FACULTÉ
DEMÉDECINE
ET DE PHARMACIE DE BORDEAUXANNÉE 1901-1902 Mo 20
DES
KYSTES DERMOIDES
LA RÉGION MAMMAIRE
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenue publiquement le 27 Novembre 1901
PAR
J\xlien-3F1ortuné
FAUQUET
Né à Vacqueyras (Vaucluse), le 31 Janvier 1877 Élève du Service de Santé de la Marine
ANCIEN EXTERNEDESHOPITAUX LAURÉATDES HOPITAUX (Médaillede bronze 1899 ;Médaille d'argent 1900)
!MM. DEMONS
rmvANNA7CHAVANNAZBÉGOUINprofesseur....
agrégéagrégé.)professeur
j, Jugesl'résid
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur
diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE
DU MIDI - PAUL CASSIGNOL91 — RUE PORTE-DIJEAUX — 91
1901
Facilité de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS, doyen —
M. PITRES, doyen honoraire.
9»BIO FION»KUR8
MM. M1GÉ
)
DUPUY v Professeurs
honoraires.
MOUSSOUS )
MM.
PICOT.
PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
Clinique interne
MM.
Physique
médicale... BERGON1É.
Chimie BLAREZ.
„.. . . ,
Histoire naturelle
...GIJILLAUD.
Clinique externe
jLANELONGUE. Pharmacie FIGUIER.
Pathologie et thèra-
Matière médicale
....du NABIAS
peutique
générales. VERGELY. Médecine expérimen-
Thérapeutique
ARNOZAN. taie FERRÉ.
Médecine opératoire.
MASSE. Clinique ophtalmolo-
Clinique
d'accouché- gique BADAL.
ments LEFOUR.
Clinique des maladies
Anatomie pathologi-
chirurgicales dea en-
que
COYNE. fants P1ÉCHAUD.
Anatomie CANN1EU
Clinique gynécologique BOURSIER.
Anatomie générale et
Clinique médicale des
histologie
VIAULT. maladies des enfants
Physiologie
JOLYET. Chimie biologique...
Hygiène
LAYET. Physique pharmaceu-
Médecinelégale
MORACHE. tique
A€1 11K«; MS BGA BOXBÎ88C1C ao :
skotion de médecine (Putholo(jie interne et
Médecine léyale.)
MM. SABRAZÈS. | MM.
MONGOUR.
LE DANTEC. |
CABANNES.
HOBBS.
A. MOUSSOUS DEN1GES.
SIGALAS.
SECTION Dli CHlltUltOlE ET ACCOUCHEMENTS (MM.CHAYANNAZ.
Pathologie
externe] BRAQUEHAYE
(BÉGOUIN.
Accouchemen ts.XMM.
FIEUX.
ANDEROD1AS.
Anatomie..
SECTIONDESSCIENCES ANATOMIQDES ET PHYSIOI.OCIQUES
1MM. GENTES. | PhysiologieITr—:
MM. PACHON
BlîiLLK.Histoire naturelle.
•■I CAYAL1E.
SECTION DES SCIENCESPHYSIQUES
Chimie MM. BENECH. |
Pharmacie M. DUPOUN.
ClOliBl» 4;«SB S»liSÉSISiA' TAIESM
S
:Clinique desmaladies cutanées et
syphilitiques MM. DUBREUILH.
Clinique des maladiesdes voies
urinaires
Maladies dularynx, desoreilles etdunez Maladies mentales
Pathologie interne Pathologieexterne Accouchements
Physiologie Embryologie Ophtalmologie
Hydrologie etMinéralogie Pathologie exotique
Le Secrétaire dela faculté
POUSSON.
MOURE.
REGIS.
RONDOT.
DENUCÉ.
FIEUX.
PACHON.
PRINCETEAU LAGRANGE.
CARLES.
LE DANTEC.
LE M AIRE.
Pardélibération du 5 août1879, la Faculté aarrêté que les
opinions émises dans
Thèses quilui sontprésentéesdoivent être
considérées
commepropresà leurs autours,
qu'elle n'entend leur donner niapprobation ni
improbation.
A MONSIEUR LE DOCTEUR BOURRU
DIRECTEUR DU SERVICE DESANTÉDELA MARINE DIRECTEUR DE L'ÉCOLE PRINCIPALE DU SERVICE DE SANTÉ
DELAMARINE ET DES COLONIES OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTIONPUBLIQUE
A LA FAMILLE
SEGUIN
Pourla remercier delasympathie etde
l'intérêt
quetous sesmembresm'ont
témoignés et des
conseilsetdes secours qu'ils m'ont
prodigués.
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR DEMONS
PROFESSEUR DECLINIQUE CHIRURGICALE A LA FACULTÉ DEMÉDECINE
DE BORDEAUX
MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE OFFICIER DELALÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DEL'INSTRUCTIONPUBLIQUE
AVANT-PROPOS
Dans une de ses
leçons cliniques du mois de juillet 1901,
M. le Prof. Démons nous montraune tumeur dontla nature exacte n'avait pas
été
reconnueavantqu'elle
nefût
enlevée: ils'agissait d'un kyste dermoïde
de larégion mammaire. A
ce propos, notre éminent Maître nous
signala l'extrême
rareté d'unepareille localisation,
cause de l'incertitude dudiag¬
nostic et nous engagea
à rechercher les
cas semblables que pouvait renfermer la littérature médicale.C'est donc à M. le Prof. Démons que nous
devons
l'idéepremière
de ce travail : nous tenons à remercier vivement ceMaître
qui,
audébut
de nos études àBordeaux,
voulut bien nousaccepter dans
son service. Pendanttrois ans nous avonsécouté ses
leçons
avec un intérêttoujours croissant,
et danstoutes,
laclinique
et les devoirsprofessionnels
nous ont été clairementexposés. Rechercher
pourle malade
le maximum debien-être,
nejamais intervenir
quelorsque les bénéfices
de
l'intervention l'emportent
sur sesdangers, voilà
ce que nous avonsappris
comme moraleprofessionnelle
;quant
auxenseignements scientifiques, il
noussuffitderappeler
sessages conseilssurlesprocédés opératoires
etsurtoutesles méthodes detraitement employés
enchirurgie. Aussi
ce fut pour nousun
plaisir
bien vifquand
nous fûmesappelé
à retourner dans sonservice à la fin de nos études médicales. En noustaisant
l'honneur d'accepter la présidence
de notre thèse il nous donne encore unenouvelle preuve
de
sa bienveillance pourses élèves.Nous remercions
également M.
le Prof,agrégé Rondotqui,
dans ses
entretiens de chaque jour au lit du malade, a su
nous
inspirer
ungoût profond pour la médecine, en nous
apprenant à surmonter les difficultés qui se trouvent sur la
voie du
diagnostic.
Nous serions
ingrat si nous ne témoignions toute notre
reconnaissance
à M. le Prof, agrégé Sabrazès qui nous a reçu
dansson
laboratoire et qui
nousa enseigné la méthode rigou¬
reuseavec
laquelle
ondoit conduire toute recherche dans les
sciences
expérimentales.
Enfin nous
adressons tous nos remerciements à MM. les
Prof. Picot, Moussous;
à MM. les Prof, agrégés Lagrange et
Chavannaz
qui
nousont toujours témoigné la plus grande
sympathie et nous ont prodigué leurs sages conseils et leurs
savantes
leçons.
Enterminant, nous nous
garderons d'oublier que M. le
D1'Verdelet a
toujours été pour nous un ami sûr, qu'il a
guidé
nospremiers pas dans la vie d'hôpital lorsqu'il était
chef de
clinique de M. le Prof. Démons et qu'il nous a con¬
servésa
sympathie et continué son aide aujourd'hui qu'il est
devenu
chirurgien des hôpitaux.
CHAPITRE PREMIER
INTRODUCTION. HISTORIQUE
Bien que
l'expression de kyste dermoïde ait été employée
pour
la première fois
parLeblanc
en1831,
cefut Lebert qui
dans son mémoire
communiqué à la Société de biologie
en 1852 en donna une définitionqui est
encoreadmise aujour¬
d'hui : « Nous
appelons kystes dennoïdes, dit-il, des kystes qui offrent
à leur surface interne uneorganisation semblable
à celle de la peau,
pouvant présenter de l'épiderme, des
pa¬pilles, du derme,
desglandes sébacées, même sudoripares,
des
poils implantés, du tissu adipeux sous-cutané, de la graisse
libreet
sébacée,
des osetdes dents. »Auparavant,
ceskystes étaient désignés
sousle
nomde kystes pileux, pilifères, pili-dentaires, pili-osseux, pili-grais-
seux, etc., suivant la nature du contenu. Ils étaient même confondusavecles
kystes sébacés folliculaires
et connus aussisous le nom de
loupes, mélicéris, athérome, stéatome, choles- téatome,
etc. ; c'est ainsi quedans
sonTraité de
laLupio- logie (1775) Girard
écrit: « Lesloupes présentent de temps
entemps des phénomènes
assezsinguliers. Quelques observa¬
teurs
prétendent
yavoir trouvé
divers corpsétrangers qu'on
a même
jugé être organisés
;des œufs de pigeon, des animaux durcis,
deschâtaignes, d'autres
corpsqui n'avaient
pas dorganisation,
tels quedes balles, des clous,
des aiguilles.
etc.— 12 —
» Philoxènes, un
des premiers chirurgiens qui ait écrit sur
sa
profession et duquel Galien et Gelse parlent très avantageu¬
sement. dit avoir
rencontré dans les loupes de petits ani¬
mauxassez semblables à
des mouches, etc., etc.
»D'autre
part Gelse (lib. VII, cap. VI) nous apprend que,
souslenomde
bronchocèle, les Grecs désignaient des tumeurs
enkystées, qui
sedéveloppent entre la peau et la trachée et
qui contiennent une matière semblable à du miel, de l'eau, et
quelquefois même des poils mêlés à de petits os : « interdum
etiam minutis ossibus
pili immixti
».Gomme on levoit,
les kystes dermoïdes, en général, sous
desdénominations diverses,
sont très anciennement connus;
mais les
kystes dermoïdes de la mamelle sont signalés depuis
beaucoup moins de temps, car nous 11e voulons parler que des
cas
authentiques.
Dans ce
travail,
nous neconsignerons,
eneffet, que les tu¬
meurs
kystiques dont le contenu sera tel (poils) qu'il ne
puisse avoir été produit que par une paroi à structure certai¬
nement dermoïde, ou
dont la paroi
auraété soigneusement
examinée au
microscope et
reconnuecomme offrant une orga¬
nisation semblable à celle de la peau.
Enfin nous ne nous occuperons que
des kystes dermoïdes
de la mamelle et de la
région qu'occupe cet organe, c'est-à-
dire de cette
région qui s'étend dans le sens transversal du
bord du sternum au
pli antérieur de l'aisselle et dans le sens
vertical de la troisième à la
sixième
ouseptième côte. Nous
laissons ainsi de côté les
kystes dermoïdes du sternum, que
M. Waitza fortbien étudiés dans son
travail inaugural (Thèse
de Paris 1897). Ainsi délimité, notre
sujet
setrouve bien res¬
treint;
la littérature médicale est,
eneffet, bien pauvre en
documents sur les
kystes dermoïdes de la région mammaire.
Le
premier
cas que nous ayonsrencontré remonte à 1713 et
appartient à F.-IL Russel
:il
aété publié dans le Philosophi-
cal Transactions, n°
337,
p.220, repris
parAlbers en 1833
dans ses
Erlauterùngen et cité
parCornil et Ranvier dans
leur Manuel
d'histologie pathologique. Il s'agissait d'une
- 13 —
femme
qui portait
surla poitrine
une grossetumeur conte¬
nantunematière sébacée mêlée à des cheveux.
Les auteurs n'en
publièrent plus pendant plus d'un siècle.
Cruveilhieren1813 et en 1852 observe
quelques
casde kystes
sébacés. Lebert,
Velpeau, Broca citent aussi des
casde kystes
sébacés de la
région mammaire
;mais
enrelisant leurs obser¬
vations il nous a été
impossible de reconnaître, dans la des¬
cription qu'ils donnent des tumeurs qu'ils ont observées, les
caractères distinctifs des
kystes dermoïdes.
Biliroth dans l'article consacré aux tumeurs du sein chez l'homme dit y
avoir rencontré
unatliérome, mais il
ne donne aucun
renseignement précis.
Labbé et Covne,
Tripier
nesignalent
pasl'existence de kystes dermoïdes dans le sein.
Lannelongue et Achard dans leur magistral Traité des kystes congénitaux
encitent deux exemples
:Un cas douteux de
Burggrœve (de Gand), publié dans les
Annales et Bulletins de la Société de Médecine de Gand
(1857,24
vol., p.166) et repris
parPaul Horteloup dans
sa thèsed'agrégation, DesTumeurs du sein chez l'homme (Paris 1872).
Cependant Paul Horteloup considère
ce cas comme unkyste
sébacé: «
D'après les détails donnés
surla poche,
surl'aspect
et surtout sur l'odeur du contenu,
je crois qu'on est
endroit
de le considérer comme un
kyste sébacé
envoie de
suppu¬ration. »
Voici d'ailleurs un résumé de cette observation :
« Examen
clinique (1855). —Homme de soixante-un
ans portant au seingauche
unetumeur du volume d'un double poing d'adulte.
Elle ressemblequant à la forme
ausein d'une
femmequi allaite
; elle estplus
oumoins molle, bien cir¬
conscrite,
arrondie, sans bosselures, mobile, neprésentant
aucune adhérence avec lapeau,
mais adhérente
par sabase, légèrement
douloureuse à lapression
; pourle reste, parfai¬
tement indolente
quand
onn'y touche
pas.» Quand on la
comprime entre les doigts,
onsent
unefausse
fluctuation,
commequelque chose de cotonneux; la
peau
qui recouvre la tumeur, par suite du frottement, présente
une rougeur
érysipélateuse ; les ganglions de 1 aisselle ne
sont pas
engorgés.
» Evolution. —
Etant
auservice en 1812, cet homme
reçut
un coupde pied de cheval sur l'endroit où plus tard la
tumeur s'est
développée
:il
enrésulta une forte ecchymose
qui disparut insensiblement, en laissant néanmoins un noyau
dur,
de la
grosseurd'une noisette ; ce noyau était indolent et
11edevenait le
siège de douleur que lorsqu'il heurtait contre un
corps
dur. Le tout resta dans cet état jusqu'au moment où le
maladefitune
chute dans
unbateau et donna avec la tumeur
contreune ancre.
Dès
cemoment, le sein devint rouge, chaud,
douloureux,
grandit considérablement et acquit en quinze
jours le volume actuel ; bientôt tous ces symptômes se dissi¬
pèrent, excepté le volume. Cette tumeur gênait beaucoup par
son volume.
»
Opération.
—Enucléation de la tumeur après deux inci¬
sions
semi-lunaires.
» Examen de la
pièce.
—La tumeur était un véritable
kyste, à parois lisses, mais très épaisses, renfermant une
quantité de matière caséeuse concrète, excessivement fétide,
blanche,
équivalant à un demi-litre. »
Il nous semble
qu'avec
unexamen anatomo-pathologique
aussi
incomplet, il
11enous est pas permis de classer nette¬
ment cettetumeur:
aussi rejetterons-nous cette observation
du cadrede ce
travail.
Quant
ausecond
cascité par MM. Lannelongue et Achard,
nous en avons
déjà parlé, c'est l'Observation de Russel repro¬
duite par
Albers et de nouveau mentionnée par Cornil et
Ranvier.
En 1887,
Reverdin et Mayor publièrent une observation de
tumeurs
associées du sein. Il s'agissait d'une femme de qua¬
rante-cinq
ansqui portait dans le sein gauche un kyste der-
moïde dontle contenu
était devenu purulent, et cinq tumeurs
fibromateuses
solides.
Parmi les réflexions que ce cas
bizarre
asuggérées à Rever- din,
noustrouvons ceslignes
: «Le siège de notre kyste der-
moïde dans le sein constitue à lui seul
déjà
unerareté.
Lannelongue signale
un casde Gerdy,
un casde Dieffenbacli indiqué sommairement
parLebert,
un casde Burggrœve publié
par
Horteloup, et
un casd'Albers cité
parCornil et Ranvier
;j'ajoute
queVelpeau outre le
casde Gerdy indique
unepièce
de
l'hôpital Saint-Barthélémy, provenant de la pratique de
Lawrence etexaminée par
Paget
:la tumeur était située
sous la mamelle : un autre cas,toujours d'après Velpeau, aurait
été
communiqué
parArnolt à M. Henry
; cestumeurs sont indiquées
parVelpeau
sousle titre de kystes sébacés, mais
tout
indique qu'il s'agit bien de kystes clermoïdes.
»Nous
regrettons de
nepouvoir partager l'avis de Reverdin.
Lannelongue, à la
page27 de
sonTraité des kystes congéni¬
taux, considère le fait de
Gerdy
commerelatif à
unkyste
sébacé. Il
siégeait, chez
unefemme de quarante-cinq
ans,à
la
partie inféro-externe
du seingauche dans laquelle il s'était
creusé une
loge.
De
plus, l'examen anatomo-patliologique publié dans la
thèse de
Guyot (Paris 1853)
nelaisse
aucundoute
surla
nature de ce
kyste.
« Examen de la
pièce (Obs. VIII,
p.23).
—Au pourtour
de la tumeur et surtout vers la
partie supérieure,
ontrouve quelques portions de
tissuadipeux.
» M.
Gerdy sépare
avecle scalpel le petit lambeau de
peau(adhérent
à latumeur). Le kyste présente
uneenveloppe fibreuse
blanche ; àl'extérieur,
sont depetits tractus de tissu
cellulairequi la
réunissaient auxparties environnantes. On
rencontre aussi
quelques réseaux vasculaires qu'on
nepeut séparer complètement de l'enveloppe.
» A
l'intérieur,
on trouvesuperficiellement de petites lamelles blanchâtres, molles, imbriquées, placées les
unesà
coté des
autres, paraissant ainsi former
une seconde couche,une seconde
enveloppe demi transparente, blanchâtre, qui
senlève trèsfacilement ; on ne trouve
plus après cela qu'une
matière
grisâtre, ressemblant à une sorte de pulpe de bouillie,
dégageant
uneodeur fade, nauséeuse, des plus désagréables,
offrant en un mot
la plus grande analogie avec ce qu'on
nomme athérome,
mélicéris, etc.
» Examen au microscope.
—L'enveloppe externe est pure¬
mentde tissu fibreux,
les petites lamelles blanchâtres ne sont
composées
quede cellules d'épithélium très grandes, très
belles et à contours très
nets. La matière contenue dans l'in¬
térieur offre, sous
le champ du microscope, des cristaux de
cholestérine,
des granulations de carbonate de chaux, de
magnésie, des cellules d'épithélium pavimenteux, des
noyaux
â granulations graisseuses, des globules de graisse. »
Dans cette
description,
nousn'avons rencontré ni papilles,
ni
glandes
Od'aucune sorte,
7ni cellules dentelées ; mais au
contraire des cellules
épithéliales à contours très nets, des
noyaux
à granulations graisseuses, des globules de graisse
comme dansles cellules
des glandes sébacées.
Enfin cette
pièce fut présentée par Bombeau, externe du
service de
Gerdy, à la Société d'anatomie, en février 1852 ;
à cette même séance
assistait Lebert qui préparait en ce
momentle mémoire sur
les kystes dermoïdes qu'il commu¬
niqua
aumois d'août 1852 à la Société de biologie. Il est pro¬
bable que
si cette tumeur avait eu un aspect dermoïde, 1 at¬
tention de Lebert eût été mise en
éveil, tandis
quecet émi-
nent
anatomo-pathologiste parla seulement d'un kyste
sébacé de la mamelle
qu'il avait
vu enAllemagne et qui lui
avait été donné par
Dieffenbach. Il insista seulement sur les
connexions de ces
kystes
avecla
peau ;il dit que ces con¬
nexions existaient presque
toujours et qu'elles étaient inti¬
mes ;
mais
quedans d'autres
cas,le lien était rompu et qu'il
était alors facile d'énucléer les
petites tumeurs.
Nous sommes
obligé de
nousrallier à l'opinion de Velpeau
etde ne pas nous occuper
davantage de ces tumeurs ; nous
retenons
cependant l'observation publiée par Reverdin et
May
or.Hermann, en
1890, observa et présenta à la Société des
— 17 —
médecins de
Prague
unkyste dermoïde du sein droit
quil
avait observé chez une femme de soixante-six ans.
Enfin,
ledernier
cas est celui queM. le Prof. Démons
a bien voulu nouspermettre d'observer dans
son service declinique pendant le mois de juin 1901, et dont M. Rocher,
interne duservice,
aprésenté les pièces à la Société de gyné¬
cologie, d'obstétrique et de pœdiatrie de Bordeaux.
Telssont à peu
près tous les documents
que nouspossé¬
dons sur les
kystes dermoïdes de la région mammaire,
carjusqu'ici
ces tumeurs ont été fortpeuétudiées. Nos
auteursclassiques, P. Delbet
dans l'article « Tumeurs de larégion
mammaire » du Grand Traité de
chirurgie, de Duplay et Reclus,
ne consacre quequelques lignes à l'étude des kystes
dermoïdes et sébacés de cetterégion. J.-W. Binaud
etBra- quehaye dans
l'article « Tumeurs de larégion mammaire
» du Traité dechirurgie clinique
etopératoire distinguent les kystes
dermoïdes.dusein de ceuxqui
sedéveloppent
surla ligne médiane
; donnentquelques indications
surle
momentd'apparition, l'évolution,
lessymptômes, le
contenude
cestumeurs.
Deplus, ils indiquent deux pièces conservées
àHunterian Muséum,
sous les no* 235et 256 B.En
résumé,
nous nepossédons
comme documents sérieux queles observationsde F.-R. Russel(mentionnée
parAlbers).
de J.-L Reverdin et
Mayor, de Hermann
etde
M. le Prof.Démons
; enfin lespièces
conservées à Hunterian Muséum.Nous allons
reproduire
tous les documentspubliés jusqu'à
ce
jour,
nouspourrons ainsi étudierquels sont les
caractèresgénéraux
deskystes, voir
cequ'ils offrent de particulier dans
cette
région,
aupoint de
vue de leurstructure, de
leurpatho¬
génie,
dessymptômes auxquels ils peuvent donner lieu, des transformations qu'ils
peuventsubir
dans leur évolution, du pronosticqu'ils
entraînent avec eux et enfin du traitement quil faut leurappliquer.
F.
CHAPITRE II
OBSERVATIONS
Observation I
(Observation tirée
de
:Erlalitoriingen zti dern Atlasse dcr patliologiscben
Anatomie fur praktische Aerzte,vom
Albers.
—Drilte Abtheilùng enlhâlt:
dieKrankheiten der Brùst,1833).
Tumeur kystique contenant
des cheveux.
DanslePhilosophical
transactions, 331,
p.220,
onlit le faitsuivant:
Le 18 août 1713, F.-R. Russclétait
appelé auprès de la femme Schmith.
à Lewen, comtéde
Susscz. Cette femme était épuisée par la fièvre, fiè¬
vre accompagnée
de
toux,d'une douleur lancinante à la poitrine, et de
quelques autres
phénomènes
quel'on attribuait à une pleurésie. Or tous
ces phénomènes
s'amendèrent et disparurent quand on eut évacué de la
poitrine une
certaine quantité de sérosité ou plutôt de liquide clair res¬
semblant à du purin; la
quantité de liquide
queRussel évacua' était
bien suffisante pour
mouiller complètement quatre mouchoirs de poche.
Al'examen dela poitrine, on trouvaunegrosse
tumeur profondément
située, cédant à la
pression, et ayant la consistance d'une bouillie
épaisse. On
introduisit
unstylet
parl'ouverture et on évacua une masse
qui avait
l'apparence de farine de
sagouou d'un mélange de son et de
cheveux. On enleva encore un kystequi
pesait 8
onceset qui conte¬
nait une masse compacte
semblable à celle qu'on avait retirée aupara¬
vant etdans laquellese
trouvait mêlée
unesubstance ressemblant à des
cheveux.
Pressée dequestions, la
malade déclara
quetrente-huit ans aupara-
-19-
vantelle avaitreçu uncoupde pied de cheval à la poitrine;
elle
res¬sentitalors une vive douleur, et dans la suite elle vit apparaître une tumeur et se développer un réseau veineux considérable. La douleur disparut, mais la tumeur persista, regardéepar son médecin comme un véritable squirrhe, croissant d'une façon très lente. Cependant la glande mammaire n'entra jamais en fonction, et la malade ne put jamais allaiterson enfantavec le sein situé de ce côté.
La paroi du kyste, d'une grande épaisseur, était nourrie par
trois
petitsvaisseaux; elle avait si bien envahi le tissu environnantque cetissu, épaissià son tour, seconfondait avecelle.
Observation II
(Reverdin
et A.Mayor)
(Rev. méd. dela Suisse romande, 1887.)
Tumeurs associées du sein; kystes dermoïdes et fibromes multiples; suppuration du kyste.
Mine Fanny D..., quarante-sept ans, de Cartigny
(Genève),
m'estadressée le 6 mai 1885parle docteur Winzenried, pour une tumeurdu
seinqui a subi dans ces derniers temps une augmentation de volume rapide.
MmeD... n'a connaissance d'aucunantécédent de tumeurdans sa fa¬
mille; son père est mortà quarante-huit ansd'une fluxion de poitrine,
samère de dépérissement, elle a une sœurâgée de quarante-cinqans etbienportante.
Personnellement,
et quoique de petite taille et de frêle constitution, elle dit n'avoirjamais eu de maladie grave; elle accuse surtout d'assezfréquentes
attaques de rhumatisme.Régléeà seize ans, facilement, elle l'a toujours été régulièrement et
1est encore maintenant. Elles'est mariée àvingt-sixansetn'aeu qu'une seulegrossesse; accouchée à vingt-huit ans, elle a nourri son enfant pendant quinzemois sans avoir ni gerçures ni abcès du sein; elle ne se souvientpas non plus d'y avoir reçu de coups.
C est
lorsqu'elle
asevré son enfant qu'ellea remarqué dans son sein gauche plusieursgrosseurs, dures, grosses comme des noix, mobiles et disséminéesdans la glande; elles n'étaient du reste nullement doulou¬reuses. Ces tumeurs n'ont jamais disparu depuis, mais leur marche,
— 20 —
d'après
la malade, aurait été très irrégulière ; elles ont plusieurs fois
trèsnotablementdiminué pour
reprendre plus tard leur volume.
Deuxoutroisans aprèsleur
apparition, elle alla faire, pour ses rhu¬
matismes, une cure aux
bains de la Caille; ces tumeurs se seraient
réduitespendant
la
cureauvolume de petits grains. Jusqu'à cet hiver, la
marchedes tumeursaurait
procédé ainsi
paraugmentation et diminu¬
tionsuccessives. *
Au mois de maidernier,
elle
serend à Aix-les-Bains, et là les gros¬
seurs gardent
leur volume; à cette époque, le sein gauche avait à peu
près
doublé, il était bosselé à sa surface; chacune des tumeurs parais¬
sait avoirlagrosseur
d'une noix. Mais c'est depuis le mois de février
1885 que
l'accroissement est devenu très rapide et régulier; il y a
quinze
jours (22 avril) que, en raison de cet accroissement, elle fit venir
ledocteur Winzenried,
qui la revit
encorele 2 mai; il constata l'existence
d'une tumeurvolumineuse, en
grande partie fluctuante, avec vasculari-
sation de lapeau,
celle-ci
nonadhérente; il lui recommanda de ne faire I
aucunefriction et de se
faire opérer; à
sadernière visite il nota un
accroissementmarqué,
des sensations de picotement, d'élancement et de
tiraillement,pas de
douleurs pulsatives.
Depuislors
la
peaude la partie externe et supérieure de la région j
mammaire estdevenue rouge;
la
rougeurest diffuse, inflammatoire, et
dateraitd'aprèsla
malade d'hier, 5 mai
;au centre de la partie rouge il
existe uneplaque de
l'étendue d'une pièce de 50centimes sur laquelle la
couchecornéede l'épiderme
s'est détachée comme sur un vésicatoire ; la
malade nes'enétaitpas aperçue.
Je note immédiatement que le 7 mai, ;
au momentdel'opération,
j'ai trouvé
uneseconde plaque analogue dans
levoisinage, mais à
distance de la première.
Monconfrèrem'a faitsavoir que
la
tumeurétait, à sa dernière visite,
le2mai, indolente àla
pression, qu'il n'y avait pas de douleurs spon¬
tanées; il n'aremarqué
ni écorchures, ni éraillures quelconques de la
peau; on
sentait
uncordon lymphatique remontant dans l'aisselle.
MmeI).... affirme n'avoireu aucune
maladie dans
cesderniers temps! ;
ellen'apas eude
frisson, mais
unelégère sensation de chaleur, depun
une quinzaine
de jours
pasde transpiration ; elle a eu de la céphalalgie- ;
il estvrai, mais elleyestsujette.
Le vendredi, 1er mai, elle a eu un
malaise assez marqué, avec
mal de tète, fièvre, et est restée ce jour-U
— 21 —
au lit. L'urine examinée estclaire, normale, sans albumine. Enfin, il n'yajamaiseu d'écoulement de liquidepar le mamelon.
Mme D.... estde très petite taille, maigre,d'apparencechétive. L'exa¬
men attentifdes poumons, ducœur, du foie, des reins, ne permet d'y
constater riend'anormal ; toutes les fonctions du restes'exécutent très bien.
Le sein gauche présente le volume de la tête d'un enfant de six ans environ; il forme unetumeur arrondie mais surtout proéminente en dehorseten haut. La peau estsillonnée par de grossesveines bleuâtres
en dedans et au-dessus du mamelon ; en dehors et en haut, elle est rouge, larougeurest diffuse, plus vive au centre qu'à la périphérie;
surcette teinte rouge générale, on voit, en examinant attentivement, se détacherdefines arborisations vasculaires d'un rougevif. Il n'ya nulle partd'adhérence de la peau auxparties profondes, partout on peut y faireun pli ; mais dansla partie supérieure et externe les téguments paraissent très amincis; versle haut on aperçoit une petite saillie du volume d'une grossetêted'épingle.
Le mamelonest gros, très saillant, et ne présente ni excoriations, ni gerçures,niéruptions, ni croûtes. La tumeur est molle, présente une iluctuationparfaite ; mais àlapartie interne de laglande on sent une masse dure, arrondie, paraissant libre, sansadhérence, du volume d'un œuf; à lapartie inférieuredu sein, une autre tumeur analogue, moins facileà
circonscrire,
est en quelque sorte logée dans la partie inférieurede lamasse fluctuante. Pasde douleuràla pression; aucune tumeur appréciable dans l'aisselle; mobilité parfaite de la tumeur du sein sur lespartiesprofondes.
Diagnostic
: Cysto-sarcomeavec grande loge kystique enflammée et suppurée.Loriginede l'inflammation et de la suppuration m'échappe; aucun traumatisme;je trouveseulement surle bras gauche de la malade une
petite
égratignure
qui paraît dater detrois ou quatrejours seulement-,etquina passuppuré. La malade, d'après un interrogatoire dirigé dans tesens, n'a eu avant l'inflammationde sa tumeur aucune maladie
infectieuse,
etaucuneindisposition, ni du côté des voies respiratoires,ni du côté du tubedigestif. J'ajoute par anticipation que quelques jours apies1
opération,
le 10 mai, la malade ayant crachédu sangàplusieurs- 22 —
reprisesdans
la journée, je l'interroge de
nouveau ;elle me dit qu'en effet
elleavait depuistrois jours
craché du
sangà plusieurs reprises ; elle se
souvientmaldudébut de cet accident, etillui
semble
que ce sang'ne
vient pasde lagorge,
mais du
poumon ;l'examen de
sonmouchoir de
poche
m'indique
aucontraire qu'il doit provenir des fosses nasales ; c'est
alors queje découvre que
la face postérieure du pharynx est tapissée
par un gros
caillot noirâtre, glutineux
; uneirrigation par les fosses
nasales lui fait rendre unepartie de cette massesous
la forme de caillots
glutineux d'un brun
grisâtre
;elle
medit alors qu'elle
a eude tout
tempsunpeude
mal de
gorge,des sensations de gêne dans le pharynx,
unbesoind'avaler, eta rendu depuis fort longtemps
des croûtes
encrachats; la muqueusedu pharynx estcomme
vernissée
;rien à la par¬
tie antérieure desfosses nasales ; pas d'ozène.
Est-ce cettelésion locale qui a pu servir de porte
d'entrée
aux germes pyogènes ;il
estdifficile de rien affirmer
sous cerapport, mais cela
paraît bien
probable.
La malade entreà notre clinique particulière
le
6mai
;la tempéra¬
ture est prise
aveclemême thermomètre dans les deux aisselles et monte
à37°7de chaque côté.
Opération, le 7 mai. Ethérisation.
Pulvérisation phéniquée. Je fais
d'aborduneponction aubistouri, il
s'échappe
unflot de
pus ;M. le Prof.
Fol récolte dans la profondeur du pus pour faire
des cultures. Ce pus
examiné au microscope
fourmille
de microbes.J'agrandis alors l'ouver¬
tureetvide la poche quirenferme prèsd'un litre
de
pus,jaune, épais,
très fétide, sans corps solides. Je circonscris
ensuite
pardeux incisions
un lambeauelliptiquecomprenant le mamelon etla plus
grande partie
dela portion enflammée de lapeau, ilest
oblique
enhaut
et endehors ;
arrivé sur lekyste,jel'isole avecles doigts, la tumeur
solide inférieure
vientavec et s'énuclée facilement ; la tumeur interne est
énucléée à
part,le grand pectoral està nu ;j'enlève ensuite en bas eten
haut les
restes de laglande mammaire. Quelques ligatures peu nombreuses
au
catgut,lavage auchlorure de zincà8 0/0; deux drains côte à
côte sor¬
tent par une contre-ouverture postérieure. Suture continue
des bords
dela plaie au catgut; unpoint desuture profonde en U,etc.
Suites, 10 mai. —Lesoir, pouls 100, température 37u7, la
malade a
craché un peu desang qui vient du
pharynx.
Dans l'épaisseur de cette
mamelle
setrouvent contenues deux sortes
de tumeurs:
1° La cavitéd'une vaste paroi kystique.
2° Des nodules, aunombre de cinq, de
volume variable, d'aspect
fibro-sarcomateux, et dont l'un
confinait
aukyste
sanscependant
se confondreavec saparoi : une couchecelluleuse l'en séparait.
1° La paroi du kyste est
formée d'une couche externe de nature
con¬jonctive, et d'une coucheinterne
épithéliale
ouplutôt épidermique.
a) En effet, le revêtement interne
de cette cavité est constitué
par un épithélium pavimenteuxstratifié,
avec sescellules profondes, prisma¬
tiques et allongées, ses éléments
intermédiaires cuboïdes et
pourvusde
prolongements unitifs, enfin ses
cellules aplaties dont les plus superfi¬
cielles,bien qu'elles semblent conserver
leur
noyau,fixent l'acide picri-
quedu réactif et forment un liséré jaune
vif d'aspect homogène qui
limiteen dedans lasurfaceépithéliale.
L'éléidine ne se rencontre presquenullepart
dans
cescouches épider-
miques; nullepart les cellules
superficielles
ne sontchargées de goutte¬
lettesni degranulations graisseuses.
Mais
encertains points elles parais¬
sentsubir ladégénérescence vacuolaire de
leur protoplasma.
b) Dans la profondeur, l'épithélium repose sur un
tissu conjonctif
assez dense qui prend parfois l'aspect de
papilles de forme irrégulière,
de volume inégal et souventlargement espacées.
Ce tissu offre ceci de
remarquable qu'il est parcouru par de très
nombreux capillaires, volu¬
mineux, tapissés de belles cellules endothéliales et se
terminant
en ansesau niveau de la coucheprofonde de l'épiderme.
Plusprofondément, letissuconjonctif devient
plus dense, les vaisseaux
ysontmoinsnombreuxet plusvolumineux. Leur
paroi semble formée
en dehors de la tunique endothélialepar des couches
successives de cel¬
lules plates dontles noyauxellipsoïdes disposentleur
grand
axetantôt
perpendiculairement tantôt parallèlement à la direction
longitudinale
du vaisseau.
Fréquemment, autourdes circonvolutions que décritl'un deces
vais¬
seaux, on rencontre de véritables nappes decellules
embryonnaires, les
unes fortement granuleuses les autres plus claires. Ces nappes, traces
dune inflammation de daterécente, occupenttantôtla
profondeur tantôt
levoisinagede l'épiderme. Leur importance est fort
variable. Dans les
— 24. -
régions internes de la paroi kystique, elles diffusent souvent fort loin
dans l'épaisseur de la trame conjonctive qu'elles infiltrent et qu'elles
semblent détruire oudissocier.
Au niveau du point où elles entourent des vaisseaux de calibre, il
arrive souvent que ceux-cisont oblitérés par une prolifération abon¬
dantedeleurscellules endothéliales qui s'allongentet se disposent, sur des coupes qui rencontrent transversalement les vaisseaux,en forme de
rayonsplus aumoins réguliers.
En résuméil s'agit ici d'un kyste dermoïde dont les parois présentent quelques formations papillaires, mais dans lesquelleson netrouveaucune trace deglandes, ni defollicules pileux.
De plus ces parois offrent des traces manifestes d'inflammation.
2o Les noyauxnéoplasiques sont, commeleur aspectl'indique, consti¬
tués par du tissu conjonctif. Dans la plus grande partie de leur étendue,
cetissu conjonctifest fibrillaire. Les fibrilles en sontfines, ondulées, parsemées de cellules aplaties ouramifiées, peu nombreuses.
Tantôt, etcela surtout autourdes débris glandulaires qui parsèment
latumeur, le carmin agitpeu sur cettesubstance connective, tantôt au contraire il lacolore nettementen rose vif.
A la surface des néoplasmes, le tissu conjonctif qui les forme
prend
l'aspect de lames homogènes, parallèles, fortement colorées et séparéespar des cellules plates.
Enfin, les débris glandulairessont des sortes de tubes plus ou moins irréguliers, des lacunes anguleuses, des espaces ramifiés que tapisse un épithélium semblableà celui des canaux excréteurs de laglande mam¬
maire. Disposées sur plusieurs couches arrondies ou cubiques dans leur profondeur, les cellules de cetépithélium deviennent cylindriques à la
surface et leur protoplasma se colore plus nettement en jaunepar
le
picro-carmin. Elles forment alors le revêtement mêmedes lacunes, qu'elles bordent ainsi d'un épithélium cylindriquerégulier.Quantaux vaisseaux deces tumeurs, ilssontrelativement fort rares etpeu importants.
En un mot, les nodules qui se rencontrent à côté du kyste
dermoïde
que nous décrivions toutà l'heure nesont autrechose que des tumeurs de natureconjonctive. Ils appartiennentà cesformes où le tissu connec-
- 25 -
tifsemontre àson état adulte, constituantune variété de fibromes que leur faible densité rapproche àl'œil nudes tumeurs sarcomateuses.
Ajoutonsque, dansl'hypothèse d'une pénétration de microbes parles
canauxexcréteurs—
(hypothèse
qui avait été émise lorsque, croyant àuncysto-fibrome suppuré,on cherchait la causede cettesuppuration)—
descoupes avaient été pratiquéessur le mamelonettraitées de façon à permettrede reconnaître la présence de parasites. Elles n'ont présenté
aucun microbe danslescanaux galactophores. C'est unrésultat négatif quiencette qualité même n'a qu'unevaleur très relative, maisque, du reste,je mentionne simplement,la nature du kystereconnue ultérieure¬
ment enlevant laplus grande partie desonintérêt à la recherche dont je viensdeparler.
L'observationqu'on vient de lire, présenteundouble intérêt: en pre¬
mierlieuj'avaisporté le diagnostic de cysto-sarcome etnous avonstrouvé cinqtumeurs fibromateusessolides etunvastekyste dermoïde; ensecond heu lekyste dermoïdes'était enflammé et avait suppuré.
Relativementaupremier point,l'erreur de diagnostic est, je crois,par¬
donnable;jetrouvais d'une part,destumeurssolides, dont l'une parais¬
saitisolée et sans connexion directeavec la masse liquide, mais dont lesautressemblaient faire corps avec la poche kystique, les noyaux solides mobiles, àsurface régulière, sans adhérence ni avec lapeau, ni
aveclaglandemammaire, de consistance dure et élastique,nepouvaient être quedufibrome, du sarcomeou dufibro-sarcome, en unmot, unde
cesnéoplasmes nomméstumeurs bénignes du sein, et,comme fort sou¬
vent, ces néoplasmessontle siège de modifications qui amènent la for¬
mation de cavitéspseudo-kystiques,il était naturel de voir, dans lapro¬
duction morbideen question, unexemple decysto-sarcome ou de cysto- fibrome. Il n'enétaitrien, le diagnostic était justeen cequi regarde les tumeurs solides, mais la collection liquide en était indépendante, et celle-cin'étaitautrechose qu'unvastekyste dermoïde suppuré, annexéen
quelque sorte aux masses
fibromateuses,
il y avait donc'dans le mêmesein deux tumeurs développées auvoisinage immédiat l'une de l'autre.
1 n seulfait aurait pu mettresur la voie du diagnostic : les alterna¬
tives
d'augmentation
et de diminution du volume de la tumeur auraient pu tairesoupçonnerunkyste dermoïde, mais les kystes dermoïdes dusein sontde la plus granderareté ; il y avait là d'ailleurs des masses
fibromateuses qui écartaientcette idée.
— 26 —
Le fibrome formaitcinq tumeurs distinctes : l'une,
la plus volumi¬
neuse, avaitla grosseur d'un œuf de pigeon, c'est
celle qui était mobile,
isoléedu kyste et qui occupait la partie interne et
inférieure de la
glande; desquatre autres,variant du volume d'une
grossenoix à celui
d'unepetite noisette, deux occupaient
la partie inférieure du sein,
logées au-dessous du mamelon, à
la partie inférieure du kyste,
une autre était située unpeu plus haut et en dehors, enfinla dernière
se trouvait souslapoche à la partiesupérieure et externede la mamelle.
Sur le vivant, ces tumeursparaissaientfaire corpsavec
le kyste,
ce¬pendant elles en sontséparées par une
faible épaisseur de tissu conjonctif
assezdélicat, non adipeux; si on cherche à énucléer lestumeurs,
elles
se séparent facilement; on peut même séparer dela membrane kystique
le tissu conjonctif interposé. Enunmot,
les
quatre tumeurssontparfaite-
mentdistinctes du kyste dermoïde, mais elles n'ensont
séparées
que pardu tissu conjonctif et non parle tissu
glandulaire.
Ceci constaté, deux hypothèsesse présententrelativement à
la genèse
des deuxtumeurs, fibrome et kystedermoïde. Se
sont-elles développées
indépendamment l'une del'autre,
chacune pourson compte, sansqu'il
yait rien decommun dans leur origine, ou bien leur
apparition dans la
même région, dans le même organe
s'explique-t-elle
par unemême
cause primitive ?Je crois qu'ilserait fort
hasardeux de trancher cette
question.
En ce qui concerne le kyste, lathéorie
généralement admise aujour¬
d'hui est celle de l'enclavement
(Einstulpùng)
;pendant le développement
embryonnaire, unepetite portion du tégumentexternes'est
trouvée peu
à peu recouverte et enclavéesous la peau et plus
tard s'est développée
sous laforme d'une poche; «la cavitédermoïde estune
ectopie du tégu¬
ment externe, mais dans ce siègeanormal, letégumentjouit
de toutes
sespropriétés et peut donner naissance à tous sesproduits
ordinaires
» (Lannelongue).Ence qui concerneles néoplasmesproprementdits
auxquels appartien¬
nentnos fibromes, il faut avouer que laquestion deleurgenèseest
encore
peu avancée, l'hypothèsede Conhcim, qui rapporteleur
formation à de
petites masses de tissu embryonnaire restésans emploipour
le dévelop¬
pement normal, est loin de satisfaire complètement l'esprit, elle
n'expli¬
que nullement pourquoi ces éléments embryonnaires prennent à un
mo¬
ment donné la formede tissuspathologiques et se heurte
d'ailleurs a
d'autres objections; il ya
probablement quelque chose de vrai dans cette
hypothèsequi s'adapteadmirablement à Certains
cas;mais il
nousmanquecertainementune ou
plusieurs inconnues du problème.
Précisément dans notre cas, cettehypothèse serait assez
satisfaisante,
il y a eu dans l'évolution decette
mamelle
uneanomalie pendant la
période embryonnaire etla preuve enest
dans la présence du kyste der-
moïde; pourquoice troublesurvenu dans
le développement de cellules
superficielles ectodermiques n'aurait-il pas
porté
enmême temps
surles éléments plus profonds destinés à la
formation du tissu conjonctif
périglandulaire. Ceux-ci ultérieurement auraient
donné lieu
audévelop¬
pementdes nodules du fibrome etl'influence de la région
aurait déter¬
miné laforme spéciale de ce fibrome,
forme
propre auxglandes
en grappeet particulièrementauxglandes mammaires.En faveur de cette manière de voir, je signale la
multiplicité des
tu¬meurs : iln'estpas rare de trouverdeux ou trois
fibromes dans
unsein,
mais ilest moins commun d'enrencontrerjusqu'àcinq;
je signale
encore le faitdu voisinage très immédiat de quatre de ces tumeurs avecla
paroi kystique. Enfinj'ajoute que, d'après
Lannelongue, la combinaison
dukystedermoïde avec unnéoplasme proprement dit a
été déjà obser¬
véequelquefois: « Quantaux tumeursdermoïdesproprementdites,
elles
peuventelles-mêmes devenir le siège de formations
pathologiques et
mêmede véritables néoplasmes. A.insi dans les kystes
dermoïdes ovariens
on avu se développerdu cancer
(Heschl, Schrœder), de l'épithélioma
pavimenteux lobulé(Cornilet
Babinski), du
sarcome(Unverricht).
una trouvé aussi du cancerencéphaloïde dans une production
semblable
du scrotum (cas deSpiess), et de l'épithélioma dans une tumeur
sacrée (Czerny).
»Mais d'un autre côtéles nodules fibromateuxne sesont pasdéveloppés
danslaparoi du kyste,ilsen sont séparés pardu tissu
conjonctif normal
etla tumeurla plus volumineuse est fort éloignée du siège
de la poche
dermoïde.
Je ne saurais donc trancherla question,force est bien
de la laisser
en suspens.Eesiège de notre kyste dermoïde dansle sein constitue à
lui seul déjà
une rareté : Lannelongue signale un casde Gerdy, un cas
de Dieffen-
bacli