtautres aspects d.e sa personnaiité. Après s'être

montré

avec

tant

d,'dclat commc cxpérimentateur,

il va

reparaître d'une manière non moins remarquable comme

écrivain

dans

la

réd.action

de

son

traité

de chimie, ouvrage dans lequel, en deux petits volumes,

il établit

sans négliger

aucun détaii les

bases

de ia chimie

mo<ierne, clans

lequel

ses idées se

'formulent à itaide d'un styie si

pur qu'il

efface tous les ouvrarges qui

ltont

précécté.

N'oublions

pas

enfin

que

Lavoisier a établi, avec Guyton

de

Morvan, un

essai d.e nomenclature

qui

est

la

base de celle des chimistes

actuels

(1787)

et qu'il s'est illustré

dans

le domaine de la

physique, notamment

par

ses

travaux

sur 1a chaleur avec

le

jeune lrapiace.

Après avoir montré ce que Lavoisier était' comme savant, il

reste

à

vous

expose

comment

cette vie fut

brusquement tranchée. Sa théorie

était

alors complète, mais

il avait

besoin de

la

résumer, d.'en pré-

^^-!^.^ l^^ L^^^^ f^--l^-^^^-^r^l^^ \ l^ -^^^L!-^:Ll

^^ 1^^-^t-^ lL^:r J---,

IJtjllUUr lUs UatsUN IUlUinuIUIlUairUS ilJ li1J lruliUC-rrUe. L/e UeNUITI tjUAIU (leVgIfU pfUS

impérieux

que jamais, car

à

cette époque

Ia

théorie d.e Lavoisier

n'était

plus celle de Lavoisier, mais celle cles chimistes français.

Ainsi

Lavoisier, après

avoir vu

sa

doctrine

contestée sous

le rapport

d.e

ltinvention,

la

voyait

encore s'échapper de ses mains pa,r un partage auquel les chimistes de son temps étaient appelés. Ce nouveau coup

luifut

très pénible. < Cette

<

théorie n'est

pas, comme

je

l'entend.s dire, celle d.es chimistes frangais,

< elle est

la

mienne

r,

s)écrie-t-il dans une réclamation écrite presque au

pied. de l'échafaud.. < C'est une

propriété

que

je

réclame auprès de mes

< contemporains

et

cle

la

postérité. ri

A cet

égard,

tout

nuage

a

disparu.

Il

connut certes le

péril

qui Ie menaçait, mais d.ans Ie moment même ori

la mort planait

sur sâ

tête, il continuait

encore ses

travâux, il

pour- suivait,

iI hâtait

I'impression de ses æuvres.

En

1794, le 2 mai, un membre

d.e

la

Convention, nommé

Dupin, vint porter

à l'assemblée de

la

Conven-

tion un acte

d.'accusation

contre tous les

fermiers-généraux. Lavoisier

s'y trouva

d.onc compris. Peu de

jours

après, Ie

rapport

est 1u

et

changdr

par Fouquier-Tinville en un acte

d.'accusation près

le tribunal

révolu-

tionnaire.

Certains

amis l'ont

caché pend.ant

quelque temps,

notam-

ment le vieux

Lucas, au

Jardin

d"es Plantes. Mais

lorsqutil

apprend que ses collègues sont arrêtés, que son beau-père est arrêté,

iI

n'hésite plus,

il

s'arrache à I'asile et va se constituer prisonnier. I-.,e 6 mai

il

est cond.amné

à mort

el,

le 8 mai iI monte à

I'échafaud.. I-.,e

tribunal n'hésite

pas un

(16)

-lbb-

instant. Pour lui,

I_,avoisier

n,est qu'un chiffre. ce n'est

pas L,avoisier

quton a condamné, mais le fermier-général numéro cinq, sans

plus

d'attention. Et

c'est peut-être cette indifférence, imprévue pour

lui,

qui

a

causé sa perte.

Il

semble

que pïesque toutes les

expériences

et

découvertes de I-,avoisier

ont

été

faites avant lui et par dtautres

savantsr comme nous I,avons rapporté.

Par

contre, dans son mémoire <Débat historiclue sur la cause d.e

ltaugmentation de poids,

etc. D,

Lavoisier

revendique comme siennes

la

théorie de

I'oxydation et

celle de

la

combustion, I'analyse et la d.écomposition

de l,air par les métaux et les corps

combustibles, la

théorie

d.e

I'acidification,

les premières idées

sur les

substances végétales et animales

et

1a

théorie

de

la

respiration.

Il

est intéressant de suivre les polémiques

qui

se sont élevées sur

l'æuvre

de

l,avoisier

el, tlombien nom-

brcux furent

ses d,étracteurs.

Jusqu'à l:avoisier, les Allemands et les

suéclois

étaient

maîtres incontestés en

l'une au

moins d.es

parties

de

la

chimie

: la

métallurgie ;

une

école

de

savants anglais

s'était

spécialisée d,ans

la chimie

d.es gaz.

Avec

l-,avoisier

et

ses d.isciples,

Ia primauté en matière

d.e chimie passe

en Flance, lrais ce n'est point là une raison

Suffisantc

pour

adopter, comme certains Savants clu d.ébut d.u

XIXe

siècle, ltexpression d.e < chimie française

r. si Ie

système l-.,avoisier

I'a

emporté,

il ne faut pas

oublier que, même à Ia frn clu

XVIIIe

et dans les premières années du

XIXe

sièclet

une quantité de faits

essentiels

ont été

découverts

par

des chercheurs

non français. Il serait plus exact de parler d'une chimie

lavoisienne.

D'ailleurs,

ces polémiques sont souvent stériles

et il

semble quer dans le d.omaine scientifique, 1e nationalisme

doit

donner

le

pas

à Ia

recherche cle

la vérité ;

c'est

bien mal à

propos que certains chimistes frangais et allemand.s

ont

créé une polémique

nationaliste

avec les opinions diver- gentes d.es d.éfenseurs

de llavoisier et

d-e

leurs

aclversaires.

Nous concluons en

rapportant ici I'opinion

d.tun chimiste allemantl, Lùebi,g, qui ne peut être suspecté de

parti-pris:

< I-le mérite de cet homme

immortel

est dtavoir d.oté

la

chimie

d'un

sens nouveau,

d'avoir

rassemblé les membres épars du corps de la science et d.ten avoir trouvé les

jointures.l ce petit

âperçu

historique

nous

fait

penser

à

une phrase

du

grand.

chimiste Georges

Urbain :

<

Il

serait illusoire

et vain

de

parler

de science absolue et

parfaite.

L,a science est humaine

et

d.oit être à notre mesure. D

Au XIXe

siècle,

les problèmes qui paraissaient

inaccessibles

furent

résolus grâce

aux

méthod.es scientifiques

introcluites

dans

i'industrie

et dans

la vie

sociale

et qui

proviennent, comme Yous venez de

le voir,

de

l'action de Lavoisier et de

ses contemporains.

Il est donc naturel

de

concevoir les savants tournés

Yers

un positivisme

caractérisé

par

la philosophie

d'Àuguste

Comte.

Par réaction contre

I'id,éalisme utopique

(17)

-156-

des

générations précéd,entes,

on proclame alors et on

préconise une science orgueilleuse

et

d.ominatrice et

I'on

constate,

par

contre,

la faiilite

d.e

la métaphysique.

Cependant

bientôt ce

scientisme engend.re des mécomptes,

et

grâce

à la subtilité flne

d.e

leurs critiques,

les métaphy- siciens reprennent

la

discussion,

mettant

en d.oute Ia

valeur

des éléments de cet id.éal scientiflque

où tout

est absolu

et

que caractérise

un

déter- minisme

toujours

accessible.

Un tel pouvoir humain

sans bornes nous

parait une utopie et

nous nous étonnons

que cette

science

positive

à l'extrême et qui rejette les causes premières et les causos finalcs dcs phéno- mènes sous prétexte d.e métaphysique puisse escompter si

fort

sur I'avenir.

Qu'on ne

stétonne

plus alors du

changement

qui

s,opère dans les philosophies. Nous allons lentement vers

une

oonception moins absolue

et

vers

un

relativisme d.ont on

parle fort

aujourd.'hui. Quand., depuis de longues années,

on fait

d"e

la

chimie expérimentale, l,enthousiasme d.es

premiers jours, construit sur les illusions de

jeunesse,

se

mod.ifle, la science devient alors moins ou plus quton

I'imaginait. Il faut

d.onc rappeler

'aux

étudiants de nos écoles, pour éviter les incertitud.es, les doutes et les e reurs,

qu'il

nous

faut

rester humains

et

mod.estes.

On

épargnera ainsi à

la

science bien des mécomptes

et

d.es critiques.

Elle n'en

sera pas pour cela moins

utile et

moins belle.

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vu . uuuù ù@ v vuD rvr u urEu qu wu l,vuu rur rvIIUUuuI uu uuLtÈt }rruuurul

la

seule

amélioration du

bien-être

matériel de I'homme et

d.e

ne

guère influencer

notre

sensibilité. Nous ntignorons pas

qu'elle

est

parfois

nui- sible. I-,'époque

terrifiante

et amorale que nous vivons nous dispense d.,en

fournir les

preuves.

Mais elle est

aussi

bienfaisante dans nombre

de disciplines

et nous

pensons

que si ceux qui

sten

tiennent aux

aspects extérieurs connaissaient mieux

le

domaine scientifique,

ils

sauraient que le savant

doit

déployer, pour

faire

æuvre

qui

d,ure,

autant

d'imagination que

ltartiste. La

science

a

sâ beauté,

et pour

se

permettre

d.e

la

juger,

il

faut

stastreindre

à

une longue

et

dure préparation.

(18)

-L57-

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Paracel 1493-1541

Bibliothèque Centrale, Zurich

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