DES ONDES AUX PARTICULES ET AUX CORDES
YANN BRENIER
R´esum´e. Il est traditionnel de d´eriver la dynamique classique des particules `a partir de solutions oscillantes d’´equations d’onde de la m´ecanique quantique (Schr¨odinger ou Dirac), en passant `a la limite sur la fr´equence d’oscillation (m´ethodes WKB, int´egrales de Feynman, phase stationnaire, mesures de Wigner etc...). Le but de l’expos´e est de montrer qu’on peut non seulement retrouver ces mouvements, mais aussi ceux de cordes classiques, voire de membranes, d’une facon tr`es diff´erente, `a partir de solutions de tr`es grande intensit´e des ´equations introduites par Born et Infeld en 1934 pour leur th´eorie non-lin´eaire du champ ´electromagn´etique. Il s’agit de l’expos´e de travaux effectu´es pour partie avec Wen-An Yong, de l’universit´e de Heidelberg. On discutera aussi du prolonge- ment des solutions des ´equations de Born-Infeld au del`a de l’apparition de singularit´es.
On obtiendra comme sous-produit une reformulation purement hilbertienne des lois de conservation scalaires unidimensionnelles avec donn´ees initiales monotones.
1. Introduction
Le passage des ondes aux particules est un sujet de recherche courant en physique math´ematique. Prenons l’exemple bien connu de l’´equation de Schr¨odinger d’une particule quantique en pr´esence d’un potentiel Φ(t, x) d´ependant du temps t et de la variable d’espace x∈R3:
(1.1) i∂tψ+ 2
2∆ψ+ Φψ = 0,
o`u le param`etre d´epend de la constante de Planck et de la masse, apr`es une mise `a l’´echelle ad´equate. L`a o`u la fonction d’onde complexe ψ ne s’annule pas, on peut l’´ecrire sans ambiguit´e
ψ(t, x) =p
ρ(t, x) exp(iS(t, x)
)
et on trouve pour les variables ρ >0 et v =∇S, les ´equations de Madelung [15]:
(1.2) ∂tρ+∇ ·(ρv) = 0, ∂tv+ (v· ∇)v =∇Φ + 2
2∇(∆√ρ
√ρ ).
Si l’on n´eglige dans cette ´equation (“limite classique”), on retrouve les ´equations de m´ecanique classique d’un milieu continu de densit´e ρ et de vitesse v =∇S:
(1.3) ∂tρ+∇ ·(ρv) = 0 , ∂tv+ (v· ∇)v =∇Φ,
et d’acc´el´eration ∇Φ. En effet, en notant X(t, a) la position dans R3 d’une particule d’´etiquette a ∈R3 au temps t, la deuxi`eme ´equation de (1.3), ne fait qu’exprimer la “loi de Newton”:
∂ttX(t, a) = (∇Φ)(t, X(t, a)).
1
Ainsi, on a un exemple ´el´ementaire (au niveau formel seulement) de passage des ondes aux particules.
Le but de cet expos´e est de montrer un autre exemple de passage onde/particule fond´e sur la th´eorie de l’´electromagn´etisme non-lin´eaire de Born et Infeld [1]. La transition se fera par concentration avec des solutions de tr`es haute ´energie. La th´eorie de Born- Infeld est la formalisation d’une id´ee de Born, consistant `a corriger de fa¸con non-lin´eaire les ´equations de l’´electrostatique, de sorte que le champ ´electrostatique g´en´er´e par une charge ponctuelle (l’´electron) reste inconditionnellement born´e par une constante absolue E0 `a d´eterminer (ce que fait Born en fonction de la masse de l’´electron suppos´ee d’origine purement ´electrostatique). Born propose comme Lagrangien de sa th´eorie ´electrostatique non-lin´eaire l’expression
L=− q
E02−E2
pour le champ ´electrique E(t, x), en s’inspirant manifestement de la relativit´e restreinte (o`u toutes les vitesses sont suppos´ees born´ees par celle de la lumi`ere).
Un petit calcul rapide permet de trouver le champ ´electrostatique correspondant `a une charge ponctuelle. On trouve une solution radiale
E =E(r) =E0
r20 pr04+r4,
o`ur0 doit ˆetre ajust´e en fonction de la charge et de E0. Avec son choix de E0, Born voit que cette valeur est atteinte par le champ ´electrostatique classique (de Coulomb) `a une distance de l’ordre de 10−15m`etres. Autrement dit, le champ de Born et celui de Coulomb ne diff`erent vraiment qu’`a l’´echelle atomique. Dans le travail avec Infeld [1], Born passe
`a l’´electromagn´etisme, corrige les ´equations de Maxwell en proposant le lagrangien L=−
q
E02−E2+B2−E0−2(E·B)2
pour le champ ´electromagn´etique (E, B), sujet aux contraintes diff´erentielles:
(1.4) ∇ ·B = 0, ∂tB+∇ ×E = 0.
Dor´enavant, nous poserons E0 = 1 (quitte `a modifier les unit´es). Apr`es un calcul de variations ´el´ementaire, on trouve les ´equations de Born-Infeld (homog`enes):
(1.5) ∂tB+∇ ×E = 0, ∂tD− ∇ ×H= 0, ∇.B =∇.D = 0 ,
(1.6) E = B ×V +D
h , H = −D×V +B
h ,
o`u
(1.7) h=p
1 +B2 +D2+|D×B|2, V =D×B, et | · |d´esigne la norme euclidienne.
Sur le caract`ere apparemment arbitraire de la th´eorie non-lin´eaire de Born-Infeld, il est bon de faire quelques observations. (Au fil de l’expos´e, on se convaincra que les
´equations de Born-Infeld sont dot´ees de propri´et´es tout `a fait exceptionnelles.) Rap- pelons que les contraintes diff´erentielles (1.4) ne font qu’exprimer la propri´et´e que le champ
´electromagn´etique (E, B) d´erive (en tant que 2-forme diff´erentielle sur l’espace temps), au
moins localement, d’un potentiel vecteur (i.e. une 1-forme) A = (A0, A1, A2, A3). Ainsi on a:
Ei =∂tAi+∂iA0, i= 1,2,3, B1 =∂2A3−∂3A2, etc...
Le Lagrangien de Born-Infeld se r´e´ecrit simplement L=−p
−det (g+F)
o`u Fαβ = ∂αAβ − ∂βAα et g est la m´etrique de l’espace-temps, qui, ici, est celle de l’espace plat g = diag(−1,1,1,1). (La m´etrique g peut, bien entendu, ˆetre une m´etrique de Minkowski quelconque, et mˆeme varier selon les ´equations d’Einstein. Nous ne ferons rien de tel le long de cet expos´e. Notons aussi que √
−detg est l’´el´ement de volume de la vari´et´e. Le lagrangien de Born-Infeld est donc une sorte de volume g´en´eralis´e incluant une composante ´electromagn´etique. On retrouve l`a l’id´ee assez commune dans les ann´ees 30, d’un tenseur g +F unifiant, avec sa partie sym´etrique, la gravit´e et, avec sa partie antisym´etrique, l’´electromagn´etisme.)
D`es sa parution, le travail de Born-Infeld [1] attire l’attention (voir [17] par exemple), mais l’int´erˆet qui lui est port´e s’´etiole rapidement avec l’´emergence de l’´electrodynamique quantique. Revivifi´ee dans les ann´ees 50, la th´eorie de Born-Infeld r´eapparait en physique des hautes ´energies, dans les ann´ees 90, en connexion avec le concept de D-branes [16, 11].
Ceci n’est pas surprenant, puisque le lagrangien de base de la th´eorie des cordes, celui de Nambu-Goto, qui d´ecrit les surfaces extr´emales de dimension deux dans l’espace-temps quadridimensionnel de Minkowski, n’est rien d’autre que le lagrangien de Born-Infeld, lorsque le champ (E, B) ne d´epend que d’une seule coordonn´ee spatiale. De mˆeme pour les champs ne d´ependant que de deux coordonn´ees spatiales, avecE etB perpendiculaires, le lagrangien de Born-Infeld coincide avec celui des surfaces extr´emales de codimension un dans l’espace temps `a trois dimension. Typiquement, on ´ecrit B = (−∂2φ, ∂1φ,0), E = (0,0, ∂tφ), o`uφ=φ(t, x1, x2) est une fonction scalaire. Le lagrangien de Born-Infeld (avec la normalisation E0 = 1) devient alors
L=−p
1−∂tφ2+|∇φ|2,
i.e. l’´el´ement d’aire (relatif `a la m´etrique de Minkowski) du graphe (t, x1, x2)→(t, x1, x2, φ(t, x1, x2))
dans l’espace-temps tridimensionnel. Les ´equations correspondantes:
∂t(∂tφ
L )− ∇ ·(∇φ L ) = 0,
ont ´et´e r´ecemment ´etudi´ees, du point de vue des EDP, par Lindblad [14]. Utilisant les
“formes nulles” de Klainerman, Lindblad montre l’existence globale de solutions r´eguli`eres pour le probl`eme de Cauchy, pour de petites donn´ees initiales nulles `a l’infini. Dans la foul´ee, Chae et Huh [8] obtiennent le mˆeme type de r´esultats pour le syst`eme complet de Born-Infeld. Ces r´esultats peuvent ˆetre consid´er´es comme perturbatifs par rapport `a la th´eorie classique de Maxwell. Il y a pourtant d’autres r´egimes int´eressants, lorsque les champs (B, D) sont forts. En effet, et c’est l’objet principal de l’expos´e, le comporte- ment des solutions s’approchent alors de celui d’un continuum de particules, ou de cordes suivant les ´echelles. Ainsi, on observe une transition ondes/particules (et ondes/cordes) par un itin´eraire tr`es diff´erent de celui de Madelung, d´ecrit au tout d´ebut de cette intro- duction. L’analyse math´ematique de cette transition est consid´erablement simplifi´ee par
deux observations, l’une faite dans [4] et l’autre, avec le concours de Wen-An Yong, dans [6]:
1) Plutˆot que de consid´erer les ´equations de Born-Infeld proprement dites (1.5,1.6,1.7), on leur ajoute quatre lois de conservation suppl´ementaires r´egissant h et V (d´efinies par (1.7)), grace au th´eor`eme de Noether, et on d´ecouple les variables h, V des vari- ables (B, D), en oubliant les contraintes alg´ebriques (1.7). (Introduite dans [4], cette id´ee a ´et´e d´evelopp´ee dans une direction un peu diff´erente, pour des mod`eles g´en´eraux d’´electromagn´etisme non-lin´eaire, dans [19].)
2) Ecrire les ´equations augment´ees, un syst`eme de 10 lois de conservations `a 10 incon- nues, sous forme non-divergentielle, ce qui permet de compl`etement d´esingulariser les
´etats correspondant aux champs intenses et, en prime, de compl`etement sym´etriser les
´equations.
2. Le syst`eme de Born-Infeld et sa version ´etendue non conservative Les champs de vecteur B et D du syst`eme de Born-Infeld sont solutions de
∂tB+∇ ×(B×V +D
h ) = 0, ∇ ·B = 0,
∂tD+∇ ×(D×V −B
h ) = 0, ∇ ·D = 0, (2.1)
o`u
(2.2) h=p
1 +B2 +D2+|D×B|2, V =D×B,
et| · | d´esigne la norme euclidienne. On voit tout de suite que les ´equations classiques de Maxwell dans le vide
∂tB+∇ ×D = 0, ∇ ·B = 0,
∂tD− ∇ ×B = 0, ∇ ·D = 0, (2.3)
peuvent s’interpr´eter comme limites des ´equations de BI, pour des champs de faible am- plitude B, D <<1.
Comme le lagrangien de la th´eorie BI n’implique explicitement ni le temps ni l’espace, il en d´ecoule, par le th´eor`eme de Noether, des lois de conservation suppl´ementaires (de l’´energie et de l’impulsion, selon la terminologie des physiciens) pour les variables h (´energie) et V (impulsion ou vecteur de Poynting). L’id´ee de [4] est d’ajouter au syst`eme BI ces lois de conservation suppl´ementaires.
En notant
v =V /h, b =B/h, d=D/h,
on obtient alors un syst`eme de 10 lois de conservation (toujours en dimension 3 d’espace), que nous appelons syst`eme ABI (augmented Born-Infeld):
∂th+∇ ·(hv) = 0,
∂t(hv) +∇ ·(hv⊗v−hb⊗b−hd⊗d) =∇(h−1),
∂t(hb) +∇ ·(hb⊗v−hv⊗b) +∇ ×d= 0,
∂t(hd) +∇ ·(hd⊗v−hv⊗d)− ∇ ×b = 0 (2.4)
avec les contraintes diff´erentielles:
∇ ·(hb) =∇ ·(hd) = 0.
(2.5)
L’id´ee principale de [4] est de substituer le syst`eme ABI au syst`eme BI apr`es avoir not´e que ce dernier n’est rien d’autre que le premier restreint `a la vari´et´e alg´ebrique, que nous appelerons vari´et´e BI, d´efinie par:
V =D×B, h=√
1 +D2+B2+V2.
Plus pr´ecis´ement, toute solution r´eguli`ere du syst`eme ABI `a valeurs dans la vari´et´e BI au temps initial le restera pour tous les autres temps. L’´ecriture du syst`eme ABI sous forme non conservative, en utilisant comme variables d, b, v et τ = h−1, est encore plus frappante:
∂tτ+ (v · ∇)τ −τ∇ ·v = 0,
∂tv+ (v· ∇)v−(b· ∇)b−(d· ∇)d−τ∇τ = 0,
∂tb+ (v· ∇)b−(b· ∇)v +τ∇ ×d= 0,
∂td+ (v· ∇)d−(d· ∇)v −τ∇ ×b= 0, (2.6)
o`u on omet les contraintes diff´erentielles (2.5). On est en pr´esence d’un syst`eme sym´etrique (donc forc´ement hyperbolique) dont les non-lin´earit´es sont quadratiques homog`enes. Ce syst`eme, que nous appelerons NCABI (non-conservative augmented Born-Infeld equa- tions), poss`ede une s´erie de propri´et´es remarquables que nous allons examiner.
2.1. Domaine de d´efinition. Le syst`eme NCABI est bien d´efini pourtout´etat (τ, v, d, b)∈ R10. En particulier, les ´etats pour lesquels τ = 0 et mˆeme τ <0 sont math´ematiquement acceptables.
2.2. Conservation de la vari´et´e BI. La vari´et´e BI s’´ecrit tr`es ´el´egamment sous la forme
τ > 0, τ2+b2+d2+v2 = 1, τ v =d×b . (2.7)
Cette vari´et´e est conserv´ee par les solutions r´eguli`eres du syst`eme NCABI.
2.3. Conservation des contraintes diff´erentielles. Les contraintes diff´erentielles (2.5) sont ´egalement conserv´ees par les solutions r´eguli`eres du syst`eme NCABI.
2.4. Invariance galil´eenne classique. Le syst`eme NCABI est invariant selon les trans- formations galil´eennes classiques suivantes:
(t, x)→(t, x+tc), (τ, v, d, b)→(τ, v−c, d, b),
pour toute “vitesse” constante c. Cette propri´et´e est paradoxale, puisque le syst`eme BI est relativiste. Le myst`ere s’´eclaircit une fois que l’on a observ´e que la vari´et´e BI (2.7) n’est pas compatible avec de telles transformations.
2.5. Int´egrabilit´e des solutions unidimensionnelles. Les solutions r´eguli`eres du syst`eme NCABI qui ne d´ependent que d’une seule variable d’espace,x1 pour fixer les id´ees, peuvent se calculer ais´ement. On introduit d’abord les variables
(2.8) z =
q
b21 +d21+τ2, u= (b1
z,d1
z ,τ
z), w= (b2, b3, d2, d3, v2, v3).
Elles v´erifient les ´equations suivantes:
(2.9) (∂t+v1∂1)z =z∂1v1, (∂t +v1∂1)v1 =z∂1z, (2.10) (∂t+v1∂1)u= 0, (∂t+v1∂1)w=z A(u)∂1w, avec
(2.11) A(u) =
0 0 0 u3 u1 0
0 0 −u3 0 0 u1
0 −u3 0 0 u2 0
u3 0 0 0 0 u2
u1 0 u2 0 0 0
0 u1 0 u2 0 0
=
0 −iu3 u1
iu3 0 u2 u1 u2 0
(avec des notations complexes ´evidentes). Tant quez reste born´e entre αetα−1 pour une constante α >0, on peut effectuer, `a chaque tempst, un changement de coordonn´ees spa- tiales (eul´erien-lagrangien pour reprendre le langage de la m´ecanique des milieux continus) x→s, d´efini par:
(2.12) ∂sX(t, s) = z(t, X(t, s)), ∂tX(t, s) = v1(t, X(t, s)).
En posant
(2.13) U(t, s) =u(t, X(t, s)), W(t, s) =w(t, X(t, s)), on peut r´e´ecrire le syst`eme (2.9,2.10) sous la forme
(2.14) ∂ttX =∂ssX, ∂tU = 0, ∂tW =A(U)∂sW,
la matrice A ´etant toujours d´efinie par (2.11). Ainsi on a r´eduit le syst`eme NCABI unidimensionnel `a une ´equation des ondes lin´eaires et `a un syst`eme hyperbolique lin´eaire
`a coefficients variables en espace. Sachant que u21 +u22+u23 = 1, on voit que les valeurs propres de la matrice A sont toujours +1,−1 et 0, chacune de multiplicit´e deux.
2.6. Apparition de singularit´es en temps fini. L’examen des solutions unidimen- sionnelles montre que le syst`eme NCABI a des solutions r´eguli`eres tantˆot globales tantˆot locales en fonction des donn´ees initiales. En effet, la r´eduction `a l’´equation des ondes en dimension un n’est possible que tant que la transformation (2.12) est valide, ce qui suppose ∂sX >0. Or l’´equation des ondes, r´e´ecrite sous forme:
(2.15) ∂tX =∂sU, ∂tU =∂sX,
est explicitement r´esolue par la formule de d’Alembert X(t, s) = 1
2(X(0, s+t) +X(0, s−t) +U(0, s+t)−U(0, s−t)), U(t, s) = 1
2(X(0, s+t)−X(0, s−t) +U(0, s+t) +U(0, s−t)).
(2.16)
On voit tout de suite que la condition d’inversibilit´e ∂sX > 0 sera globalement assur´ee (pour −∞< t <+∞) si et seulement si les conditions initiales v´erifient:
(2.17) ∂s(X+U)(0, s)> ∂s(U −X)(0,˜s), ∀(s,s)˜ ∈R2.
Si cette condition n’est pas satisfaite, une singularit´e apparait n´ecessairement en temps fini (positif ou n´egatif) pour la solution correspondante du syst`eme NCABI. (Ce r´esultat n’est pas nouveau. Voir par exemple [18] (volume II).)
3. Limites de champs forts: particules, cordes et membranes
3.1. Les syst`emes r´eduits. Pour le syst`eme NCABI (2.6), l’´etat τ = 0 n’est en rien singulier. Or il correspond au cas de champs infiniment intenses (puisque τ = h−1). Le syst`eme r´eduit, obtenu en annulant τ dans les ´equations s’´ecrit:
∂tv+v· ∇v−b· ∇b−d· ∇d = 0,
∂tb+v· ∇b−b· ∇v = 0,
∂td+v· ∇d−d· ∇v = 0.
(3.1)
On peut encore r´eduire le syst`eme de fa¸con coh´erente en annulant la variabled`a son tour:
∂tv+v· ∇v−b· ∇b = 0,
∂tb+v· ∇b−b· ∇v = 0.
(3.2)
Finalement, τ = 0, b =d= 0, reduit le syst`eme NCABI (2.6) `a la simple ´equation:
∂tv+v· ∇v = 0.
(3.3)
parall`element, la vari´et´e de Born-Infeld (2.7) devient successivement:
b2+d2+v2 = 1, d×b= 0, v·b =v·d = 0, (3.4)
b2 +v2 = 1, v·b= 0, (3.5)
v2 = 1, (3.6)
en association respective avec les syst`emes r´eduits (3.1), (3.2) et (3.3).
3.2. Int´egration des syst`emes r´eduits. La s´erie des syst`emes r´eduits (3.1), (3.2) et (3.3) a une interpr´etation simple en termes `a la fois g´eom´etriques et physiques. En effet, l’´equation la plus r´eduite (3.3) d´ecrit un continuum de particules se mouvant en ligne droite `a vitesse constante. Si, la contrainte BI r´eduite (3.6) est impos´ee de surcroit, ces particules ont la vitesse 1 (i.e. la vitesse de la lumi`ere) et s’interpr`etent donc comme des particules sans masse (des photons). On retrouve donc l’optique g´eom´etrique. (En milieu homog`ene, bien entendu, avec une m´etrique g g´en´erale, on obtiendrait l’optique g´eom´etrique en toute g´en´eralit´e.)
le syst`eme r´eduit (3.2) est plus subtile et d´ecrit en fait un continuum de cordes vibrantes, comme on va le voir dans un instant. La condition (3.5) assure que ces cordes sont authentiquement relativistes (i.e. correspondent `a des surfaces extr´emales dans l’espace de Minkowski). Il est notable que (3.2) d´ecrit aussi la magn´etohydrodynamique en “eau peu profonde” (shallow water MHD), `a condition de n´egliger la gravit´e. Voir [12]. De mˆeme, le syst`eme (3.1) d´ecrit un continuum de membranes vibrantes. Ces observations r´esultent du r´esultat ´el´ementaire suivant:
Proposition 3.1. Soit (s, r, u) ∈ R3 → X(t, s, r, u) une famille de diff´eomorphismes de R3, param´etr´ee par t ∈ [−T, T]. Soient λ, µ deux constantes positives ou nulles.
Supposons:
∂ttX =λ∂ssX+µ∂rrX (3.7)
et d´efinissons implicitement
b(t, X(t, s, r, u)) =∂sX(t, s, r, u), (3.8)
d(t, X(t, s, r, u)) =∂rX(t, s, r, u), (3.9)
v(t, X(t, s, r, u)) =∂tX(t, s, r, u)..
(3.10)
Alors(b, d, v)sont des solutions r´eguli`eres sur [−T, T] respectivement des syst`emes (3.1), si λ=µ= 1, (3.2) si λ= 1, µ= 0 et (3.3) si λ=µ= 0.
La preuve est une application directe de la d´erivation des applications compos´ees: il suffit de d´eriver (3.8,3.9,3.10) par rapport `a t, d’utiliser (3.7) pour trouver les ´equations voulues (3.1,3.2,3.3).
L’interpr´etation g´eom´etrique est tr`es simple. Dans le cas λ =µ = 0, chaque trajectoire t→X(t, r, s, u) est droite et (r, s, u) varie dans R3.
Si λ= 1 etµ= 0, chaque surface (t, s)→X(t, r, s, u) est r´egie par l’´equation des ondes
∂ttX =∂ssX,
et correspond `a une corde vibrante, alors que (r, u) varie dans R2. Notons que les con- traintes alg´ebriques (3.5) s’´ecrivent
∂tX2+∂sX2 = 1, ∂tX·∂sX = 0,
ce qui assure que les cordes sont bien relativistes (i.e. sont des surfaces extr´emales dans l’espace de Minkowski).
Finalement, observons que les syst`emes r´eduits, qui sont donc tous int´egrables, `a l’aide d’´equations d’ondes lin´eaires, ont des solutions r´eguli`eres globales ou non, selon les donn´ees initiales, suivant que (r, s, u)→X(t, r, s, u) reste ou non inversible deR3 dans lui-mˆeme.
3.3. Convergence vers les syst`emes r´eduits. La r´e´ecriture des ´equations de Born- Infeld sous la forme du syst`eme sym´etrique NCABI (2.6) rend triviale l’asymptotique des champs intenses, au moins en temps petit, puisque les ´etats τ = 0, ou τ =d= 0, ne sont en rien singuliers! Avec un tel argument, l’intervalle de temps, sur lequel la convergence a lieu, d´epend grossi`erement de la normeHsdes donn´ees initiales, pours >5/2. Lorsque les syst`emes limites ont des solutions sur un intervalle de temps plus grand, ´eventuellement infini, on s’attend `a ce que les solutions approch´ees du syst`eme NCABI convergent sur un intervalle de temps comparable. Ce r´esultat peut en effet ˆetre obtenu par les m´ethodes d’´energie classique, dans la lign´ee de [13]. Les d´etails sont expos´es dans [6]. Donnons un exemple de r´esultat reliant cordes et solutions du syst`eme de Born-Infeld lorsque le champ magn´etique initial est tr`es intense. (Pour simplifier on le suppose constant.)
Th´eor`eme 3.2. Soit B0∗ = (1,0,0) et D∗0 un champ r´egulier `a divergence nulle et nul
`
a l’infini sur R3. Pour > 0, consid´erons (B, D) = (B, D) solution locale du syst`eme original de Born-Infeld (1.5) avec donn´ee initiale:
B(t= 0, x) = B0∗
, D(t= 0, x) =D0∗(x).
Soit la famille, param´etr´ee para∈R2, de cordes vibrantes (relativistes)(t, s)→X(t, s, a), solutions de ∂ttX =∂ssX, avec valeurs initiales:
X(t= 0, s, a) = (s, a),
∂tX(t = 0, s, a) = D∗0×B0∗
p|B0∗|2+|D0∗×B0∗|2(s, a). (3.11)
Alors il existe 0 >0 et T >0 tels que, pour tout t∈[0, T] et tout 0< ≤0: i) (s, a)→X(t, s, a) est un diff´eomorphisme de R3,
ii) (B, D) est r´egulier avec inf0≤t≤T inf(x,)|B(t, x)|>0, B
pB2+|D×B|2(t, X(t, s, a)) =∂sX(t, s, a) +O(), D×B
pB2+|D×B|2(t, X(t, s, a)) =∂tX(t, s, a) +O(). (3.12)
Esquisse de preuve. Pour montrer ce r´esultat il suffit d’appliquer les r´esultats indiqu´es plus haut pour le syst`eme NCABI. Plus pr´ecis´ement on pose d’abord.
τ= 1
p1 +B2 +D2+|D×B|2 , b =τ B , d=τ D , v =τ D×B.
On note qu’au temps t = 0:
τ =O(), d=O(), b =b∗0+O(), v =v∗0+O(), o`u
b∗0 = B∗0
p|B0∗|2+|D0∗×B0∗|2, v0∗ = D0∗×B0∗
p|B0∗|2+|D0∗×B0∗|2 .
Du caract`ere bien pos´e du syst`eme NCABI dans les espaces de Sobolev Hs pours >5/2, on d´eduit imm´ediatement qu’il existe un temps T >0 et un 0 >0 pour lequels
1) la solution (τ, v, d, b) est bien d´efinie pour t∈[0, T] et 0< ≤0;
2) cette solution est, en norme Hs, `a distance de la solution “limite” (τ∗, v∗, d∗, b∗) admettant pour donn´ees initiales (0, v∗0, b∗0,0).
Compte tenu de l’homog´en´eit´e du syst`eme NCABI (2.6), la solution limite v´erifie τ∗ = 0, d∗ = 0 et (v∗, b∗) est solution du syst`eme r´eduit (3.2) avec donn´ee initiale (v0∗, b∗0). Selon la proposition 3.1, on peut donc int´egrer le syst`eme r´eduit (3.2) `a l’aide de cordes vibrantes, de sorte que
b∗(t, X(t, s, a)) =∂sX(t, s, a), v∗(t, X(t, s, a)) =∂tX(t, s, a), tant que (s, a)→X(t, s, a) reste un diff´eomorphisme de R3.
V´erifions ensuite que |B| reste minor´e. Comme (τ, v, d, b) est `a distance de
(τ∗, v∗, d∗, b∗) = (0, v∗,0, b∗), en norme Hsavecs >3/2, on a τ2+d2 ≤K2 sur l’intervalle [0, T] pour une certaine constante K >0. Cela se r´e´ecrit:
1 +D2
K2 ≤1 +B2+D2+|D×B|2 ≤(1 +B2)(1 +D2).
On en d´eduit que: 1 +B2 ≥K−1−2 et (1 +D2)(1−K2)≤K2(B2+|D×B|2). Ainsi |B| reste minor´e et
B2+|D×B|2
1 +B2+D2+|D×B|2 = 1 +O().
Donc:
B
pB2+|D×B|2 =b+O() =b∗+O(), D×B
pB2+|D×B|2 =v+O() =v∗+O(), et les r´esultats du th´eor`eme s’ensuivent sans difficult´e.
Observons qu’une d´emonstration directe de ce th´eor`eme serait probablement tr`es lourde sans l’utilisation du syst`eme ´elargi NCABI.
4. Solutions dissipatives au del`a des singularit´es
Les syst`emes BI, NCABI et les syst`emes r´eduits `a haute ´energie sont tous susceptibles de voir apparaitre des singularit´es en temps fini. C’est en particulier le cas du plus simple d’entre eux (3.3), bien connu (souvent sous le nom d’´equation de Burgers). La question se pose naturellement de prolonger ces solutions au del`a des singularit´es et de voir si l’on peut ainsi rendre le probl`eme de Cauchy bien pos´e globalement dans un espace de solutions peu r´eguli`eres. La proc´edure la plus simple (et dont la pertinence est `a discuter en fonction du contexte physique) est de nature dissipative et ne concerne que le probl`eme de Cauchy progressif (i.e. pour les t > 0). On connait ainsi, pour les ´equations de type Burgers et sous certaines conditions, la th´eories des solutions entropiques, remontant `a Kruzhkov et Volpert dans les ann´ees 70, fond´ee sur l’espace L1 et celle des solutions de viscosit´e, due `a Crandall et Lions et fond´ee sur l’espace C0, dans les ann´ees 80. Elles permettent de donner un sens `a des solutions g´en´eralis´ees et de montrer le caract`ere bien pos´e des
´equations correspondantes dans les espaces appropri´es (L1 et C0 respectivement). Il est remarquable que les ´equations couvertes par ces deux th´eories d´ecrivent des particules se d´eplacant en ligne droite, selon l’´equation ∂ttX = 0, ou plus g´en´eralement selon une dynamique de particules ponctuelles sous l’action d’une force ext´erieure impos´ee. Les
´equations qui nous pr´eoccupent dans cet expos´e sont plus complexes. Typiquement, le syst`eme NCABI en dimension un et le syst`eme r´eduit (3.2) d´ecrivent des cordes vibrantes selon le syst`eme (2.15). Les singularit´es apparaissent d`es qu’une solution (t, s)→X(t, s) de ce syst`eme (2.15) viole la condition de passage eul´erien lagrangien, `a savoir, dans le cas unidimensionnel: ∂sX >0. Or, la th´eorie classique des op´erateurs maximaux montones [7] permet de rendre les solutions globales en imposant la contrainte relach´ee ∂sX ≥0. Il suffit pour cela, de consid´erer l’espace H =L2(R)2 et d’y d´efinir un potentiel convexe Φ par
(4.13) Φ(X) = 0, si ∂sX ≥0, Φ(X) = +∞ sinon.
Au lieu de r´esoudre (2.15) on cherche plutˆot les solutions de:
(4.14) 0∈∂tX−∂sU+ (∂Φ)(X), ∂tU =∂sX,
avec les notations de l’analyse convexe [7]. Les solutions sont bien d´efinies dans l’espace des fonctions continues du temps `a valeurs dansH =L2(R)2,t→(X(t,·), U(t,·)) et forment, pour t≥0, un semi-groupe de contraction dans H. En particulier deux solutions (X, U) et (Y, V) v´erifient toujours:
||X(t,·)−Y(t,·)||L2+||U(t,·)−V(t,·)||L2 ≤ ||X(s,·)−Y(s,·)||L2+||U(s,·)−V(s,·)||L2 , pour toust≥s ≥0. Plus concr`etement, les solutions de (4.13,4.14) peuvent ˆetre obtenues par approximation, des deux fa¸cons diff´erentes suivantes.
Approximation num´erique. On introduit un r´eseau discret pour les variables (t, s), de pas uniformes δt >0 en t et δs >0 en s. On imposeδt =δs de sorte que les ondes g´en´er´ees par (2.15) se propagent exactement sur le r´eseau. L’approximation num´erique Xn,i de la solution X(nδt, iδs) est d´efinie, pour chaque pas de temps n = 0,1,· · ·, en deux ´etapes.
On utilise d’abord la formule de d’Alembert (2.16) et on pose:
X˜n+1,i= 1
2(Xn,i+1+Xn,i−1+Un,i+1−Un,i−1), Un+1,i = 1
2(Xn,i+1−Xn,i−1+Un,i+1+Un,i−1).
(4.15)
La suite obtenue i→X˜n+1,i n’´etant pas forc´ement croissante, on la r´errange dans l’ordre croissant, ce qui fournit les valeurs valeurs Xn+1,i d´esir´ees. On alors:
Th´eor`eme 4.1. Lorsque δt = δs → 0 les solutions approch´ees fournies par le sch´ema num´erique et convenablement initialis´ees convergent vers les solutions de (4.13,4.14).
La d´emonstration est essentiellement la mˆeme que celle utilis´ee dans [5] pour la th´eorie des cordes vibrantes “bien ordonn´ees”. Cette th´eorie a d’ailleurs ´et´e d´evelopp´ee pour rendre globales les solutions de (3.2), dans le cas particulier de solutions (b, v) de la forme:
b= (b1(t, x1, x3),0,1), v = (v1(t, x1, x3),0,0).
Une simulation num´erique. Les deux figures suivantes montrent une simulation num´erique du syst`eme dissipatif (4.13,4.14) qu’on approche par le sch´ema (4.15), r´earrangement compris, avec δt=δs= 0.005.
La premi`ere figure montre les trajectoires t ∈ [0,2]→ X(t, s), pour−1 ≤ s ≤3. (L’axe vertical correspond au temps et l’axe horizontal `a l’espace.) On y voit les concentrations de trajectoires se d´evelopper rapidement avec une intensit´e maximale entre t = 0.25 et t= 0.5. Sur la seconde figure on voit l’´evolution de l’´energie totale
100
200
X
i=2
(|Xn,i−Xn,i−1|2+|Un,i−Un,i−1|2) et celle de l’´energie cin´etique:
100
200
X
i=2
|Un,i−Un,i−1|2.
On observe la diminution rapide de l’´energie totale dans la phase de concentration maxi- male. Ensuite l’´energie totale stationne peu apr`es t= 0.5: c’est la fin des concentrations dissipatives d’´energie. La solution devient alors p´eriodique en temps.
0 0.5 1 1.5 2
-1 -0.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3
"fort.59"
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 1.4
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8 2
"fort.58"
Approximation parabolique. Voici un second proc´ed´e d’approximation du syst`eme dissi- patif (4.13,4.14). On prend n’importe qu’elle fonction convexeτ →ψ(τ), valant +∞pour τ <0, r´eguli`ere pourτ >0 et nulle en τ = 1. Par exemple, ψ(τ) =τlogτ,ψ(τ) =−logτ ou ψ(τ) = 1/τ −1 conviennent. Ensuite, on introduit un petit param`etre > 0 et on remplace dans (4.14) la fonctionnelle X →Φ(X), qui ne prend que les valeurs 0 et +∞, par
X → Z
ψ(∂sX)ds.
Ecrite en clair, l’´equation r´esultante devient (au moins formellement):
(4.16) ∂tX =∂sU +∂s(ψ0(∂sX)), ∂tU =∂sX,
ce que l’on peut interprˆeter comme l’´equation d’un milieu visco´elastique. Formellement, le pendant eul´erien, au travers des formules (2.12), de cette ´equation dissipative est une approximation de type “Navier-Stokes” du syst`eme (2.9), `a savoir:
(∂t+v1∂1)z =z∂1v1,
(∂t+v1∂1)v1 =z∂1z+∂1(µ(1/z)∂1v), (4.17)
o`u µ(τ) = τ ψ00(τ). (Par exemple ψ(τ) = τlogτ conduit `a une “viscosit´e” constante:
µ= 1 et ψ(τ) =−logτ donne µ(1/z) =z.)
5. Reformulation des lois de conservation scalaires
La version dissipative (4.13,4.14) de l’´equation des ondes avec vitesse de propagation 1 (2.15) se g´en´eralise ais´ement au cas o`u la vitesse de propagation est une constante γ >0.
Ainsi
(5.18) ∂tX =∂sU, ∂tU =γ2∂sX a pour version dissipative:
(5.19) 0∈∂tX−∂sU+ (∂Φ)(X), ∂tU =γ2 ∂sX.
Le cas d´eg´en´er´e γ = 0 est instructif. On trouve:
(5.20) f ∈∂tX+ (∂Φ)(X),
o`u f = ∂sU devient une donn´ee, ind´ependante du temps. La propri´et´e de contraction se r´eduit alors, pour deux donn´ees distinctesf et g, avec solutions correspondantesX etY: (5.21) ||X(t,·)−Y(t,·)||L2 ≤ ||X(s,·)−Y(s,·)||L2+ (t−s)||f −g||L2,
pour t ≥ s. Bien entendu, on peut approcher les solutions de (4.13,5.20) par le sch´ema num´erique d´eriv´e de (4.15) lorsque γ →0. Ce sch´ema consiste `a r´earranger, dans l’ordre croissant, `a chaque pas de temps n, la suite i→X˜n+1,i donn´ee par:
X˜n+1,i=Xn,i+δtfi .
Or ce sch´ema (introduit par l’auteur dans [3] sous le nom de “transport-collapse method”) est connu pour permettre l’approximation de la loi de conservation scalaire
(5.22) ∂tu+∂xF(u) = 0, x∈R, t ≥0,
pour toute fonction F Lipschitz continue et toute donn´ee initiale x → u0(x) monotone croissante (avec valeurs 0 et 1 lorsquex tend respectivement vers −∞et +∞, pour fixer les id´ees). (Pour plus de d´etails sur la th´eorie des lois de conservation hyperboliques, voir [9], [18].) Plus pr´ecis´ement, on prend N >0 entier, on pose pour i= 1,· · ·, N :
fi =N(F( i
N)−F(i−1 N )), et on choisit X0,i sur l’axe r´eel de sorte que
u0(X0,i−0) = i−1/2
N .
Selon [3], pour tout t≥0, l’unique solution (au sens de Kruzhkov) x→u(t, x) de (5.22), telle que u(0,·) = u0, est la limite (localement dans L1) de l’approximation
uN(nδt, x) = 1 N
N
X
i=1
H(x−Xn,i)
(o`uH d´esigne la fonction d’Heaviside), lorsque nδt→t etN →+∞. Il en d´ecoule ais´ement:
Th´eor`eme 5.1. Les solutions de Kruzhkov u(t, x) de la loi scalaire (5.22), avec donn´ee initiale monotone variant de 0 `a 1 sur la droite r´eelle, s’´ecrivent exactement:
u(t, x) = Z 1
0
H(x−X(t, s))ds, o`u X est solution de (4.13,5.20) avec f =F0.
On a donc obtenu, dans le cas tr`es simple des lois de conservation scalaires avec donn´ees initiales monotones et flux arbitraires, une formulation impliquant un semi-groupe con- tractant dans L2. Ainsi, on a une structure hilbertienne sous-jacente des lois de conser- vation scalaires, ce qui semble n’avoir jamais ´et´e observ´e `a ce jour.
Remarque. Pour deux solutions `a la Kruzhkov, u et v avec flux F et G, la propri´et´e de contraction (5.21) peut se r´e´ecrire:
dW,2(∂xu(t,·), ∂xv(t,·))≤dW,2(∂xu(s,·), ∂xv(s,·)) + (t−s)||F0−G0||L2 ,
pourt≥s, o`udW,2 d´esigne la distance de “Wasserstein” d’exposant 2 entre deux mesures de probabilit´e (voir [20] par exemple). Sous cette forme, le r´esultat ´etait d´ej`a connu de [2] (dans le cas F =G).
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