Int´egration et probabilit´es
ENS Paris, 2012-2013Divertissements probabili es – Corrig´e
0 – Exercice du TD 13 `a chercher
E
xercice 0. (Sommes al´eatoires) Soit (Xn)n≥) une suite de variables al´eatoires r´eelles ind´ependantes de mˆeme loi, centr´ees, de varianceσ. On poseSn=Pnm=Xm. Soit (Nk)k≥une suite de v.a. `a valeurs dans N∗, toutes ind´ependantes de la suite (Xn)n≥. On pose finalement
Zk=√ NkSNk.
On suppose queNk→ ∞p.s. lorsquek→ ∞. Montrer queZkconverge en loi vers une variable al´eatoire que l’on d´eterminera.
Corrig´e :
PosonsYn =Sn/√
n et soitN une variable al´eatoire normale centr´ee r´eduite. Nous allons montrer queZk converge en loi versN. SoitF :R→R+ une fonion continue born´ee. Fixons >. D’apr`es le th´eor`eme central limite,Ynconverge en loi versN. Il exie doncN tel que pourn≥n:
|E[F(Yn)]−E[F(N)]| ≤. On ´ecrit ensuite :
E[F(Zk)] = E
hF(YNk)i
=
∞
X
j=
E
hF(Yj)1{Nk=j}
i
=
∞
X
j=
P[Nk=j]E hF(Yj)i
par ind´ependance deNk etYj
Ainsi :
|E[F(Zk)]−E[F(N)]| ≤
∞
X
j=
P[Nk=j]
E hF(Yj)i
−E[F(N)]
≤ kFk∞P[Nk≤n] +X
j≥n
P[Nk=j]
E
hF(Yj)i
−E[F(N)]
≤ kFk∞P[Nk≤n] +X
j≥n
P[Nk=j]
≤ kFk∞P[Nk≤n] +.
OrNkconverge presque s ˆurement vers, et donc en probabilit´e (ou utiliser le th´eor`eme de convergence dominer pour le faire `a la main). Le premier terme de la derni`ere somme converge donc vers. On en d´eduit que|E[F(Zk)]−E[F(N)]| ≤pourksuffisamment grand, ce qui conclut.
1 – Processus de Galton-Watson
Soitµ= (µi)i≥une mesure de probabilit´e sur {,,, . . .}telle que µ+µ<. Le processus de Galton- Watson (Zn)n≥ed´efinie r´ecursivement parZ=et, pourn≥:
Zn+=
Zn
X
j=
Xj(n),
o `u les variables al´eatoires (Xj(n))j,n≥sont i.i.d. de loiµ. Ainsi, (Zn)n≥mod´elise l’´evolution d’une popu- lation dont `a chaque inantnles individus meurent en donnant naissance `a des nombres d’enfants i.i.d de loiµ. On introduit la fonion g´en´eratriceφassoci´ee `aµ:
φ(s) =X
n≥
µnsn, s∈[,].
On note finalement m=φ0() la moyenne du nombre d’enfants. Le but ede d´emontrer le th´eor`eme suivant :
Presque s ˆurement, il exien≥tel queZn=si et seulement sim≤.
Th´eor`eme (Probabilit´e d’extinion).
() Prouver queφe riement croissante, queφ0 e riement croissante et queφ() =.
(i) Pours∈[,], on noteφn(s) =E hsZni
. Montrer queφn+=φn◦φ.
(ii) SoitT = min{n≥;Zn=}. Montrer queP(T <∞) ele plus petit point fixe deφ. Conclure.
Figure – Simulation d’un grand arbre g´en´ealogique du processus de Galton-Watson (les sommets correspondent aux individus, et deux individus sont reli´es par une arˆete si l’un a donn´e naissance `a l’autre).
Corrig´e :
() Pas de difficult´e en d´erivant sous le signe somme.
(i) On d´emontre ais´ement par r´ecurrence surnque pour tout entiern≥,Znet (Xj(k);≤j,≤k≤n) sont ind´ependants. Ainsi :
φn+(s) = E
sPZnj=X
(n) j
=
∞
X
k=
E
sPkj=X
(n) j 1{Zn=k}
=
∞
X
k=
P[Zn=k]E
sPkj=X
(n) j
carZnet (X(n), . . . , Xk(n)) sont ind´ependants
=
∞
X
k=
P[Zn=k]E
sX(n) k
carX(n), . . . , Xk(n)sont iid
=
∞
X
k=
P[Zn=k]φ(s)k
= φn(φ(s)).
D’o `u le r´esultat.
(ii) La probabilit´e d’extinionP(T <∞) ela r´eunion croissante des ´ev´enements{Zn=}. En remar- quant queφn() =P[Zn=], il s’ensuit queqela limite deφ(n)() lorsquen→ ∞.
Lorsquem≤, on introduit la fonionh(s) =φ(s)−squi v´erifie, pour≤s <h0(s) =φ0(s)−<
φ0()−≤. Ainsihe riement d´ecroissante sur [,] avech() =. On en d´eduit queφ(t)> t pour toutt∈[,). Lorsquem >, on d´emontre de mani`ere similaire que que φ(s) =sadmet une unique solution sur [,). Il ealors classique de montrer que la suiteφ(n)() converge vers le plus petit point fixe deφsur [,] lorsquen→ ∞.
2 – Percolation
On consid`ere un graphe G form´e d’un ensemble (fini ou d´enombrable) de sites S et d’un ensemble d’arˆetesA(une famille de couples de sites).
On d´efinit une famille de variables al´eatoires (ω(a), a∈ A) ind´ependantes, de mˆeme loi de Bernoulli de param`etrep∈[,]. En d’autres termes, pour chaque arˆetea, on tire ind´ependamment pile (c`ad ) avec probabilit´epou face (c`ad) avec probabilit´e−p. Lorsqueω(a) =, on dit que l’arˆeteaeouverte, et sinon ferm´ee. On notePpla loi correspondante.
Une r´ealisation deωd´efinit donc un sous-graphe al´eatoire deGform´e des sitesSet des arˆetes ouvertes pourω. Souvent, on identifie la r´ealisationω= (ω(a), a∈ A) avec le graphe qu’elle d´efinit.
On consid`ere le cas du grapheG=Zd.
(i) Lorsqued=, p.s. exie-t-il une composante connexe infinie ? Notre but ede d´emontrer le r´esultat suivant :
Lorsqued≥, il exiepc=pc(d)∈(,) tel que :
- pour toutp < pc,ωn’a presque s ˆurement pas de composante connexe infinie.
- pour toutp > pc,ωa presque s ˆurement (au moins) une composante connexe infinie.
Th´eor`eme (Transition de phase pour la percolation).
Figure – Simulation de la composante connexe contenant l’origine dans Z (simulation de Daniel Tiggemann).
(ii) On noteA={ωa au moins une composante connexe infinie}. Montrer quePp(A) =ou. (iii) Montrer quep7→Pp(A) ecroissante.
Indication. On pourra d´efinir une famille (X(a), a ∈ A) de variables al´eatoires ind´ependantes uniformes sur [,] et consid´ererωp(a) =1X(a)≤p.
(iv) Montrer que pour p suffisamment petit, presque s ˆurement il n’exie pas de chemin ouvert de longueur infinie issue de l’origine.
(v) En d´eduire quepc>.
(vi) Montrer que sipesuffisamment proche dealors presque s ˆurement il exie un chemin ouvert de longueur infinie issue de l’origine. En d´eduire quepc<.
Indication.Pourd=, on pourra remarquer que s’il n’exie pas de chemin ouvert de longueur infinie issue de l’origine, alors il exie un cycle “dual” ferm´e entourant l’origine.
(vii) Quelle ela probabilit´e critiquepcpour la percolation (par arˆetes) dans un arbre binaire (chaque site, sauf la racine, ereli´e `a trois voisins, et le graphe ne comporte pas de cycle) ? Pour p=pc, exie-t-il une composante connexe infinie ?
Petits compl´ements (hors TD) :
- Montrer le th´eor`eme analogue dans le cas de la percolation par sites (et non plus sur arˆetes) sur Zd.
- ( ) Montrer que surZd, ou bien il n’y a p.s. pas de composante connexe infinie, ou bien il y a p.s. une unique composante connexe infinie.
On peut d´emontrer quepc=/pour la percolation par arˆetes pourZet que sousP/il n’y a p.s. pas de composante connexe infinie. On ne sait pas ce qu’il en een dimension.
Pour davantage de d´etails, consulter le livrePercolation et mod`ele d’Isingde Wendelin Werner.
´Ebauche de corrig´e :
(i) Oui, uniquement lorsquep=. Sip <, le lemme de Borel-Cantelli implique que presque s ˆurement, ω(i) =pour une infinit´e dei≥eti≤.
. l’espace d’´etats edonc{,}Amuni de la tribu produit.
(ii) V´erifions tout d’abord que Aebien mesurable pour la tribu produit. `A cet effet, notons Ax = {ωa au moins une composante connexe infinie contenantx}pourx∈Zd, de sorte que
A= [
x∈Zd
Ax= [
x∈Zd
\
n≥
{Xereli´e `a la boule de centrexet de rayonnpar un chemin ouvert}. Or toute partie qui ne d´epend que de l’´etat d’un nombre fini d’arˆetes emesurable pour la tribu produit. Formellement, cela veut dire que si on noteπa :{,}A → {,}la projeion d´efinie par πa(ω) =ω(a), alors toute partie de la forme
πa−(C)∩ · · · ∩πa−j(Cj) (j≥, a, . . . , aj ∈ A, C, . . . , Cj⊂ {,}) emesurable pour la tribu produit. AinsiAebien mesurable.
Le fait quePp(A) =oueune cons´equence de la loi du-de Kolmogorov. Si on veut r´ediger cela en d´etail, on peut proc´eder comme suit. Soit (ai)i≥une ´enum´eration des arˆetes deAet notons Xi = ω(ai) pour i ≥ . Ainsi, sousPp, (Xi)i≥ eune suite de variables al´eatoires i.i.d. Or A ne d´epend pas de l’´etat d’un nombre fini d’arˆetes, de sorte que pour toutn ≥, A∈σ(Xn, Xn+, . . .).
DoncAedans la tribu asymptotique de (Xi)i≥, qui etriviale d’apr`es la loi du-de Kolmo- gorov pour une suite de variables ind´ependantes.
(iii) La loi deωpePp. On en d´eduit que pourp≤p0 :
Pp(A) =P(ωp∈A)≤P(ωp0∈A) =Pp0(A).
Pour l’in´egalit´e, on a utilis´e l’inclusion{ωp∈A} ⊂ {ωp0∈A}, vraie presque s ˆurement.
(iv) On rappelle la notationAx={ωa au moins une composante connexe infinie contenantx}pourx∈ Zd. Mais
A⊂ {il exie un chemin injeif ouvert infini issu de}.
Mais le nombre de chemins injeifs ouverts de longueurn issus de eau plus d(d−)n−. Donc, pour toutn≥,
P[A]≤P( il exie un chemin injeif ouvert de longueurnissu de)≤pnd(d−)n−, qui tend verslorsquen→ ∞pourp </(d). AinsiP[A] =lorsquep </(d).
(v) On a
P[A]≤ X
x∈Zd
P[Ax]≤ X
x∈Zd
P[A]
par invariance par translation. On a vu queP[A] =pourp </(d), doncpc≥/(d).
(vi) Comme Z ⊂Zd, s’il exie p.s. une composante connexe infinie dans Z, alors il en exie une p.s. dansZd, ce qui impliquepc(Zd)≤pc(Z). Il suffit donc de prouver le r´esultat pourd=. Par dualit´e, s’il n’exie pas de chemin ouvert de longueur infinie issue de l’origine, alors il exie un cycle “dual” ferm´e entourant l’origine. Mais ce cycle dual intersee n´ecessairement la demi-droite positive. Or si un tel cycle passe par [x, x+], alors il ede longueur au moinsx+et contient donc un chemin injeif de longueur x passant par [x, x+]. Comme il y a u plusx chemins injeifs de longueurxpassant par [x, x+], on a :
Pp(n’epas dans une composante connexe infinie)≤X
x≥
((−p))x.
Lorsquepesuffisamment proche de, cette somme e rcitement inf´erieure `a, ce qui implique Pp(A)>. D’o `uPp(A)>, et commePp(A) =ou, il s’ensuit quePp(A) =pourpsuffisamment proche de.
(vii) La composante connexe de la racine eun arbre de Galton-Watson de loi de reproduionµdonn´ee par :
µ= (−p), µ=p(−p), µ=p, µi= (i≥).
D’apr`es l’exercice sur les processus de Galton-Watson, la composante connexe de la racine e presque s ˆurement finie si et seulement si la moyenne deµeinf´erieure ou ´egale `a. On en d´eduit imm´ediatement que pc = /et que pour p=/ il n’y a presque s ˆurement pas de composante connexe infinie.
3 – Le capybara savant
Un capybara tape un texte al´eatoirement sur son capyclavier contenant leslettres de l’alphabet ca- pybarien (en choisissant chaque nouvelle lettre uniform´ement au hasard, les lettres ´etant tap´ees aux inants,,, . . .). On noteXnla lettre tap´ee `a l’inantn. Pour un motM=mm· · ·mk, on noteTMle premier inant o `u le capybara a tap´e exaement le motM, c’e-`a-dire :
TM= inf{n≥; (Xn−k+, Xn−k, . . . , Xn) = (m, m, . . . , mk)}.
On suppose que l’alphabet romain einclus dans l’alphabet capybarien.Quelle ela probabilit´e de lire ABRACADABRA avant ABRACADABRI ?Qui ele plus grand entreE[TABRACADABRA] etE[TABRACADABRI] ?
´Elements de r´eponse :
En s’arrˆetant aux inants successifs o `u on lit ABRACADABR, on voit que la probabilit´e de lire ABRA- CADABRA avant ABRACADABRI vaut/.
Donnons une explication intuitive du fait queE[TABRACADABRA]>E[TABRACADABRI] :
- lorsqu’on lit ABRACADABR et que la lettre d’apr`es n’epas A, tout se passe comme si on recommenc¸ait de z´ero si on veut lire ABRACADABRA.
- lorsqu’on lit ABRACADABR et que la lettre d’apr`es n’e pas I, tout ne se pas pas comme si on recommenc¸ait de z´ero si on veut lire ABRACADABRI. En effet, si la lettre d’apr`es eA, cela nous favo- rise car on pourrait lire ABRACADABRABRACADABRAou ABRACADABRACADABRA(tout se passe comme si on recommenc¸ait en sachant qu’on a d´ej`a un A, ce qui nous favorise).
Il epossible calculer explicitementE[TM] pour tout motM(cette quantit´e fait intervenir le nombre de pr´efixes deMqui sont ´egalement suffixes). Par exemple, on a
E[TABRACADABRA] =++, E[TABRACADABRI] =.
Une d´emonration simple de ceci sera donn´ee en TD au second semere en utilisant le th´eor`eme d’arrˆet pour les martingales.
. Un mot etoujours suppos´e de longueur finie.
Fin