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Les environnements numériques de travail dans l'enseignement secondaire : étude d'un système représentationnel

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Academic year: 2021

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Submitted on 5 Mar 2019

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Les environnements numériques de travail dans

l’enseignement secondaire : étude d’un système

représentationnel

Lucie Loubère

To cite this version:

Lucie Loubère. Les environnements numériques de travail dans l’enseignement secondaire : étude d’un système représentationnel. Réseaux sociaux et d’information [cs.SI]. Université Paul Sabatier -Toulouse III, 2018. Français. �NNT : 2018TOU30048�. �tel-02058159�

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Résumé :

L’intégration des technologies numériques dans l’éducation (TICE) est souvent décrite comme difficile. Parce que leur déploiement est généralisé et leur utilisation rendue obligatoire par l’institution, les environnements numériques de travail (ENT) constituent un outil à part dans le champ des TICE. Ce travail propose d’investiguer comment cet outil a intégré la pensée professionnelle enseignante à partir d’une approche reposant sur la théorie des représentations sociales. L’étude proposée est constituée en deux phases. Le premier temps est consacré à l'examen du discours social sur les TICE et se fonde sur l’analyse de trois corpus textuels, correspondant à trois types de discours différents (discours médiatiques, textes institutionnels, et contributions à la concertation sur le numérique éducatif de 2015). Nous proposons par une approche lexicométrique d’identifier les thématiques transversales à ces corpus et celles qui sont spécifiques de chacun de ces types de discours.

Le second temps de ce travail repose sur une enquête par questionnaire menée auprès de 625 enseignants du secondaire de l’académie de Toulouse. À partir de tests d’évocations hiérarchisées, nous étudions les contenus des représentations professionnelles de quatre objets : l’ENT, le métier d’enseignant, la notion d’information et la notion de communication. L’analyse de la structure des réponses, sur chacun de ces objets puis dans les relations entre les objets, met notamment en évidence la particularité de leur lecture par les enseignants au regard du discours social identifié dans la partie précédente. Le système complexe formé par ces quatre objets permet d’observer que les représentations du métier d’enseignant et de l’ENT ont peu de contenus communs, mais qu’elles partagent toutes les deux de nombreux éléments avec les représentations de la communication et de l’information. Ces résultats dessinent également deux grandes tendances dans la façon de décrire les objets de représentation investigués : une partie de la population semble systématiquement privilégier des éléments fonctionnels pour décrire chacun des objets alors qu’une autre partie de la population associe préférentiellement des éléments évaluatifs.

Mots clés : Environnement numérique de travail, enseignant du secondaire, système de représentations sociales, représentations professionnelles, lexicométrie

Abstract :

The integration of Information and Communication Technologies in Education (ICTEs) has often been described as a thorny endeavour. Digital Work Environments (DWE) can be considered as a particularly interesting ICTE tool because of their widespread and compulsory deployment in the French educational system. This study investigates how the DWE tool has integrated professional representations based on the theoretical approach of social representations. In a first phase, we base our analyses on the social discourses about ICTEs through three textual corpora, reflecting three different types of discourses (media, institutional, national consultation on digital education in 2015). We use a lexicometric approach in order to identify the transversal themes and the idiosyncrasies of these discourses.

The second part of this study is based on a survey by questionnaires on 625 secondary education teachers of Toulouse academy. Here, the hierarchical evocation method is used to examine the content of professional representations on four objects: the DWE, the teaching profession, the notions of information and of communication. The structure analyses of the responses and the interrelations study between these objects show the peculiarity of the teachers’ universes compared to the ones identified in the three social discourses. The complex system formed by the four objects allows us to observe that although the representations of the teaching profession and the DWE have few common contents, they share numerous elements with the representations of communication and of information. Finally, these results enlighten us on two larger tendencies on the way secondary teachers describe the investigated objects: one part of the population seem to systematically privilege functional elements whereas the other part of the population prefers to associate evaluative elements when relating to each one of these objects.

Key words: Digital Work Environment, secondary education teacher, social representations system, professional representations, lexicometry

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Remerciements

Je tiens à remercier ici toutes les personnes grâce à qui j’ai pu mener à bien ce travail :

Pierre Ratinaud, pour sa disponibilité, sa bienveillance et sa curiosité scientifique et plus particulièrement, pour les conseils éclairés et la liberté qu’il m’a offerts dans la construction de cette recherche.

Pascal Marchand, pour sa confiance et son accompagnement dans cette discipline que sont les Sciences de l’Information et de la Communication., l’équipe PSYCOM et le LERASS plus généralement pour leur accueil et les moyens mis à disposition des doctorants.

Les membres du jury, qui me font l’honneur de venir échanger avec moi sur mon travail.

Les doctorants qu’ils soient du LERASS, de l’EFTS de l’IDETCOM et encore bien d’autres laboratoires. Les échanges que nous avons eus tout au long de ces 4 années qu’ils participent aux registre amical ou aux questions plus théoriques m’ont permis de garder le rythme sans m’éloigner de l’objectif.

Une pensée particulière pour Alexia et Natacha mes deux « compagnes de bord » le partage de notre bureau fût bien souvent pour moi une source de réconfort.

Les enseignants et enseignantes des départements d’information et communication, de sciences de l’éducation et maintenant de l’ESPE pour leurs conseils lors de mon apprentissage de l’enseignement.

Mes anciens collègues des « pôles d’appui » pour leur connaissance du projet ENT et leur enthousiasme à toute épreuve. Plus spécifiquement à Abbas, mon collègue sur le bassin muretain pour sa gentillesse et son calme imperturbable.

À tous les enseignants qui ont pris sur leur temps pour répondre à mon enquête.

À la communauté des logiciels libres (Iramuteq, R, Linux, LibreOffice, Gephi…) sans qui ce travail n’aurait pu se faire.

À mes relectrices Nicole et Elsa pour leur rigueur.

À ma famille et belle famille qui m’ont épaulée tout au long de ces années merci pour leur soutien et leur disponibilité.

Enfin à Lola qui a commencé sa vie aux balbutiements de ce projet, à Louane qui nous a rejoint en cours de route et bien sûr à Manu, merci à vous trois d’avoir supporté une thésarde à domicile avec les hauts et les bas que cela implique.

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Sommaire

1 Introduction...1

1.1 Positionnement théorique...2

1.1.1 SIC et SED...3

1.1.2 Et la psychologie sociale ?...4

2 Définition des objets questionnés...6

2.1 L’environnement numérique de travail...7

2.1.1 Les TICE et l’école...7

2.1.2 L’ENT...12

2.2 Le métier d’enseignant...18

2.2.1 Métier ou profession...18

2.2.2 La définition du poste enseignant du secondaire...20

2.3 La communication et l’information dans le métier d’enseignant...27

2.3.1 Communication : définitions courantes...27

2.3.2 Information : définitions courantes...28

2.3.3 Les théories de l’information et de la communication...30

3 Cadre théorique...38

3.1 L’étude des objets TIC...39

3.1.1 La sociologie des usages...39

3.1.2 Études sur les usages...40

3.2 Les représentations sociales...41

3.2.1 Définition...41

3.2.2 Les représentations de nos objets peuvent-elles exister ?...44

3.2.3 Naissance vie et dynamique d’une RS...45

3.2.4 Fonction des RS...48

3.2.5 École des représentations sociales...49

3.2.6 Représentations professionnelles...53

3.2.7 Attitude et représentations sociales...55

3.2.8 Pratiques et représentations...57

3.2.9 Relations entre représentations sociales...58

3.2.10 Les représentations de nos objets...60

4 Problématique(s)...66

4.1 Positionnement du chercheur et construction de l’objet de recherche...67

4.1.1 Naissance de l’objet d’étude...67

4.1.2 Naissance de l’objet de recherche...68

4.1.3 Implication du chercheur...69

4.2 Problématiques...70

4.2.1 Problématique dans le champ des SIC...70

4.2.2 Une problématique psycho-sociale...73

5 Méthodologie...76

5.1 Les outils de recueils de données...77

5.1.1 La constitution des corpus...77

5.1.2 Le questionnaire d’enquête...78

5.2 Les outils de traitements de données...81

5.2.1 Le Chi2 d’indépendance...81

5.2.2 L’Analyse Factorielle de Correspondances (AFC)...82

5.2.3 L’analyse factorielle des correspondances multiples...82

5.2.4 La méthode Reinert...83

(6)

5.2.6 La distance de Labbé...89

5.2.7 L'analyse prototypique...90

5.2.8 L’analyse de similitude...91

6 Résultats...94

6.1 Le contexte social des TICE...96

6.1.1 Le discours institutionnel...96

6.1.2 Le discours de la presse...119

6.1.3 Le corpus de la concertation sur le numérique éducatif...148

6.1.4 Croisement des corpus, permanences et différences...162

6.2 L’inscription de l’ENT dans la pensée enseignante...166

6.2.1 Description de la population...166

6.2.2 La catégorisation des données :...169

6.2.3 Les attitudes...178

6.2.4 Les représentations...179

7 Discussion...246

7.1 Du discours social aux représentations professionnelles...246

7.2 Les attitudes...247

7.3 Les représentations professionnelles en système...248

8 Conclusion :...254

9 Bibliographie...258

Glossaire des acronymes et des sigles...289

Index des tableaux...291

Index des illustrations...292

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1 Introduction

« L’école ne peut « continuer à vivre comme à l’époque de la machine à vapeur » (Mariet, 1989 cité par Jacquinot-Delaunay, 2001)

« L’avenir de l’école ne s’écrira pas à la craie sur un tableau noir : le numérique doit maintenant révolutionner l’école » (Chatel, 2010)

Ces deux citations ont été prononcées à 21 ans d’écart. La première fut contemporaine du minitel et du magnétoscope, la seconde fut énoncée la même année que le lancement commercial de l’Ipad®. La première se préoccupait de la diffusion de l’audiovisuel dans la société et de l’impossibilité de l’école de s’en préserver, la seconde de la pression de la société numérique et du besoin de l’école de s’y accoutumer. 21 ans séparent ces dires, et si l’un était prononcé par un chercheur et l’autre par le ministre de l’Éducation nationale, la même idée persiste : les technologies, qu'elles soient analogiques à l’époque, ou numériques aujourd’hui, existent indifféremment de l’école, ou plutôt l’inverse : l’école existe indifféremment de ces technologies. De nombreux « plans numériques » se sont succédé de gouvernement en gouvernement, apparaissant maintenant pour la presse comme un « serpent de mer ». Les technologies devenues pédagogiques sont entrées dans le langage commun sous la forme de TICE (technologie de l’information et de la communication pour l’éducation), mais s’insèrent-elles vraiment dans l’école ?

De nombreux plans de développement du numérique éducatif sont restés au stade d’expérimentation, ou n'ont pas été reconduits. Dans tout cela, le projet des environnements numériques de travail (ENT) se démarque par sa généralisation sur les territoires, mais surtout par les injonctions hiérarchiques rendant son emploi quotidien obligatoire. Cet outil à la frontière du site internet et de l’intranet d’un établissement est défini comme « un point d’entrée unifié pour accéder au système d’information pédagogique de l’école ou de l’établissement » (MEN, 2012). Son institutionnalisation, voire sa banalisation, peuvent l’affranchir du qualificatif de « nouvelle technologie », mais peut-on le considérer comme un outil de l’enseignant ? La permanence de l’ENT dans la journée de l’enseignant (relevé des présences, report des notes, actions pédagogiques,

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consultation des mails professionnels…) permet-elle de l’inscrire dans la pensée enseignante ? Si tel est le cas, sur quelles notions et comment cette inscription se produit-elle ?

Notre travail propose d’interroger les représentations sociales (RS) que porte la communauté enseignante sur l’ENT et d’envisager ses relations avec des objets préexistants : le métier d’enseignant, la communication et l’information dans ce métier. L’objectif est de proposer une modélisation de l’ancrage de la RS de cet objet dans un « déjà là pensé » (Jodelet, 1984, p. 361) propre au champ de l’enseignement secondaire.

1.1

Positionnement théorique

Le travail de recherche, qui plus est celui d’une thèse, s’inscrit dans une démarche, une méthodologie, mais aussi une discipline. Notre thématique, le numérique éducatif, est étudiée par de nombreux champs disciplinaires : les sciences de l’éducation, les sciences de l’information et de la communication, les didactiques des langues, l’informatique, la psychologie, la sociologie… Chacune de ces sections va porter son intérêt sur un aspect du système. Baron (2003) synthétise ces périmètres par le schéma présenté en illustration 1.

L’auteur, à travers ce schéma, proposait d’illustrer la diversité des engagements disciplinaires, dans une vision statique qui, dès sa publication, constituait une limite : « les chercheurs en TICE [évoluant] au cours du temps » (Baron, 2003, p. 5).

Illustration 1: contribution de différents domaines disciplinaires à la recherche sur les TICE (Baron,2003 p.5)

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Si cette présentation n’est donc plus d’actualité, elle montre trois grands axes de réflexion, encore présents : la conception des services et environnements, l’étude des usages éducatifs et les recherches sur les systèmes de représentation. Des surfaces communes entre ces trois pôles persistent et montrent que l’étude des représentations sociales n’est pas incompatible avec les travaux sur les usages ou les techniques, nous avons voulu situer l’utilité de notre travail dans cet écosystème :

• La conception des ENT s’est développée sur le canevas de la forme scolaire (Cerisier, 2011), en cela elle répond aux représentations du système éducatif. Cet outil s’inscrit également dans la succession de nombreux plans ou projets institutionnels sur le numérique éducatif, il sera donc appréhendé à partir des traces mentales que cet historique aura laissées.

• Les usages d’un outil collectif comme l’ENT ne peuvent faire abstraction de la technique utilisée, mais doivent également s’inscrire dans une perspective sociale (chap. 3.1.1). En effet, la médiation sociotechnique « est à la fois technique, car l’outil utilisé structure la

pratique, mais la médiation est aussi sociale, car les mobiles, les formes d’usages et le sens accordé à la pratique se ressourcent dans le corps social » (Jouët, 1997, p. 293). De plus,

les modèles définissant les processus d’usage (chap 3.1.2) rappellent la présence des croyances ou attitudes en amont de toute intention d’usages.

Autour de ces trois axes gravitent des champs d’études qui relèvent du cloisonnement monodisciplinaire, « ne serait-ce que parce qu’il resterait à ces groupes de chercheurs à apprendre à communiquer » (Jacquinot-Delaunay, 2001, p. 401). Ces relations se limitent donc à ce que l’on pourrait appeler une pluridisciplinarité dans le sens d’une « addition de disciplines, sans véritables

interactions entre elles » (Darbellay, 2005, p. 48). Notre travail s’inscrit quant à lui dans une

démarche interdisciplinaire. Nous développerons dans les parties qui suivront notre position entre sciences de l’éducation (SED) et sciences de l’information et de la communication (SIC), avec une approche théorique centrée sur la psychologie sociale.

1.1.1 SIC et SED

Notre première posture interdisciplinaire se situe au travers des SED et des SIC. Notre objet d’étude étant une technologie de l’information et de la communication dans l’enseignement, elle se définit « au carrefour des dimensions proprement communicationnelles et proprement éducatives » (Jacquinot-Delaunay, 2002, p. 2), chacun de ces versants s’inscrivant dans un champ disciplinaire. Les deux disciplines à l’œuvre ici ont déjà été étudiées dans leurs complémentarités. Ce travail de synthèse a été proposé, mais également expérimenté par Jacquinot-Delaunay, qui tout au long de sa

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carrière a su associer ces deux pans de réflexion, à la fois professeur de SED, et fondatrice du département SIC de paris-8. Elle propose d'illustrer la gémellité des deux disciplines par ces éléments : une visée institutionnelle marquée par leurs développements récents avec leurs parcours d’institutionnalisation et les difficultés dues à leur hybridation. Mais surtout, elles se caractérisent par leur pluridisciplinarité :

"elles se sont constituées à partir de la juxtaposition de disciplines diverses des sciences humaines et sociales et ensuite, développées en sollicitant la plupart de ces autres disciplines tantôt « contributives » tantôt « constitutives » de leur champ spécifique; toutes deux ont eu leur débat (non clos) sur le pluriel ou le singulier de leur statut de « science(s) » » (Jacquinot-Delaunay, 2001, p. 394)

Nous noterons ici que si l’auteur qualifie cette constitution de pluridisciplinaire, nous interpréterons le développement cité supra de « transdisciplinaire » au sens « d’un mouvement de traversée des disciplines aboutissant à une « co-construction des savoirs qui traversent littéralement les disciplines constituées » (Darbellay, 2005, p. 51) » (Charaudeau, 2010). Mais si cette définition s’applique à la fois au SED et au SIC, elles n’en restent pas moins deux disciplines différentes. Nous considérons notre positionnement entre ces deux univers comme appartenant à une transculturalité donnant la possibilité au sujet « d’habiter et d’être habité par les différentes cultures, de passer d’un référent culturel à un autre » (Di & Moro, 2008, p. 22 cité par Chante & Yahiaoui, 2016) . Notre question de départ est née dans un parcours universitaire en SED, et elle a évolué dans un environnement de recherche en SIC (chap. 4.1), si ces deux périodes sont complémentaires pour le travail proposé aujourd’hui, la transition d’un champ disciplinaire à l’autre s’est effectuée par un trait d’union commun : l’ancrage théorique en psychologie sociale.

1.1.2 Et la psychologie sociale ?

Charaudeau définit les sciences de l’éducation et les sciences de l’information et de la communication comme :

« deux champs disciplinaires qui circonscrivent, chacun à sa façon, leur domaine d’étude, et qui, selon l’objet qu’ils étudient, peuvent avoir recours, autant que de besoin, à d’autres disciplines, telles la sociologie, la psychologie sociale, les linguistiques de la langue et du discours, l’histoire etc. » (Charaudeau, 2010, p. 198)

(11)

Notre démarche d’étude a choisi un regard psycho-social pour étudier l’intégration d’un objet TICE dans la pensée enseignante. Cette discipline s’intéresse à :

«ces événements psychologiques fondamentaux que sont les comportements, les jugements, les affects et les performances des êtres humains en tant que ces êtres humains sont membres de collectifs sociaux ou occupent des positions sociales (en tant donc que leurs comportements, jugements, affects et performances sont en partie tributaires de ces appartenances et positions)» (Beauvois, Joule, & Monteil, 1998, p. 310-311)

Nous considérons donc que le rapport des enseignants à l’ENT dépasse les fonctionnalités de ce dernier et est constitué à partir de l'identité sociale de cette population. Nous le questionnerons donc non pas par une définition objective de l’outil, mais par une interprétation de l’objet inscrit dans le contexte d'un métier. Pour accéder à ce type de savoir subjectif, nous choisirons les théories des représentations sociales. Ces structures cognitives, socialement partagées et propres à un groupe, sont à la fois le produit et le processus d’une activité mentale permettant de reconstruire le réel et de lui attribuer « une signification spécifique » (Abric, 2011, p. 64).

Pour permettre une étude compréhensive de cette intégration, nous débuterons ce mémoire par une présentation des quatre objets questionnés (ENT, métier d’enseignant, communication et information), puis nous exposerons les éléments théoriques qui nous permettent d’aboutir à notre problématique. La seconde partie du mémoire sera composée, après un exposé des outils méthodologiques, d’une étude empirique en deux temps. Une première étape est orientée vers l'exploration du discours social sur les TICE et repose sur l'étude de textes provenant de trois sphères sociales différentes (presse, institution et forum). La seconde étape étudie les représentations professionnelles de l'ENT et son intégration dans la pensée enseignante. Cette partie repose sur l'étude de 625 questionnaires relevant les représentations professionnelles de l’environnement numérique de travail, du métier d’enseignant, de l’information et de la communication dans ce métier. Ces analyses s’emploieront à faire ressortir les liens exprimés entre ces objets, mais également les invariances d’opinions les traversant. Ce travail aboutira à des pistes de recherches, qui questionneront les limites de l'ENT face à l’environnement professionnel, mais qui permettront également un nouveau mode de lecture des structures des représentations sociales.

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2 Définition des objets questionnés

2 Définition des objets questionnés...6

2.1 L’environnement numérique de travail...7

2.1.1 Les TICE et l’école...7

2.1.2 L’ENT...12

2.1.2.1 La définition de l’ENT...13

2.1.2.2 L’ENT de notre terrain...15

2.1.2.2.1 Les outils proposés...16

2.1.2.2.2 Des outils personnels...16

2.1.2.2.3 Les outils pédagogiques...16

2.2 Le métier d’enseignant...18

2.2.1 Métier ou profession...18

2.2.2 La définition du poste enseignant du secondaire...20

2.2.2.1 Un historique...20

2.2.2.2 La définition institutionnelle...22

2.3 La communication et l’information dans le métier d’enseignant...27

2.3.1 Communication : définitions courantes...27

2.3.2 Information : définitions courantes...28

2.3.3 Les théories de l’information et de la communication...30

2.3.3.1 Une origine commune...30

2.3.3.2 Les théories de la communication...31

2.3.3.3 Les théories de l’information...33

2.3.3.3.1 La société de l’information...34

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Les représentations sociales (RS) ne sont pas un savoir scientifique, la signification que les groupes sociaux donnent à un objet, n’est jamais directement superposable à sa définition exhaustive, définition bien souvent impossible à produire sur un objet vecteur de RS (chap 3.2.2). Cependant, les théories permettent de modéliser et comprendre le monde qui nous entoure et les éléments que nous étudions dans ce travail. Nous ne chercherons pas à avoir une vision intégrale de nos objets, mais une présentation pragmatique des éléments nous permettant de bâtir notre problématique, les outils de recueil de données et les interprétations de nos résultats.

2.1

L’environnement numérique de travail

Cet objet est l’outil TICE étudié dans ce travail. Afin d’en cerner ses caractéristiques, nous allons présenter un historique des TIC dans l’éducation, puis définir les caractéristiques de cet objet.

2.1.1 Les TICE et l’école

L’étude des TICE, au-delà de leurs particularités respectives, ne peut se détacher de l’étude du lien qu’entretiennent le système scolaire et l’informatique. En effet, ces outils ne sont pas apparus sur un terrain vierge mais ont été les instruments, ou les conséquences, de décisions institutionnelles concernant l’informatique.

Les professionnels (EPI1) et chercheurs (Baron, 1990; Harrari, 1996; Ratinaud, 2003) s’accordent

sur l’arrivée de l’informatique dans l’enseignement secondaire français en mars 1970 avec le séminaire sur « L’enseignement de l’informatique à l’école secondaire » tenu au Centre de Recherche sur l’Innovation dans l’Enseignement (CERI). Les recommandations de l’OCDE2

d’introduire une discipline informatique dans l’enseignement secondaire sont reprises dans les textes officiels (BOEN, 1970)3 présentant déjà aussi bien les apports fondamentaux que représente

l’apprentissage de l’algorithme : « Il [l’enseignement secondaire] doit profiter de la valeur

formatrice de l’enseignement de l’informatique, de la rigueur et de la logique qu’elle impose »

(BOEN, 1970, p. 1764), mais également les possibilités qu’il offrira comme outil dans les domaines professionnels : «Il doit faire apparaître la portée économique du phénomène et faire savoir ce que l’informatique peut apporter à la vie professionnelle » allant même jusqu’à pressentir l’omniprésence du numérique dans la société actuelle : « préparer au monde de demain dans lequel ceux qui ignoreront tout de l’informatique seront infirmes » (BOEN, 1970, p. 1764).

1 EPI : association pour l’enseignement de l’informatique

2 OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques 3 BOEN : Bulletin officiel de l’éducation nationale

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Cette volonté ambitieuse a donné lieu au plan 58 lycées4 (1970) qui a permis d’équiper certains

établissements en ordinateurs. Ce matériel fut associé à la présence de quelque 500 enseignants préalablement formés sur une année chez les industriels de l’informatique présents dans le projet (Baron, Bruillard, & Pair, 1996). Si sur cette période les ateliers informatiques d’initiation à la programmation sont proposés dans les lycées ; ils reposent sur le principe du volontariat des élèves comme des enseignants et la création d’une discipline académique n’est pas encore envisagée. Le plan qui suivra répond au nom des 10 000 ordinateurs, décrit dans la presse comme « le mariage du siècle : éducation et informatique », il s’intègre au plan national visant une compétitivité et une relance industrielle. Le versant éducatif de cette démarche donnera lieu en 1980 au déploiement des 10 000 ordinateurs mais également au rapport Simont qui souligne l’importance de l’enseignement de l’informatique pour tous, et surtout la question de l’informatique comme objet ou comme outil d’enseignement (Baron & Bruillard, 2011).

5 ans plus tard naîtra le plan « Informatique pour tous » inscrit dans une vision globale du système scolaire, il se démarquera des autres plans par sa généralisation à l’enseignement primaire. Interrompu par un changement de gouvernement un an après son lancement, il sera longtemps décrié et les témoignages d’enseignants l’ayant mal vécu se retrouveront dans les représentations de ce public 25 ans plus tard (Netto, 2011). Au-delà des ressentis des professionnels de l’éducation, ce plan marque la mise en place de moyens techniques (120 000 machines réparties sur 46 000 établissements), mais également humains grâce à l’initiation de 110 000 enseignants par leurs collègues déjà formés sur les plans antérieurs. Cette vague de formation, si elle couvrait le territoire, ne représenterait au total qu’une trentaine d’heures par individu parfois prises sur les congés scolaires (Marquet, 2004). Les textes officiels présentent dès lors des contenus disciplinaires, de l’école au lycée, sur les algorithmes, et institutionnalisent l’option informatique dans les lycées. Avec l’interruption de ce projet, s’amorce le désengagement des budgets nationaux au profit d’une gestion matérielle locale. Seul le versant logiciel continuera d’être centralisé par la production de produits spécifiques ou la négociation de tarifs « éducation nationale » avec les industriels.

Si sur les dix années suivantes aucun plan numérique ne sera mis en place, cette décennie sera la manifestation d’aller-retour dans les décisions sur cette thématique. La « saga de l’option informatique » (Baron, 1994, p. 77) constitue un exemple de ces incohérences : l’option généralisée et institutionnalisée en 1985, sera officialisée en 1988 par la création d’une épreuve au baccalauréat, puis abandonnée en 1989, elle reviendra pour être définitivement arrêtée en 1994. La formation des

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enseignants, la politique logicielle et la maintenance des équipements ont également subi différentes mesures contradictoires.

Par ailleurs la société va voir se démocratiser l’informatique dans les foyers mais au-delà du simple équipement, l’informatisation du quotidien « s’infiltre dans une multitude d’activités et jusque dans

la fabrication du lien social. La performativité devient partie de nos savoirs faire, de notre outillage mental et de nos valeurs. » (Jouët, 1990, p. 221).

C’est en 1997 dans un contexte de mise en place du PAGSI5 (Programme d’Action

Gouvernementale pour la Société de l’Information) par Lionel Jospin (premier ministre) qu’est lancé le plan « Nouvelles technologies de l’enseignement » du ministre de l’éducation nationale Claude Allègre. Avec comme objectif global « l’entrée de la société française dans le XXIe siècle et gagner la bataille de l’intelligence » (Jospin, 1997). Le dessin est d’intégrer les NTIC dans « toute démarche pédagogique », présupposant que leur utilisation « constitue un facteur supplémentaire de réussite scolaire ». L’arrivée d’internet propose les possibilités d’échanges que l’informatique jusque là ignorait. L’enseignement par les TICE passe d’une visée constructiviste (produire avec le numérique) à socio-constructiviste (apprendre par l’échange).

Ce plan marque le tournant de l’utilisation du multimédia, des TICE, et l’oubli de l’informatique comme savoir. Il vise à moderniser l’enseignement afin de préparer l’entrée de l’école dans la société de l’information. L’informatique comme outil au service de l’enseignant quelle que soit sa discipline est définie dans une vision globale du système. Nous retrouverons donc les thématiques de formation des enseignants et d’équipement mais la notion d’inclusion de l’outil dans une autre matière posera la question des ressources. Ainsi dans le rapport décrivant sa mise en œuvre, le PAGSI se déclinait en 8 parties dont :

 deux sur l’enseignement : enseigner avec les Tice dans une démarche éducative globale ; donner la priorité à la formation des enseignants et des cadres.

 trois concernant le matériel et sa gestion : équiper les établissements scolaires ; assurer un développement cohérent et équilibré ; développer le partenariat actif avec les collectivités locales et les industries.

 trois sur les ressources numériques : soutenir l’industrie du multimédia éducatif ; encourager la production individuelle ; favoriser leur diffusion.

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Le gouvernement suivant en 2002 présentera le plan « Pour une république numérique dans la société de l’information », porté par le premier ministre Jean pierre Raffarin sous l’appellation « RE/SO 2007 ». Ce projet de politique générale vise à transposer les valeurs républicaines dans une société de l’information. Les objectifs généraux misent sur l’accès et l’appropriation des TIC par tous et sur l’impulsion par l’exemple des administrations de santé et scolaire. Un volet spécifique à l’enseignement sera développé par le ministre Xavier Darcos.

S’appuyant sur les structures déjà en place pour le volet matériel/ressource, il répartit les actions aux différents partenaires : le CNDP sera missionné pour la création et la promotion de ressources pédagogiques, les collectivités territoriales pour la dotation d’équipements. Ces dernières seront appuyées par le conseil territorial de l’éducation (créé à cette période). La réflexion sur la formation laissera son empreinte dans l’institution scolaire par la création des certifications informatiques : Brevet informatique et internet (B2I) pour les collégiens de troisième ; Certificat Informatique et Internet (C2I) optionnel pour les futurs enseignants. Enfin, c’est le 14 mai 2003 en conseil des ministres qu’il est fait mention du projet d’espace numérique de travail, prévoyant un accès personnel pour « chaque élève, chaque enseignant et chaque famille » (Darcos, 2003) d’ici 2007.

Si cette ambition mettra bien plus de temps à devenir réalité, l’échéance de 2007 sera l’année du « plan de développement des technologies de l’information appliquées à l’éducation ». Initié par le ministre de l’enseignement Gilles de Robien, ce projet sort du périmètre de l’établissement scolaire, et de sa temporalité. Ce programme va ouvrir les TICE à la sphère privée de l’élève, en s’appuyant sur la circulaire parue un an avant sur « le rôle et la place des parents à l’école » (BOEN, 2006b) qui invitait les établissements à développer la communication avec les familles (Monceau, 2017). C’est ainsi qu’apparaît la généralisation des ENT dans le secondaire auquel s’adosse « un livret scolaire des compétences en langues vivantes », appelé « portfolio » pour les collégiens. Pour le primaire, si les ENT ne sont pas encore d’actualité, la caisse des dépôts porte le projet « Mon enfant à l’école primaire » offrant aux parents l’accès « à tout un ensemble de services utiles, comme l’inscription à l’école, au gymnase, et aux activités peri-scolaires offertes par les mairies » (De Robien, 2006).

 Mais au-delà de la communication entre l’école et la famille, l’emploi des TICE apparaît également dans l’accompagnement scolaire. Un appel à projet est lancé pour la conception et mise en place de soutien scolaire à distance. Dans les projets retenus, le CNED est missionné pour une étude sur la mise en place d’une généralisation d’aide à la scolarité à distance.

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 Enfin, une sensibilisation aux TICE, pour les nouveaux enseignants, sort également des murs de l’école par l’attribution pour chaque professeur à sa sortie de l’IUFM d’une clé USB contenant « des productions numériques validées au plan national, mais aussi les ressources de chaque académie ».

En 2009 le ministre Xavier Darcos mettra en place le plan « école numérique rurale » permettant à 6 700 écoles de commune de moins de 2 000 habitants de toucher une subvention pouvant aller jusqu’à 9 000 € pour l’équipement numérique.

L’année suivante, en novembre 2010, Luc Chatel ministre de l’éducation nationale lance le « plan de développement des usages numériques à l’école » s’appuyant sur le rapport Fourgous (2010) le programme se décline en 5 points :

 Favoriser l’accès aux ressources numériques de qualité, en établissant un référencement des solutions existantes publiques et privées. Les établissements bénéficieront d’un « chèque ressources numériques », ce projet devant impulser les usages d’applications numériques par destination (Puimatto, 2014).

 Former et accompagner les enseignants dans les établissements en désignant un enseignant référent numérique par établissement, poste prévu à la fois comme formateur et conseil à la direction.

 Généraliser les services numériques et les ENT avec une mise en avant du cahier de texte numérique.

 Nouer les partenariats avec les collectivités locales pour le développement des usages du numérique. Sous cette appellation c’est la redéfinition des responsabilités en matière de déploiement mais aussi de maintenance du matériel qui sera réparti sur ces acteurs.

 La refonte du B2I, ce certificat sera réécrit de façon à être en accord avec les technologies numériques utilisées par les élèves, s’ouvrant désormais la notion de danger des réseaux sociaux.

En 2012 Vincent Peillon va proposer son grand plan pour « faire entrer l’école dans l’ère numérique ». Appuyant son projet sur des enquêtes d’opinions favorables au numérique éducatif, il inscrit sa démarche dans une vision globale du système scolaire. Ainsi, prônant le partenariat et la collaboration de tous les acteurs, le programme s’inscrit dans la continuité des projets déjà menés :

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 La formation des enseignants (au numérique) prévue de façon initiale et continue sera mise en place dans les Écoles Supérieures du Professorat et de l’Éducation (ESPE). Si elle repose sur la maîtrise des outils, elle montre l’ambition d’être au service des apprentissages et de la communication avec les familles. Pour se faire par le numérique, elle sera proposée dans une modalité à distance.

1. Les ressources pédagogiques : toujours en privilégiant l’accès à ces dernières, ce sont les pratiques déjà en place qui seront mises en avant par la création d’une plateforme de partage de productions pédagogiques par et pour les enseignants. Au-delà de ces catalogues, le soutien des industries du numérique éducatif est renforcé, leur développement constituant une opportunité économique sur le marché international.

Ce plan apportera de nouveaux outils de gouvernance pour les TICE. Au niveau national, un conseil au numérique éducatif sera ouvert, permettant une meilleure coordination des projets. Si les collectivités territoriales restent les financeurs, un renfort logistique leur est apporté afin de monter des dossiers de financement européen. Une Union de groupement d’achat public (UGAP) permettra aux municipalités d’acquérir du matériel sans avoir à souscrire de marché public.

Les derniers partenaires à faire leurs apparitions dans ce plan sont les chercheurs. Le projet affiche la volonté de travailler avec la recherche publique pour « répondre aux questions […] soulevées par

le développement du numérique à l’école » (Peillon, 2012), mais également pour développer les

outils et les programmes, ou encore évaluer l’impact de ces technologies. Ce partenariat devrait prendre la forme d’appels à projets et favoriser les rapports avec l’industrie.

Si ces grands axes s’inscrivent dans la continuité des plans précédents, apparaissent des outils à destination de la sphère familiale qui n’intègrent pas le corps enseignant. Une partie de ces outils concerne l’ensemble de la population sous forme d’activités complémentaires (de l’aide à l’apprentissage de la lecture, aux révisions pour le bac) mais la majorité des propositions s’oriente vers les élèves en difficulté (soutien scolaire, cellule décrochage, orientation handicap).

2.1.2 L’ENT

Notre travail portant sur l’intégration d’un objet TICE dans la pensée enseignante, nous avons choisi l’objet ENT comme réflexion. Ce choix s’est établi en raison de certains critères que nous allons exposer dans la présentation de cet objet.

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2.1.2.1 La définition de l’ENT

Sous l’acronyme ENT se cachent plusieurs déclinaisons possibles. En effet, si tout le monde s’accorde sur la signification des deux dernières lettres « Numérique de Travail », le E peut représenter les termes « espace » ou « environnement »6. Au-delà de la simple appellation, les ENT

sont difficiles à caractériser. Cet outil représente une exception française (Bruillard, 2011; Kaplan, Pouts-Lajus, & Leccia, 2004) : si des outils proches peuvent se retrouver dans des établissements étrangers, seule la France a structuré le projet sur le plan national. Cette particularité, tout en ouvrant une richesse aux niveaux des expériences, traduit une définition empirique complexe. Les ENT ayant déjà fait l’objet de plusieurs thèses sur les dernières années (Costa Cornejo, 2013; Louessard, 2016; Schneewele, 2012; Voulgre, 2011b,etc). Dans les lignes qui suivront, nous nous emploierons à situer cet objet d’étude dans la recherche présentée. Ce choix laissera volontairement de côté les spécificités techniques en privilégiant une vision globale de l’outil et sa pertinence dans l’étude des TICE.

Le schéma directeur des ENT7 (SDET), véritable « base normative qui encadre ou doit encadrer le

développement des ENT » (Cerisier, 2011), définissait dans sa première version (2004) les projets ainsi :

2004

Un espace numérique de travail désigne un dispositif global fournissant à un usager un point d’accès à travers les réseaux à l’ensemble des ressources et des services numériques en rapport avec son activité. Il est un point d’entrée pour accéder au système d’information de l’établissement ou de l’école.

À ces quelques lignes s’ajoutaient des paragraphes présentant les publics concernés, les périmètres des projets et la volonté de mutualiser les ressources « inter-établissement avec les partenaires publics et privés » (MEN, 2004).

Dés 2006 une seconde version du document paraîtra et proposera une définition plus étoffée. Ainsi, le « point d’accès » à l’ensemble des ressources et des services deviendra le point d’accès unifié à l’ensemble des outils, contenus et services applicatifs, le système d’information deviendra « le système d’information de l’administration de l’établissement ou de l’école », relevant ainsi du

6 Nous noterons que si les instances recommandent la première dénomination, notre terrain utilisant la seconde, nous resterons sur l’appellation « environnement numérique de travail ».

7 Ce document n’ayant pas vocation à fournir un modèle, certains ENT ne suivent pas ces recommandations , cependant sur notre terrain, il reste utilisé par le rectorat pour la mise en place du projet ENT et constitue une empreinte du discours institutionnel nous intéressant ici.

(20)

domaine bureaucratique de l’administration scolaire (Laforgue, 2007). Il faudra attendre la quatrième version (2012) du document pour voir une véritable évolution de cette définition :

2012 :

Un espace numérique de travail désigne un ensemble intégré de services numériques, organisé, choisi et mis à disposition de la communauté éducative par l’école ou l’établissement scolaire. Il repose sur un dispositif global fournissant à un usager un espace dédié à son activité dans le système éducatif. Il est un point d’entrée unifié pour accéder au système d’information pédagogique de l’école ou de l’établissement.

Nous noterons ici que si l’outil ENT est défini dès les premiers textes comme un point d’accès à un système d’information, ce ne sera que 8 ans plus tard que cette directive prendra en compte l’aspect pédagogique. Caractérisé par le périmètre de l’établissement, cet outil est dans les premières années de généralisation centré sur l’administration de l’établissement. D’un point de vue légal, le proviseur (et /ou principal) sont les responsables des contenus publiés sur l’ENT, ils peuvent choisir les outils et modules actifs, cependant, ils n’ont aucun pouvoir sur la solution logicielle choisie pour l’ENT. En effet, la mise en place de ce projet répond à une organisation spécifique du système scolaire français. Dès 2011, Éric Bruillard expliquait comment « les ENT sont au cœur de tensions entre les différents acteurs institutionnels » (Bruillard, 2011, p. 104). De la même façon que le ministère impose les programmes ou gère les personnels ; les ENT et le cahier de texte numérique ont été impulsés, voire imposés, par cette autorité (Chaptal, 2007; Voulgre, 2011a). Cependant, les réformes successives ont doté les collectivités territoriales de la responsabilité des équipements scolaires dont les dotations informatiques (logicielles et matérielles) font partie. Ainsi le choix du prestataire et la gestion du projet incombent aux conseils départementaux et régionaux, reléguant les établissements à la liberté d’activer ou non certaines options (Genevois & Poyet, 2010).

L’ENT est donc officiellement un portail d’accès à des services numériques. Cette nouveauté dans le champ des TICE repose sur la création d’un annuaire permettant de définir pour chaque individu son rôle dans l’établissement (élève, enseignant, parent…). À partir de cette structure sont déterminés les droits d’accès aux outils ou contenus mais également les communications de masse et d’identification automatique à des abonnements extérieurs. Si les objectifs de l’ENT étaient de transformer l’école dans son architecture, dès leur conception ils sont modélisés sur la forme scolaire leur préexistant (Cerisier, 2011). Ainsi, chaque individu sera caractérisé par une fonction mais également une classe, voire un groupe de travail. Cette structure, définie par l’administration de l’établissement, génère un fonctionnement pédagogique calqué sur le format traditionnel.

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2.1.2.2 L’ENT de notre terrain

Notre étude s’est déroulée exclusivement sur l’académie de Toulouse, l’objet sondé n’est pas le concept de l’ENT mais la concrétisation qu’il prend dans notre académie. Les deux projets déployés sont l’Ecollège, sur les collèges de la Haute-Garonne, et l’ENTmip, sur les lycées de la région et les collèges des autres départements. Bien que ces projets soient distincts politiquement, le prestataire de service, la solution logicielle et les ressources humaines permettant la mise en place de l’ENT sont identiques. Cependant, malgré ces points communs, quelques différences persistent :

 Une entrée dans le projet différé : si le projet ENTmip est lancé en 2007 pour les établissements pilotes et termine sa généralisation en 2012, l’Ecollège31, lui, ne démarra qu’en 2011 et son déploiement se terminera en 2014.

 2 projets = 2 contrats : si pour nos 2 ENT c’est la solution Kd’école qui est en place, les versions de l’outil diffèrent. Ainsi, quelques détails d’ergonomie mais aussi quelques options peuvent être distingués.

 2 projets = 2 annuaires : L’annuaire d’un ENT est un élément central. En effet, il permet, quel que soit l’établissement sur lequel la connexion est faite, d’accéder à ses services personnels. Or, les deux structures ne partagent pas l’annuaire. Ainsi, un enseignant effectuant son service sur deux établissements aux projets différents ne pourra pas accéder aux cours ou aux ressources stockés sur son compte ENTmip lorsqu’il se connecte sur l’établissement dépendant d’Ecollège.

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Au-delà de ces particularités, les deux projets restant proches, nous parlerons de ces derniers de manière équivalente dans la suite de notre propos.

2.1.2.2.1 Les outils proposés

Dans cette partie nous présenterons les différents outils proposés aux enseignants. Notre étude ne portant que sur cette population, nous n’aborderons la présence des autres acteurs que sous forme de contextualisation. Cette présentation volontairement non exhaustive présentera les outils exprimés dans les résultats empiriques.

2.1.2.2.2 Des outils personnels

Cette première famille d’outils a la particularité de n’être visible que par l’enseignant, ils composent ce que l’on pourrait appeler l’espace personnel qui est accessible quel que soit l’établissement à partir duquel il se connecte (dans le périmètre du projet) :

 espace de stockage : nous pourrions comparer cet outil à une clé USB virtuelle, l’enseignant peut y organiser le contenu sous forme d’arborescence ; ce dernier sera disponible dans les autres outils.

 agenda : un agenda interactif, auquel il peut être superposé les agendas de groupes de travail, de l’établissement ou d’autres agendas.

 classeur pédagogique : cet espace permet d’organiser les fiches de séances pédagogiques ou du travail à faire à destination du cahier de texte (voir infra). En fin d’année, c’est sur cet outil que seront archivées les séances publiées dans le cahier de texte.

 La messagerie : sur cet outil, il ne faut pas confondre le mail professionnel que les enseignants possèdent, de l’adresse de messagerie qu’ils ont dans l’ENT. Ces deux outils distincts communiquent uniquement par une alerte postée automatiquement sur le mail professionnel, informant l’enseignant de la réception d’un message sur l’ENT. Une des différences fondamentales est l’accès à cette adresse de messagerie par les élèves et les parents.

2.1.2.2.3 Les outils pédagogiques

Dans cette catégorie nous recenserons les outils prévus pour l’interaction avec les élèves, il va de soi que leur utilisation peut être détournée pour l’emploi de travail collaboratif entre enseignants par exemple. Cependant, leur mise en place orientait leur utilisation dans un contexte de classe. Ces outils sont accessibles par les différents publics (selon leurs droits). L’enseignant peut choisir de

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masquer temporairement sa production mais la destination finale est d’être visible par les autres acteurs scolaires : élèves, direction d’établissement8, inspection et parents.

 Le cahier de texte : c’est la réplique de son homologue papier qui faisait foi du travail effectué en classe ou demandé pour les séances suivantes. Depuis 2011 le format numérique est rendu obligatoire, il permet aux parents de le consulter, à la direction de l’établissement d’y apposer son visa (une fois cette démarche faite, l’enseignant n’a plus la possibilité de le modifier) et est ouvert aux inspecteurs les 15 jours précédents une inspection. Il sert également d’emploi du temps des classes. Lors de notre enquête les deux projets permettaient d’avoir l’emploi du temps réactualisé à la semaine. Cette dynamique était cependant récente. En effet, jusque-là la base utilisée par la direction pour traiter l’emploi du temps n’était pas reliée à l’ENT et demandait à la personne en charge de faire « remonter les services » à chaque modification. Il contient également des outils classiques de LMS9 :

remise de devoir, possibilité de créer des sous-groupes de travail pour différencier les tâches...

 Les rubriques : sous cette appellation nous désignerons l’interface d’édition de contenu. Les ENT, au-delà des services fournis, portent également la fonction de site internet classique.

8 Les proviseurs et directeurs étant légalement responsables des contenus de l’ENT ont accès à tous les contenus hormis les services détaillés dans le chapitre «Les outils personnels ». C’est également le cas des administrateurs. 9 LMS : Learning Management System, plateforme de gestion pédagogique.

(24)

L’outil permettant la publication des informations est identique quelles que soient les destinations. Représentant les éléments accessibles par le menu affiché à gauche de l’ENT, ils peuvent être ouverts à différents publics que ce soit pour la consultation, la rédaction ou la gestion. Chaque rubrique contient par défaut 5 outils pouvant être désactivés :

▪ une page fixe, le contenu présent ici étant statique

▪ un blog présentant les articles par ordre ante-chronologique ▪ un chat permettant la discussion synchrone

▪ un forum favorisant les discussions asynchrones

▪ un partage de documents permettant de stocker de façon collaborative les documents Dans ces onglets, il existe une spécificité sur la partie classe. Les sous-rubriques contenues ici sont automatiquement générées chaque année sous la forme d’une sous-rubrique par classe ouverte dans l’établissement. Peuvent y accéder les élèves de cette classe, leurs parents, et leurs enseignants. Ces sous-rubriques ont une durée de vie d’une année scolaire, les contenus seront archivés10 à la fin de l’année.

 Les questionnaires : l’outil Kd’école permet aux usagers11 de créer des questionnaires à

choix multiples, les résultats sont stockés en format .csv. La correction automatique n’est pas proposée mais une application Excel® allant dans ce sens a été développée par un membre du rectorat.

2.2

Le métier d’enseignant

Notre volonté de départ étant d’étudier comment un objet TICE s’intègre dans la pensée enseignante, le schéma aurait été incomplet si nous n’avions pas recueilli les représentations des enseignants sur leur métier (Davidson & Desjardin, 2011; Netto, 2011; Paquay, Altet, Charlier, & Perrenoud, 2001). L’étude menée étant exclusivement orientée sur le secondaire, nous nous focaliserons sur les enseignants de ce niveau. Afin de contextualiser notre étude, nous présenterons une définition institutionnelle du métier en parcourant l’historique des changements intervenus dans les formalisations de la fonction.

2.2.1 Métier ou profession

10 Cet archivage n’est accessible que par l’administrateur.

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Un des premiers choix requis dans notre étude fut celui de l’expression « métier d’enseignant ». Cet objet est non seulement questionné mais constitue également la contextualisation professionnelle aux autres objets. Cette omniprésence dans notre recueil de données, nous a amené à nous questionner sur les différences entre les expressions « métier d’enseignant » et « profession d’enseignant ».

La professionnalisation des enseignants est un sujet de tension dès lors que l’on traite de la formation de ces acteurs (Bourdoncle, 1990, 1993). La création des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres (IUFM) au début des années 1990 en constitue un exemple en recherchant une « professionnalité globale » (Bancel, 1989, p. 3) ; cette action sera renforcée par le recrutement au niveau master des professeurs et la création des ESPE. La question reste d’actualité dans les discours politiques (Dulot, Bonneau, Colombani, Forestier, & Mons, 2012; OCDE, 2016) et de nombreux travaux universitaires portent sur ce processus (Altet, 2010; Bailleul & Bodergat, 2015; Bourdoncle, 1993; Broyon & Changkakoti, 2008; Fabre & Lang, 2000; Michel & Bertone, 2017; Paquay et al., 2001; Wittorski & Briquet-Duhazé, 2008 ;etc). Si ces recherches révèlent des changements cognitifs chez les enseignants, interroger ces derniers sur leur « profession d’enseignant » inscrirait la professionnalité non pas comme objet d’étude mais comme « savoir naïf » (Jodelet, 2003a) (chap 3.2.1). Dans cette optique, nous examinerons les termes « profession » et « métier » selon les définitions d’un dictionnaire usuel :

Le dictionnaire « Trésor de la Langue Française »12 (TLF) définit les objets « métier » et profession

selon plusieurs aspects :

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Définitions proposées par le TLF pour le mot

métier Définitions proposées par le TLF pour le motprofession

 Activité manuelle ou mécanique nécessitant l'acquisition d'un savoir-faire, d'une pratique  Occupation, profession utile à la société,

donnant des moyens d'existence à celui qui l'exerce.

 Occupation, activité permanente s'apparentant à un métier par son utilité sociale, le savoir-faire ou le mode d'existence qu'elle implique.

 Habileté, savoir-faire dans la production ou l'exécution manuelle ou intellectuelle acquise par l'expérience, la pratique que confère un métier ou une activité permanente

 Activité, état, fonction habituelle d'une personne qui constitue généralement la source de ses moyens d'existence

 Activité manuelle ou intellectuelle procurant un salaire, une rémunération, des revenus à celui qui l'exerce.

 Métier appartenant à un ensemble dans un secteur d'activité particulier

Tableau 2.1 : comparaison définition des termes métier et profession

Les éléments ressortant des définitions du terme « métier » dépassent l’aspect financier, orientant la notion vers un savoir faire acquis par l’expérience et une place, voire une utilité, dans la société. À ces définitions orientant l’objet « profession » sur un versant économique et identitaire, s’ajoutent les travaux de Wittorski créditant un savoir de terrain. Ce dernier serait acquis par l’expérience du métier, là où la profession dépendrait d’un savoir théorique enseigné (Wittorski, 2005). Ces réflexions ont orienté notre choix vers le terme « métier d’enseignant ».

2.2.2 La définition du poste enseignant du secondaire

2.2.2.1 Un historique

Si notre étude porte sur l’acte d’enseigner, le choix de notre terrain restreint notre population aux professeurs du secondaire. Cette particularité nous demande de nous attarder sur la profession d’enseignant du secondaire. En effet, le terme « enseignant » regroupe aujourd’hui la totalité des personnels transmettant leurs savoirs à la nouvelle génération13. Cependant cette généralisation 13 Le mot enseignant est défini par le TLF comme : Qui a pour fonction d’enseigner.

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n’apparaît que dans les années 1960 (Hirschhorn, 1993), historiquement les corps de métier étaient cloisonnés dans leur niveau d’exercice (primaire, secondaire…), mais également dans leur fonction comme la définissait leur formation initiale : au sortir de la guerre, les enseignants du primaire étaient formés dans les écoles normales orientant leur métier sur la transmission « non seulement des connaissances mais aussi des valeurs » (Compagnon & Thévenin, 2001, p. 263). Par contre, Les « professeurs » (enseignants du secondaire) initialement formés dans les universités, attendirent 1952 pour intégrer les centres pédagogiques régionaux (CPR) où, pour la première fois ils reçurent un enseignement pédagogique (Prost, 2014). Dans les années 1980, sur la fin des CPR ce volet sera davantage développé bien que souvent décrié et avec une mise en place hétérogène selon les centres (Tixeront & Leselbaum, 1987). Ce cloisonnement des lieux de formation était à l’image de la différence faite entre les deux professions. Ainsi, les enseignants du primaire se définissaient comme « des éducateurs du peuple », alors que les enseignants du secondaire étaient des « hommes cultivés, grâce à l’étude approfondie d’une discipline » (Bourdoncle, 1990, p. 58).

La création des IUFM en 1990 va marquer la fin de cette séparation. Ces instituts vont être lancés dans une conjoncture de mutation du champ éducatif. En effet, sous l’effet conjugué de la démocratisation de l’enseignement secondaire et des futurs départs en retraite d’une partie du corps enseignant, l’État doit repenser le mode de recrutement et de formation des enseignants. L’évolution du public, concerné par l’enseignement secondaire, fait émerger une nouvelle problématique dans ce domaine : l’hétérogénéité des collégiens (et plus tard des lycéens). Dès la naissance de ces instituts, les formations des deux corps d’enseignants (primaire et secondaire) sont rassemblées sur une même structure dépendant des universités. Cette démarche cherchait à créer une identité commune à tous les enseignants. Pour cela elle incluait la formation de « haut niveau scientifique » (Jospin, 1991) du personnel du primaire, mais également la « maîtrise de la transmission et de sa traduction pédagogique » (Jospin, 1991) pour ceux du secondaire. Cette rupture s’illustre dans l’extrait du discours de Lionel Jospin (ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports) :

« Les enseignants c'est particulièrement vrai pour ceux du second degré -ne sont pas préparés, durant leur formation, à répondre à ce qui sera pourtant une de leurs préoccupations majeures tout au long de leur carrière : savoir enseigner à des élèves très différents. »(Jospin, 1991)

Les IUFM seront dans un même temps la cible d’une forte polémique dans le corps enseignant ou la société en général (Robert & Terral, 2000) mais également l’objet de nombreux travaux de

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recherches visant à dresser un bilan (Altet, 2010; Bourdoncle, 1990; Robert & Terral, 2000) ou étudiant plus précisément les modifications professionnalisantes qu’apporte cette structure (Bourdoncle, 1993; Charles & Clément, 1997; Fabre & Lang, 2000; Lang, 1995; Paquay et al., 2001). Après plusieurs tentatives de modifications, la réforme dite de « masterisation » de 2008 marque un tournant dans le recrutement des enseignants. En effet, depuis cette période, ces personnels sont recrutés à Bac+514. Les IUFM seront démantelés aux profits des ESPE en 2013. Ces

écoles, toujours intégrées aux universités, proposent une offre de masters métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation (MEEF), à la suite desquels les étudiants peuvent postuler aux concours de recrutement du corps enseignant. Ces formations se veulent ouvertes sur le champ professionnel, cumulant des périodes de stages et de formation. Les étudiants présents dans ces parcours en supplément de cette alternance, effectuent un mémoire de recherche tout en préparant le concours de recrutement, ils doivent ainsi répondre à une « triple préoccupation éthique » (Pachod, 2016).

Lors de notre recueil de données (2014 et 2015), la question du recrutement et de la formation des enseignants revenait sur le devant de la scène. La loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la république (2013) a rétabli une formation initiale pour les enseignants. Elle s’exprime par une alternance à mi-temps entre l’ESPE et l’établissement d’affectation lors de la première année d’exercice. Ce statut de stagiaire rémunéré et formé avait disparu de 2010 à 2013, sur cette période, les étudiants postulaient aux concours après la validation de leur master et s’ils devenaient également « enseignants stagiaires », ils effectuaient directement un plein temps. Ces modifications ont entraîné une rupture dans les formations et dans le sentiment d’efficacité des jeunes enseignants (Perrault, 2013).

2.2.2.2 La définition institutionnelle

Se situant toujours dans une démarche de professionnalisation, les instances législatives ont défini un référentiel de compétence du métier d’enseignant (Lessard, 2009). Si leur emploi ne suffit pas à analyser l’action enseignante (Rey, 2012), ces textes constituent une vision de l’institution sur ce qu’est le métier d’enseignant. En France, il existe plusieurs concours15 permettant d’accéder aux 14 Jusqu’alors les enseignants entraient à l’IUFM après un bac+3, préparaient le concours (1 an) et une fois admis,

bénéficiez d’une formation d’un an en alternance, validant ainsi un bac+5. A partir de 2008, les concours d’enseignements ne seront accessibles qu’aux Bac+5.

15 Concours de l’enseignement public : Agrégation,

CAPEPS : Certificat d'Aptitude au Professorat d'Education Physique et Sportive, CAPES : Certificat d’Aptitude au Professorat de l’Enseignement du Second degré, CAPET : Certificat d'Aptitude au Professorat de l'Enseignement Technique, CAPLP : Concours d'Accès au corps des Professeurs de Lycée Professionnel.

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différentes qualités d’enseignants du secondaire, cependant une fiche de poste en définit les compétences communes. Sur ce travail nous étudierons les documents précédant notre étude, ainsi nous confronterons deux textes publiés à trois ans d’intervalle :

 les « dix compétences que les professeurs, les documentalistes et les conseillers principaux

d’éducation doivent maîtriser pour l’exercice de leur métier » (MEN, 2010)16

 le « Référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de

l'éducation » (MEN, 2013).

Si le premier référentiel n’avait que peu évolué par rapport aux versions précédentes17 celui de 2013

constitue une réelle rupture. Les 10 compétences communes aux trois groupes professionnels se multiplient en 4 compétences communes aux personnels de l’éducation, puis 5 propres à tous les enseignants (premier et second degrés). À cela s’ajoute 4 compétences spécifiques aux professeurs documentalistes et 8 portant sur les principaux d’éducation. Les compétences des deux référentiels sont mises en relation dans le tableau 2.2.

16 Préalablement éditées en 2007 (MEN, 2007)

17 L’arrêté du 19/12/2006 mentionnait déjà les 10 compétences (BOEN, 2006a) :

Article 5 - La formation professionnelle initiale, dispensée en institut universitaire de formation des maîtres, doit permettre d’assurer une maîtrise suffisante de chacune des dix compétences suivantes, dont le contenu est précisé dans l’annexe du présent arrêté :

- agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable ; - maîtriser la langue française pour enseigner et communiquer ; - maîtriser les disciplines et avoir une bonne culture générale ; - concevoir et mettre en œuvre son enseignement ;

- organiser le travail de la classe ;

- prendre en compte la diversité des élèves ; - évaluer les élèves ;

- maîtriser les technologies de l’information et de la communication ;

- travailler en équipe et coopérer avec les parents et les partenaires de l’école ; - se former et innover.

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Référentiel 2010 Référentiel 2013 Axes 2013 Public 2013 1. Agir en fonctionnaire de l'État et de

façon éthique et responsable

1. Faire partager les valeurs de la République

Les professeurs et les personnels d'éducation, acteurs du service public d'éducation C omp éte n ce s c ommu n es

2. Inscrire son action dans le cadre des principes fondamentaux du système éducatif et dans le cadre réglementaire de l'école

6. Prendre en compte la diversité des élèves

3. Connaître les élèves et les processus d'apprentissage

Les professeurs et les personnels d'éducation, pédagogues et éducateurs au service de la réussite de tous les élèves

4. Prendre en compte la diversité des élèves

5. Accompagner les élèves dans leur parcours de formation

1. Agir en fonctionnaire de l'État et de façon éthique et responsable

6. Agir en éducateur responsable et selon des principes éthiques

2 . Maîtriser la langue française pour enseigner et communiquer

7. Maîtriser la langue française à des fins de communication _ 8. Utiliser une langue vivante étrangère dans les situations

exigées par son métier 8. Maîtriser les technologies de

l'information et de la communication

9. Intégrer les éléments de la culture numérique

nécessaires à l'exercice de son métier

9. Travailler en équipe et coopérer avec les parents et les partenaires de l'école

10. Coopérer au sein d'une équipe

Les professeurs et les personnels d'éducation, acteurs de la communauté éducative

11. Contribuer à l'action de la communauté éducative 12. Coopérer avec les parents d'élèves

13. Coopérer avec les partenaires de l'école

10. Se former et innover 14. S'engager dans une démarche individuelle et collective de développement professionnel

3. Maîtriser les disciplines et avoir une

Figure

Tableau 2.2 : http://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=73066
Illustration 10: nombre d'articles par année contenant la chaîne 'société de l'information" dans la presse quotidienne nationale.
Tableau 3.2 : Synthèse des éléments constitutifs de la RS d’après le modèle bidimensionnel
Tableau 3.3 : contenus des RS des objets Banque Argent et Prêt (étude Abric et Verges)
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