• Aucun résultat trouvé

Étude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Étude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer"

Copied!
44
0
0

Texte intégral

(1)

0 Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie

d’Alzheimer

Mémoire de Recherche en vue de la validation du Master

Présenté par Boué Pauline

Soutenu publiquement le:

26/06/2019

Étude

neuropsychologique des liens entre théorie

de l’esprit et

planification dans la maladie d’Alzheimer

2017-2019

Master mention « Psychologie Clinique, Psychopathologie et Psychologie de la Santé » Parcours Neuropsychologie

Sous la direction de

M. Besnard Jéremy

(2)

1 Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie

d’Alzheimer L’auteur du présent document vous

autorise à le partager, reproduire, distribuer et communiquer selon les conditions suivantes :

Vous devez le citer en l’attribuant de la manière indiquée par l’auteur (mais pas d’une manière qui suggérerait qu’il approuve votre utilisation de l’œuvre).

Vous n’avez pas le droit d’utiliser ce document à des fins commerciales.

Vous n’avez pas le droit de le modifier, de le transformer ou de l’adapter.

Consulter la licence creative commons complète en français : http://creativecommons.org/licences/by-nc-nd/2.0/fr/

(3)

2 Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie

d’Alzheimer

R E M E R C IE M E N T S

En premier lieu, je remercie mon directeur de mémoire, Mr Besnard, pour m’avoir assurée sa confiance et su me guider pour ce premier travail de recherche ainsi que pour avoir répondu à l’ensemble de mes interrogations. Je suis reconnaissante pour votre disponibilité.

Je souhaite aussi adresser toute ma gratitude à Mr Laurent (professeur de statistique à l’Université d’Angers) pour les nombreux conseils et explications qu’il m’a donné.

Je tiens à remercier mes amis de l’Université d’Angers : Arnold, Marie, Marianne et Ophélie pour leur soutien sans faille et leur aide précieuse. Et une spéciale dédicace pour ma « Lélé » : merci pour ton soutien, tes corrections et pour m’avoir supportée lors de ces cinq années universitaires ! Un grand merci à mes amis du lycée pour m’avoir permis de recruter mes sujets contrôles (Matthieu et Esther). Merci à tous pour votre aide mais aussi pour « les bouffées d’oxygène » !

Merci à mes parents, sans eux, je n’aurais pas pu effectuer cette formation de cinq ans et ni effectuer autant de stages.

A l’Accueil de jour et au PASA (Pôles d’Activités et de Soins Adaptés) qui ont accepté de participer à la recherche et m’ont permis de recruter des sujets atteints de la maladie d’Alzheimer. Merci à toute l’équipe (Soraya, Rebecca, Michelle et Maryline) !

Enfin, je tiens à exprimer toute ma gratitude à l’ensemble des participants sans qui cette recherche n’aurait pas pu aboutir.

(4)

3 Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie

d’Alzheimer

Table des matières

INTRODUCTION………..………..………..1

I- Aspects théoriques.……….…………...………….….…….2

1. La théorie de l'esprit……….……2

1.1 Définition………...…….2

1.2 Représentation mentale………....………..3

2. Les fonctions exécutives……….……….…4

La planification………...………5

3. Les liens entre FE et TDE………...…..…….….….…5

3.1 Une indépendance entre théorie de l’esprit et fonctions exécutives……….…5

3.2 Une dépendance entre théorie de l’esprit et fonctions exécutives…………..……….7

4. La maladie d'Alzheimer : un lien éventuel entre un trouble de planification et de théorie de l'esprit ?………..………...9

4.1 La maladie d’Alzheimer et la théorie de l’esprit…...………….………10

4.2 La maladie d’Alzheimer et la planification……….………...……11

4.3 Le lien entre théorie de l'esprit et planification dans cette pathologie………...…12

Problématique……….…13

Hypothèses………...15

II- Méthodologie………...………..………..16

1. Participants…………...……….16

2. Protocole expérimental………...……….………..17

3. Procédure……..……….18

III- Résultats……….………....19

1. Comparaisons de moyennes………...19

1.1 Comparaisons des performances en théorie de l’esprit………19

1.2 Comparaisons des performances à la Tour de Londres………...……….21

2. Analyse des corrélations……….23

IV- Discussion………...23

1. La théorie de l'esprit dans la maladie d'Alzheimer………...24

2. La planification dans la maladie d'Alzheimer………...25

3. Lien entre théorie de l'esprit et planification dans la maladie d'Alzheimer………26

(5)

4 Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie

d’Alzheimer

4. Les limites de notre étude………...27

5. Conclusion………..28

Bibliographie……….……….30

Annexe……….………..38

Sommaire des figures et des tableaux Tables des tableaux

Tableau 1 : Données sociodémographiques, scores aux MMSE (Moyennes, Ecarts-Types et Comparaisons statistiques)……….17

Tableau 2. Comparaison statistique intergroupe des sujets contrôles et des patients Alzheimer à l’épreuve des faux pas………...….…19

Tableau 3. Comparaison statistique intergroupe des sujets contrôles et des patients Alzheimer à l’épreuve d’attribution d’intention……….21

Tableau 4. Comparaison statistique intergroupe des sujets contrôles et des patients Alzheimer à l’épreuve de la Tour de Londres……….…22

Table des figures

Illustration 1 : Les bases anatomiques de la TDE (Duval et al., 2011)……….2

Illustration 2 : Modèle de Norman et Shallice (1980)………...5

Illustration 3 : Modèle illustrant les composantes de bases impliquées dans la TDE (Samson, 2012)……….…7

Illustration 4 : Corrélation entre la tâche d’attribution d’intention et les items à 5 déplacements (incitateur positif)………...27

.

(6)

5 Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie

d’Alzheimer

Liste des Abréviations :

ADI : Alzheimer Disease International

BADS : Behavioural Assessment of the Dysexecutive Syndrome DSM : Diagnostic and Statistical manual of Mental disorders HAS : Haute Autorité de Santé

MA : Maladie d’Alzheimer

NINCDS-ADRDA : National Institute of Neurological and Communicative Disorders and the Alzheimer’s Disease and Related Disorders Association

OMS : Organisation Mondiale de la santé SAS : Système Attentionnel Superviseur TDE : Théorie De l’Esprit

(7)

1

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

INTRODUCTION

La maladie d’Alzheimer (MA) est une pathologie neurodégénérative caractérisée par une atteinte corticale diffuse (Guichart-Gomez & Hahn, 2016). Dans les cas les plus courants, l’apparition de la maladie se traduit par une atrophie hippocampique (Derouesné, 2006). Nous pouvons considérer cette pathologie comme un problème de santé publique puisqu’elle concerne plus de 60 % des pathologies neurodégénératives (OMS & ADI, 2012). Cette maladie évolue en quatre phases : stade préclinique (phase asymptomatique mais les lésions temporales internes sont présentes), stade prodromal (les symptômes commencent à faire leur apparition), stade clinique symptomatique (plusieurs symptômes présents de manière plus nette) et enfin la phase ultime qu’on appelle la « MA démentielle » ou la « démence d’Alzheimer » qui se traduit par une apparition typique ou atypique (Guichart-Gomez & Hahn, 2016).

La théorie de l’esprit (TDE) est généralement perturbée dans la MA (Fernandez-Duque, Baird &

Black, 2009 ; Zaitchik, Koff, Brownell, Winner & Albert, 2006 ; Gregory et al., 2002). Elle est définie comme la capacité à inférer des « états mentaux à soi-même et à autrui et de les comprendre » (Duval et al., 2011).

Rogan (2010) définit les fonctions exécutives (FE) comme recouvrant « l’ensemble des fonctions nécessaires au contrôle et à la réalisation de tâches complexes nouvelles et non automatiques ». De nombreuses études montrent que les FE se détériorent au fur et à mesure que la maladie progresse, le plus fréquemment lors du stade démentiel de la maladie. (Guichart-Gomez &

Hahn, 2016 ; Swanberg, Tractenberg, Mohs, Thal & Cummings, 2004 ; Perry & Hodges, 1999). Le stade démentiel de cette pathologie se traduit par une agitation excessive, une altération du sommeil et une dépendance totale concernant l’habillage, l’alimentation et l’hygiène (Feldman, Van Baelen, Kavanagh & Torfs, 2005). D’autres études contredisent ces faits à propos de la planification/

programmation d’une activité : les difficultés exécutives seraient présentes dès les premiers stades de la MA. En effet, les sujets auraient des difficultés à préparer un repas ou à programmer un trajet de conduite automobile dès les prémices de la maladie (Bherer, Belleville & Hudon, 2004).

Sandoz, Démonet & Fossard (2014) montrent un lien entre FE (inhibition et capacités de raisonnement) et théorie de l’esprit (TDE) dans la MA. Les liens entre planification et TDE n’ont pas été étudiés dans cette pathologie alors qu’ils s’avèrent que ces deux processus sont en lien (Pellicano, 2007 ; Hughes & Russell, 1993). Ce lien potentiel pourrait s’expliquer par le type de

(8)

2

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

présentation/ le design de la tâche de TDE. Le design renvoie à la manière dont le test est construit (dessins, histoires écrites, etc.). Cependant, les travaux émettant cette hypothèse ont été réalisés chez des patients schizophrènes (Brüne, Schaub, Juckel & Langdon, 2011) et autistiques (Pellicano, 2004 ; Hughes et Russell, 1993).

Dans un premier temps, nous présenterons le concept de TDE afin de le définir et d’expliquer les diverses représentations mentales. Ensuite, nous parlerons des FE de manière globale avant de préciser nos propos sur la planification. Nous tenterons d’exploiter les liens existants entre ces deux mécanismes (TDE et planification). Pour finir, nous essayerons d’observer le lien entre ces deux processus dans la MA. La deuxième partie fera l’objet de la méthodologie qui permettra d’opérationnaliser nos hypothèses de recherche. L’analyse des résultats sera suivie d’une discussion, nous amenant à la conclusion de cette étude ayant pour but de préciser s’il existe une relation entre TDE et planification chez des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

I- Aspects théoriques

1. La théorie de l’esprit 1.1 Définition

Dans notre société, la régulation comportementale et la compréhension du monde qui nous entoure s’avèrent essentiels. Cette régulation se fait notamment grâce à la théorie de l’esprit. Cette dernière est indispensable dans le traitement des interactions sociales et permet de s’adapter aux actions de nos pairs dans diverses situations (Moreau & Champagne-Lavau, 2014).

Le terme « théorie de l’esprit » (TDE) est apparu pour la première fois en 1978 au cours d’une expérimentation sur le chimpanzé (Premack & Woodruff, 1978). Depuis cette étude, de nombreux travaux ont émergé (Laisney & Desgranges, 2014 ; Fernandez-Duque, Baird & Black, 2009 ; Zaitchik, Koff, Brownell, Winner &

Albert, 2006 ; Gregory et al., 2002 ; Miermont, 1997). Elle est définie comme la capacité mentale à inférer des « états mentaux à soi-même et à autrui et de les comprendre » (Duval et al., 2011). Selon des études en neurosciences, la TDE est sous tendue par diverses régions du cortex : le cortex préfrontal, le Illustration 1 : Les bases anatomiques de la TDE (Duval et al.,

2011)

(9)

3

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

complexe pôle temporal/amygdale et le complexe sillon temporal supérieur/jonction temporo- pariétale (Duval, Desgranges, Eustache & Piolino, 2009). Pour avoir une TDE efficiente, il est nécessaire de reconnaître les aspects cognitifs et émotionnels de soi-même mais aussi d’autrui dans les interactions sociales (Miermont, 1997).

1.2 Représentation mentale

La TDE n’est pas considérée comme une entité unique. Dans la plupart des études, on parle de deux types de TDE (Laisney & Desgranges, 2014). La première forme de TDE est centrée sur les connaissances, les concepts que les individus ont sur le monde. En d’autres termes, elle permet de raisonner sur nos pensées. Elle n’a pas de connotation émotionnelle et est ainsi considérée comme une TDE « froide » (Coricelli, 2005). La deuxième TDE concerne la capacité d’un individu à comprendre l’état émotionnel d’un autre individu. En d’autres termes, elle permet de comprendre l’état affectif de l’autre (Coricelli, 2005) et est qualifiée de TDE « chaude » (Laisney & Desgranges, 2014).

La TDE est une capacité cognitive complexe (Laisney & Desgranges, 2014) qui comporte différents niveaux qu’il est possible de classer. Pour hiérarchiser le niveau de complexité, on parle de deux types d’approches (Cermolacce et al., 2011) : certains auteurs parlent de fausses croyances de 1er et de 2ème ordre (Perner & Wimmer, 1985). Les représentations dites de 1er ordre

« correspondent à celles que l’on a de l’état mental d’une personne en adoptant sa perspective » et les représentations de 2ème ordre « correspondent aux représentations mentales qu’une personne a sur les représentations mentales d’une autre. » (Duval et al., 2011).

Sabbagh (2004) a repéré que le décodage et le raisonnement font partie des processus impliqués dans la TDE. Le décodage « fait référence à la perception et l’identification d’informations sociales et d’indices présents dans l’environnement » : par exemple lorsque que quelqu’un sort sa carte bancaire pour payer un achat ; lorsqu’elle regarde sa voiture pour s’assurer qu’elle n’a pas bougé de place : tous ces éléments participent au décodage de l’action. En revanche, le processus de raisonnement sert à « comprendre, expliquer ou […] prédire les actions et requiert nécessairement l’accès aux connaissances ou faits concernant soit le protagoniste, soit les circonstances contextuelles. » (Duval et al., 2011).

Il semble important de préciser que la TDE est un concept multidimensionnel et que les tâches utilisées actuellement, sans aucune exception, comportent des limites. Une tâche seule n’évalue pas

(10)

4

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

l’ensemble des concepts de TDE. La plus grande critique que nous pouvons faire à l’égard de ces tâches concerne le manque d’aspect interactionnel : il s’avère alors nécessaire d’avoir un regard critique sur les diverses tâches utilisées dans la littérature (Besnard, 2009).

2. Les fonctions exécutives

L’étude des FE a débuté il y a environ un siècle, grâce à l’observation de troubles comportementaux chez un patient nommé Phinéas Gage présentant une atteinte frontale (Damasio, 1995). Ce concept a évolué à travers le temps : les travaux effectués par Milner (1963) et Luria (1966) ont permis l’émergence du concept des FE. Les FE sont responsables des capacités mentales nécessaires à la formulation des objectifs, à la planification et à l’exécution efficace des plans (Lezak, 1982). Plus récemment, Rogan (2010) définit les fonctions exécutives comme recouvrant

« l’ensemble des fonctions nécessaires au contrôle et à la réalisation de tâches complexes nouvelles et non automatiques ». Elles permettent le bon déroulement de l’action allant de la planification jusqu’à la réalisation de la tâche (Hofmann, Schmeichel & Baddeley, 2012). Le plus fréquemment, elles sont réparties en deux catégories : une composante « froide » qui comporte la planification et le raisonnement ; une composante « chaude » qui correspond à la régulation des comportements orientés vers un but qui nécessite un contrôle volontaire de l’action (Fourneret & Des Portes, 2016).

Les FE sont dites « essentielles » pour acquérir une autonomie au quotidien et pour le développement et le maintien de relations sociales adaptées (Lezak, Howieson & Loring, 2004).

Les FE sont principalement localisées au niveau du cortex préfrontal (Van Der Linden & Seron, 2014). Cependant d’autres études neuroanatomiques ont prouvé que les FE sont intégrées dans un réseau beaucoup plus vaste (Stuss, 2011 ; Collette, Hogge, Salmon & Van Der Linden, 2006). Il existe une littérature très variée sur le sujet : cela a donné lieu à divers modèles théoriques (Stuss, 2006 ; Stuss, Binns, Murphy & Alexander 2002 ; Miyake, Friedman, Emerson, Witzki, Howerter &

Wager, 2000 ; Shallice & Burgess, 1998 ; Rabbitt, 1997 ; Shallice, 1982). Il est possible de fractionner le fonctionnement exécutif en plusieurs composantes (Miyake et al., 2000 ; Godefroy, Cabaret, Petit-Chenal, Pruvo & Rousseaux, 1999). Miyake et ses collaborateurs (2000) établissent trois processus exécutifs de bas niveaux : la mise à jour de l’information, la flexibilité mentale et l’inhibition. Selon Chevalere en 2014, les processus complexes sont les suivants : la planification, l’organisation et/ou la déduction de règles. Il nous semble important de préciser que les premiers modèles prônaient davantage le caractère unitaire des FE. A présent, nous pouvons voir que les modèles ont évolué afin de présenter des FE multidimensionnelles et complémentaires entres elles (Fourneret & Des Portes, 2016). Nous allons maintenant définir le processus de planification.

(11)

5

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

 La planification

Comme nous l’avons vu précédemment, la planification est une fonction intégratrice des FE indispensable à la vie quotidienne : grâce à elle, nous pouvons programmer nos actions (Rogan, 2010). Elle peut être définie comme « l’agencement et l’ordonnancement temporel en terme de priorité des différentes étapes nécessaires à la mise en place de la stratégie. » (Deslandre, Lefebvre, Girard, Lemarchand & Mimouni, 2004). La planification peut être qualifiée de composante froide (Fourneret & Des Portes, 2016). Il a été prouvé que cette dernière commence à se développer dans l’enfance et se complexifie progressivement au fil des années (Fourneret & Des Portes, 2016).

La planification est un concept qui n’est pas sans importance. Nous pouvons nous référer à des modèles comme Norman et Shallice (1980) où la planification est impliquée dans l’élaboration des schémas, du gestionnaire de conflit et du SAS (Système Attentionnel Superviseur).

Ce concept est aussi présent dans le modèle de Grafman (1989, 1999). Il utilise les termes suivants : les unités de connaissance de management (MKUs). Ces unités se trouvant au niveau du lobe frontal interviennent dans la planification de l’action, la régulation des comportements sociaux et la gestion des connaissances. Ces MKUs sont composés d’une série d’événements, d’objectifs et lorsque ces derniers se regroupent cela forme des schémas.

Après avoir défini les concepts clés de notre étude : TDE et FE (plus particulièrement la planification), nous allons nous intéresser au(x) lien(s) éventuel(s) entre ces deux composantes.

3. Les liens entre fonctions exécutives et la théorie de l’esprit 3.1 Une indépendance entre théorie de l’esprit et fonctions exécutives

Selon certaines études de cas, nous pouvons constater des différences de résultats entre les performances à des tâches de TDE et des tâches évaluant le fonctionnement exécutif. En d’autres termes, ces résultats montrent une indépendance entre ces deux processus (Bird, Castelli, Malik,

Illustration 2 : Modèle de Norman et Shallice (1980)

(12)

6

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Frith & Hussain, 2004 ; Fine, Lumsden & Blair, 2001 ; Tager-Flusberg, Sullivan & Boshart, 1997).

Afin de comprendre au mieux cette distinction, nous allons développer chacune des études précédemment citées.

L’étude de Tager-Fluberg, Sullivan et al. (1997) a été menée chez 14 enfants ayant un syndrome de Prader-Willi (maladie génétique rare entraînant un risque d’obésité morbide, des difficultés d’apprentissage et comportementale) et chez 10 enfants atteints du syndrome de Williams (maladie génétique rare provoquant un dysfonctionnement dans le développement moteur et mental). Les tâches exécutives évaluaient essentiellement le contrôle inhibiteur et la manipulation mentale (i.e. la mémoire de travail). Des tâches de fausses croyances ont été utilisées pour évaluer les capacités de TDE. Les résultats montrent un échec aux tâches exécutives mais une réussite pour celles évaluant la TDE. La conclusion de cette étude est la suivante : les FE ne sont pas une partie intégrante de la TDE. Leurs difficultés exécutives n’entravent pas la réussite aux tâches de TDE.

En 2001, Fine et al. ont montré chez une personne ayant une lésion de l’amygdale, des capacités exécutives (tests d’inhibition, d’intentionnalité, tests de mémoire exécutive) efficientes alors que diverses tâches de TDE (fausse croyance, compréhension de blagues, compréhension de la parole non littérale/métaphore etc.) sont déficitaires.

Enfin, il en est de même pour l’étude de Bird, Castelli, Malik, Frith et Husain(2004) : le patient GT a subi une forme rare d’AVC-infarctus de l’artère cérébrale antérieure bilatérale. Il ne présente pas de déficit de TDE alors que l’évaluation des ergothérapeutes objective un syndrome dysexécutif majeur (mémoire, planification, initiation et confabulation). L’altération de la planification a été testée grâce à l’échelle de la BADS (Behavioural Assessment of the dysexecutive Syndrome). Les auteurs ont utilisé plusieurs tâches de TDE dont une qui nécessitait d’organiser dans l’ordre des séquences d’images prédéterminée (Baron-Cohen, Leslie & Frith, 1986). En d’autres termes, le déficit de planification (test du zoo dans la BADS) n’empêche pas le patient de réussir la tâche nécessitant d’organiser dans l’ordre les séquences d’images de l’histoire (TDE). La charge exécutive (i.e la planification) de cette tâche n’empêche pas à GT de réussir. Ces résultats mettent donc en évidence qu’un déficit de planification n’empêche pas d’avoir des performances satisfaisantes aux tâches de TDE.

Ainsi, les conclusions de ces études montrent une indépendance entre les deux processus. Plus précisément, les sujets ayant des problèmes exécutifs peuvent réussir les tâches de TDE et

(13)

7

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

inversement. Cependant, le consensus n’est pourtant pas établi puisque d’autres recherches prouvent le contraire.

3.2 Une dépendance entre théorie de l’esprit et fonctions exécutives

La TDE n’est pas une composante unique. Elle présuppose l’intégration d’autres fonctions exécutives de bas et de haut niveau pour le traitement des diverses informations (Moreau &

Champagne-Lavau, 2014).

Chez l’adulte, une étude effectuée par German et Hehman (2006) a montré une relation entre les performances de TDE et les performances dans les tâches évaluant les FE (les auteurs ont augmenté la demande de capacité exécutive des tâches de TDE).

Un article reprend les conclusions de 24 études effectuées sur des patients atteints de pathologies neurologiques acquises, montrant que ces deux processus sont soit touchés, soit préservés, quelle que soit l’étiologie de leur maladie ou bien la zone de la lésion. Dans cette méta- analyse, ils n’ont pas réussi à mettre en évidence des sous processus exécutifs (déplacement, mise à jour, inhibition) responsables de la TDE. (Aboulafia-Brakha, Christe, Martory & Annoni, 2011).

La proposition théorique de Samson (2012) émet un postulat : la TDE est multimodale c'est-à- dire qu’elle a besoin de certaines fonctions cognitives pour pouvoir être efficiente. Afin d’avoir une TDE opérante, le modèle postule la nécessité de quatre processus : l’inhibition, l’orientation de son attention, la représentation mentale temporaire du schéma d’action et l’utilisation des savoirs sémantiques. Ce schéma laisse à penser que la TDE et les FE sont liées. En revanche, il est à noter que ce modèle n’évoque aucunement les processus de planification.

Illustration 3 : Modèle illustrant les composantes de bases impliquées dans la TDE (Samson, 2012)

(14)

8

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Hughes et Russell en 1993, quant à eux, ont postulé auprès d’une population autistique que le développement des FE permettait une efficience de la TDE. Ces auteurs pensent que les tâches de TDE incluent des capacités exécutives. Ils expliquent que les tâches de TDE exigent d’effectuer un plan en plusieurs étapes pour pouvoir comprendre la situation : premièrement, il faut se référer à l’emplacement initial de l’objet, attirer le personnage à cet endroit et obtenir un but au niveau d’un autre emplacement.

En 2007, une étude effectuée chez 30 enfants atteints d’autisme et 40 sujets contrôles, montre des corrélations entre les résultats aux tâches de TDE (fausses croyances) et les tâches exécutives évaluant la planification (Tour de Londres, la tâche Mazes), la flexibilité mentale et l’inhibition (Pellicano, 2007).

D’autres auteurs considèrent que la TDE repose sur la déduction logique qui servirait aussi lors de tâches exécutives (Leslie, Friedman & German, 2004).

Plus récemment, une étude a été effectuée prouvant un lien plus précis entre TDE et planification dans la schizophrénie (pathologie psychiatrique) mais il est précisé que le design de la tâche peut provoquer un déficit de TDE qui n’en est pas un (Brüne, Schaub, Juckel, & Langdon, 2011). Dans cette étude, le fonctionnement exécutif a été évalué par le WCST (Wisconsin Card Sorting Test) évaluant la flexibilité mentale. Pour évaluer la planification, le test de cartographie du zoo a été utilisé. Concernant la TDE, une tâche non verbale de séquençage d’images à été utilisée (TOM-PST) et une tâche plus complexe d’attribution d’état mental. Les résultats ont montré que l’attribution de l’état mental (tâche non verbale) a été significativement expliquée par la planification exécutive.

La plupart des études montre que l’inhibition et la flexibilité mentale sont les principaux processus exécutifs en jeu dans la TDE (Samson, Apperly, Kathirgamnathan & Humphreys, 2005 ; Champagne-Lavau, 2002) mais grâce aux études précédemment décrites nous voyons qu’il est possible que ce ne soient pas les seuls processus impliqués : en effet, selon certains auteurs les autres processus exécutifs qui interviendraient dans la TDE sont moins clairs et difficiles à mettre en lien (Moreau & Champagne-Lavau, 2014).

(15)

9

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Afin de faire la transition, il est intéressant d’évoquer l’étude de Sandoz, Démonet & Fossard (2014) montrant un lien entre FE (inhibition et capacités de raisonnement) et TDE chez des patients atteints de la MA. En revanche, la planification n’est pas évoquée.

4. La maladie d’Alzheimer : un lien éventuel entre un trouble de planification et de théorie de l’esprit ?

Selon les classifications internationales, telles que le DSM-V (2013), la maladie d’Alzheimer est caractérisée par un trouble cognitif léger (au stade initial) ou majeur (au stade final) qui s’illustre par une altération progressive de la mémoire (APA, 2013). C’est une maladie corticale se caractérisant par une dégradation des fonctions cognitives (Adam & Colette, 2007). Au fil du temps, les symptômes cognitifs et comportementaux vont s’accentuer. La Haute Autorité de Santé (2011) considère cette pathologie comme « neurodégénérative d’évolution progressive ». Nous pouvons considérer cette pathologie comme un problème de santé publique puisqu’elle concerne plus de 60 % des pathologies neurodégénératives (OMS & ADI, 2012).

Cette maladie débute par l’accumulation de plaques séniles autour des neurones et une agrégation anormale de protéine Tau provoquant une dégénérescence neurofibrillaire et une atrophie cérébrale progressant au fil de l’évolution de la pathologie. Au stade final, nous pouvons observer à l’imagerie une atrophie-sous-corticale. Il existe de nombreux facteurs de risques (âge, sexe, antécédents familiaux de démence ou de traumatisme crânien, niveau socioculturel etc.). Il est à noter que l’origine de la maladie est encore méconnue. (Gil, 2014).

Les troubles de la mémoire sont prédominants dans la maladie d’Alzheimer. Des auteurs suggèrent que les troubles suivants les difficultés de mémoire sont les altérations exécutives (Perry

& Hodges, 1999). Aux difficultés cognitifs, s’ajoutent par la suite, les troubles du comportement : David, en 2014, explique que les troubles psychologiques et comportementaux se majorent en fonction de l’avancée de la maladie, ce qui accentue la perte de l’indépendance. Gregory et Hogdes (1996) observent chez les patients atteints de cette pathologie, un manque d’implication dans les relations sociales et un raisonnement non opérant dans la perspective de l’autre.

(16)

10

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

4.1 La maladie d’Alzheimer et la théorie de l’esprit

Des études ont mis en évidence des déficits de TDE présents chez les sujets atteints de cette pathologie bien qu’il soit important de noter que ces résultats sont hétérogènes (Fernandez-Duque, Baird & Black, 2009 ; Zaitchik, Koff, Brownell, Winner & Albert, 2006 ; Gregory et al., 2002).

Dans l’étude de Fernandez-Duque et al. (2009), des tâches de fausses croyances ont été exploitées pour évaluer la TDE. Les patients atteints de MA ont un déficit de TDE de second d’ordre. En revanche, ils réalisent parfaitement les tâches impliquant la TDE de premier ordre.

Zaitchik et al. (2006) ont comparé 20 patients atteints de la MA du stade léger à modéré et 20 sujets sains. Les patients sont âgés de 69 à 94 ans. Cette étude comprend une tâche de TDE faisant l’interface entre l’apparence et la réalité d’un objet, une tâche de fausse croyance comportant une boîte avec un contenu, une tâche de fausse croyance sous forme de récit et d’illustrations. De plus, les auteurs ont choisi d’utiliser le MMS, une figure à copier et le test des similitudes (test présent dans la WAIS IV). Les résultats ont montré une préservation de la TDE de premier ordre, en revanche la TDE de second ordre est encore une fois altérée. Les deux premières tâches de TDE sont efficientes alors que la troisième ait échouée. Les auteurs expliquent cet échec en termes de déficits cognitifs. Pour eux, les difficultés sont davantage liées à la mémoire et à la capacité de conceptualiser. De plus, ils ont démontré que les tâches altérées sont généralement des tâches de TDE comportant des textes longs. Cette conclusion apporte un biais aux tâches de TDE utilisées aujourd’hui. Gregory et al (2002) mettent en évidence les mêmes conclusions pour les patients atteints de cette maladie. Seules les tâches nécessitant une activation importante de la mémoire de travail sont altérées (c'est-à-dire celles de second ordre). Les altérations observées aux différentes tâches sont dites échouées en raison d’un déficit cognitif global.

En neuro-imagerie, des travaux réalisés par Laisney, Bon, Guiziou (2013) ont montré que les lésions cérébrales de la MA touchent des régions corticales impliquées dans la TDE : cortex préfrontal, cortex préfrontal ventro médian, le cortex cingulaire postérieur et la jonction temporale.

Les données neuroanatomiques renforcent les conclusions des études précédentes : la TDE est atteinte dans la MA. Ainsi, ces résultats suggèrent que la TDE est perturbée au cours de cette pathologie. De plus, c’est une des premières études qui constate une altération de la TDE cognitive de premier ordre. Ces auteurs ont montré une altération dans toutes les tâches de TDE. Les performances déficitaires aux tâches de TDE affectives seraient essentiellement dues à des problèmes au niveau de la mémoire à court terme. En d’autres termes, l’échec serait en partie lié à

(17)

11

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

la sévérité de la maladie. En revanche, Gilles (2015), a montré un échec aussi bien en TDE cognitive qu’affective chez des patients se trouvant au stade léger de la MA.

Ainsi, les déficits de TDE sont présents chez les patients atteints de MA mais les résultats sont dichotomiques. Les résultats comportent des biais importants : les tâches actuellement utilisées peuvent comporter une charge considérable de mémoire de travail ou de capacités langagières (Sandoz, Démonet & Fossard, 2014).

4.2 La maladie d’Alzheimer et la planification

Les patients atteints de cette pathologie ont aussi des déficits des FE (Guichart-Gomez &

Hahn, 2016 ; Swanberg, Tractenberg, Mohs, Thal & Cummings, 2004 ; Perry & Hodges, 1999) et notamment une altération de la planification (Rainville, Lepage, Gauthier, Kergoat & Belleville, 2012 ; Bherer, Belleville & Hudon, 2004 ; Rainville, Amieva, Lafont, Dartigues, Orgogozo, Fabrigoule, 2002).

Une étude a été menée auprès de 17 patients atteints de la MA à un stade précoce et modéré et chez 17 personnes contrôles. Les deux groupes sont appariés selon l’âge et le sexe. L’objectif est d’évaluer leur capacité de planification. La tour de Londres a été administrée aux différents sujets.

Les résultats ont montré que les patients atteints de la MA présentaient des performances déficitaires par rapport aux sujets contrôles (Rainville, Amieva, Dartigues, Orgogozo & Fabrigoule, 2002). Il s’avère que ce trouble est présent chez la majorité des patients présentant un MCI (mild cognitive impairment) (Rainville, Lepage, Gauthier, Kergoat & Belleville, 2012).

Lors d’une épreuve dite « écologique », notamment en utilisant le test du zoo (test intégré dans la BADS), les patients atteints de cette pathologie sont significativement moins performants en terme de temps, de score et d’erreurs que les sujets contrôles (Allain et al., 2007). Autrement dit, la MA entraînerait des difficultés lors de la planification, l’organisation et l’enchaînement des diverses tâches ainsi qu’une difficulté à raisonner sur les divers éléments abstraits (Auriacombe &

Orgogozo, 2004).

Ainsi, la planification semble être un concept peu étudié dans la littérature et pourtant ce trouble semble apparaître de manière précoce dans ce type de maladie neurodégénérative.

(18)

12

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

4.3 Le lien entre théorie de l’esprit et planification dans cette pathologie

A notre connaissance, aucune étude spécifiant un lien potentiel entre planification et TDE dans la MA n’a été réalisée. Aboulafia-Brakha et al. (2011) reprennent les conclusions de 24 études effectuées sur des patients atteints de pathologies neurologiques acquises, montrant que ces deux processus sont soit touchés soit préservés quelle que soit l’étiologie de leur maladie ou bien la zone de la lésion. Dans cette méta-analyse, les chercheurs n’ont pas mis en évidence les sous processus exécutifs (déplacement, mise à jour, inhibition) comme responsables de la TDE. En revanche, cela suggère qu’une personne atteinte de la MA par exemple (pathologie neurologique acquise) aura probablement un déficit de TDE et de planification ou bien une préservation des deux processus.

Dans cette étude, les auteurs recommandent aux futures recherches de spécifier les aspects exécutifs en lien avec la TDE.

Sandoz, Démonet & Fossard (2014) mettent en lumière un lien entre FE (inhibition et capacités de raisonnement) et TDE chez des patients atteints de la MA mais ils n’évoquent pas la planification. Les études intègrent peu l’aspect de planification pourtant il a été prouvé que l’échec au niveau d’une tâche d’attribution de l’état mental (Brunet, Sarfarti, Hardy-Bayle, 2003) peut être significativement expliqué par un déficit de planification exécutive (Brüne, Schaub, Juckel, &

Langdon, 2011).

Aussi, d’autres études démontrent que la planification peut être en lien avec la TDE (Hughes &

Russell, 1993 ; Pellicano, 2007). Selon ces dernières, si le sujet présente un déficit de planification, sa performance en TDE sera affectée par ce déficit puisque les tâches utilisées actuellement font appel à cette composante. Le design de la tâche pourrait alors avoir un impact sur les résultats obtenus par les sujets.

Par conséquent, une interrogation s’impose à nous : si les tâches font appel à la composante

« planification », ces épreuves évaluent-elles vraiment la TDE ?

A présent, il est admis dans la littérature que les tâches de théorie de l’esprit sont critiquables en raison de l’absence de l’étude du comportement, d’interaction sociale avec autrui : en d’autres termes, ces épreuves ne permettent pas d’observer réellement l’attitude du patient en situation

« réelle » d’interaction. Les différents tests neuropsychologiques évaluant la TDE ont bien entendu pour mérite d’exister mais les situations naturelles de communication sont restreintes voire inexistantes (Sanna & Blanc, 2018 ; Laval, 2016 ; Besnard, 2009). Il est possible qu’en essayant d’évaluer la TDE avec les tâches les plus répandues dans la pratique clinique (Reading the mind in

(19)

13

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

the eyes, théorie de l’esprit, attribution d’intentions, la tâche de Yoni etc.) nous évaluions probablement plus spécifiquement les FE ou d’autres domaines cognitifs (Brüne, Schaub, Juckel, &

Langdon, 2011). Ces suppositions pourraient nous laisser croire qu’un déficit de TDE ne reflète pas nécessairement un problème au niveau des interactions sociales mais plutôt au niveau des FE.

Actuellement, les recherches tentent de proposer des épreuves beaucoup plus « écologiques » en créant des outils informatiques se rapprochant de la réalité quotidienne en variant les différents contextes (Laval, 2016). Le design des tâches de TDE semble encore une fois poser problème.

Ainsi, il existe une dissociation dans les résultats des recherches évoquant des liens entre FE et TDE. D’un point de vue quantitatif, un nombre important de travaux suggère un lien existant entre ces deux processus. La problématique de ces différentes études, est qu’il existe une réelle difficulté à dégager la nature des processus exécutifs qui font parties de la TDE. Cette distinction n’est pas facilitée par la diversité des tâches utilisées dans les diverses études précédemment citées. De plus, les épreuves utilisées actuellement sont très critiquables et nous ne sommes pas certains d’évaluer réellement la théorie de l’esprit. Selon les données de la littérature, la planification et la TDE sont altérées dans la MA mais aucune étude n’a tenté d’émettre un lien entre ces deux processus dans cette pathologie neurodégénérative. Compte-tenu des différentes données que nous avons à notre disposition, nous pouvons nous demander si les liens entre planification et théorie de l’esprit ne sont pas expliqués seulement par le type de tâche (i.e. le design) actuellement utilisé c'est-à-dire « non interactionniste ».

 Problématique

La question des troubles de la cognition sociale dans la MA devient un enjeu crucial pour la recherche. Il est possible que les troubles comportementaux observés dans la MA soient en lien avec la TDE. De ce fait, il nous semble important d’étudier les déficits de TDE et d’expliciter leur lien avec les autres fonctions exécutives et plus particulièrement la planification puisque très peu d’études existent à ce sujet. Ainsi, ce mémoire a pour objectif d’être utile dans la pratique clinique concernant le choix des épreuves de théorie de l’esprit dans un bilan neuropsychologique face à un patient atteint de la MA.

Les études évoquant un lien entre théorie de l’esprit et fonctions exécutives sont dichotomiques.

Il est difficile de conclure à un consensus étant donné que les patients ont des pathologies diverses et les tâches administrées sont différentes d’une étude à une autre (Moreau et Champagne-Lavau,

(20)

14

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

2014 ; Pellicano, 2007 ; German & Hehman, 2006 ; Bird, Castelli, Malik, Frith & Hussain, 2004 ; Leslie, Friedman & German, 2004 ; Fine, Lumsden & Blair, 2001 ; Tager-Flusberg, Sullivan &

Boshart, 1997). En revanche, chez les patients neurologiques, un consensus semble avoir été établi empiriquement grâce à une méta-analyse de 24 études (Aboulafia-Brakha, Christe, Martory &

Annoni, 2011) : lorsqu’une épreuve évaluant la TDE est touchée, il s’avère que les tâches évaluant les FE sont elles aussi touchées et inversement. Ces diverses études évoquent essentiellement le lien entre les processus de flexibilité mentale, d’inhibition et de TDE.

Cependant, différentes recherches traitent du lien entre planification et TDE (Brüne, Schaub, Juckel, & Langdon, 2011 ; Pellicano, 2007 ; Bird, Castelli, Malik, Frith & Husain, 2004). L’étude réalisée par Pellicano montre un lien entre les tâches de TDE et la planification chez des enfants atteints d’autismes.L’étude effectuée en 2011 (Brüne et al., 2011) a été réalisée auprès des patients schizophrènes. Un lien existe entre les deux processus, mais ce résultat est controversé en raison du design de la tâche : ils utilisent une tâche de séquençage d’images pour évaluer la TDE mais les auteurs supposent l’existence de processus de planification dans cette tâche (Brüne, Schaub, Juckel

& Langdon, 2011).

Les études (Sandoz, Démonet & Fossard, 2014 ; Aboulafia-Brakha, Christe, Martory & Annoni, 2011 ; Pellicano, 2007 ; German & Hehman, 2006 ; Leslie, Friedman & German, 2004 ; Hughes &

Russell, 1993), dans la plupart des cas, montrent un lien entre TDE et FE, en revanche la planification est très peu étudiée et prise en compte dans les diverses études (surtout dans la MA).

Nous avons pensé qu’il était pertinent d’étudier le lien entre TDE et les processus de planification dans la maladie d’Alzheimer, puisque ces deux compétences sont altérées dans cette pathologie (Guichart-Gomez & Hahn, 2016 ; Fernandez-Duque, Baird & Black, 2009 ; Zaitchik, Koff, Brownell, Winner & Albert, 2006 ; Swanberg, Tractenberg, Mohs, Thal & Cummings, 2004 ; Gregory et al., 2002 ; Perry & Hodges, 1999). Compte-tenus des divers éléments exposés, nous arrivons à cette problématique :

Un déficit de TDE peut-il être la conséquence exclusive d'un trouble exécutif ?

Dans un premier temps, nous allons déterminer les performances chez les sujets sains et les patients atteints de MA à travers différentes tâches : test des faux pas (Baron-Cohen, O’Riordan, Jones, Stone & Plaisted, 1999 traduit dans une version adulte par Boutantin, Moroni, Demeneix,

(21)

15

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Marchand, Lys, Pasquier & Delbeuck, 2010), la tâche d’attribution des intentions (Brunet, Sarfarti

& Hardy-Bayle, 2003) et les performances à la tour de Londres (Shallice, 1982). Puis, secondairement nous regarderons s’il existe des corrélations entre les différentes tâches.

 Hypothèses

 Hypothèses générales

- (1) : Nous nous attendons à observer pour les patients atteints de MA des performances inférieures par rapport aux sujets contrôles dans les deux tâches de TDE (Fernandez-Duque, Baird & Black, 2009 ; Zaitchik, Koff, Brownell, Winner & Albert, 2006 ; Gregory et al., 2002).

- (2) : En nous appuyant sur les différents travaux précédemment cités, nous nous attendons à observer un déficit de planification dès le stade léger pour les personnes atteintes de la MA contrairement au contrôle (Rainville et al., 2012).

- (3) : Nous pensons constater un lien entre les capacités de planification et la tâche de TDE impliquant la planification (tâche d’attribution d’intentions) chez les patients atteint de la MA (Aboulafia-Brakha et al., 2011,Brüne et al.,2011 ; Pellicano, 2007).

 Hypothèses opérationnelles

- (1) : Notre première hypothèse suggère que les patients atteints de la MA présenterons un score plus faible que les sujets sains aux épreuves de TDE : les faux pas (Baron-Cohen, O’Riordan, Jones, Stone & Plaisted, 1999 traduit dans une version adulte par Boutantin et al., 2010) et la tâche d’attribution d’intentions (Brunet, Sarfarti & Hardy-Bayle, 2003).

- (2) : Notre deuxième hypothèse évoque l’idée que les patients atteints de la MA auront une performance inférieure à celle des sujets contrôles à la tâche de la Tour de Londres (Shallice, 1982 : version abrégée).

(22)

16

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

- (3) : Notre troisième hypothèse suggère que seul un lien de corrélation pourrait être établi avec la tâche d’attribution d’intentions (versant planification) et la tour de Londres chez les patients atteint de la MA. Il n’y aurait donc pas de corrélation avec les faux pas et les deux autres tâches (Tâche d’attribution d’intentions et Tour de Londres).

II- Méthodologie

1. Participants

Nous avons décidé d’utiliser les critères du diagnostic probable de la MA du NINCDS-ADRDA (McKhann, Drachman, Folstein, Katzman, Price & Stadlan, 1984) (voir Annexe 7). Les onzes personnes atteintes de la MA ont été rencontrées par l’intermédiaire d’un accueil de jour et d’un PASA (Pôle d’Activités et de Soins Adaptés). Cependant, seulement sept personnes ont été inclues dans notre étude afin de répondre correctement aux critères établis. L’échantillon des sujets atteints de la MA se compose de quatre femmes et trois hommes. Les sujets se trouvaient à un stade léger : nous avons contrôlé cet effet grâce à un MMSE (Mini Mental State Examination) (Folstein et al., 1975). Le résultat de ce dernier doit être inférieur ou égal au seuil pathologique correspondant au niveau socioculturel du patient (voir annexe 8) et il doit être supérieur à 20 (HAS, 2008). Les sujets ayant des antécédents de dépression et psychiatriques n’étaient pas intégrés dans l’étude (vérification via le dossier du patient). Les sujets porteurs de troubles sensoriels non corrigés étaient écartés de l’étude (apnée du sommeil, problème d’audition). De plus, les personnes étaient exclues du protocole si elles étaient non francophones, ne sachant ni lire, ni écrire.

Concernant les sujets contrôles, nous avons veillé à ce qu’ils ne présentent aucun antécédent de dépression, de troubles neurologiques ou psychiatriques. Les sujets présentant des troubles sensoriels non corrigés étaient écartés de l’étude. Pour les sujets sains, leur score au MMSE devait être supérieur au score seuil selon le niveau socioculturel (voir annexe 8). Les personnes non francophones, ne sachant ni lire, ni écrire ont été exclues de l’expérience. Nous avons au total vingt participants : onze hommes et neuf femmes.

D’un point de vue éthique, chaque participant a signé un formulaire de consentement (voir annexe 9).

Le tableau 1 présente les données socio-démographiques des participants à la recherche ainsi que leurs performances au MMSE. Les données individuelles sont présentées en annexe 1.

(23)

17

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Tableau 1. Données sociodémographiques, scores aux MMSE (Moyennes, Ecarts-Types et Comparaisons statistiques)

Type de données

Sujets Contrôles (N=20) Patients Alzheimer (N=7) Comparaison Au Mann-Whitney Moyenne

(M)

Ecart- Type

(σ)

Médiane Moyenne (M)

Ecart- Type

(σ)

Médiane Valeur U (U)

Valeur P (p)

âge 77.40 7,84 78 83.86 6.543 85 38.00 .080

NS 2.9 0.78 3 3 1 3 66.00 .837

MMSE 28.75 0.91 29 22 1.53 21 140.0 <.001***

NS : Niveau socioculturel ; *seuil significatif p<0.05

2. Protocole expérimental

Avant d’évaluer la TDE et les FE, il est important d’avoir en possession un MMSE datant de moins de 6 mois. Dans le cas contraire, nous avons effectué un MMSE afin de respecter les critères d’inclusion que nous avions définis précédemment et de s’assurer que chaque patient se trouve dans le seuil pathologique par rapport à son niveau socioculturel et que le score de chaque sujet contrôle se trouve au dessus du seuil (Kalafat, Hugonot-Diener & Poitrenaud, 2003) (voir annexe 8).

Pour évaluer la TDE, nous avons choisi le test des faux pas (Baron-Cohen, O’Riordan, Jones, Stone & Plaisted, 1999 traduit dans une version adulte par Boutantin et al., 2010). Ce test présente la notion de faux pas « en situation d’interaction sociale ». En d’autres termes, il s’agit d’une maladresse sociale. La version française est composée de 20 histoires comprenant des scénarios sans faux pas et des histoires avec la présence de faux pas. Afin de s’assurer que le sujet comprend correctement l’histoire, des questions contrôles de compréhension ont été intégrées. Ce test évalue les deux composantes de la TDE : affective et cognitive (voir annexe 8).

Ensuite, nous avons utilisé une tâche de TDE avec un versant de planification : la tâche d’attribution d’intentions (Brunet, Sarfarti & Hardy-Bayle, 2003). Au total, il y a 28 bandes dessinées. En haut de la feuille, il y a trois images racontant une histoire et ensuite trois alternatives

(24)

18

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

de réponses sont proposées afin de choisir la fin logique de l’histoire (voir annexe 8). Les feuilles ont été imprimées en 3D pour obtenir de meilleurs résultats (conseils des auteurs).

La tour de Londres est une tâche qui permet entre autre d’évaluer la planification (Shallice, 1982 : version abrégée). Elle contraint le sujet à se placer dans une situation non routinière avec des niveaux de complexité divers. Pour administrer cette tâche, il faut deux supports en bois (un pour l’expérimentateur et un pour le sujet) avec trois tiges de longueurs diverses et trois perles de couleurs différentes (rouge, jaune et bleu). La petite tige ne peut recevoir qu’une perle, celle du milieu peut en recevoir deux et la dernière (la plus longue) peut en accueillir trois. Le but étant de reproduire la situation observée sur le support dans un nombre minimum de coups. (Shallice, 1982 : version abrégée). Lors de la passation, nous avons calculé le nombre de déplacements. Il était nécessaire de calculer le temps de latence : en d’autres termes, le temps que le patient mettait pour déplacer la première perle. L’expérimentateur devait aussi noter le temps qu’il mettait pour effectuer l’item complet. Dans cette version, il y a plusieurs types de mouvements : neutre, avec incitateur positif et négatif (voir annexe 8). L’incitateur positif permet dès le premier mouvement de placer la perle au bon endroit. L’incitateur négatif signifie que les perles sont disposées d’une certaine manière et le sujet doit s’empêcher de mettre une perle directement à la bonne place car cela « bloquerait la résolution du problème » (Shallice, 1982).

Actuellement, les normes de ces différentes épreuves comportent peu d'effectifs et les tranches d'âges sont très larges. Il est donc préférable de comparer les performances des patients avec les résultats obtenus lors de la passation auprès des sujets contrôles.

3. Procédure

Chaque sujet de l’étude est rencontré dans un endroit calme à leur domicile en ce qui concerne les volontaires sains. Les personnes atteintes de la MA sont vues à l’hôpital (accueil de jour et PASA). La rencontre débute systématiquement par un bref entretien afin d’expliquer en quoi consiste la passation et permettre aux sujets de poser des questions. Pour les personnes contrôles, nous nous renseignons pendant l’entretien, sur les antécédents psychiatriques, neurologiques et dépressifs. Pour les patients, nous avions accès aux dossiers médicaux. Ensuite, un MMSE est effectué. Après, la passation du MMSE, le test de la tour de Londres est proposé aux patients. Enfin, les deux tâches de TDE (faux pas et tâche d’attribution d’intentions) sont administrées aux sujets.

Pour finir, nous avons demandé aux patients s’ils avaient d’éventuelles interrogations.

(25)

19

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

III- Résultats

Le logiciel Jasp a été utilisé pour l’analyse statistique des résultats. Les variables quantitatives ont été mises sous forme de moyenne et d’écart type. Pour l’analyse de nos données, nous avons utilisé des tests non paramétriques afin de comparer les différentes performances. Cette utilisation s’explique par le fait que nos échantillons sont de trop petites tailles pour pouvoir utiliser d’autres tests. Nous avons administré le test U de Mann-Withney pour comparer les moyennes des performances des deux groupes. L’analyse de corrélation a été calculée avec le Rho de Spearman.

Le seuil de significativité a été fixé à p<.05. Les données individuelles sont présentées en annexes (2 et 4).

1. Comparaisons de moyennes

1.1 Comparaisons des performances en théorie de l’esprit (annexe 2)

Notre première hypothèse était que les patients Alzheimer seraient déficitaires dans les tâches de théorie de l’esprit par rapport aux sujets contrôles. Les deux tâches qui ont été proposées sont les faux pas (annexe 2) et la tâche d’attribution d’intentions (annexe 2).

Tableau 2. Comparaison statistique intergroupe des sujets contrôles et des patients Alzheimer à l’épreuve des faux pas

Tâche : Les faux pas

Sujets Contrôles (N=20) Patients Alzheimer (N=7)

Comparaison Au Mann- Whitney

Moyenne (M)

Ecart- Type (σ)

Médiane Moyenne (M)

Ecart- Type

(σ)

Médiane Valeur U (U) Valeur P (p)

Histoire sans faux pas

(sur 20)

18,40 1,789 18 13,14 3,976 14 127,0 0.001***

Histoire avec faux pas (sur 10)

9,30 0,801 9 8,571 1,512 9 85,50 0,371

Explications (sur 60)

50,65 4,891 51 31,00 9,037 27 137 <.001***

(26)

20

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Compréhensio n (sur 40)

38,85 1,137 39 32,71 2,752 34 140,0 <.001***

*seuil significatif p<0.05

Les scores à la tâche des faux pas sont exprimés en nombre de bonnes réponses pour chaque condition. Les patients Alzheimer présentent une performance significativement inférieure par rapport aux sujets contrôles pour la condition des histoires « sans faux pas » avec un score moyen de 13,14 (écart-type : 3,976 ; médiane : 14). On retrouve la même conclusion pour les explications (score moyen : 31 ; écart type : 9,037 ; médiane : 27) ainsi que pour la compréhension (score moyen : 32,71 ; écart-type : 2,752 ; médiane : 34). Ce tableau ci-dessus nous permet de voir que les différences de scores observées sont significatives (histoire sans faux pas : U=127, p = 0,001***;

explications : U =137, p<.001*** ; compréhension : U=140, p<.001***).

En revanche, les données concernant les histoires avec la présence de faux pas ne nous permettent pas de mettre en évidence une différence significative entre les patients Alzheimer et les sujets contrôles (U=85,50 ; p=0,371). Il est à noter d’une manière qualitative que les patients ont tendance à répondre généralement « oui » à la question « est-ce que quelqu’un a fait quelque chose de maladroit ? ». En revanche, ils sont la plupart du temps en incapacité d’expliquer correctement la maladresse. Ils semblent être en difficulté pour discriminer les histoires et semblent être généralement dans une sorte de persévération de l’acquiescement.

(27)

21

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Tableau 3. Comparaison statistique intergroupe des sujets contrôles et des patients Alzheimer à l’épreuve d’attribution d’intentions

Tâche Sujets Contrôles (N=20) Patients Alzheimer (N=7) Comparaison Au Mann- Whitney

Moyenne (M)

Ecart- Type

(σ)

Médiane Moyenne (M)

Ecart- Type

(σ)

Médiane Valeur U (U)

Valeur P (p)

Attribution d’intentions (sur 28)

24.55 3.379 25 17.57 1.988 17 131.0 <.001***

*seuil significatif p<0.05

Les patients Alzheimer ont obtenu des performances inférieures par rapport aux sujets contrôles à la tâche d’attribution d’intentions. En effet, les patients Alzheimer présentent un score moyen de 17,57 (écart type : 1.988 ; médiane : 17) contre 24.55 (écart type : 3.379 ; médiane : 25) pour les sujets contrôles. Le tableau ci-dessus nous permet de voir que les différences de scores observées sont significatives (U=131, p<.001***). Pour visualiser les résultats, les boîtes à moustache se trouvent en annexe (annexe 3).

1.2 Comparaisons des performances à la Tour de Londres (annexe 4)

Notre deuxième hypothèse évoquait l’idée que les patients atteints de la MA auraient une performance inférieure à celle des sujets contrôles à la tâche de la Tour de Londres (Shallice, 1982 : version abrégée).

(28)

22

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

Tableau 4. Comparaison statistique intergroupe des sujets contrôles et des patients Alzheimer à l’épreuve de la Tour de Londres.

Tâche : Tour de Londres

Sujets Contrôles (N=20) Patients Alzheimer (N=7) Comparaison Au Mann- Whitney

Moyenne (M)

Ecart- Type

(σ)

Médiane Moyenne (M)

Ecart- Type

(σ)

Médiane Valeur U (U) Valeur P (p)

Items à 3 déplacements

3,050 0,2236 3 5 3,651 3 42 0,014*

Items à 5 déplacements

(incitateur positif)

6,250 1,209 6 7 1,528 7 48,50 0,231

Items à 5 déplacements

(sans incitateur)

6,450 1,504 6 11,29 4,071 10 7 <.001***

Items à 5 déplacements

(incitateur négatif)

6,550 1,234 6 10,57 2,760 11 10,50 <.001***

*seuil significatif p<0.05

Les scores à la tâche de la Tour de Londres sont exprimés en nombre de déplacements pour chaque condition. Les patients Alzheimer présentent une performance significativement inférieure comparativement aux sujets contrôles pour : les items à trois déplacements avec un score moyen de 5 (écart-type : 3,651 ; médiane : 3), les items à cinq déplacements sans incitateur avec un score moyen de 11,29 (écart type : 4,071 ; médiane : 10). On retrouve la même conclusion pour les items

(29)

23

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

à cinq déplacements avec incitateur négatif (score moyen : 10,57 ; écart type : 2,760 ; médiane : 11). Le tableau ci-dessus nous permet de constater que les différences de scores observées sont significatives (items à trois déplacements : U=42, p = 0,014* ; items à cinq déplacements sans incitateur : U=7, p<.001*** ; items à cinq déplacements avec incitateur négatif : U=10,50, p<.001***). De plus, il est à noter que qualitativement, les patients commettent davantage de ruptures de règle que les sujets contrôles.

En revanche, les performances aux items à cinq déplacements avec incitateur positif ne nous permettent pas de mettre en évidence une différence significative entre les patients Alzheimer et les sujets contrôles (U=48,50 ; p=0,371). Afin d’examiner les résultats, les boîtes à moustache se trouvent en annexe (annexe 5).

2. Analyse des corrélations

Notre troisième hypothèse suggérait que seul un lien de corrélation pourrait être établi avec la tâche d’attribution d’intentions (versant planification) et la tour de Londres. Il n’y aurait donc pas de corrélation avec les faux pas et les deux autres tâches (Tâche d’attribution d’intentions et Tour de Londres) pour les sujets présentant une MA. Nous avons utilisé le rhô de Spearman pour comparer les relations entre les performances des différentes tâches (faux pas, attribution d’intentions et la tour de Londres).

Le tableau (annexe 6) montre que nos données ne nous permettent pas dans la quasi majorité des cas de mettre en évidence une corrélation significative entre les différentes épreuves puisque la p-value est supérieure à 5%.

Dans cette analyse de données, seulement deux corrélations ont été détectées : le score des histoires avec faux pas et les questions pour expliquer l’histoire sont significativement corrélés positivement (r(5)=0.849 ; p=0.016*). De plus, les histoires sans faux pas et les items à 5 déplacements avec incitateur négatif sont corrélés positivement (r(5)=0.761 ; p=0.047*).

IV- Discussion

L’objectif de cette étude était d’étudier la TDE et la planification dans la maladie d’Alzheimer ainsi que les liens qui pouvaient exister entre ces deux fonctions.

(30)

24

Pauline Boué| Etude neuropsychologique des liens entre théorie de l’esprit et planification dans la maladie d’Alzheimer

1. La théorie de l’esprit dans la maladie d’Alzheimer

Notre première hypothèse était que les patients Alzheimer seraient déficitaires dans les tâches de théorie de l’esprit par rapport aux sujets contrôles. Les deux tâches proposées étaient les faux pas et la tâche d’attribution d’intentions.

Notre hypothèse n’est que partiellement validée puisque nos résultats montrent une dichotomie entre les deux tâches : les patients Alzheimer sont déficitaires à la tâche d’attribution d’intentions (tâche avec un versant de planification). En revanche, concernant la tâche des faux pas, les sujets présentant une maladie d’Alzheimer sont moins performants que les personnes contrôles seulement pour les histoires sans faux pas, les questions d’explication et de compréhension : les patients avaient tendance à vouloir « trouver un faux pas » à chaque histoire malgré la répétition des consignes précisant qu’il pouvait y avoir la présence d’une maladresse mais que cette dernière n’était pas présente dans chaque histoire. Ainsi, la détection de maladresses dans les histoires avec faux pas semble sensiblement similaire par rapport à la détection de sujets contrôles.

L’échec des patients à la tâche d’attribution d’intentions est cohérent avec les données de la littérature : les patients atteints de cette pathologie sont censés avoir des déficits de planification dès le stade léger (Rainville, Lepage, Gauthier, Kergoat & Belleville, 2012 ; Bherer, Belleville &

Hudon, 2004) et il s’avère que cette tâche a une composante importante de planification (Brüne, Schaub, Juckel, & Langdon, 2011). A noter tout de même que contrairement à l’étude précédemment cité, nous ne retrouvons pas de lien de corrélation entre la tâche d’attribution d’intentions et la tâche de la Tour de Londres (sans doute en raison d’un nombre de sujets beaucoup moins importants que dans cette étude). A travers ces affirmations, il semble donc logique que ces patients n’obtiennent pas des performances similaires par rapport aux sujets contrôles (Rainville, Amieva, Dartigues, Orgogozo & Fabrigoule, 2002 ; Rainville, Lepage, Gauthier, Kergoat &

Belleville, 2012 ; Auriacombe & Orgogozo, 2004). A notre connaissance, il n’existe pas d’étude utilisant cette tâche avec des patients atteints de maladie d’Alzheimer, nous ne pouvons donc pas comparer les résultats.

La différence significative retrouvée par rapport aux sujets contrôles au niveau des questions de compréhension et d’explication dans la tâche des faux pas est en accord avec les données de la littérature. De fait, cette tâche est cognitivement chargée en mémoire de travail et en langage : il s’avère que les patients atteints de la maladie d’Alzheimer ont des déficits dans ces deux domaines

Références

Documents relatifs

Le tableau clinique (Figure 1) fait apparaître plusieurs phases du développement de la démence de type Alzheimer, mais il faut dire qu’il y a par- fois un peu d’abus dans le

C’est ainsi que le concept de démence sénile commence à émerger, dans un premier temps comme diagnostic différentiel d’au- tres troubles mentaux, puis sa définition s'affinera au

• Troubles mnésiques de type « hippocampique » =profil typique du patient avec maladie d’Alzheimer (80% des patients):.. - Faiblesse du rappel en mémoire à

(1) Dans la très grande majorité des autres cas, &#34;le diagnostic identifie la maladie d'Alzheimer, mais ne parvient pas à établir l'existence d'une cause additionnelle

45% de réduction de l’atrophie hippocamique après un an de traitement par Donepezil dans la MA

IDE B : Oui, il faut vraiment être à l’écoute, c’est vrai que c’est important aussi de connaître les antécédents, l’histoire de vie parce que l’on

Cependant, comme la corrélation entre les TUT et l’accélération atteint un niveau de significativité marginale de .054, nous pouvons supposer qu’avec davantage

MAIA du Grand Ajaccio Conseil départemental de Corse du Sud Hôtel du département BP 414 - 20183 AJACCIO MAIA Grand Sud.. (Canton Valinco, Grand Sud