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Article pp.7-10 du Vol.7 n°1 (2009)

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É DITORIAL

Au cours de ces trente dernières années, le champ de recherche sur les TICE (technologies de l’information et de la communication dans l’éducation) a évolué en deux phases. Tout d’abord, en distinguant progressivement, au cours des années 1970-80, le champ des technologies éducatives de celui, plus spécifique, des médias éducatifs (Clark et Salomon, 1986), puis, plus récemment, en particularisant ce dernier champ : les médias n’étant plus considérés comme des tuyaux passifs véhiculant de l’information, mais pouvant également être des outils cognitifs ou des médiateurs entre personnes (Basque, 2005).

Les différents domaines de recherche mettant en œuvre des dispositifs informatiques comme aide à l’apprentissage et l’enseignement ont, entre autres tâches, à faire la preuve empirique du bien-fondé de cette mise en œuvre. Mais la notion de technologie incorpore souvent prima facie son efficacité, à tel point que l’on oublie parfois de la vérifier dans la pratique. Ainsi, de nombreux dispositifs et en particulier ceux qui relèvent de l’EAD (enseignement à distance) ou de la FOAD (formation ouverte et à distance) sont souvent construits sans être testés et, lorsqu’ils le sont, sans qu’on s’accorde nécessairement sur ce que le test montre vraiment.

Si les TICE en général et les dispositifs d’EAD en particulier peuvent être évalués sur leur capacité à favoriser l’apprentissage ou l’enseignement, les preuves empiriques qui en ont été tirées prêtent souvent à débat. Par exemple, y a eu, dans les années 1980- 1990, un large débat sur les effets des médias sur l’apprentissage, animé par Richard Clark et Robert Kozma (voir Clark, 2001, pour une synthèse, et Chaptal, 2003, pour une revue en français, ainsi que, dans ce numéro, l’entretien avec Clark et son article).

Clark soutient que le média, en lui-même, n’influencera jamais l’apprentissage, Kozma montre que, dans certains cas circonscrits, l’on pouvait arriver à estimer une plus-value de leur utilisation. En d’autres termes, il a souvent été dit que l’on apprenait et enseignait différemment avec les TICE, sans que les éléments de cette différence soient toujours bien explicités, voire mis au jour (e.g., de récentes revues, pour l’enseignement à distance, Bernard et al., 2004 ; pour les outils cognitifs autonomes, Clarebout et Elen, 2006 ; pour les hypermédias, Dillon et Gabbard, 1998). En bref, si le débat Clark/Kozma s’est déplacé sur de nouveaux objets, les questions fondamentales qu’il pose sont-elles définitivement réglées ou bien encore à tester empiriquement ?

Ce numéro thématique se propose donc à faire le point, autant qu’il puisse être fait, sur le cas particulier des dispositifs d’EAD et de FOAD, à propos desquels leurs concepteurs doivent faire la preuve de leur pertinence, voire de leur efficacité sur les différents aspects de l’enseignement-apprentissage auxquels ils prétendent répondre : atteinte de certains publics, qualité des formations du point de vue pédagogique et didactique, coût, etc. Aussi les textes rassemblés dans ce numéro nous éclairent-ils sur certains de ces points, tout en laissant encore en suspens des questions qui restent fondamentales et que nous essaierons de formuler à la fin de cet éditorial.

La première contribution, de Jean-François Bourdet et Pascal Leroux, du Laboratoire d’informatique de l’université du Mans, aborde la conceptualisation du

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8 D&S – 7/2009. Les effets des dispositifs d’EAD

processus de conception d’une plate-forme d’EAD. Si la posture classique consiste à envisager les choses selon un cycle ingénierie – étude d’usage – réingéniérie, la vision qu’ils présentent repose sur la notion d’appropriation des outils du dispositif d’EAD, qui intègre la construction des usages dès la conception. Selon cette nouvelle perspective, le vécu des acteurs devient aussi important que le processus de conception et ce sont ces deux dimensions, appréhendées simultanément, qui donnent à comprendre ce que devient un dispositif d’EAD.

Le texte suivant rend compte d’une étude franco-allemande, menée par Brigitte Albero, de l’Université de Haute Bretagne, et par Arnim Kaiser, de l’Université de la Force de défense fédérale à Munich. Avec prudence, compte tenu de la nature de leur échantillon, les auteurs discutent de l’idée intéressante selon laquelle la FOAD ne pourrait prétendre s’adresser à tous les publics. En effet, seuls des adultes déjà très autonomes et sûrs de leurs aptitudes à apprendre en bénéficieraient véritablement. Ce constat débouche sur le fait que certaines formes d’organisation de la FOAD conviendraient mieux à certains profils d’apprenants, hypothèse qui reste néanmoins à mettre à l’épreuve.

Après eux, Jean-Marie Dujardin et Séverine Maron, de l’École de Gestion de l’Université de Liège, lèvent le voile sur le coût de l’EAD, pour une institution qui s’y engage. Profitant d’un projet européen, soumis à une obligation et à une rigueur d’évaluation auxquels d’autres dispositifs d’EAD universitaires peuvent échapper, les auteurs exposent leur démarche et, surtout, livrent quelques-uns de leurs résultats en termes de coût global de conception de modules d’enseignement et de coût de l’heure par étudiant. Nous saluons cette transparence qui nous rappelle que les effets de l’EAD ne peuvent être étudiés en dehors de toute contrainte économique.

Puis, c’est au tour de Marianne Follet et Marie-France Peyrelong, de l’École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques, de rendre compte des usages d’un outil de travail collaboratif dans le contexte particulier de la rédaction collective de documents. Les apprenants observés (élèves-conservateurs de bibliothèques) semblent essentiellement bénéficier des fonctionnalités de conservation et d’organisation collective offerte par le système, et ce, dans celles qui précèdent la rédaction et dans les phases qui lui succèdent. Le processus de production en serait facilité dans son ensemble, bien que la phase de rédaction résiste à une désindividualisation, pourtant permise par la plate-forme.

Le texte qui suit nous offre de faire le point sur un aspect particulier de l’EAD, la visioconférence. Mônica Macedo-Rouet, de l’ERT-IRMA de l’Université de Poitiers, fait une synthèse de la littérature sur les effets de la visioconférence, et pointe ce qu’il est raisonnable d’espérer de ce média, selon tel ou tel contexte d’usage. Son angle d’approche est la notion de distance de transaction et elle indique dans quelle mesure cette distance est plus ou moins modifiée par le recours à la visioconférence. Au moment où les débits intercontinentaux se stabilisent et ou des services gratuits de visioconférence pair-à-pair (peer-to-peer) voire multipoints se multiplient, sa contribution éclaire les nouvelles possibilités de recourir à la voix et à l’image de façon synchrone.

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Éditorial 9 Deux autres contributions à ce numéro sont au crédit de Richard Clark, du Centre for Cognitive Technology de l’Université de Californie du Sud à Los Angeles.

Comme nous l’avons dit précédemment, il fut l’un des protagonistes de la controverse sur les effets des médias avec Robert Kozma. Nous donnons la traduction d’un de ses articles qui pourra aider les promoteurs et les détracteurs de l’EAD à davantage discuter sur des résultats tangibles plutôt que de produire des débats d’opinion. L’idée développée dans ce texte est que toute tentative d’évaluation de tels dispositifs doit permettre de séparer les effets du mode de diffusion de l’information et les effets de la méthode d’enseignement, que les dispositifs d’EAD ou de FOAD superposent et rendent souvent difficiles à observer.

Nous complétons son point de vue par l’entretien que nous avons réalisé avec lui, non parce qu’il défendit le premier la position sur laquelle la communauté des chercheurs s’accorde aujourd’hui, mais parce que son expérience particulière offre de porter un regard critique et utile à tous ceux qui sont engagés dans des projets d’EAD, à différents niveaux, scientifique, pédagogique, politique. Ses travaux débouchent aussi sur des méthodes de formation professionnelle peu connues des chercheurs francophones et qui dépassent largement le champ de l’EAD.

Au terme du parcours de ce numéro, il apparaît que certaines questions ont traversé les dernières décennies sans que des réponses satisfaisantes ne leur aient été apportées. Par exemple :

– d’un point de vue théorique, l’évolution des paradigmes de recherche en psychologie de l’éducation (e.g., socio-constructivisme, théorie de l’activité, action située, cognition distribuée) ont-ils fondamentalement influencé la conception des plates-formes actuelles, et permettent-ils de prédire leurs effets éventuels sur l’enseignement ou l’apprentissage ?

– évaluer les effets de ces dispositifs, c’est comparer un enseignement ou un apprentissage à distance à un autre plus classique. Mais cette comparaison a-t-elle toujours un sens lorsque les deux types d’enseignement comparés ont de plus en plus souvent des points communs (i.e., l’enseignement traditionnel peut comporter des phases plus « modernes », et les enseignements avec TICE alternent de plus en plus souvent avec des enseignements « en présence », ou « mixtes ») ? Parfois, au contraire, les situations en présence et à distance sont tellement différentes que leur comparaison n’a plus de sens sur le plan méthodologique ;

– dans le meilleur des cas, la mise au jour d’éventuels effets de l’EAD se fait souvent par comparaison avec un autre dispositif, ne différant du premier que par certains aspects permettant justement la mise en évidence d’effets. Concrètement, quels sont les modes de comparaison les plus pertinents, selon quels buts ? L’autonomie de plus en plus grande laissée à l’apprenant ne complexifie-t-elle pas l’évaluation de leur efficacité ? Quelles méthodes (e.g., expérimentation contrôlée, méta-analyse, analyse coût-bénéfice, test d’utilisabilité, étude d’usage), portant sur quelles variables dépendantes (e.g., charge cognitive, attitudes, connaissances, comportement, relations interpersonnelles) peuvent être utilisées pour vraiment s’assurer de l’effet positif du dispositif ?

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10 D&S – 7/2009. Les effets des dispositifs d’EAD

– que peut-il se passer du côté de l’enseignement ? Quel effet l’ingénierie pédagogique mise en œuvre peut-elle avoir sur les dispositifs en service ? La majorité des études dans le champ de l’EAD ne contrôlent pas toujours « l’effet- tuteur ». Jusqu’à quel point les caractéristiques d’un cours en ligne sont-elles différentes d’un enseignement dit « traditionnel » ? Cette question devient de plus en plus d’actualité avec l’apparition de systèmes gérant des scénarios pédagogiques ;

– de manière prospective, quels vont pouvoir être les prochains dispositifs (e.g., réalité virtuelle, agents pédagogiques, systèmes de learning design) pouvant apporter des effets positifs sur l’apprentissage et l’enseignement à distance ?

D’autres numéros thématiques de Distances et Savoirs seront d’évidence nécessaires pour continuer à avancer sur ces questions qui, tant qu’elles resteront superficiellement traitées, feront courir le risque de proposer encore longtemps trop de dispositifs coûteux, inadaptés, et peu efficaces.

PHILIPPE DESSUS –Université de Grenoble PASCAL MARQUET –Université de Strasbourg Remerciements

Nos chaleureux remerciements vont aux relecteurs des articles de ce numéro : Éric Bruillard, Christian Depover, Michel Grangeat, France Henri, Geneviève Jacquinot, Laurent Lima, Grégory Munoz et Emmanuel Sylvestre. Merci également à Martine Vidal pour nous avoir très efficacement guidés tout au long du processus éditorial de ce numéro.

Bibliographie

Basque J., « Une réflexion sur les fonctions attribuées aux TIC en enseignement universitaire », Revue Inter. des Technologies en Pédagogie Universitaire, vol. 2, n° 1, 2005, p. 30-41.

Bernard R. M., Abrami P. C., Lou Y., Borokhovski E., Wade A., Wozney L. et al., “How does distance education compare with classroom instruction? A meta-analysis of the empirical literature”, Review of Educational Research, vol. 74, n° 3, 2004, p. 379-439.

Chaptal A., Efficacité des technologies éducatives dans l’enseignement scolaire. Analyse critique des approches française et américaine, Paris, L’Harmattan, 2003.

Chen C. et Rada R., “Interacting with hypertext : a meta-analysis of experimental studies”, Human-Computer Interaction, vol. 11, 1996, p. 125-156.

Clarebout G., Elen J., “Tool use in computer-based learning environments: Towards a research framework”, Computers in Human Behavior, vol. 22, n° 3, 2006, p. 389-411.

Clark R. E. (Ed.), Learning from media, Greenwich, Information Age Publishing, 2001.

Clark R. E. et Salomon G., “Media in teaching”, M.C. Wittrock (Ed.), Handbook of Research on Teaching, New York, McMillan, 1986, p. 464-478.

Dillon A. et Gabbard R., “Hypermedia as an educational technology: A review of the quantitative research literature on learner comprehension, control, and style”, Review of Educational Research, vol. 68, n° 3, p. 322-349.

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