Universit´e Lille 1 - Sciences et Technologies Licence Math/Physique, Semestre 3 (2016-17)
M31 - Alg`ebre
Devoir Surveill´e – Corrig´e, 22/10/2016 8H-10H
Documents et calculatrices interdites.
Barˆeme indicatif : 2,5+5+6+0,5+3,5+1,5+1. Les exercices sont tous ind´ependants et peuvent ˆetre trait´es dans un ordre arbitraire.
1. Exercice
Prouver que les vecteurs
u1=
0
−1 1
, u2=
−1 0
−1
, u3=
1
−1 0
forment une base de R3. Expliciter la matrice de changement de base P =Pe(u1, u2, u3) associ´ee `a cette famille de vecteursu= (u1, u2, u3), o`u e= (e1, e2, e3)d´esigne la base canonique de R3, puis d´eterminer la matrice de changement de base inverseQ=Pu(e1, e2, e3).
On forme la matrice de ces vecteurs dans la base naturelle :
P = e1
e2
e3
u1 u2 u3
0 −1 1
−1 0 −1
1 −1 0
. (0)
On ´echelonne cette matrice en appliquant la m´ethode du pivot sur les lignes, ce qui revient `a changer la base dans laquelle on exprime les vecteurs (u1, u2, u3) :
P 7→ e01 e02 e03
u1 u2 u3
1 −1 0
−1 0 −1
0 −1 1
L1↔L3
(1)
7→ e001 e002 e003
u1 u2 u3
1 −1 0
0 −1 −1
0 −1 1
L1: ligne pivot L2←L2+L1
L3←L3
(2)
7→ e0001 e0002 e0003
u1 u2 u3
1 −1 0
0 −1 −1
0 0 2
L2: ligne pivot L3←L3−L2
. (3)
On obtient une matrice ´echelonn´ee de rang maximal, ce qui permet de conclure que les vecteurs (u1, u2, u3) forment une base de R3. (Remarque : Une autre m´ethode consiste `a v´erifier que Dete(u1, u2, u3) est non nul.)
On applique l’extension de la m´ethode du pivot pour transformer cette matrice en matrice identit´e, ce qui signifiera que l’on aura fini par exprimer notre base (u1, u2, u3) dans elle mˆeme :
(3)7→ e00001 e00002 e00003
u1 u2 u3
1 −1 0
0 1 1
0 0 1
L1←L1
L2← −L2
L3←L3/2
(4)
BF, Courriel : Benoit.Fresse@math.univ-lille1.fr
7→ e000001 e000002 e000003
u1 u2 u3
1 0 1
0 1 1
0 0 1
L1←L1+L2
L2: ligne pivot L3←L3
(5)
7→ u1
u2
u3
u1 u2 u3
1 0 0
0 1 0
0 0 1
L1←L1−L3
L2←L2−L3
L3: ligne pivot
. (6)
On reproduit la suite d’op´erations (1-6) sur la matrice de la base (e1, e2, e3) dans elle mˆeme pour effectuer les mˆemes changements de base et aboutir `a l’expression de la matrice des vecteurs (e1, e2, e3) dans la base (u1, u2, u3) :
e1
e2
e3
e1 e2 e3
1 0 0
0 1 0
0 0 1
7→ e01 e02 e03
e1 e2 e3
0 0 1
0 1 0
1 0 0
L1↔L3 (10)
7→ e001 e002 e003
e1 e2 e3
0 0 1
0 1 1
1 0 0
L1: ligne pivot L2←L2+L1 L3←L3
(20)
7→ e0001 e0002 e0003
e1 e2 e3
0 0 1
0 1 1
1 −1 −1
L2: ligne pivot L3←L3−L2
(30)
7→ e00001 e00002 e00003
e1 e2 e3
0 0 1
0 −1 −1
1/2 −1/2 −1/2
L1←L1
L2← −L2
L3←L3/2
(40)
7→ e000001 e000002 e000003
e1 e2 e3
0 −1 0
0 −1 −1
1/2 −1/2 −1/2
L1←L1+L2 L2: ligne pivot L3←L3
(50)
7→ u1 u2
u3
e1 e2 e3
−1/2 −1/2 1/2
−1/2 −1/2 −1/2 1/2 −1/2 −1/2
L1←L1−L3 L2←L2−L3
L3: ligne pivot
. (60)
On obtient ainsi la matrice deP−1=Pu(e1, e2, e3) en ligne (6’), la matrice deP =Pe(u1, u2, u3) ayant
´
et´e donn´ee ligne (0).
2. Exercice
Donner une expression factoris´ee du d´eterminant de la matrice
A=
a 2 0 0
1 a 1 0
0 1 a 1
0 0 2 a
et pr´eciser les valeurs du param`etrea∈Rpour lesquelles cette matrice Aest inversible.
On utilise les propri´et´es d’invariance du d´eterminant par les op´erations sur les lignes et les colonnes de
la m´ethode du pivot, ainsi que les formules de r´eduction du d´eterminant d’une matrice triangulaire par bloc :
Det(A) =
a 2 0 0
1 a 1 0
0 1 a 1
0 0 2 a
=
a+ 2 2 0 0 a+ 2 a 1 0 a+ 2 1 a 1 a+ 2 0 2 a
C1←C1+C2+C3+C4
= (a+ 2)
1 2 0 0
1 a 1 0
1 1 a 1
1 0 2 a
= (a+ 2)
1 2 0 0
0 a−2 1 0
0 −1 a 1
0 −2 2 a
L2←L2−L1
L3←L3−L1
L4←L4−L1
= (a+ 2)
a−2 1 0
−1 a 1
−2 2 a
= (a+ 2)
a−2 1 0
0 a 1
a−2 2 a
C1←C1+C3
= (a+ 2)(a−2)
1 1 0 0 a 1 1 2 a
= (a+ 2)(a−2)
1 1 0 0 a 1 0 1 a
L3←L3−L1
= (a+ 2)(a−2)
a 1 1 a
= (a+ 2)(a−2)(a2−1) = (a+ 2)(a−2)(a−1)(a+ 1).
La matriceAest inversible si et seulement si son d´eterminant v´erifie Det(A)6= 0, donc si et seulement sia6∈ {±1,±2}.
Une autre m´ethode : On peut ´egalement utiliser des techniques de d´eveloppement (selon des lignes ou des colonnes) et factoriser ensuite pour obtenir le d´eterminant deA:
a 2 0 0
1 a 1 0
0 1 a 1
0 0 2 a
=a·
a 1 0
1 a 1 0 2 a
−2·
1 1 0 0 a 1 0 2 a
=a·(a3+ 0 + 0−a−2a−0)−2·
a 1 2 a
=a·(a3+ 0 + 0−a−2a−0)−2·(a2−2)
=a4−5a2+ 4 = (a+ 2)(a−2)(a−1)(a+ 1) .
3. Exercice
3.1)Prouver que les vecteurs
w1=
1 1 1 1
, w2=
1 i
−1
−i
, w3=
1
−1 1
−1
, w4=
1
−i
−1 i
forment une base de C4. Indication: On pourra calculer le d´eterminant de ces vecteurs ou ´echelonner leur matrice.
On a
Det(w1, w2, w3, w4) =
1 1 1 1
1 i −1 −i
1 −1 1 −1
1 −i −1 i
=
1 1 1 1
0 i−1 −2 −i−1
0 −2 0 −2
0 −i−1 −2 i−1
L2←L2−L1
L3←L3−L1
L4←L4−L1
=
i−1 −2 −i−1
−2 0 −2
−i−1 −2 i−1
=
2i −2 −i−1
0 0 −2
−2i −2 i−1
C1←C1−C3
=
2i −2 −i−1
0 0 −2
0 −4 −2
L3←L3+L1
=−16i6= 0
.
Donc les vecteurs (w1, w2, w3, w4) forment une base deC4. 3.2)On consid`ere la matrice
B=
a b c d
d a b c
c d a b
b c d a
et l’application lin´eaire associ´eeψ:C4→C4, d´efinie parψ(X) =BX pour tout vecteurX ∈C4. Calculer ψ(w1), ψ(w2), ψ(w3), ψ(w4). Observer que les vecteurs obtenus s’expriment simplement en fonction de (w1, w2, w3, w4), puis donner l’expression de la matrice de ψ dans la base (w1, w2, w3, w4) au d´epart et `a l’arriv´ee.
On a :
a b c d
d a b c
c d a b
b c d a
·
1 1 1 1
=
a+b+c+d d+a+b+c c+d+a+b b+c+d+a
= (a+b+c+d)·
1 1 1 1
,
soitψ(w1) = (a+b+c+d)w1 ;
a b c d
d a b c
c d a b
b c d a
·
1 i
−1
−i
=
a+ib−c−id ia−b−ic+d
−a−ib+c+id
−ia+b+ic−d
= (a+ib−c−id)·
1
i
−1
−i
,
soitψ(w2) = (a+ib−c−id)w2;
a b c d
d a b c
c d a b
b c d a
·
1
−1 1
−1
=
a−b+c−d
−a+b−c+d a−b+c−d
−a+b−c+d
= (a−b+c−d)·
1
−1 1
−1
,
soitψ(w3) = (a−b+c−d)w3 ;
a b c d
d a b c
c d a b
b c d a
·
1
−i
−1 i
=
a−ib−c+id
−ia−b+ic+d
−a+ib+c−id ia+b−ic−d
= (a−ib−c+id)·
1
−i
−1 i
,
soitψ(w4) = (a−ib−c+id)w4.
La matrice deψdans la base (w1, w2, w3, w4) s’´ecrit donc :
ψ(w1) ψ(w2) ψ(w3) ψ(w4)
w1
w2
w3
w4
a+b+c+d 0 0 0
0 a+ib−c−id
0
0 0 a−b+c−d
0
0 0 0 a−ib−c+id
.
3.3) Donner une expression factoris´ee (sur C) de Det(ψ) en utilisant le r´esultat obtenu dans la question pr´ec´edente.
On obtient
Det(ψ) = (a+b+c+d)(a+ib−c−id)(a−b+c−d)(a−ib−c+id) en appliquant la formule du d´eterminant d’une matrice diagonale.
4. Quiz
D´eterminer la d´ecomposition en cycles `a supports disjoints et donner la signature de la permutation de {1, . . . ,7}telle que :
σ=
1 2 3 4 5 6 7 5 7 2 4 6 1 3
.
On obtient σ = (1 5 6)·(2 7 3) et sgn(σ) = sgn((1 5 6))·sgn((2 7 3)) = (−1)2·(−1)2 = 1 par multiplicativit´e de la signature et d’apr`es la formule donnant la signature d’unrcycle (voir exercice 6).
5. Exercice
On consid`ere la permutation de{1, . . . ,2n} telle que :
θ=
1 2 · · · i · · · n n+ 1 n+ 2 · · · n+j · · · n+n 1 3 · · · 2i−1 · · · 2n−1 2 4 · · · 2j · · · 2n
.
5.1)On fixei∈ {1, . . . , n}. D´eterminer l’ensemble des valeurs dej∈ {1, . . . , n} telles queθ(i)> θ(n+j).
On a
θ(i) = 2i−1> θ(n+j) = 2j⇔j < i−1
2 ⇔j∈ {1, . . . , i−1}.
5.2)D´eterminer l’ensemble des pairesk < l qui sont une inversion pour la permutation θ. Remarque : on r´edigera soigneusement la d´emonstration de son r´esultat en distinguant les sous ensembles sur lesquels les
´
el´ements de la pairek < lpeuvent varier dans{1, . . . ,2n}.
Pour une paire telle que k, l∈ {1, . . . , n}, on ak < l⇒θ(k) = 2k−1< θ(l) = 2l−1. Pour une paire telle quek=n+i, l=n+j ∈ {n+ 1, . . . , n+n}, on ak < l⇒θ(k) = 2i < θ(l) = 2j. Les seules inversions possibles apparaissent donc pour des pairesk < ltelles quek=i∈ {1, . . . , n},l=n+j ∈ {n+ 1, . . . , n+n}, et ces cas sont trait´es dans la question (1) de l’exercice.
On obtient finalement que l’ensemble des inversions de θ est constitu´e des paires k < l de la forme k=i∈ {1, . . . , n},l=n+j∈ {n+ 1, . . . , n+n}, avecj = 1, . . . , i−1.
5.3)D´eterminer le nombre d’inversions deθet en d´eduire une expression de la signature de cette permutation sgn(θ).
Pour chaquei∈ {1, . . . , n}fix´e, on ai−1 valeurs possible dej telle que la paire i < n+j forme une inversion deθ. L’ensemble des inversions deθ comprend donc
]Inv(θ) = 0 + 1 +· · ·+i−1 +· · ·+n−1 = n(n−1) 2
´
el´ements. On a donc :
sgn(θ) = (−1)n(n−1)/2 par d´efinition de la signature.
6. Question(s) de compr´ehension du cours
On note Σn le groupe des permutations de {1, . . . , n} et sgn : Σn → {−1,1} l’application qui `a une transposition σ ∈ Σn associe sa signature sgn(σ) ∈ {−1,1}. Le but de cet exercice est de revoir des d´emonstrations de formules vues en cours.
6.1)On suppose connue la formule sgn((a b)) = −1, valable pour toute transpositionτ = (a b), que l’on ne demande pas de red´emontrer. On se donne un r-cycle c = (a1 a2 · · · ar). Donner une formule de d´ecomposition decen produit de transpositions, puis retrouver l’expression de la signature decen utilisant cette d´ecomposition et en pr´ecisant avec soin les r´esultats du cours utilis´es.
On a :
c= (a1a2)·(a2 a3)·. . .·(ar−1 ar).
On en d´eduit la formule :
sgn(c) = sgn((a1a2))·sgn((a2a3))·. . .·sgn((ar−1 ar)) = (−1)r−1
par le th´eor`eme de multiplicativit´e de la signature et d’apr`es la formule donnant la signature d’une transpo- sition.
6.2)Donner la d´emonstration de la relationsgn(σ−1) = sgn(σ), valable pour toute permutationσ∈Σn, en pr´ecisant bien les arguments utilis´es.
On a
sgn(σ−1)·sgn(σ) = sgn(σ−1·σ) = sgn(id) = 1,
d’apr`es le th´eor`eme de multiplicativit´e de la signature, la signature de la permutation identit´e ´etant ´egale `a 1. On en d´eduit ;
sgn(σ−1) = sgn(σ)−1= sgn(σ), puisque sgn(σ)∈ {−1,1} ⇒sgn(σ)−1= sgn(σ).
7. Question(s) de compr´ehension du cours
SoitEun espace vectoriel sur un corpsK. Soitφ:E×E×E→Kune forme3-lin´eaire altern´ee. Soient v1, v2, v3∈E des vecteurs. Prouver que φ(v1+v2, v2+v3, v3+v1)s’exprime en fonction deφ(v1, v2, v3)en utilisant les propri´et´es g´en´erales des formesn-lin´eaires altern´ees.
On d´eveloppeφ(v1+v2, v2+v3, v3+v1) en utilisant les propri´et´es de lin´earit´e deφpar rapport `a chaque composante :
φ(v1+v2, v2+v3, v3+v1) =φ(v1, v2+v3, v3+v1) +φ(v2, v2+v3, v3+v1) (1)
=φ(v1, v2, v3+v1) +φ(v1, v3, v3+v1)
+φ(v2, v2, v3+v1) +φ(v2, v3, v3+v1) (2)
=φ(v1, v2, v3) +φ(v1, v2, v1) +φ(v1, v3, v3) +φ(v1, v3, v1)
+φ(v2, v2, v3) +φ(v2, v2, v1) +φ(v2, v3, v3) +φ(v2, v3, v1). (3) On utilise ensuite que les termes avec une composante r´ep´et´ee sont nuls (propri´et´es de forme altern´ee) pour en d´eduire :
(3)⇒φ(v1+v2, v2+v3, v3+v1) =φ(v1, v2, v3) +φ(v2, v3, v1). (4) On utilise ensuite les propri´et´es d’antisym´etrie :
(4)⇒φ(v1+v2, v2+v3, v3+v1) =φ(v1, v2, v3)−φ(v2, v1, v3) =φ(v1, v2, v3) +φ(v1, v2, v3). (5) On obtient finalement :
φ(v1+v2, v2+v3, v3+v1) = 2φ(v1, v2, v3).
—Fin du devoir—