L3 de Math´ematiques Ann´ee 2020–2021 Structures lin´eaires et bilin´eaires
Examen (session 1) (dur´ee : 3h)
Exercice 1 (5 points). SoitA=
1 1 1
0 1 0
−1 0 3
.
a) Calculer det(A−2I3) et det(A−I3).
b) Le polynˆome p1(λ) = (λ−2)(λ−1) est-il annulateur de A? Mˆeme question pourp2(λ) = (λ−2)2(λ−1) ?
c) Donner le polynˆome minimalµA de Aainsi que son polynˆome caract´eristiqueχA. d) Soit (e1, e2, e3) la base canonique deR3 eth·|·i le produit scalaire canonique sur R3.
(1) Trouver tous lesu1∈R3 tels que (A−2I3)u1= 0 ethu1|e1i= 1.
(2) Trouver tous lesu2∈R3 tels que (A−2I3)u2=u1 ethu2|e2+e3i= 1.
(3) Trouver tous lesu3∈R3 tels que (A−I3)u3= 0 ethu3|e1+e2i= 1.
e)En se servant des questions pr´ec´edentes, trouver une base de jordanisation deAet la forme r´eduite de Jordan dans cette base.
R´eponses.
a) det(A−2I3) = 0 et det(A−I3) = 0.
b) Par calcul direct on obtient p1(A)6= 0 (p1 non annulateur de A) et p2(A) = 0 (p2 est annulateur de A).
c) µA(λ) = −χA(λ) = p2(λ) (les signes d´ependent de la convention adopt´ee). Ce r´esultat est une conclusion des questions pr´ec´edentes, pas besoin de calculer χA(λ).
d) On trouveu1=
1 0 1
,u2=
0 0 1
,u3=
2
−1 1
.
e) (u1, u2, u3) est une base de jordanisation. La r´eduite de Jordan dans cette base est
2 1 0 0 2 0 0 0 1
.
(Attention, l’ordre des blocs de Jordan doit ˆetre coh´erent avec l’ordre de la base).
Exercice 2 (5 points). Soit M = 1 1
1 0
, et soit φ1 : M2(R)× M2(R) → R la forme bilin´eaire donn´ee par φ1(A, B) = tr(tBM A) pour tout A, B∈ M2(R).
a) Montrer queφ1 est sym´etrique.
b) Trouver la matrice de φ1 dans b, la base canonique de M2(R), c’est-`a-dire b = (b1, . . . , b4) avec b1 =
1 0 0 0
,b2 = 0 1
0 0
,b3= 0 0
1 0
,b4 = 0 0
0 1
.
c) Soit q2 :R4×R4 →Rla forme quadratique donn´ee parq2(x) = (x1+x3)2+ (x2+x4)2−x23−x24 pour toutx∈R4 de coefficients (x1, x2, x3, x4). Donner la forme polaireφ2 de q2 ainsi que sa matrice dans la base canonique de R4.
d) D´eterminer la signature deφ1. Est-ce que φ1 est positive ? Non-d´eg´en´er´ee ? e) Trouver l’orthogonal de Vect(b1, b2) pour φ1.
R´eponses.
a) En utilisant le fait que tr(tN) = tr(N) pour tout N ∈ M2(R) on trouve φ1(B, A) = tr(tA M B) = tr t(tAM B)
= tr(tBtM A) = tr(tBM A) =φ1(A, B)
pour toutA, B∈ M2(R) vu que la matriceM est sym´etrique. (On pouvait aussi exprimerφ1(B, A) en terme des coefficients de B etA dans la base canonique et d´evelopper, on obtenait ainsi une formule manifestement sym´etrique.)
b)On trouve la matrice repr´esentative en calculant les coefficientsφ1(bi, bj) pour touti, j∈ {1,2,3,4}, ce qui donne la matrice
1 0 1 0 0 1 0 1 1 0 0 0 0 1 0 0
.
c) La forme polaire φ2(x, y) = (x1 +x3)(y1 +y3) + (x2 +x4)(y2 +y4)−x3y3 −x4y4 (on pouvait soit la deviner, soit la calculer avec la formule polaire), et en calculant, on trouve la mˆeme matrice repr´esentative que pourφ1.
d)En se servant des questions pr´ec´edentes on voit queφ2 (et doncφ1) est de signature (2,2,0). Donc φ1 n’est pas positive, et φ1 est non-d´eg´en´er´ee.
e)On trouve queφ1(x, b1) = 0 etφ1(x, b2) = 0 est ´equivalent `a 0 =x1+x3et 0 =x1+x3+x2+x4. Ceci est ´equivalent `ax1=−x3etx2 =−x4, ce qui permet d’obtenir (Vect(b1, b2))⊥= Vect(b1−b3, b2−b4).
Exercice 3 (5 points). Soit
A=
2 −1 0
−1 2 0
0 0 3
, B =
0 0 0 0 0 0 0 0 5
.
Soit h·|·i : R3 ×R3 → R (`a ne pas confondre avec le produit scalaire canonique de R3!) la forme bilin´eaire sym´etrique dont la matrice dans la base canonique deR3 estA.
a) Trouver les valeurs propres et une base deR3 de vecteurs propres de A.
b) Justifier que la forme bilin´eaire sym´etriqueh·|·i est un produit scalaire.
c) V´erifier que le vecteuru1 =t(−1,1,0) est un vecteur de propre de A et pr´eciser la valeur propre.
Calculer sa norme ku1k pour le produit scalaire h·|·i (`a ne pas confondre avec le produit scalaire canonique de R3!).
d) Trouver une base (v1, v2, v3) de R3 de vecteurs propres de A, orthonorm´ee pour h·|·i, telle que v1 = kuu1
1k.
e) Montrer qu’il existe une base orthonorm´ee pourh·|·i, form´ee de vecteurs propres de B.
R´eponses.
a) Les valeurs propres sont λ1 = 1 et λ2 = 3. Un exemple de base de vecteurs propres (les deux premi`eres correspondant `a la valeur propre 3, le dernier `a 1) est : u1 = t(−1,1,0), u2 = t(0,0,1), u3 =t(1,1,0).
b)Aest sym´etrique et toutes ses valeurs propres sont strictement positives, c’est donc une conclusion du th´eor`eme spectral. (On pouvait aussi exprimer la forme quadratique comme somme de carr´es.) c) Par calcul direct on trouve que u1 est vecteur propre de valeur propre 3. Sa norme ku1k = phu1|u1i=√
6 (attention `a utiliser le bon produit scalaire).
d) On peut utiliser l’algorithme de Gram–Schmidt, mais il y a beaucoup de simplifications car on trouve hv1|u2i= 0, et u3 est forc´ement orthogonal `au1 etu2. Il suffit donc de normaliseru2 etu3 :
v1 = 1
√6
−1 1 0
, v2 = 1
√3
0 0 1
, v3 = 1
√2
1 1 0
.
e) Cela suit du th´eor`eme spectral si on montre que l’endomorphisme associ´e `a B est sym´etrique pour h·|·i (il ne suffit pas de savoir que la matriceB est sym´etrique !). En effet, pour tout u, v∈R3 on a
hu|Bvi=tuABv=tuBAv=t(Bu)Av=hBu|vi,
o`u l’identit´e AB = BA suit d’un calcul direct, et la troisi`eme identit´e utilise le fait que B est une matrice sym´etrique au sens usuel. (On pouvait ´egalement remarquer que les vecteurs propres de B sont des vecteurs propres deA et construire la base demand´ee directement.)
Exercice 4 (5 points). Soit n≥1 entier. Supposons que A, B ∈ Mn(C) sont des matrices v´erifiant [A, B] =A(o`u [A, B] =AB−BA).
a) Montrer par r´ecurrence que pour toutk≥1 entier, [Ak, B] =kAk.
b) Soit f : Mn(C) → Mn(C) l’endomorphisme donn´e par f(M) = [M, B] pour tout M ∈ Mn(C).
Montrer quef(Ak) =kAk pour toutk≥1 entier. Montrer queA est nilpotent.
On supposera dans la suite quen= 2.
c) Soit p(λ) = aλ2 +bλ+c un polynˆome de degr´e ≤ 2, o`u a, b, c ∈ R. En utilisant a), exprimer [p(A), B] comme polynˆome deA.
d) Soit maintenant χA(λ) =λ2+bλ+c le polynˆome caract´eristique de A. En utilisant le th´eor`eme de Cayley–Hamilton et la questionc), montrer 2A2+bA= 0.
e) Sans justifier, donner toutes les r´eduites de Jordan possibles deA. On pourra se servir de b).
R´eponses.
a) Le cas k= 1 est l’hypoth`ese [A, B] = A. Montrons que si [Ak−1, B] = (k−1)Ak−1 et [A, B] =A, alors [Ak, B] =kAk. En effet,
[Ak, B] =AkB−BAk=A(BAk−1+ (k−1)Ak−1)−(AB−A)Ak−1 = (k−1)Ak+Ak=kAk, o`u on a utilis´e [Ak−1, B] = (k−1)Ak−1 et [A, B] =A pour obtenir la seconde ´egalit´e.
b) Par la question pr´ec´edente, f(Ak) = [Ak, B] = kAk. Si A ne serait pas nilpotent, alors par la question pr´ec´edente f aurait un nombre infini de valeurs propres, {1,2,3, . . .}, ce qui est impossible puisque dimMn(C)<+∞.
c) Vu que [A2, B] = 2A, [A, B] =Aet [I2, B] = 0, on obtient [p(A), B] = 2aA2+bA.
d) Par Cayley–Hamilton, χA(A) = 0 et donc aussi [χA(A), B] =χA(A)B−BχA(A) = 0. Si on ´ecrit χA(λ) =λ2+bλ+c, l’identit´e [χA(A), B] = 0 implique 2A2+bA= 0 en utilisant c)avec a= 1.
e) On a A2 = 0 donc les r´eduites de Jordan possibles sont 0 0
0 0
et 0 1
0 0
.