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Cancers urologiques - Partie 1

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106 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016

Cancers urologiques

Urothelial cancers

P. Beuzeboc*

*

Institut Curie, Paris.

Cancers de la prostate

Biologie

Mutations “ciblables” dans les cancers de la prostate métastatiques

Fruit de la collaboration entre de grandes institu- tions américaines et européennes, un groupe de chercheurs international (1) a analysé, par séquen- çage systémique de l’exome entier et du trans- criptome, les échantillons de 150 patients atteints d’un cancer de la prostate résistant à la castration métastatique (CPRCm). Près de 90 % des hommes testés présentaient au moins 1 mutation permet- tant de prédire une réponse ou une résistance à des thérapies connues. Des mutations au niveau du récepteur des androgènes (RA) ont été notées chez près du tiers des patients (63 %). Les autres anomalies génomiques retrouvées le plus fréquem- ment concernaient les gènes de fusion ETS, TP53 et PTEN (40 à 60 % des cas) avec, par rapport aux cancers de la prostate primaires, un enrichissement des altérations du RA et de TP53. De nouvelles alté- rations ont été identifiées : PI3K3CA/B, R-spondin, BRAF/RAF1, APC, β-caténine, ZBTB16/PLZF. Mais la découverte sans doute la plus importante est le fait, encore une fois par rapport aux tumeurs primaires, que de nombreux patients (23 %) présentaient des mutations des gènes de la réparation de l’ADN, comme BRCA2, BRCA1 et ATM, ouvrant des pers- pectives thérapeutiques particulières. Ces patients pourraient répondre à des inhibiteurs de PARP, comme l’olaparib (2).

Gènes de fusion TMPRSS2-ERG et réponse à une privation androgénique dans les cancers de la prostate

La fusion TMPRSS2-ERG serait responsable, sous l’influence d’une stimulation androgénique, de la sur expression de facteurs de transcription, qui pour- rait conduire à une reprogrammation épigénétique, une signalisation de WNT, et une down-regulation des voies de l’apoptose. De ce fait, la présence de

gènes de fusion fait envisager la possibilité qu’elle puisse être un facteur d’une hormonosensibilité plus particulière, question posée par une étude portant sur 239 patients traités par hormonothérapie (HT) [3].

La moitié étaient atteints d’une tumeur de stade T3 ou plus et avaient un score de Gleason de 8-10 au diagnostic. Sur un suivi médian de 10,2 ans, les résultats, non statistiquement significatifs, laissent envisager que la présence de gènes de fusion est associée à un risque de mortalité diminué chez les patients traités par orchidectomie. Ces données sont trop limitées pour avoir un niveau de preuve suffisant. Il faudra attendre les résultats de larges cohortes prospectives pour confirmer le fait que les cas de tumeurs avec gène de fusion TMPRSS2-ERG puissent plus particulièrement bénéficier de l’HT en phase néo-adjuvante, adjuvante ou métastatique.

Altérations du nombre de copies de l’ADN et amplification de c-MYC dans les cancers de la prostate chez les hommes à BRCA2 muté Les hommes ayant une mutation germinale de BRCA2 présentent un risque accru de cancer de la prostate (risque multiplié par 8,6 avant 65 ans) [4].

Les cancers de la prostate, chez ces patients, ont un phénotype plus agressif et un plus mauvais pronostic que les formes sporadiques. Une étude anglo- ibérique (5) a évalué la fréquence et la nature des anomalies du nombre de copies de l’ADN (Copy Number Alterations [CNA]) au niveau de l’ADN extrait de 9 cancers prostatiques associés à une mutation de BRCA2 et de 16 cancers sporadiques.

Il a été retrouvé, en hybridation génomique compa-

rative (CGH) à haute résolution (Agilent), un nombre

significativement plus élevé (p = 1,4 × 10 −5 ) de CNA

dans les cancers associés aux mutations de BRCA2,

ainsi que des gains de la région 8q24.21, qui porte

le locus de l’oncogène c-MYC (89 %, contre 12,3 %

pour les formes sporadiques). Il faut aussi relever une

perte de la région 13q21.23 (qui porte le locus du

gène BRCA2) plus fréquente (67 versus 12,5 %). Parmi

les implications possibles de ce travail, une première

question est de savoir si la présence élevée de CNA

peut être un indicateur potentiel du profil BRCAness.

(2)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016 | 107 Deuxièmement, la présence de multiples copies de

l’oncogène c-MYC peut-elle expliquer le mauvais pronostic de ces formes mutées ? Enfin, l’amplifi- cation de MYC pourrait-elle servir de cible théra- peutique ?

Analyse moléculaire des cancers de la prostate neuroendocrines (NEPC)

Les formes neuroendocrines ne sont pas toutes semblables. Un premier groupe, de progression graduelle, avec des métastases osseuses et ganglion- naires, est souvent asymptomatique en échec bio- logique. Un deuxième est rapidement progressif avec des métastases hépatiques et des taux très bas de PSA. Ils n’expriment pas ou ne sécrètent pas forcément de marqueurs neuroendocrines. Peut-on essayer de les définir à partir d’altérations molé- culaires distinctes ? L’étude de 114 échantillons tumoraux (6) provenant de 81 patients (dont 35 cas de NEPC) a retrouvé une perte de RB1 dans 70 % des NEPC (contre 32 % dans les CPRC ; p = 0,003) et une mutation ou une délétion de TP53 dans 66,6 % des NEPC (contre 31,4 % des CPRC ; p = 0,04). Les mutations du RA sont absentes dans les NEPC (13 % dans les CPRC). De même, les amplifications de RA sont plus fréquentes dans les CPRC (p = 0,00075).

Si les profils génomiques montrent un overlap signifi- catif, les NEPC peuvent être distingués des CPRC sur la base d’altérations moléculaires distinctes, essen- tiellement épigénétiques. Les altérations des NEPC sont partagées avec un sous-groupe de CPRC. Leur caractérisation est possible au niveau des cellules tumorales circulantes (CTC) [7]. Cela pourrait aider à identifier des patients avec une progression indé- pendante du RA.

Facteurs de risque et prévention

Existe-t-il un lien entre fertilité masculine et cancer de la prostate ?

Une association entre fertilité masculine et risque de cancer de la prostate a été suggérée par certaines études, qui pourrait être liée à des taux bas d’andro- gènes chez les patients non fertiles. Une étude suédoise (8) basée sur un registre national a utilisé une méthodologie originale pour évaluer une relation

potentielle entre les deux. Sa particularité est d’avoir évalué la fréquence de jumeaux de même sexe homozygotes (considérant que c’était un marqueur de haute fertilité) chez 96 301 patients atteints d’un cancer de la prostate par rapport à une population contrôle appariée de 378 583 hommes. Pour ne pas être biaisée par les techniques modernes de fécondation in vitro, l’étude a été restreinte à des hommes ayant été pères avant 1991. Les conclusions sont claires : il n’a pas été retrouvé d’augmentation du risque chez les pères de jumeaux par rapport aux pères d’enfants uniques, que ce soit pour le taux global de cancer de la prostate (HR = 0,95 ; IC 95 : 0,89-1,02) ou de tumeurs à bas risque (HR = 0,97 ; IC 95 : 0,84-1,12).

Aspirine quotidienne et réduction de la mortalité spécifique dans une large cohorte de patients atteints d’un cancer de la prostate non métastatique : des résultats moins évidents que ceux qui étaient attendus

L’aspirine pourrait diminuer la mortalité due au cancer en inhibant l’activation plaquettaire par l’acétylation irréversible de COX1 et, finalement, en réduisant le développement des métastases.

L’étude publiée par E.J. Jacobs (9) a été réalisée à partir des données des patients inclus dans la Cancer Prevention Study-II Nutrition Cohort. Durant un suivi d’une dizaine d’années, il a été constaté 441 décès par cancer de la prostate parmi les 8 427 patients ayant reçu une information sur l’aspirine avant le diagnostic, et 301 décès parmi les 7 118 cas ayant reçu cette information après le diagnostic. L’uti- lisation d’aspirine, que ce soit avant ou après le diagnostic, n’était pas, par rapport à l’absence d’aspirine, associée significativement à la morta- lité spécifique (respectivement : HR = 0,92 ; IC 95 : 0,72-1,7 ; HR = 0,98 ; IC 95 : 0,74-1,29). Cependant, en cas de tumeurs à haut risque (T3 ou plus ou score de Gleason ≥ 8), il a été retrouvé une baisse significative de la mortalité spécifique (HR = 0,60 ; IC 95 : 0,27-0,92). Ces résultats suggèrent qu’il est important, avant de tirer la moindre conclusion, de disposer de résultats d’essais randomisés démon- trant l’intérêt de l’aspirine dans les tumeurs à haut risque. Il conviendrait aussi d’analyser le rôle du RTOG 96-01. La CT n’est pas en reste dans les formes métastatiques hormonosensibles (STAMPEDE), tout comme les nouvelles cibles thérapeutiques concernant en particulier les défauts de réparation de l’ADN.

» Rein : profonde déception due aux résultats négatifs du premier essai adjuvant ASSURE (1 943 patients) qui évaluait l’efficacité d’un traitement antiangiogénique (sunitinib, sorafénib versus placebo) après néphrectomie.

Deux résultats majeurs ont été retrouvés avec, pour la 1 re fois dans les formes métastatiques, une amélioration de la SG avec le nivolumab (CheckMate 025), et avec le cabozantinib (METEOR), tous 2 comparés à l’évérolimus après traitement antiangiogénique. La génomique, elle, poursuit ses avancées.

» Testicule : peu de données nouvelles mais des résultats intéressants en génomique et dans de larges études rétrospectives.

» Vessie : de nouvelles perspectives avec le développement d’inhibiteurs de points de contrôle immunitaires à différents stades de la maladie et la possibilité de combinaison avec une thérapie ciblée.

Mots-clés

Cancer de la prostate Cancer du rein Cancer du testicule Cancer de la vessie

Highlights

» Prostate cancer. Many changes especially in biology, in radiotherapy with the results of the GETUG16, CHHiP, RTOG 96-01 phase III trials, but also important data for chemo- therapy with the results of STAMPEDE trial which confirm the benefit of docetaxel in patients with hormone sensitive meta static tumours as well as for the potential role of olaparib in case of DNA-repair defects.

» Kidney cancer. First a deep deception with the nega- tive results of the first adju- vant ASSURE phase III trial (1943 patients) which evaluates sunitinib or sorafenib after nephrectomy. But two major positive results for nivolumab in the CheckMate 025 trial and for cabozantinib in the METEOR trial both versus everolimus in second-line therapy after anti-angiogenic treatment in patients with advanced disease.

» Testicular cancer. Some new data in the genomic field and some results of large studies focused on bilateral tumours, second cancers, teratoma with somatic-type malignant trans- formation, high dose sequen- tial chemotherapy and brain metastases

» Bladder cancer. New impor- tant perspectives with the development of immune check- points inhibitors at different stages of the disease and the possibility of combination with targeted therapy.

Keywords

Prostate cancer

Kidney cancer

Testicular cancer

Bladder cancer

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108 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016

dosage de l’aspirine, mais également de l’utilisa- tion des statines, qui sont souvent associées chez les patients avec un terrain cardiovasculaire, tout comme celle de la metformine chez les patients diabétiques. Autant de facteurs pouvant interférer avec les résultats.

Statines et cancer de la prostate

Dans JAMA Oncology, L.C. Harshman et al. (10) ont rapporté que, chez les patients atteints d’un cancer de la prostate traités par suppression andro- génique (ADT), une statine avait un temps jusqu’à progression (TTP) prolongé (27,5 versus 17,4 mois).

Les auteurs ont évoqué la possibilité que les statines induisent l’inhibition d’un précurseur des androgènes, le sulfate de déhydroépiandrostérone (DHEAS), capturé via l’OATP (Organic Anionic Transporting Polypeptide), codé par SLC02B1.

ADT et risque de maladie d’Alzheimer

Une étude a extrait les données des systèmes de santé de l’université de Stanford (1,8 million de patients entre 1994 et 2013) et du Mount Sinai Hospital (3,7 millions de patients entre 2000 et 2013) afin d’étudier la relation entre ADT et maladie d’Alzheimer dans une cohorte de 16 888 patients atteints d’un cancer de la pros- tate (11), 2 397 (14,2 %) ayant reçu une ADT avec une médiane de suivi de 2,7 ans. Il y a eu 125 nouveaux diagnostics de maladie d’Alzheimer, avec un temps médian de survenue de 4 ans. Les patients ayant reçu une chimiothérapie (CT) ont été exclus, celle-ci pouvant être responsable de troubles cognitifs. L’âge et les antécédents cardiovasculaires ont montré une association statistiquement significative en analyse multiparamétrique de Cox. Cette étude retrouve une association entre l’utilisation d’une ADT et une augmentation du risque de maladie d’Alzheimer (HR = 1,88 ; IC 95 : 1,10-3,20 ; p = 0,021), qui s’accentue avec la durée de l’ADT (p = 0,016). Elle présente néanmoins de nombreuses limitations, en particulier liées à son caractère rétrospectif, à la fiabi- lité des données informatisées (comme le montre la difficulté d’extraire une donnée aussi élémen- taire que le score de Gleason) et à l’impossi bilité de colliger les facteurs de risque (cardiovasculaires, familiaux, biologiques, etc.). Les critères de défini- tion de la maladie d’Alzheimer étaient limités au codage, avec des risques de mauvaise classification.

On ne peut pas non plus exclure la présence d’une maladie d’Alzheimer prévalente dans certains cas.

En conclusion, ces données doivent être considérées avec prudence.

Dépistage et diagnostic précoce

Actualisation à 13 ans des données

de l’European Randomised Study of Screening for Prostate Cancer

Cette actualisation à 13 ans (12) a montré une amélioration potentielle des résultats en termes de réduction de la mortalité par rapport à ceux à 9 et 11 ans. Sept mille quatre cent huit cancers de la pros- tate ont été diagnostiqués dans le groupe dépisté, contre 6 107 dans le groupe contrôle, soit une inci- dence de 9,55 versus 6,23 pour 1 000 personnes/ an.

Le RR de mortalité à 13 ans est de 0,79 (IC 95 : 0,69- 0,91), ce qui revient à 1 décès évité pour 781 hommes invités au dépistage ou 1 décès pour 27 cancers de la prostate détectés… La réduction de la morta- lité apparaît un peu plus marquée pour le groupe des patients âgés de 65 à 70 ans. Les actualisa- tions à venir seront importantes, car la médiane de suivi après diagnostic de cancer de la prostate n’est encore que de 6,4 ans dans le groupe dépisté.

Élever le seuil du diagnostic précoce, comme c’est le cas actuellement, à 4 ng/ ml, permet de diminuer le taux de surdiagnostic. Le problème majeur reste celui du surtraitement de tumeurs “indolentes”.

Il pourrait bénéficier des progrès rapides de l’IRM et de la biologie moléculaire permettant de juger de l’agressivité de la maladie et de son pronostic.

Essai ERSPC : données à 18 ans de la cohorte suédoise

À 18 ans, un cancer de la prostate a été diagnos- tiqué dans le groupe dépisté chez 1 396 hommes, dont 79 en sont morts, contre 962 diagnostics et 122 décès dans le groupe contrôle, soit une incidence de 16 % et une mortalité cumulée de 0,98 %, au lieu des 6,8 et 1,7 % attendus (13). Le dépistage organisé entraîne une réduction absolue de la mortalité de 0,72 % (IC 95 : 0,50-0,94) et une réduction du RR de décès de 42 % (IC 95 : 28-54), mais au prix d’un impor- tant “surdiagnostic”.

Répercussion des recommandations de 2012

de l’USPSTF pour décourager l’utilisation du PSA

dans le dépistage des cancers de la prostate

Depuis 2012, l’US Preventive Services Task Force

(USPSTF) recommande de ne pas faire de dosage

du PSA pour dépister un cancer de la prostate chez

les patients asymptomatiques. Une étude menée

à partir des données du NHIS (National Health

Interview Survey) [14] s’est donné pour objectif

de mesurer l’impact de ces recommandations aux

États-Unis, en estimant la proportion d’hommes

(4)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016 | 109 de 40 ans et plus ayant vu un praticien leur pres-

crire un dosage du PSA à visée de dépistage. Entre 2010 et 2013, le pourcentage d’hommes de 40 à 49 ans dépistés s’est avéré stable (12,5 à 11,2 % ; p = 0,4). En revanche, le taux de dépistage a signi- ficativement diminué chez les hommes de 50 à 59 ans (de 33,2 à 24,8 % ; p < 0,01), de 60 à 74 ans (de 51,2 à 43,6 % ; p < 0,01) et de 75 ans et plus (de 43,9 à 37,1 % ; p = 0,03). Néanmoins, un large pourcentage de patients étaient dépistés en dépit d’une espérance de vie inférieure à 10 ans (> 52 %).

En 2013, approximativement 1,4 million d’Américains âgés de plus de 65 ans ont été dépistés alors qu’ils présentaient un risque de décès à 9 ans supérieur à 52 %. Ces données montrent que, si ces recom- mandations ont permis une diminution des dosages du PSA après 50 ans, de très nombreux dosages sont toujours effectués dans une population où il existe un consensus sur son absence d’intérêt. On peut regretter que le taux de dépistage ait diminué dans la population âgée de 50 à 65 ans, chez qui un diagnostic précoce permet une forte réduction du risque de décès.

Dépistage du cancer de la prostate dans la communauté noire des Caraïbes : un problème à revoir spécifiquement ?

A.L. Patrick et al. ont développé, dans un article du BJU International (15), tout un argumentaire à partir des données du dépistage réalisé sur l’île de Tobago, aux Caraïbes, fournies par la Tobago Health Studies Unit avec la collaboration de la Graduate School of Public Health of the University of Pitts- burgh. Dans cette île, la population est d’origine africaine à 95 %. Les hommes de 40 ans ou plus ont été dépistés 3 fois entre 1997 et 2007. Les biopsies réalisées en cas de PSA supérieur à 4 ng/ ml ou de toucher rectal anormal ont été positives dans 42 % des cas (342 sur 814). Le taux de cancer de la prostate en fonction de l’âge était de 1 % entre 40 et 49 ans, de 8 % entre 50 et 59 ans, de 21 % entre 60 et 69 ans et de 29 % entre 70 et 79 ans. Au total, la prévalence était de 16,8 % pour la popula- tion dépistée entre 50 et 79 ans (328 patients sur 1 947 ; IC 95 : 14,9-18,2), et de 11,1 % (342 patients sur 3 089 ; IC 95 : 10,2-11,8) entre 40 et 79 ans. La distribution du score de Gleason était la suivante : – pour un score de 5 : 1 % ;

– pour un score de 6 : 51 % ; – pour un score de 7 : 35 % ; – pour un score de 8 : 6 % ; – pour un score de 9 : 6 % ; – pour un score de 10 : 0 %.

Cancers de la prostate létaux

On pourrait augmenter la spécificité du dépistage en utilisant le PSA associé à un éventail de kallicréines utilisées comme marqueurs (16).

Biopsies de la prostate guidées par fusion d’image IRM/échographie versus biopsies guidées par échographie

L’introduction et le développement de l’IRM prosta- tique permettent maintenant d’identifier les tumeurs

“significatives”, notamment de haut grade, et de réaliser des biopsies ciblées. Une étude prospective a été menée chez 1 003 patients ayant eu des biopsies de la prostate entre 2007 et 2014 au National Cancer Institute (NCI) [17], souvent après une première série de biopsies négatives ; l’objectif primaire était de comparer la détection du cancer de la prostate à haut risque (score de Gleason ≥ 4 + 3). Les objectifs secon- daires étaient la détection du cancer de la prostate à bas risque (score de Gleason de 3 + 3 ou 3 + 4) et la probabilité de prédire une pathologie de l’ensemble de la glande grâce à l’histologie. Les biopsies ciblées et standardisées ont dépisté un nombre comparable de cancers, respectivement 461 et 469 cas. En revanche, les biopsies ciblées ont diagnostiqué 30 % de plus de cancers à haut risque (173 versus 122 cas ; p < 0,001) et 17 % de moins de cancers à bas risque (213 versus 122 ; p < 0,001). Quand des biopsies ciblées étaient asso- ciées à des biopsies standard, 103 cas supplémentaires étaient relevés, essentiellement représentés par des cancers à bas risque. On peut conclure que les biopsies ciblées augmentent le taux de détection des cancers à haut risque. Quand elles sont combinées aux biopsies standard, une plus grande sensibilité de détection du cancer de la prostate est retrouvée (77 versus 53 %).

Néanmoins, l’utilité d’ajouter des biopsies standard paraît limitée si le but est de détecter un cancer signi- ficatif justifiant un traitement curatif. Les données de cette étude doivent être considérées comme prélimi- naires au regard des critères de jugement essentiels que constituent les récidives et la mortalité spécifique du cancer de la prostate.

L’autre considération essentielle est celle du coût que représenterait la diffusion de cette technique.

Formes localisées : RT associée ou non à une HT ; essais de CT

Essai CHHiP : RT hypofractionnée dans les cancers

de la prostate localisés de risque intermédiaire

CHHiP (Conventional or Hypofractionated High

dose intensity modulated radiotherapy in Prostate

(5)

110 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016

100 80 60 40 20

0 0 1 2 3 4 5 6 7

Années après la randomisation 74 Gy

60 Gy 57 Gy

HR 60 = 0,83 ; IC 90 : 0,68-1,02 HR 57 = 1,19 ; IC 90 : 0,99-1,44

Non-sur venue d ’év énemen t (%)

Patients à risque (événements)

1 065 (4) 1 036 (24) 990 (39) 925 (24) 794 (20) 494 (11) 284 (4) 167 1 074 (5) 1 041 (15) 1 010 (23) 964 (28) 815 (18) 532 (10) 280 (10) 176 1 077 (6) 1 043 (30) 1 003 (35) 943 (31) 797 (31) 491 (9) 262 (12) 152

Figure 1. Essai CHHiP : survie sans rechute à 5 ans (essai de non-infériorité) [d’après Dearnaley D et al., ECC-ESMO 2015: abstr. LBA8, actualisé].

100 80 60 40 20

0 0 6 12 18 24 30 36 42 48 54 60 66 72

Radiothérapie (n = 373)

102 90 78 84 96 Mois

Radiothérapie

Radiothérapie + hormonothérapie (ADT)

p (log-rank test stratifié) < 0,0001 Événements, n (%) Survie sans progression à 5 ans, % (IC

95

) HR (IC

95

)

138 (37,0) 62,1 (57-67)

0,50 (0,38-0,66) 78 (21,1) 79,6 (75-84) Radiothérapie + goséréline 10,8 mg (n = 369)

Sur vie sans pr ogr ession (%)

Patients à r isque (n)

338 294 266 228 140 61 18 360 341 297 268 185 87 24

Figure 2. Étude GETUG-AFU 16 : survie sans progression (d’après Carrie C et al., ASCO® 2015: abstr. 5006, actualisé).

cancer) [18] est un essai de phase III de non- infériorité, impliquant 71 centres de RT du Royaume-Uni, qui a comparé 3 schémas d’irradiation chez 2 100 patients : le schéma standard, 74 Gy en 37 fractions (n = 696) ; et 2 schémas de RT hypo fractionnée, 60 Gy en 20 fractions (n = 698) et 57 Gy en 19 fractions (n = 706). Pour être éligibles, les patients devaient présenter une tumeur T1b-T3a N0M0, un score de

Gleason inférieur à 8, avec un risque d’envahissement des vésicules séminales ne dépassant pas 30 %, un taux de PSA inférieur ou égal à 30 ng/ ml, une espérance de vie de plus de 10 ans. Ils étaient traités par une HT courte (3 à 6 mois) commencée avant la RT. Le critère principal était la progression biochimique (PSA) ou la rechute du cancer. Après un suivi médian de 62,4 mois, le schéma 60 Gy/20 fractions a démontré sa non-infériorité par rapport au schéma classique 74 Gy/37 fractions (HR = 0,83 ; IC 95 : 0,68-1,02 ; p = 0,003). En revanche, le schéma 57 Gy/19 fractions a échoué à montrer sa non-infériorité. La toxicité aiguë était similaire, mais un peu plus précoce pour les groupes avec hypo fractionnement. Les toxicités tardives, digestives et vésicales étaient identiques pour les 3 schémas de RT. Environ 7 % des patients ont rapporté une altération de la qualité de vie liée à des symptômes digestifs ou vésicaux. Avec les résultats de cette étude, la RT hypofractionnée (avec un hypo fraction nement modéré), plus confortable pour les patients et plus rationnelle pour les services de soins, devrait devenir un standard thérapeutique dans le cancer de la prostate (figure 1).

Âgisme dans le sous-traitement des cancers de la prostate à haut risque : jusqu’à quand résister au poids des évidences ? Existe-t-il une discrimination liée à l’âge ? Celle-ci apparaît de fait, même si elle n’est pas intentionnelle.

L’étude menée par D.A. Shumway et al. (19), qui

ont utilisé les données SEER-Medicare concernant

des patients traités entre 1997 et 2007, s’est focalisée

sur les sujets de plus de 75 ans et a montré que les

(6)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016 | 111

– Une RT après prostatectomie. Dans ce cas, l’indication se pose à partir d’un seuil de 0,2 ng/ml. À ce taux, l’imagerie est généralement négative et n’a pas d’indication.

– Une prostatectomie après traitement par RT (4), voire une réirradiation (par curiethérapie, par exemple). Un taux de PSA < 4 ng/ml et un PSA-DT > 12 mois sont les critères les plus significatifs pour penser que la récidive est locorégionale.

– Un curage ganglionnaire (5) ou une irradiation ganglion- naire après récidive ganglionnaire isolée.

Le TEP scan à la choline est aussi indiqué pour exclure une extension rétropéritonéale ou systémique avant une procé- dure de rattrapage. Rappelons qu’il faut tenir compte d’un possible effet négatif d’un traitement antiandrogénique sur la captation de la choline et, si possible, prévoir de réaliser l’examen avant la mise en place d’une HT.

Encadré 1. Trois scénarios de traitement de rattrapage se discutent en pratique.

traiter permettait d’obtenir le même bénéfice que chez des patients plus jeunes. L’addition de la RT à l’HT réduit dans cette population le risque de décès spécifique de moitié (HR = 0,51 ; IC 95 : 0,44-0,59), et le risque de décès toutes causes, de 40 % (HR = 0,63 ; IC 95 : 0,59-0,67). À une époque où l’attention est centrée sur le sur traitement des cancers à bas risque, il conviendrait de s’intéresser au sous-traitement des patients âgés, dont les conséquences sont importantes.

Récidive

Étude GETUG-AFU 16 : intérêt d’une courte HT en combinaison avec une RT comme traitement de sauvetage lors de la rechute biologique après prostatectomie radicale

Cette étude de phase III, menée par C. Carrie et al.

(ASCO® 2015: abstr. 5006), a randomisé 743 patients entre octobre 2006 et mars 2010 dans 43 centres français. Le taux de PSA devait avoir, après la prosta tectomie, été indétectable pendant au moins 6 mois et être remonté à 0,2 à 2 ng/ ml (et vérifié à 2 reprises). Les patients devaient ne pas avoir reçu d’HT. Le délai moyen entre la prostatectomie et la rechute biologique était de 40 ± 27 mois.

La dose d’irradiation délivrée était de 66 Gy sur la prostate et de 46 Gy sur le pelvis (pour 15 % des patients). L’objectif principal était la survie sans progression (SSP) à 5 ans. Le but était de détecter une amélioration de la SSP clinique ou biologique de 45 % avec la RT seule versus 60 % avec l’association RT + HT courte de 6 mois. Les objectifs secondaires étaient la survie globale (SG), les toxicités aiguës et tardives ainsi que la qualité de vie. Sur 63 mois de suivi médian, il existe une amélioration de la SSP à 5 ans statistiquement significative : 79,6 % (IC 95 : 75-84) versus 62,1 % (IC 95 : 57-67) [HR = 0,50 ; IC 95 : 0,38-0,66] (figure 2). L’analyse en sous-groupes montre un bénéfice pour tous les sous-groupes. Il n’a pas été retrouvé de différence de SG : 96,2 % (IC 95 : 93-98) versus 94,8 % (IC 95 : 92-97), ni de qualité de vie.

Le TEP scan à la choline dans les rechutes biologiques des cancers de la prostate après traitement à visée curative n’est justifié que s’il a un impact sur le traitement de rattrapage (20, 21) [encadré 1]

Le TEP scan à la choline devient une technique d’imagerie moderne qui prend une place impor- tante dans les récidives biologiques des cancers

de la prostate localisés traités à visée curative par prostatectomie, RTE ou curiethérapie. Les données espagnoles du SEMINIM (Spanish Society of Nuclear Medicine and Molecular Imaging), publiées par S. Rodado-Marina et al. (20), sont importantes pour définir la place du TEP scan à la choline en pratique et la population spécifique pour laquelle il peut avoir un impact significatif, afin de décider du meilleur traitement à mettre en œuvre. Il était important d’obtenir 2 éléments cruciaux : le seuil de PSA pour que l’examen soit suffisamment sensible et le nombre de cas où le résultat modifie le traitement.

Dans ce contexte, le TEP scan peut être recommandé à partir d’un seuil de 1 ng/ ml. Si le patient n’est pas candidat à un traitement de rattrapage et que seule une HT est envisagée, alors sa prescription n’a pas de sens.

Au total, 233 patients de 6 institutions ont été inclus

dans cette étude rétrospective. Le taux de détection a

été de seulement 47,6 % (n = 111). Il varie entre 23,5 et

38,2 % en cas de PSA compris entre 1 et 2-3 ng/ ml,

et atteint 67 % à partir de 3 ng/ ml. G. Giovacchini

et al. (3), dans une série de 358 patients, avaient

publié un taux de détection proche de 80 % pour

des taux de PSA entre 3 et 5 ng/ ml. Si l’on considère

le temps de doublement, le meilleur seuil est moins

de 6 mois, avec une sensibilité et une spécificité de

58 %. Les patients ayant un score de Gleason de

8-10 avec un temps de doublement du PSA (PSA-DT)

inférieur à 6 mois ont une plus grande probabilité

de présenter une récidive systémique. La rechute se

situait au niveau de la prostate ou de la loge pros-

tatique chez 26 patients (23,4 %), d’adénopathies

régionales ou à distance chez 52 patients (46,8 %)

et de l’os dans 33 cas (29,7 %).

(7)

112 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016

Les oligométastases posent le problème d’associer au traite- ment hormonal de référence une intensification du traitement local (à doses potentiellement curatrices) afin de prolonger la survie en plus d’améliorer le contrôle local et d’éviter des complications subséquentes (3). Elle pourrait permettre aussi de retarder la mise en route de traitements généraux potentiel- lement toxiques. On peut distinguer différentes cohortes entre les cancers hormonosensibles et les CPRC. Les patients chez qui l’intervalle libre entre le diagnostic initial et l’apparition des métastases, d’une part, et le temps de doublement, d’autre part, sont longs sont a priori les meilleurs candidats pour des traitements locaux sur des oligométastases diagnostiquées par TEP scan (à la choline) ou IRM corps entier.

Encadré 2. Traitement des oligométastases.

Oligométastases de cancers de la prostate : un traitement local à visée curative a-t-il un intérêt ? (encadré 2)

Les techniques d’imagerie récentes permettent d’isoler un sous-groupe de patients métastatiques porteurs d’un nombre limité de métastases, notam- ment ganglionnaires ou osseuses. Il a été rapporté que les patients en progression après RT ayant moins de 5 métastases ont une SSP supérieure à ceux présentant plus de 5 lésions.

Les métastases ganglionnaires, en particulier, pourraient représenter de bonnes indications pour des techniques à visée curative. Dans une série de 24 patients hormononaïfs présentant jusqu’à 3 méta- stases osseuses ou des métastases ganglionnaires, le délai médian jusqu’à l’instauration d’une HT a été de 38 mois (22). Des essais sont en cours pour évaluer les patients pouvant le mieux bénéficier d’un traite- ment localisé en cas d’oligométa stases. En France, une étude pilote est coordonnée par S. Supiot.

CT au stade localisé et métastatique hormonosensible

Étude GETUG 12 dans les cancers de la prostate localisés à haut risque : évaluation de l’intérêt d’une CT par docétaxel et estramustine combinée à une ADT

Cette étude de phase III (23) a évalué l’association d’une CT par 4 cycles de docétaxel + estramustine et d’une HT de 3 ans versus la même HT seule dans les cancers de la prostate localisés à haut risque définis par la classification de D’Amico (au moins 1 des facteurs de risque suivants : stade T3-T4, score de Gleason ≥ 8, PSA ≥ 20 ng/ ml). Cette popula- tion représente 15 à 20 % des cancers de la pros- tate nouvellement diagnostiqués. L’étude a inclus 413 patients entre 2002 et 2006. Le traitement locorégional pouvait faire appel à une prostatec- tomie ou à une RT (87 %). Un curage ganglionnaire avant randomisation permettait de stratifier les tumeurs en fonction de la présence d’un envahisse- ment ganglionnaire. Le critère de jugement principal était la survie sans rechute, un critère composite englobant les récidives biochimiques, locales ou métastatiques et les décès. Avec une médiane de suivi de 8,8 ans, la différence de SSP à 8 ans (62 versus 50 %) est statistiquement significative (HR = 0,71 ; IC 95 : 0,54-0,94 ; p = 0,017). L’analyse en sous-groupes (préstratifiée) montre des résultats meilleurs en cas de score de Gleason inférieur ou égal à 7, de tumeur T3-T4 et de PSA supérieur ou égal

à 20 ng/ ml. En revanche, il n’y a pas de bénéfice de la CT pour les tumeurs ayant un score de Gleason supérieur ou égal à 8. Il faudra encore attendre les données de SG pour savoir si les résultats justifieront un changement des pratiques.

Essai RTOG 0521

H. Standler a présenté, au congrès américain en oncologie clinique 2015 (abstr. LBA 5002), les résul- tats de l’essai de phase III RTOG 0521, qui comparait, chez 612 patients atteints d’un cancer localisé de la prostate à haut risque, une ADT de 2 ans et une RT suivie ou non, 4 semaines après, de 6 cycles de CT par docétaxel (75 mg/ m 2 tous les 21 jours) + pred- nisone (10 mg/j). Avec un suivi médian de 6 ans, la SG à 4 ans est de 89 % sans la CT et de 93 % avec le docétaxel (HR = 0,70 ; IC 90 : 0,51-0,98 ; p = 0,04).

L’amélioration est significative avec un test unilatéral mais pas avec un test bilatéral.

Les données de ces 2 essais ne permettent pas, actuellement, de faire de la CT un standard dans cette situation. L’étude de phase III PEACE 2, en cours, évalue la place du cabazitaxel dans les formes localisées de mauvais pronostic en asso- ciation à une HT de longue durée. Il faut 2 critères de gravité de D’Amico pour pouvoir être inclus.

Essai CHAARTED comparant HT + CT par 6 cycles de docétaxel à une HT seule dans les cancers de la prostate métastatiques hormonosensibles

Les résultats de l’étude CHAARTED, attendus

depuis 1 an, ont été publiés en août dans le New

England Journal of Medicine (24). Cet essai faisait

l’hypothèse que, dans les formes métastatiques

hormono sensibles de cancer de la prostate, l’addi-

tion de docétaxel à une ADT prolongeait la SG par

(8)

114 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016

Cancers urologiques

100 80 60 40 20

0 0 12 24 36 48 60 72 84

Mois après la randomisation SOC Médiane : 67 mois (IC 95 : 60-91)

405 décès SOC + docétaxel

Médiane : 77 mois (IC 95 : 70-NR) 165 décès

HR = 0,76 ; IC 95 : 0,63-0,91 ; p = 0,003

Sur vie globale (%)

Patients à risque (n)

1 184 (73) 1 092 (130) 860 (89) 521 (59) 310 (33) 156 (17) 81 (2) 36 592 (33) 545 (51) 437 (32) 283 (19) 180 (12) 91 (12) 48 (6) 18 SOC : Standard of care (hormonothérapie standard).

Figure 3. Étude STAMPEDE : survie globale.

Ce bénéfice en SG a été confirmé par les données, rapportées en 2015 au congrès de Chicago, de l’étude anglaise STAMPEDE, dont la population était constituée de 61 % de cancers de la prostate hormonosensibles méta- statiques (dont 94 % d’emblée métastatiques), de 22 % de formes localement avancées à haut risque (au moins 2 critères parmi : T3/4, PSA > 40, score de Gleason ≥ 8) ou en récidive après RT ou chirurgie et, enfin, de 14 % de cancers M0 avec une atteinte ganglionnaire. Il existe une amélioration de 10 mois de la médiane de SG, statistiquement significative.

Encadré 3. Étude STAMPEDE.

rapport à une HT seule. Au total, 790 patients ont été randomisés, avec une stratification selon l’extension des métastases, l’âge, le PS ECOG, l’HT adjuvante, la prévention des événements squelettiques et un blocage androgénique complet (BAC) de plus de 30 jours. Avec une médiane de suivi de 28,9 mois, la différence de SG est très significative, en faveur du bras CT, avec des médianes de 57,6 mois dans le bras CT et de 44 mois dans le bras ADT seule, soit une différence de 13,6 mois (HR = 0,61 ; IC 95 : 0,47-0,80 ; p = 0003). Le résultat est encore plus spectaculaire en cas de lésions métastatiques étendues, avec un bénéfice de 17 mois (médiane : 49,2 versus 32,2 mois ; HR = 0,60 ; IC 95 : 0,45-0,81 ; p = 0,0006).

Étude STAMPEDE

STAMPEDE (25) est une étude randomisée, contrôlée, tentant au sein d’un même essai clinique de répondre à plusieurs questions, dont celle du rôle de l’acide zolédronique et du docétaxel (multibras) chez des sujets atteints d’un cancer de la prostate M0 et M1 (multistade) commençant une HT standard (stan- dard of care [SOC]). De 2005 à 2013, 2 962 patients ont été randomisés selon un ratio 2:1:1:1 entre ADT (n = 1 184) [bras contrôle], ADT + docétaxel 75 mg/ m 2 (n = 592), ADT + acide zolédronique 4 mg/3 semaines, puis 4 mg/4 semaines (n = 593) et ADT + docé- taxel + acide zolédronique (n = 593). Il y avait 61 % de cancers de la prostate métastatiques (dont 94 % d’emblée métastatiques), 22 % de formes localement avancées à haut risque (au moins 2 critères parmi : T3/4, PSA > 40, score de Gleason ≥ 8) ou en récidive après RT ou chirurgie, et, enfin, 14 % de cancers M0 avec une atteinte ganglionnaire (encadré 3).

Il n’a pas été retrouvé de différence pour les bras avec ou sans acide zolédronique. En revanche, une amélioration de 10 mois de la médiane de SG a été notée avec le docétaxel, statistiquement signifi- cative (figure 3).

Actualisation du GETUG-AFU15

G. Gravis a publié les résultats du GETUG-AFU15 en analyse post hoc revue selon la définition des 2 sous-groupes de l’étude CHAARTED, avec un suivi médian de 82,9 mois (26). Les caractéristiques défi- nissant les 2 sous-groupes étaient comparables dans les 2 bras. La différence de SG reste non significa- tive sur l’ensemble de la population (60,9 versus 46,5 mois ; HR = 0,9 ; IC 95 : 0,7-1,2 ; p = 0,44), de même que dans le sous-groupe des hauts (39 versus 35,1 mois ; HR = 0,8 ; IC 95 : 0,6-1,2 ; p = 0,35) et des faibles volumes métastatiques (83,1 mois versus non atteinte ; HR = 1 ; IC 95 : 0,6-1,5 ; p = 0,87).

Comment expliquer la divergence des conclusions de l’étude française ?

Sans doute par le manque de puissance lié à un effectif plus limité, la sélection de patients ayant des masses tumorales moins importantes et un traitement de rattrapage par docétaxel fréquent et précoce.

Dorénavant, l’indication d’une CT par docétaxel devra être discutée chez les patients atteints d’un cancer de la prostate métastatique hormonosensible à condition que les patients apparaissent “fit” pour ce traitement (27).

CPRC

Essai PREVAIL : effets de l’enzalutamide sur la qualité de vie, le contrôle des douleurs et les événements osseux chez des patients atteints d’un CPRCm et chimionaïfs (28)

L’enzalutamide a montré une amélioration signifi-

cative du score FACT, avec un temps médian jusqu’à

(9)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016 | 115

Plus, sans doute, que les résultats, 2 éléments doivent être mis en exergue :

– la réactivité des années précédentes permettant de mettre à la disposition des patients un traitement efficace a bien changé, sans doute en raison de considérations économiques inavouées ;

– il est possible d’exploiter les données d’une ATU, et cela devrait être plus systématique pour conforter les organismes de tutelle sur le service médical rendu d’un tel dispositif, et pas seulement son rôle concernant la tolérance et la sécurité.

Peut-être que si nous étions plus à même de démontrer l’intérêt des ATU par une évaluation rigoureuse des données enregistrées, nous pourrions revenir au système plus réactif que certains de nos voisins européens nous enviaient.

Encadré 4. L’intérêt des ATU.

détérioration de 11,3 mois (contre 5,3 mois pour le placebo), et un retard de l’apparition des douleurs significatif à S13 (29 versus 42 %) – retard toutefois non significatif à S25 (32 versus 38 %). La durée médiane de traitement, pour l’enzalutamide, a été de 16,6 mois. Le temps médian jusqu’au premier SRE (Skeletal-Related Event) était de 31,1 mois dans le groupe enzalutamide. Autant de données impor- tantes pour anticiper le bénéfice clinique à attendre et retarder la décision d’une CT.

Résultats finaux de l’étude COU-AA-302 : confirmation du gain en SG

Les résultats définitifs de l’étude COU-AA-302, évaluant l’efficacité et la tolérance de l’acétate d’abiratérone (AA) en prédocétaxel dans le CPRCm, étaient attendus depuis longtemps (29).

L’analyse définitive, réalisée après un suivi médian de 49,2 mois, montre que les patients recevant l’AA bénéficient d’une augmentation significative de la SG, d’environ 20 % (médianes : 34,7 versus 30,3 mois ; HR = 0,81 ; IC 95 : 0,70-0,93 ; p = 0,0033), alors que 44 % des patients du groupe placebo ont reçu de l’AA au cours de l’étude (le bénéfice est plus marqué en ajustant sur ce facteur, avec un HR de la différence de 0,74). Le bénéfice en SG est observé dans tous les sous-groupes de patients, définis par les caractéristiques à l’inclusion (âge, statut ECOG, PSA, métastases osseuses exclusives ou non). Le délai avant le passage aux antalgiques opiacés est prolongé de 10 mois pour les patients du groupe AA (33,4 versus 23,4 mois ; HR = 0,72 ; IC 95 : 0,61-0,85 ; p < 0,0001). Le profil de tolérance est similaire à celui décrit lors des analyses inter- médiaires.

Données de suivi à long terme des patients traités en France par AA après docétaxel dans le cadre de l’ATU

La France avait été un des premiers pays à rendre possible, entre décembre 2010 et septembre 2011, l’accès au traitement au moyen d’une autori- sation temporaire d’utilisation (ATU) avant sa commercialisation. Les patients ont bénéficié d’une surveillance stricte dans le cadre de cette ATU, avec des données adressées et enregistrées à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) [encadré 4].

Cette actualisation des données de tolérance et d’efficacité de l’étude ambispective conduite dans 20 centres (30) permet de confirmer dans la pratique courante, pour les 306 patients éligibles, avec un suivi à 3 ans, des données d’efficacité comparables

à celles des patients de l’étude de phase III, avec une médiane de SG de 37,1 mois à partir de l’instauration du docétaxel et de 14,6 mois à partir de l’introduc- tion de l’AA. Plus de 1/3 des patients (69 %) ont reçu le traitement durant au moins 3 mois. Il n’y a pas de mauvaise surprise concernant la tolérance.

En analyse multivariée, la durée de traitement par AA s’est avérée significativement corrélée à la baisse du PSA à 3 mois. Un temps d’exposition à l’AA plus court, la durée de l’HT antérieure, la présence de multiples sites métastatiques étaient associés à une durée de vie plus courte.

Le score de Gleason initial n’est pas prédictif de l’efficacité de l’AA

L’analyse rétrospective des données (31) des 2 études de phase III d’enregistrement de l’AA, COU-AA-301 (1 048 patients en prédocétaxel) et COU-AA-302 (1 088 patients chimionaïfs), a montré que le bénéfice de l’AA en SG et en SSP radiographique (SSPr) était indépendant du score de Gleason. Pour les tumeurs dont le score de Gleason est inférieur à 8, le HR était de 0,70 pour la SSPr en postdocétaxel et de 0,50 en prédocétaxel, versus, respectivement, pour les tumeurs de score de Gleason supérieur ou égal à 8, un HR égal à 0,58 et 0,61. Les données de SG sont comparables. En pratique, le score de Gleason initial de la tumeur n’est pas discriminant dans la décision d’un traitement par AA.

Impact des HT antérieures sur l’efficacité clinique de l’AA dans le CPRCm :

analyse post hoc à partir des essais de phase III

Si la durée de l’hormonosensibilité initiale peut

permettre de prédire la réponse aux HT de nouvelle

génération, les données post hoc des 2 études

(10)

116 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016

Cancers urologiques

pivotales concernant l’AA n’apportent pas de réponse claire, car, si elles montrent un bénéfice indépendant de la durée, il s’agissait de patients sélectionnés (32).

Perte de PTEN et pronostic du CPRCm traité par AA

La perte de la protéine PTEN est fréquente dans les cancers de la prostate et corrélée à un mauvais pronostic. C’est un régulateur négatif de la voie PI3K/AKT/mTOR. Depuis longtemps, des données pré cliniques suggèrent que l’activation de cette voie de signalisation est impliquée dans la résis- tance à la castration des cancers de la prostate.

De multiples mécanismes interviennent dans la perte de l’expression de la protéine PTEN : muta- tions, délétions génomiques, méthylation du promoteur, etc.

Dans une étude rétrospective anglaise réalisée au Royal Marsden NHS Foundation Trust (33), sur un total de 200 échantillons de tumeurs provenant de 144 patients, une perte de PTEN a été retrouvée dans 40 % des tumeurs primitives (57 sur 144) et 50 % (30 sur 60) des métastases. La perte de l’expression de PTEN a été constatée chez 44 % des patients en phase d’hormonosensibilité (18 sur 41) et chez 54 % (22 sur 41) en phase de résistance à la castration.

L’objectif de cette étude rétrospective était d’évaluer l’efficacité de l’AA en fonction du statut de PTEN évalué au niveau de la tumeur en immunohisto- chimie dans une cohorte de patients atteints d’un CPRCm prétraités par docétaxel (une expression de PTEN était observée dans 40 % des cas). La SG représentait le critère de jugement principal. La perte de l’expression de PTEN dans les CPRC était associée à une médiane de SG plus courte (14 versus 21 mois ; HR = 1,75 ; IC 95 : 1,19-2,55 ; p = 0,004) et à une durée médiane de traitement par AA plus courte (24 versus 28 semaines ; HR = 1,6 ; IC 95 : 1,12-2,28 ; p = 0,009).

Il s’agit de la première étude montrant une asso- ciation entre le statut de PTEN et le pronostic du CPRCm. Il faut noter plus de métastases viscérales chez les patients PTEN−. Néanmoins, la perte de PTEN conserve sa valeur pronostique en analyse multivariée.

Statut ERG et amélioration de la SSPr dans les CPRCm traités par AA

Cette étude annexe de l’essai COU-AA-302 (34) avait pour but d’évaluer le lien entre les réarran- gements d’ERG et le bénéfice clinique de l’AA en termes de SSPr dans une cohorte de patients chimionaïfs. Le statut d’ERG évalué par FISH a été défini chez 348 patients. ERG était réarrangé dans

118 cas (34 %). Deux classes d’arrangements ont été distinguées : Esplit (2 %) et Edel, celle-ci étant sous-divisée en Edel 1 (18 %) et Edel 2+ (15 %), cette dernière étant caractérisée par plus d’une séquence de gène de fusion ERG. Chez les patients Edel 2+

traités par AA et prednisone, il a été retrouvé une tendance à l’amélioration de la SSPr et du temps jusqu’à progression biologique, mais sans améliora- tion de la SG par rapport aux patients sans altération d’ERG. Par rapport aux patients du bras contrôle de l’essai COU-AA-302, la SSPr augmente de 5,4 à 22 mois (HR = 0,31 ; IC 95 : 0,15-0,68) dans le groupe Edel 2+, alors que l’amélioration ne passe que de 8,3 à 16,7 mois dans le groupe sans réarran- gement (HR = 0,53 ; IC 95 : 0,38-0,74). Ces résultats suggèrent que les tumeurs de mauvais pronostic Edel 2+, qui représentent 15 % des CPRCm, pour- raient tirer un meilleur bénéfice de l’AA. Ces données sont néanmoins à confirmer.

Étude ELM-PC5 : ortéronel + prednisone versus placebo + prednisone chez les patients atteints d’un CPRCm progressant sous ou après docétaxel L’ortéronel (TAK-700) est un inhibiteur non stéroïdien, réversible, sélectif, de la 17,20 lyase.

ELM-PC5 (35) est une étude de phase III multi- centrique, randomisée en double aveugle, comparant ortéronel 400 mg/j + prednisone 10 mg/j versus placebo + prednisone chez les patients présentant un CPRCm progressant sous ou après docétaxel. Elle a randomisé (2:1) 1 099 hommes. Il n’a pas été retrouvé d’avantage concernant la SG, critère de jugement principal de l’étude. Les médianes de SG étaient respectivement de 17 versus 15,2 mois (HR = 0,886 ; IC 95 : 0,739-1,062 ; p = 0,19). En revanche, la SSPr était significativement améliorée, avec une médiane de 8,3 versus 5,7 mois (HR = 0,760 ; IC 95 : 0,653-0,885 ; p < 0,001), tout comme le TTP du PSA (médiane : 5,5 versus 2,9 mois ; p < 0,001).

La deuxième étude de phase III s’adressant à des patients chimionaïfs (36) étant également négative pour la SG (31,4 mois, contre 29,5 mois avec le placebo ; HR = 0,92 ; p = 0,314), le dévelop- pement de l’ortéronel a été suspendu, et l’AA reste sans concurrent en tant qu’inhibiteur de CYP17.

Réponses tumorales après remplacement de la prednisone par la dexaméthasone chez des patients atteints d’un CPRCm traités par AA Cette analyse rétrospective de 30 patients du Royal Marsden NHS Foundation Trust (37) ayant eu un

“switch” de leur corticostéroïde à la progression bio-

logique a montré, chez 6 patients (20 %), une baisse

(11)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016 | 117 du PSA d’au moins 50 % confirmée par un deuxième

prélèvement au moins 3 semaines plus tard et, chez 11, une baisse supérieure ou égale à 30 % avec un TTP médian de 11,7 semaines (IC 95 : 8,6-14,8) sous AA + dexaméthasone. Pour les patients chez qui la réponse biologique était supérieure ou égale à 50 %, le TTP était de 27,6 semaines (IC 95 : 14,5-40,7). Des réponses radiographiques ont également été obser- vées. Ainsi, pourquoi ne pas tester ce moyen simple, peu coûteux et sans effet indésirable, pour prolonger l’efficacité de l’AA pendant quelques mois ? Un essai de phase II est en cours, qui évalue la tolérance de l’AA associé à différents corticostéroïdes (prednisolone 5 mg × 2/j ou 5 mg/j et dexaméthasone 0,5 mg/j).

Syndrome de retrait avec l’enzalutamide Lors de son développement initial, l’enzalutamide semblait se distinguer des autres antiandrogènes par l’absence de syndrome de retrait. Mais, récemment, quelques cas ont été rapportés. Qu’en est-il en pratique ? Une étude anglaise (38) a analysé les données de 30 patients consécutifs traités par enza- lutamide après docétaxel et suivis par un dosage du PSA toutes les 2 semaines à l’arrêt du traitement.

Un seul a présenté une réponse biologique (baisse du PSA de plus de 50 % durant plus de 3 semaines), 2 patients ont eu une baisse du PSA comprise entre 30 et 50 %, dont 1 durant plus de 3 semaines. Il n’a pas été retrouvé de facteurs prédictifs particuliers.

ODM-201 : données d’une étude de phase I avec de nouvelles présentations orales ; conséquences sur la prescription dans l’étude de phase III

L’ODM-201 est un inhibiteur du RA de seconde génération développé dans le cancer de la prostate, de structure distincte des autres anti andro gènes.

Il associe 2 diastéréo -isomères pharmacologiquement actifs (ORM-16497 et ORM-16555). In vitro, il a montré une activité supérieure à celle de l’enzalu- tamide. Les premières données pharmacologiques et cliniques de l’étude de phase I/ II ARADES ont été publiées dans le Lancet Oncology (39). Dans cette étude, les doses de 200, 400, 600, 1 000, 1 400 et 1 800 mg/j avaient été testées. Une nouvelle étude de phase I (40), qui a inclus 31 patients, a montré que l’ODM-201 était bien toléré et présentait des interactions avec les aliments. Elle a permis de recommander la dose de 300 mg × 2/j au cours des repas pour l’étude de phase III. Par ailleurs, sur le plan de l’efficacité, à S12, 25 des 30 patients évaluables (83 %) ont présenté une réponse bio- logique (baisse du PSA d’au moins 50 %), avec une

médiane de TTP de 66 semaines. Les principaux effets indésirables étaient la fatigue (13 %) et les nausées (13 %).

L’étude de phase III ARAMIS (1 500 patients prévus) est en cours et évalue l’ODM-201 dans les CPRCm avec un PSA-DT inférieur ou égal à 10 mois en compé- tition avec les essais de phase III PROSPER, pour l’enzalutamide, et SPARTAN, pour l’ARN509 (41).

Les 3 études ont le même schéma (versus placebo) et le même critère de jugement principal (survie sans métastase). Le problème sera de trouver une place à côté de l’AA et de l’enzalutamide (41).

CT et traitements ciblés

Étude de phase III évaluant le tasquinimod Dans le CPRCm, les résultats de l’étude de phase III consa- crée au tasquinimod sont négatifs (Carducci MA et al., ESMO 2015: abstr. 4BA). Le mécanisme d’action précis de cette molécule n’a jamais été totalement clarifié, mais une étude de phase II chez des patients hormononaïfs avait donné des résultats encoura- geants. Le développement est interrompu.

Docétaxel + OGX-010 antisens anti-clustérine Les résultats de l’étude de phase III sont négatifs.

C’est donc un nouvel échec d’un traitement ciblé avec le docétaxel.

Le cabazitaxel reste actif chez les patients déjà traités par docétaxel et une HT de nouvelle génération (abiratérone et enzalutamide) Avec l’avènement, ces dernières années, de l’AA et de l’enzalutamide, il était important de savoir si l’efficacité du cabazitaxel se maintenait ou si, au contraire, une résistance croisée pouvait survenir avec ces nouvelles HT.

Dans cette étude rétrospective française (42), sur les 79 patients ayant préalablement reçu du docétaxel et de l’AA et traités à la dose de 25 mg/m 2 tous les 21 jours, une baisse du PSA d’au moins 30 % a été enregistrée dans 62 % des cas (IC 95 : 51-73), et une baisse d’au moins 50 % a été obtenue dans 35 % des cas (IC 95 : 25-47). La médiane de SSP a été de 4,4 mois. Ces résultats rassurent quant au maintien du bénéfice du cabazitaxel après l’AA.

L’efficacité du cabazitaxel dans les CPRC est indépendante de la présence d’AR-V7 dans les CTC

Il était légitime de s’interroger sur le fait qu’AR-V7

puisse être un biomarqueur prédictif de la réponse

(12)

118 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016

Cancers urologiques

100

50

0

– 50

– 100

AR-V7+ : - 7/17 = 41 % - IC 95 : 18-67 AR-V7– : - 13/20 = 65 % - IC 95 : 41-85

Meilleur e r éponse biochimique (v aria tion %)

p = 0,194

Figure 4. La présence du variant V7 n’est associée ni à une résistance aux taxanes ni à un bénéfice des taxanes (d’après Antonarakis ES et al., ASCO® GU 2015: abstr. 138, actualisé).

ou de la résistance aux taxanes. E.S. Antonarakis a publié (43) les résultats d’une étude évaluant la présence d’AR-V7 et la résistance aux taxanes, chez 37 patients dont 17 (46 %) étaient AR-V7+. Le taux de réponse est de 41 % (IC 95 :18-67) chez les AR-V7+, contre 65 % (IC 95 : 41-85) chez les AR-V7−

Cette différence n’est pas significative (figure 4).

Aucune différence statistiquement significative n’a par ailleurs été constatée en termes de SSP entre les 2 groupes de patients. Un traitement par taxane apparaît donc supérieur à un traitement ciblant le RA en cas d’AR-V7+. Il semble être une bonne option thérapeutique dans ce cas, d’autant que la réponse au cabazitaxel apparaît aussi indépendante du statut AR-V7 dans une étude allemande (CABARESC) publiée très récemment (44). Notons que, dans cette dernière étude, seul 1 patient initialement AR-V7−

sur 9 s’est converti en AR-V7+ durant le traitement par taxane, contre 7 sur 12 AR-V7+ (58 %) qui se sont convertis en AR-V7−.

Il reste néanmoins à régler l’essentiel : le problème pratique de l’isolement et de l’analyse des CTC en routine.

Rapport neutrophiles/lymphocytes, paramètre pronostique dans le CPRCm

La recherche de biomarqueurs pronostiques et prédictifs de l’efficacité de la CT et des nouvelles HT reste d’actualité dans le CPRCm. Le rapport neutro- philes/lymphocytes est un marqueur corrélé à l’inflam mation. Une étude (45) a analysé sa valeur pronostique dans 2 essais de phase III (TAX 327 et VENICE) utilisant, chez des patients atteints d’un CPRCm, une première ligne thérapeutique à base

de docétaxel. Au total, 2 230 patients ont été inclus dans ces 2 études. Dans l’échantillon initial à partir de l’étude VENICE (4), un rapport neutrophiles/

lymphocytes supérieur ou égal à la médiane (≥ 2) et une durée de déprivation androgénique initiale inférieure à la médiane (< 15 mois) étaient associés à une augmentation du risque de décès, avec respectivement des HR de 1,29 (IC 95 : 1,11-1,50 ; p < 0,001) et de 1,41 (IC 95 : 1,21-1,64 ; p < 0,001) après ajustement sur l’âge, la douleur, les taux de phosphatases alcalines et d’hémoglobine à l’inclusion.

Le rapport neutrophiles/lymphocytes pourrait être intégré comme facteur de stratification dans les essais thérapeutiques ou incorporé dans les nomo- grammes pronostiques. C’est un facteur simple et non coûteux qui pourrait s’avérer très utile en pratique.

La fin du cabozantinib dans les CPRCm

M.R. Smith (ASCO® GU: abstr. 139) a présenté les

résultats de l’analyse finale de COMET-1, une étude

de phase III randomisée (2:1) comparant le cabozan-

tinib (60 mg/ j) à la prednisone chez des patients

atteints d’un CPRCm après docétaxel. L’essai a inclus

1 028 patients – 682 dans le bras expérimental,

346 dans le bras placebo –, mais n’a pas atteint

son objectif principal, avec une survie médiane de

11 mois dans le bras expérimental et de 9,8 mois

dans le bras prednisone (HR = 0,9 ; IC 95 : 0,76-1,06 ;

p = 0,21). En revanche, les objectifs secondaires de

réponse à la scintigraphie osseuse, de SSPr, de temps

jusqu’à événement osseux, ainsi que le taux de

conversion des CTC et les marqueurs du remodelage

osseux étaient améliorés.

(13)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 3 - mars 2016 | 119

Réponse à l’olaparib

Suppression du cadre de lecture Délétion simple copie Mutation faux-sens

Mutation stop Délétion homozygote Perte d’hétérozygotie

★ Événement germinal

Nombre de patients 17 15 14 20 30 39 35 36 1 6 5 26 48 8 16 11 7 12 44 31 50 2 3 4 9 10 13 18 19 21 22 23 24 25 27 28 29 32 33 34 37 40 41 42 43 45 46 47 49 24 36 36 48 ≥ 44 ≥ 44 ≥ 40 57 73 16 58 19 39 62 ≥ 40 12 12 11 24 8 8 24 8 7 11 13 12 1 12 7 12 4 12 12 22 13 4 12 17 4 12 11 12 12 9 12 12 1 12

X X X X X X X X X X X X X X X X ★ ★ ★

★ ★ ★

Durée de traitement (sem.) Biomarqueur positif BRCA2 ATM FANCA CHEK2 BRCA1 PALB2 HDAC2 RAD51 MLH3 ERCC3 MRE11 NBN

Pas de réponse à l’olaparib Cancer de la prostate métastatique résistant à la castration

Figure 5. Étude TOPARP-A : descriptif des altérations génomiques dans les voies de réparation de l’ADN (d’après Mateo J et al., NEJM 2015;373:1697-708, actualisé); étude TOPARP-B (d’après Mateo J et al., NEJM 2015;373:1697-708, actualisé).

La partie a peut-être été perdue en raison de la toxicité, avec un taux d’arrêt de traitement pour effets indésirables supérieur au taux d’arrêt pour progression (33 versus 19 %), 62 % d’effets indésirables graves et 60 % de réductions de dose ! La dose- intensité n’a été que de 75 %, avec un possible effet négatif sur l’efficacité attendue.

Olaparib dans les CPRCm présentant des altérations de la réparation de l’ADN

Les CPRCm peuvent présenter des anomalies géno- miques qui interfèrent avec la réparation de l’ADN.

L’olaparib est un inhibiteur de PARP actuellement approuvé uniquement dans les cancers de l’ovaire à BRCA1/2 muté.

Dans l’étude de phase II TOPARP-A (46), menée chez des patients traités par olaparib à la dose de 400 mg × 2/j, le critère de jugement principal était le taux de réponse RECIST en cas de lésions évaluables, de réponse biochimique (réduction de 50 % du PSA) ou de réduction du nombre de CTC (de > 5 à < 5 pour 7,5 ml).

Cinquante patients ayant tous été traités auparavant

par docétaxel, 49 (98 %) par AA ou enzalutamide,

29 (58 %) par cabazitaxel ont été inclus. Un tiers

des patients (16 sur 49 [33 %] ; IC 95 : 20-48) ont

présenté une réponse, et 12 d’entre eux ont été

traités plus de 6 mois. Les données de séquençage

par NGS de biopsies (28 ostéomédullaires,

22 biopsies dirigées) ont identifié des altérations

de gènes impliqués dans la réparation de l’ADN

(BRCA1/2, ATM, FANCA [gènes de l’anémie de

Fanconi], CHEK2) chez 16 patients. Chez ces

derniers, 14 (88 %) ont présenté une réponse à

l’olaparib, dont les 7 patients avec une perte de

BRCA2 (3 avec mutations constitutionnelles), et

4 des 5 patients avec des anomalies d’ATM. Notons

qu’un patient présentait une délétion hétérozygote

de PALB2. La médiane de SSPr était de 9,8 mois

en cas de biomarqueurs positifs et de 2,7 mois en

leur absence (p < 0,001). La SG était prolongée

(13,8 versus 7,5 mois ; p = 0,05) [figures 5 et 6,

p. 120].

(14)

Cancers urologiques

ICMJE

Revue indexée depuis octobre 2015 dans la base internationale NOUVEAU

Société éditrice : EDIMARK SAS CPPAP : 0617 T 90442 – ISSN : 2110-087X

Trimestriel Prix du numéro : 48 €

Vol. VII - n° 1 Janvier-février-mars 2016

Périodique de formation

w w w . e d i ma r k . f r L’abonnement,

un engagement fort dans la vie de votre discipline

page XX

Rétrospective

& perspectives

dans les cancers ur ologiques

Coordonné par le Dr Philippe Beuzeboc (Paris)

DOSSIER

Vocabulaire

Organe Jean-Joseph Julaud (Paris)

0001_COU 1

15/03/2016 12:16:59

100 80 60 40 20 0

100 80 60 40 20

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 0

Biomarqueur positif médiane : 9,8 mois

Biomarqueur négatif médiane : 2,7 mois

p < 0,001

20 Mois depuis l’inclusion

Survie sans progression radiologique

Pr opor tion de pa tien ts (%)

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18

Biomarqueur positif médiane : 13,8 mois

Biomarqueur négatif médiane : 7,5 mois

p = 0,05

20 Mois depuis l’inclusion

Survie globale

Pr opor tion de pa tien ts (%)

Figure 6. Étude de phase II TOPARP-A évaluant l’olaparib dans le cancer de la prostate métastatique résistant à la castration multitraité.

Retrouvez la rétrospective sur les cancers du rein, du testicule et les tumeurs urothéliales sur www.edimark.fr ainsi que dans le n o  1

vol. VII de Correspondances en Onco-Urologie (janvier-février-mars 2016).

Retrouvez l’actualité à l’ASCO® GU 2016 des cancers

de la prostate, du rein, du testicule et des tumeurs urothéliales, ainsi que l’immunothérapie des tumeurs urologiques

(F. Rozet, A. Fléchon, L. Albiges, P. Beuzeboc) dans le n o  1 vol. VII de Correspondances en Onco-Urologie et sur www.edimark.fr

On peut conclure que l’olaparib présente une activité antitumorale dans les 20 à 30 % de CPRCm spora- diques présentant une anomalie de la réparation de l’ADN. Cela encourage à proposer à ces patients de participer à des essais de traitements personnalisés tant que les approches de séquençage par NGS ne sont pas accessibles en pratique. Les dérivés du platine

ou d’autres alkylants pourraient également être utiles dans ces cas. Il faut aussi noter dans cette série les 6 % de mutations constitutionnelles de BRCA2, signe que leur prévalence pourrait avoir été sous-estimée dans la population générale des CPRCm. ■

1. Robinson D, Van Allen EM, Wu YM et al. Integrative clinical genomics of advanced prostate cancer. Cell 2015;161:1215-28.

2. Balakrishnan VS. Targetable mutations found in metastatic prostate cancer. Lancet Oncol 2015;16:e316.

3. Giovacchini G, Picchio M, Coradeschi E et al. Predic- tive factors of [(11)C]choline PET/ CT in patients with bio- chemical failure after radical prostatectomy. Eur J Nucl Med Mol Imaging 2010;37(2):301-9.

4. Castro E, Goh C, Leon- gamornlert D et al. Effect of brca mutations on meta static relapse and cause- specific survival after radical treatment for localised prostate cancer.

Eur Urol 2015;68(2):186-93.

Références bibliographiques

P. Beuzeboc déclare avoir des liens d’intérêts avec Sanofi ,

Janssen, Astellas, Bayer, Novartis, Ipsen, Pierre Fabre et Amgen.

Références

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