Universit´ e Claude Bernard Lyon 1
M1G – G´ eom´ etrie : Courbes et surfaces
Corrig´ e de l’examen final du 6 janvier 2015
Les documents sont autoris´ es mais les calculettes sont interdites (car in- utiles). Il sera tenu compte de la qualit´ e de la r´ edaction pour l’attribution d’une note.
Le QCM. – On r´ epond par vrai ou faux, sans justifier.
1.– Soit ¯ γ : I −→ S une courbe asymptotique. Alors la composante normale de ¯ γ
00est nulle.
R´ep.– Vrai, c’est mˆeme une ´equivalence. Soitn:S−→S2une normale unitaire `aS.De h¯γ0, n◦¯γi= 0, on d´eduit
h¯γ00, n◦γi¯ +h¯γ0, dn(¯γ0)i= 0.
Ainsih¯γ00, n◦γi¯ = 0 si et seulement si−II(¯γ0,¯γ0) =h¯γ0, dn(¯γ0)i= 0, i. e. ¯γest une ligne asymptotique pour S.
2.– Soit ¯ γ : I −→ S une g´ eod´ esique. S’il existe s
1< s
2tels que ¯ γ(s
1) = ¯ γ(s
2) alors ¯ γ est p´ eriodique et s
2− s
1est un multiple de la p´ eriode.
R´ep.– Faux. Penser aux g´eod´esiques des cˆones : elles peuvent s’auto-intersecter sans ˆ
etre p´eriodiques pour autant.
3.– Soit ¯ γ : I −→ S une ligne de courbure. S’il existe s
1< s
2tels que
¯
γ(s
1) = ¯ γ(s
2) alors ¯ γ est p´ eriodique et s
2− s
1est un multiple de la p´ eriode.
R´ep.– Faux. Penser au plan ou `a la sph`ere. Sur de telles surfaces, toute courbe est une ligne de courbure.
4.– Soit S ⊂ R
3le support d’une surface param´ etr´ ee r´ eguli` ere et P un plan
de R
3. On suppose que P ∩ S est le support d’une courbe ¯ γ param´ etr´ ee par
la longueur d’arc. Si en tout point p ∈ P ∩ S les plans P et T
pS sont ortho-
gonaux alors ¯ γ est une g´ eod´ esique de S.
R´ep.– Vrai. Soit N(s) une normale unitaire `a S en ¯γ(s). Puisque les plansP et TpS sont orthogonaux, (N(s),γ¯0(s)) est une base deTpS.Puisque la courbe ¯γ est plane et que h¯γ0(s),γ¯00(s)i= 0 on a n´ecessairement ¯γ00(s)∈V ect(N(s)).Et donc (¯γ00(s))T = 0.
5.– On suppose que les coefficients de la premi` ere forme fondamentale d’une param´ etrisation (u, v) −→ f(u, v) sont E(u, v) = 1, G(u, v) = ϕ(u) et F (u, v) = 0 avec pour tout u, 1 > ϕ(u) > 0 et ϕ
00(u) < 0. Alors la cour- bure de Gauss de la surface est strictement positive.
R´ep.– Vrai. La formule de Brioschi montre queK= 1 2ϕ2(1
2ϕ02−ϕϕ00).Puisqueϕ00(u)<0 pour toutu,on a doncK >0 en tout point.
6.– Soit (u, v) 7−→ f(u, v) une param´ etrisation r´ eguli` ere. On suppose que les coefficients de la seconde forme fondamentale valent L(u, v) = 1 et M(u, v) = N (u, v) = ϕ(u) avec pour tout u, 1 > ϕ(u) > 0 et ϕ
00(u) < 0. Alors la cour- bure moyenne H ne s’annule en aucun point.
R´ep.– Vrai. On a
K= LN − M2
EG−F2 = ϕ−ϕ2 EG−F2 >0.
CommeH2≥K,on en d´eduit queH ne peut s’annuler.
7.– Soit f : ]0, 1[
2−→ R
3une param´ etrisation r´ eguli` ere isom´ etrique et φ : ]0, 1[
2−→]0, 1[
2telle que φ(u, v) = (v, u). Alors f ◦ φ : ]0, 1[
2−→ R
3est une param´ etrisation r´ eguli` ere isom´ etrique.
R´ep.– Vrai. En effet, les cœfficients de la premi`ere forme fondamentale de f sont E=G= 1 etF= 0 et l’effet deφest de permuterE etG.
8.– Soit f
1, f
2: ]0, 1[
2−→ R
3deux param´ etrisations r´ eguli` eres isom´ etriques entre elles et φ : ]0, 1[
2−→]0, 1[
2telle que φ(u, v) = (v, u). Alors f
1◦ φ et f
2sont isom´ etriques.
R´ep.– Faux. Puisquef1et f2 sont isom´etriques on a E1=E2, F1=F2, G1=G2
avec des notations ´evidentes. Les cœfficients de la premi`ere forme fondamentale def3= f1◦φsontE3=G1, F3=F1 et G3=E1 donc en g´en´eralE36=E2 et G36=G2.
9.– Soit f : U −→ S une surface param´ etr´ ee r´ eguli` ere, injective et plate (i. e. dont la courbure de Gauss est identiquement nulle) et γ : I −→ U une courbe C
∞ferm´ ee simple. Alors l’int´ egrale de la courbure g´ eod´ esique de
¯
γ = f ◦ γ vaut R
¯
γ
k
gds = 2π.
R´ep.– Vrai. Par le th´eor`eme de Jordan-Sch¨onflies,γborde un domaineDhom´eomorphe
`
a un disque, son image parf est hom´eomorphe `a un disque dont le bord est l’image de ¯γ.
Le th´eor`eme de Gauss-Bonnet s’´ecrit Z
¯ γ
kgds+ Z
f(D)
Kd2S= 2π
et puisqueK≡0, on obtientR
¯
γkgds= 2π.
10.– L’ensemble S = {(x, y, z) ∈ R
3| x
2+ y
2− 2z
2= 0} est une sous-vari´ et´ e de R
3.
R´ep.– Faux. L’ensembleS est un cˆone.
Probl` eme. – Soit α : [0, L] −→ R
3une courbe bir´ eguli` ere C
∞param´ etr´ ee par la longueur d’arc et soit f la surface param´ etr´ ee d´ efinie par
f : [0, L] × [0, 2π] −→ R
3(u, v) 7−→ α(u) + r(cos(v )n(u) + sin(v)b(u)).
o` u n et b sont la normale principale et la binormale de α et r > 0. Une telle surface est dite tubulaire de courbe centrale α et de rayon r.
1) On note t = α
0, k la courbure principale de α et τ sa torsion.
i) Montrer que
∀(u, v) ∈ [0, L] × [0, 2π], f
u(u, v) = (1 − rk(u) cos v)t(u) + τ (u)f
v(u, v).
ii) D´ eterminer les coefficients E, F et G de la premi` ere forme fondamen- tale de f.
iii) Montrer que si r est suffisamment petit, alors f est surface r´ eguli` ere.
iv) D´ eterminer une normale unitaire N (u, v) aux points (u, v) o` u f est r´ eguli` ere.
R´ep.– i) On a
fu(u, v) = α0(u) +r((−k(u)t(u) +τ(u)b(u)) cosv−τ(u)n(u) sinv)
= (1−rk(u) cosv)t(u) +rτ(u)(cosθ b(u)−sinv n(u))
et
fv(u, v) =−rsinv n(u) +rcosv b(u).
Ainsi
fu(u, v) = (1−rk(u) cosv)t(u) +τ(u)fv(u, v).
ii) Le calcul des cœfficientsE, F etGest quasi-imm´ediat grˆace `a la formule du point i).
E = (1−rk(u) cosv)2+r2τ2(u) F = r2τ(u)
G = r2. iii) Ainsi
EG−F2=r2(1−rk(u) cosv)2.
Soitkmax= maxu∈[0,L]k(u).Sirkmax<1 alorsEG−F2>0 en tout point de [0, L]×[0,2π]
et f est r´eguli`ere.
iv) On afu∧fv= (1−rkcosv)t∧τ fv.Or
t∧fv = −rsinv t∧n+rcosv t∧b
= −rsinv b−rcosv n Par cons´equent
N(u, v) = fu∧fv
kfu∧fvk =−(cosv n+ sinv b).
2) On suppose d´ esormais que r est choisi suffisamment petit pour que f soit r´ eguli` ere en tout point. Montrer que l’aire de f([0, L] × [0, 2π]) ne d´ epend que de r et de la longueur de α.
R´ep.– On a
Aire(f) = Z
[0,L]×[0,2π]
pEG−F2dudv
= Z
[0,L]×[0,2π]
r(1−rk(u) cosv)dudv
= Z
[0,L]×[0,2π]
rdudv carR2π
0 cosv dv= 0.AinsiAire(f) = 2πLr.
3) i) D´ eterminer les coefficients L, M et N de la seconde forme fondamentale de f en fonction de k, τ, r et v.
ii) En d´ eduire la courbure de Gauss K de f en tout point.
R´ep.– i) On a
fvv = −(rcosv n+rsinv b) =rN,
fuv = −rsinv(−kt+τ b) +rcosv(−τ n) =rksinv t+rτ N fuu = −rk0cosv t+ (1−rkcosv)kn+τ0fv+τ fvu. Ainsi
N = hfvv, Ni=hrN, Ni=r M = hfuv, Ni=rτ
L = hfuu, Ni=h(1−rkcosv)kn+τ fvu, Ni
= −kcosv(1−rkcosv) +rτ2. ii) On a
K=LN − M2
EG−F2 =−rkcosv(1−rkcosv)
r2(1−rkcosv)2 = −kcosv r(1−rkcosv).
4) i) Montrer que pour tout u ∈ [0, L], v 7→ f (u, v) est une ligne de courbure.
ii) En d´ eduire les directions et les courbures principales de f et d´ eterminer la courbure moyenne H.
iii) ´ Ecrire la matrice A de l’op´ erateur de Weingarten dans la base (t,
1rf
v).
R´ep.– i) On a
Nv= sinv n−cosv b=−1 rfv
ainsi v −→ f(u, v) est une ligne de courbure et k1 = −1r est une courbure principale.
Les directions principales ´etant orthogonale, la droitevect(t) donne n´ecessairement l’autre direction principale.
ii) Puisque K=k1k2, n´ecessairementk2= 1−rkkcoscosvv et
H = k1+k2 2 =−1
r + kcosv 1−rkcosv
iii) La base (t,1rfv) ´etant constitu´ee de vecteurs propres de l’op´erateur de Weingarten, on a :
A=
kcosv 1−rkcosv 0
0 −1
r
.
5) Donner l’expression du r´ eseau des lignes de courbures orthogonales aux lignes v 7→ f (u, v). On pourra s’aider de la fonction Ψ : [0, L] −→ R d´ efinie par
Ψ(w) :=
Z
w0
−τ(s)ds.
Montrer que pour tout u ∈ [0, L], la courbe w −→ γ
u(w) := f(u + w, Ψ(w)) est une ligne de courbure.
R´ep.– On cherche une ligne de courbure sous la formew−→f(u(w), v(w)).On a f(u(w), v(w)) = u0(w).fu(u(w), v(w)) +v0(w).fv(u(w), v(w))
= (1−rk(u(w)) cosv(w))t(u(w)) +τ(u(w))fv(u(w), v(w)) +v(w)fv(u(w), v(w)) Ainsif(u(w), v(w)) est proportionnel `at siv(w) := Ψ(w).On obtient alors
f(u(w),Ψ(w)) = (1−rk(u(w)) cos Ψ(w))t(u(w)).
Pour la fonctionu, on peut choisiru(w) =u0+w.
6) i) Montrer que pour tout u ∈ [0, L], v −→ f(u, v) est une g´ eod´ esique.
ii) Montrer que u 7→ f(u, v) est une g´ eod´ esique si et seulement si −k
0cos v + kτ sin v = 0 (1)
rτ
0− (1 − rk cos v)k sin v = 0 (2)
iii) Donner un exemple de choix de courbe non plane α pour laquelle il y ait au moins une courbe u 7→ f (u, v) qui soit une g´ eod´ esique.
iv) Montrer que si u 7→ f (u, v) est une g´ eod´ esique, alors il existe Cte ∈ R telle que
−2k cos v + rk
2cos
2v + rτ
2= Cte.
v) Montrer que les courbes u 7→ f(u,
π2) et u 7→ f (u,
3π2) ne sont jamais des g´ eod´ esiques.
R´ep.– i) En effetfvv =rN donc (fvv)T = 0.
ii) On a
fuu = −rk0cosv t+ (1−rkcosv)kn+τ0fv+τ fvu
= −rk0cosv t+ (1−rkcosv)kn+τ0fv+rkτsinv t+rτ2N d’o`u
hfuu, ti = −rk0cosv+rkτsinv hfuu, fvi = r2τ0+ (1−rkcosv)khn, fvi
= r2τ0−r(1−rkcosv)ksinv Ainsi (fuu)T = 0 si et seulement si
−k0cosv+kτsinv= 0 (1) rτ0−(1−rkcosv)ksinv= 0 (2)
iii) Siαest une h´elice circulaire alorsketτ sont constants et non nuls. Les ´equations (1) et (2) montrent alors que les courbesu7→f(u,0) etu7→f(u, π) sont des g´eod´esiques.
iv) L’´equation (2) montre que
ksinv= rτ0 1−rkcosv En injectantτ×(2) dans (1) on obtient donc
−k0cosv+ rτ τ0
1−rkcosv = 0.
Soit encore
−k0cosv+rkk0cos2v+rτ τ0= 0 ce qui s’int`egre en
−2kcosv+rk2cos2v+rτ2=Cte.
iv) Une courbeu7→f(u, v) est une g´eod´esique si et seulement si −2kcosv+rk2cos2v+rτ2 = Cte (10)
rτ0−(1−rkcosv)ksinv = 0 (2)
Ainsi les courbesu7→f(u,π2) etu7→f(u,3π2 ) sont des g´eod´esiques si et seulement si rτ2 = Cte (10)
rτ0±k = 0 (2) ⇐⇒
τ = Cte (10)
k = 0 (2)
Ceci est impossible car αest suppos´ee bir´eguli`ere, autrement dit k6= 0 en tout point.
7) On suppose d´ esormais que α est une courbe plane ferm´ ee simple.
i) Soit R = {(u, v) ∈ [0, L] × [0, 2π] | K(u, v) ≥ 0}. D´ eterminer R puis donner une expression de l’aire de f (R) en fonction de L, r et k.
ii) Montrer que l’aire de f (R) ne d´ epend en fait que de r et de L.
R´ep.– i) Il est imm´ediat queR= [0, L]×[π2,3π2 ].On a A(f(R)) =
Z
R
d2S
= Z
R
pEG−F2dudv
= Z
R
r(1−rk(u) cosv)dudv
= πLr+ 2r2 Z L
0
k(u)du.
ii) On applique le th´eor`eme des tangentes tournantes pour obtenir : Z L
kalg(s)ds=±2π
o`u kalg est la courbure alg´ebrique de α. Comme α est bir´eguli`ere, kalg garde un signe constant. Donc
Z L 0
k(u)du=
Z L 0
kalg(u)du
= 2π.
Au bilan
A(f(R)) =πLr+ 4πr2.
8) On suppose maintenant que α est un cercle. Soient 0 ≤ s
1< s
2< L. On pose D = [s
1, s
2] × [0, 2π] et E = [s
1, s
2] × [0, π].
i) Montrer que ∂f (∂D) est l’une union de quatre supports de courbes g´ eod´ esiques et que ∂f (E) est une union de deux supports de courbes g´ eod´ esiques.
ii) Calculer
Z
D
Kd
2S
directement puis au moyen du th´ eor` eme de Gauss-Bonnet.
iii) Pourquoi ne peut-on pas appliquer le th´ eor` eme de Gauss-Bonnet, tel qu’il est ´ enonc´ e dans le cours, pour calculer R
E
Kd
2S ?
R´ep.– i) Les courbes v 7→ f(u, v) sont des g´eod´esiques d’apr`es 6.i. Les courbes u 7→
f(u,0) etu7→f(u, π) sont des g´eod´esiques car elles satisfont aux ´equations du 6.ii (kest constant etτ= 0).
ii) On a d’une part Z
D
Kd2S= Z
D
−kcosv dudv=−k(s2−s1) Z π
0
cosv dv= 0.
D’autre part, la formule de Gauss-Bonnet s’´enonce Z
∂D
kgds+ Z
D
Kd2S+
4
X
i=1
θi= 2π.
Notonsγ1,...γ4 les courbes ”´evidentes” qui d´efinissent le bord. Pour chacune d’entre elles la courbure g´eod´esique est nulle d’apr`es la question pr´ec´edente. Puisque F = r2τ ≡0, les courbes s’intersectent en des angles ext´erieursθi qui sont droits. La formule de Gauss- Bonnet s’´ecrit donc ici
0 + Z
D
Kd2S+ 4×π 2 = 2π soit encore
Z
D
Kd2S= 0.
iii) Le domaine f(E) n’est pas simple. Il est hom´eomorphe `a un anneau et non `a un disque. La formule de Gauss-Bonnet, telle qu’elle est ´enonc´ee dans le cours, ne s’applique pas. Notons d’ailleurs que si l’on appliquait malgr´e tout cette formule on obtiendrait
Z
E
Kd2S = 2π− Z
∂E
kgds
= 2π−0
.
Cette valeur est erron´ee. Un calcul direct montre en effet que Z
E
Kd2S = 0.