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Article pp.191-193 du Vol.4 n°3 (2014)

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CAS CLINIQUE /CASE REPORT

Piqûre de scorpion Isometrus maculatus à la Réunion

Isometrus maculatusscorpion sting in Reunion Island

N. Delbarre · L. de Haro

Reçu le 17 septembre 2013 ; accepté le 18 décembre 2013

© SFMU et Springer-Verlag France 2014

Introduction

Les scorpions appartiennent à un ordre d’arthropodes de la classe des arachnides. Ils sont facilement différenciables de leurs cousines les araignées par leurs pinces et l’aiguil- lon venimeux qu’ils portent au bout de leur telson (extré- mité du métasoma que l’on appelle trivialement queue).

Les piqûres de scorpions peuvent constituer un sérieux problème de santé publique dans certains pays [1,2], et cela à cause de la toxicité importante du venin de quelques espèces ou par la difficulté d’accès aux soins dans certai- nes régions du monde. Plus d’un million de personnes seraient piquées chaque année par un scorpion au niveau mondial ; le nombre de décès annuel s’élevant quant à lui à un peu plus de 3 000 [3]. Toutefois, la majorité des scorpions comportent des taxons dangereux uniquement pour leurs proies, leurs piqûres étant quasi-inoffensives pour l’Homme [4,5].

En France métropolitaine, on recense cinq espèces autochtones de scorpions [6] qui sont Buthus occitanus, Euscorpius flavicaudis, Euscorpius carpathicus, Euscor- pius italicus et Belisarius xambeui. Les piqûres par ces espèces sont peu inquiétantes et n’entraînent générale- ment que des signes locaux modérés [6]. En Outre-Mer, la Guyane française est le département le plus concerné par les piqûres de scorpions, avec une incidence de 32 +/- 8 cas par an pour les seules urgences de Cayenne et des envenimations variant du bénin au sévère [7]. Dans l’Océan Indien, peu d’espèces sont présentes dans les îles françaises et leurs toxicités ont été peu étudiées. Les auteurs présen- tent une observation d’une piqûre d’Isometrus Maculatus sur l’île de la Réunion où les envenimations scorpioniques sont exceptionnelles.

Observation

Il s’agit d’un enfant de 5 ans sans antécédents, qui a été piqué au niveau de la main dans le jardin familial, en début de soirée dans une zone sans soleil, aux alentours de Saint-Denis. La douleur a été immédiate et intense et l’enfant a crié, ce qui a alerté les parents qui sont venus voir ce qui se passait. Le garçon a été amené immédiatement chez un médecin généra- liste. Au cabinet médical, 20 min après la piqûre, la douleur était toujours présente mais restait très localisée. Le point de piqûre était visible mais n’était pas inflammatoire. La fré- quence cardiaque et la pression artérielle étaient normales.

Un simple traitement par antalgique (paracétamol) fut prescrit et les algies ont disparu en moins de 6 h. Les parents ont pu voir le scorpion dont l’aspect ne laisse aucun doute sur l’es- pèce : un scorpion beige foncé, maculé de multiples taches plus foncées et ayant un profil filiforme (pinces et queue très fines et allongées sur plus de 5 cm). Cette description corres- pond à un scorpion de la famille des Buthidés qui s’appelle Isometrus maculatus(Fig. 1).

Discussion

Les scorpions sont des arachnides présents dans toutes les régions chaudes ou tempérées du monde. Moins de 1 500 espèces réparties en 18 familles sont décrites, ce qui est très peu pour des arthropodes. Une des caractéristiques de ce groupe est un taux d’endémisme extrêmement élevé avec très peu d’espèces possédant une grande aire de répartition.

La piqûre est un phénomène volontaire qui n’est pas toujours suivie de l’inoculation de venin (beaucoup de piqûres sèches chez certaines espèces). On considère classiquement que moins de 30 espèces représentent un réel danger pour les humains. En dehors du cas particulier du scorpion iranien Hemiscorpius lepturusappartenant à la famille des Scorpio- nidés, toutes les espèces potentiellement dangereuses pour l’homme appartiennent à la famille des Buthidés. Les scor- pions buthidés responsables d’envenimations graves appar- tiennent à huit genres, six dans l’ancien monde et deux dans

N. Delbarre (*) · L. de Haro

Centre antipoison, hôpital Sainte-Marguerite, 270, boulevard Sainte Marguerite,

F-13009 Marseille, France e-mail : nicolas.delbarre@ap-hm.fr Ann. Fr. Med. Urgence (2014) 4:191-193 DOI 10.1007/s13341-014-0408-9

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le nouveau monde. Pour l’ancien monde, le genreAndrocto- nus comprend des espèces redoutables telles Androctonus australisd’Algérie jusqu’en Égypte,Androctonus mauretani- cusdu Maroc ouAndroctonus hoggarensisdu Niger. Lors- qu’ils sont présents, ces scorpions sont impliqués dans une morbidité importante et une mortalité élevée. Le genreHot- tenta a été récemment remanié et comprend désormais les espèces Hottenta tamulus (le fameux scorpion rouge des Indes) et Hottenta franzwerneri du Maroc. La première espèce est en cause dans la grande majorité des envenima- tions scorpioniques graves dans le subcontinent indien. Le genre monospécifiqueLeiurusne comprend queLeirus quin- questriatusde Mauritanie jusqu’en Iraq, scorpion à juste titre considéré comme une des plus dangereuses espèces pour l’Homme. Les genres Parabuthus(Afrique australe),Meso- buthus(Moyen Orient) etButhus(Afrique du Nord et Sahel) comprennent de même des espèces susceptibles d’entraîner des envenimations humaines graves. Pour le nouveau monde, les genres Centruroides (États-Unis, Amérique centrale) et Tityus(Caraïbes, Amérique du sud, dont le redoutableTityus serrulatusdu Brésil) sont les seuls impliqués dans des enve- nimations par scorpion potentiellement mortelles [4]. Dans certains pays (Tunisie, Mexique, Brésil…), des antivenins de fabrication locale sont utilisés sans avoir prouvé leur effi- cacité. L’intérêt de ces antidotes est sujet à discussion, avec certaines équipes de réanimateurs qui soulignent que le pro- nostic d’un scorpionisme grave est étroitement lié à la qualité de la prise en charge en réanimation et non à l’utilisation des antivenins. De plus et contrairement aux toxines de serpents, il a été démontré que les anticorps spécifiques ne peuvent neutraliser les toxines de scorpions fixées sur leurs récepteurs cellulaires, ce qui paraît être une limitation supplémentaire à l’efficacité des antivenins antiscorpioniques [2-4].

Isometrus maculatus est un arthropode assez fréquent sur l’île de la Réunion et peut se rencontrer dans des zones

urbanisées ou agricoles jusqu’à une altitude de 400 mètres.

L’aspect filiforme de ce scorpion ne permet aucune confu- sion possible avec l’autre espèce présente sur l’île appelée le scorpion nain des bois (Liocheles australasiae) qui est noir, petit et trapu et totalement inoffensif pour les humains. La toxicité d’Isometrus maculatus a été peu étudiée, même si son venin a déjà été analysé [8,9] : présence de neurotoxines de typeβdont la toxicité semble limitée chez les mammifè- res. Du point de vue clinique, des médecins Singapouriens ont réalisé une étude rétrospective sur les piqûres de scor- pions traitées aux urgences de leur pays entre janvier 2004 et décembre 2009 [10]. Sur les treize cas de piqûres qu’ils ont pu recenser, trois ont été clairement attribués àIsometrus maculatus, après identification de l’espèce par le « Venom and Toxin Research Center » : pour ces trois cas (trois hom- mes de 20, 37 et 51 ans), le tableau clinique a été limité à une douleur locale, un œdème non extensif et des paresthésies/

dysesthésies au niveau de la zone de pénétration du venin.

La symptomatologie peu inquiétante a régressé entre 8 h et 3 jours avec comme seul traitement des antalgiques.

Même si Isometrus maculatus appartient à la famille dangereuse des Buthidés, ses piqûres restent donc bénignes.

Son venin est peu toxique pour les humains chez lesquels une piqûre n’induit qu’un syndrome douloureux local pou- vant perdurer jusqu’à trois jours si aucun antalgique n’est administré. Il n’y a pas de symptômes généraux lors de telles envenimations en dehors de ceux générés par l’an- goisse du patient. Ces données sont corroborées par l’article singapourien et par notre observation. Les professionnels de santé de l’île de la Réunion doivent donc être rassurés en cas de prise en charge d’une nouvelle envenimation par ce scorpion.

Conflit d’intérêt : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt.

Fig. 1 Isometrus maculatus, scorpion fréquent autour de lOcéan Indien et présent sur lîle de la Réunion

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Références

1. Dehghani R, Fathi B (2012) Scorpion sting in Iran: a review.

Toxicon 60:919–33

2. Goyffon M, Billiald P (2007) Envenomations: Scorpionism in Africa. Med Trop 67:43946

3. Chippaux JP, Goyffon M (2008) Epidemiology of scorpionism: a global appraisal. Acta Trop 107:719

4. de Haro L (2009) Animaux venimeux terrestres. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Pathologie professionnelle et de lenviron- nement, 16-078-A-10

5. Cavari Y, Lazar I, Shelef I, et al (2013) Lethal brain edema, shock and coagulopathy after scorpion envenomation. Wilderness Environ Med 24:237

6. de Haro L, Jouglard J, David JM (1996) Piqûres par scorpions dans le sud de la France : expérience du centre anti-poisons de Marseille. Presse Med 25:600

7. Benmosbah M, Guegueniat P, Mayence C, et al (2013) Epidemio- logical and clinical study on scorpionism in French Guiana. Toxi- con 73C:5662

8. Miyashita M, Sakai A, Matsushita N, et al (2010) A novel amphi- pathic linear peptide with both insect toxicity and antimicrobial activity from the venom of the scorpion Isometrus maculatus.

Biosci Biotechnol Biochem 74:3649

9. Ichiki Y, Kawachi T, Miyashita M, et al (2012) Isolation and charac- terization of a novel non-selectiveβ-toxin from the venom of the scor- pionIsometrus maculatus. Biosci Biotechnol Biochem 76:208992 10. Tan HH, Mong R (2013) Scorpion stings presenting to an emer-

gency department in Singapore with special reference toIsome- trus maculatus. Wilderness Environ Med 24:42-7

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