EPFLAlgèbre linéaire 1ère année 2009-2010
Corrigé de la série 23
Exercice 1. 1. L’adjoint deT est donné parT∗= (−T∗T)∗=−(T∗T)∗=−T∗T =T, donc T est auto-adjoint. Soitλ∈Spec(T)etv∈Vλ\ {0}, doncT v=λv. AppliquerT∗=T aux deux côtés donne−T v=λ2v. Par conséquence,(λ+λ2)v= 0, et doncλ(λ+ 1) = 0.
Il s’ensuit queλ= 0ou bienλ=−1.
2. SiB= (e1, . . . , en)est la base canonique deCn, alorsTB(ei)est lai-ème colonne de la matricei·A. Donc on aTB(ei) =iTA(ei)pouri= 1, . . . , n, et doncTB=iTA.
On obtient par conséquentTB∗ = (iTA)∗= ¯iTA∗=−iTA∗=−iT−A=iTA=TB. DoncTB
est auto-adjoint, et ses valeurs propres sont donc forcément toutes réelles.
Nous montrons maintenant queSpec(TA) =−iSpec(TB), ce qui impliquera queSpec(TA)⊆
−iR=iR.
Soit λ∈Spec(TB). Il existe alorsv∈Cnnon-nul tel queTB(v) =λv. On obtient alors TA(v) = −iTB(v) = −iλv, donc−iλ ∈ Spec(TA). De même, si TA(v) = λv pour un v∈Cnnon-nul, alorsTB(v) =iTA(v) =iλv. Comme on aλ=−i·iλ, on a montré que Spec(TA) =−iSpec(TB).
3. EcrivonsT=TA+iB. Rappelons queT∗est représenté par la matrice(A+iB)∗. De plus, nous avons(A+iB)∗=A∗+ (iB)∗ =A−iB∗ =A−iB, commeA,B sont réelles et symétriques. On en déduit :
T T∗=T∗T ⇔ (A+iB)(A+iB)∗= (A+iB)∗(A+iB)
⇔ (A+iB)(A−iB) = (A−iB)(A+iB)
⇔ A2+iBA−iAB+B2=A2−iBA+iAB+B2
⇔ 2i(BA−AB) = 0 ⇔ AB=BA.
Exercice 2. 1. Pour les noyaux : Pour tout v ∈ V, kT vk =kT∗vk. AlorskT vk = 0 ⇔ kT∗vk= 0. Par conséquent,T v= 0⇔T∗v= 0. DonckerT = kerT∗.
Pour les images :imT∗= (kerT)⊥= (kerT∗)⊥= imT.
2. On procède par récurrence. Pourk= 1c’est la définition d’opérateur normal. Supposons, pour un certaink ≥2, queT∗ commute avecTk−1, c’est-à-dire queT∗Tk−1 =Tk−1T∗. AlorsT∗Tk=T∗Tk−1T =Tk−1T∗T =Tk−1T T∗=TkT∗, ce qui termine la récurrence.
On sait par la proposition 9.1 du polycopié que (T∗)∗ = T, donc T est normal si et seulement siT∗est normal. En appliquant le résultat ci-dessus àT∗, on obtient(T∗)kT∗∗= T∗∗(T∗)ket donc(T∗)kT=T(T∗)k.
3. On fait une preuve par récurrence. Pourk= 1c’est l’hypothèse. Supposons queTk−1est normal,k≥2. Alors(Tk)∗Tk= (Tk−1T)∗Tk−1T=T∗(Tk−1)∗Tk−1T =T∗Tk−1(Tk−1)∗T = Tk−1T∗(T∗)k−1T =Tk−1T∗T(T∗)k−1 =Tk−1T T∗(T∗)k−1 =Tk(T∗)k=Tk(Tk)∗, où on a utilisé les résultats de la question précédente.
4. Pour le noyau, on fait une preuve par récurrence. Sik= 1, il n’y a rien à faire. Supposons que pour un certaink >1,kerTk−1= kerT. Soitv∈kerT. DoncT v= 0, d’oùTkv=
1
Tk−1(T v) = 0, etv∈kerTk. Par conséquent,kerT⊆kerTk. Réciproquement, supposons quev ∈ kerTk. AlorsT(Tk−1v) = 0, doncTk−1v ∈ kerT = (imT∗)⊥ = (imT)⊥, en utilisant le résultat de la question 1. et le fait queT est normal. Commek−1>0, on a k−2≥0et on peut écrireTk−1v=T(Tk−2(v))∈imT. DoncTk−1v∈imT∩(imT)⊥= {0}. Par conséquent,Tk−1v= 0, doncv∈kerTk−1= kerT par hypothèse, ce qui termine l’étape de récurrence.
On montre maintenant queim(Tk) = im(T)pour tout k ∈ N. Soitk ≥1. D’après la définition d’un opérateur normal,T est normal si et seulement siT∗ est normal. On a alors
im(Tk) = (ker((Tk)∗))⊥= (ker((T∗)k))⊥= (ker(T∗))⊥= im(T).
On a utilisé l’égalité(Tk)∗= (T∗)kqui est vraie pour toutkcar, d’après le cours(S◦R)∗= R∗◦S∗pour toutR, S∈L(V), ainsi que la première partie de cette question.
Exercice 3. 1. D’après l’exercice 6 de la série 22, on sait qu’il existe un vecteur propre u0 6= 0de T pour une valeur propreλ∈R. Le vecteuru=u0/ku0kest un multiple de u0de norme1, c’est donc aussi un vecteur propre deT pour la valeur propreλ. On pose U= span(u). Soitv∈U⊥. On a
hT(v), ui=hv, T(u)i=λhv, ui= 0, ce qui montre queT(v)∈U⊥.U⊥est doncT-invariant.
2. On peut donc considérer T|U⊥ ∈ L(U⊥). L’espace vectoriel U⊥ est muni du produit scalaire défini par la restriction àU⊥du produit scalaire surV. On a, pour toutv, w∈U⊥:
hT|U⊥(v), wiU⊥=hT(v), wi=hv, T(w)i=hv, T|U⊥(w)iU⊥. L’opérateurT|U⊥est donc auto-adjoint d’après la caractérisation de l’adjoint.
3. Soitn= 1. AlorsT =λIdV. Chaque base orthonormale deV est composée d’un unique vecteur normé. Ce vecteur est automatiquement un vecteur propre deT pour la valeur propreλ.
On admet que l’assertion à démontrer est vraie pour tout espace vectoriel réel V0 de dimensionn−1et tout opérateurT0 auto-adjoint deV0. Soitλune valeur propre réelle deT(qui existe d’après l’exercice 6 de la série 22) etuun vecteur propre normé deT pour la valeur propreλ. On considèreU := span(u). CommedimU⊥=n−1etT0 :=T|U⊥
est un élément auto-adjoint deL(U⊥)d’après la question précédente, il existe d’après l’hypothèse de récurrence une base(u1, . . . , un−1)deU⊥formée de vecteurs propres de T|U⊥. Comme les vecteurs u1, . . . , un−1sont des vecteurs propres deT|U⊥, ils sont aussi des vecteurs propres deT. La liste(u, u1, . . . , un−1)est donc une base orthonormée deV formée de vecteurs propres deT.
Exercice 4. 1. SoitV =R2etTl’opérateur ayant la matrice[T]B= 0 −1
1 0
dans la base canoniqueB= (e1, e2)deR2. (Cet opérateur n’est donc pas auto-adjoint.) Soitα= 0et β= 1. Alorsα2<4βet
[T2+αT+βIdR2]B= [T2+ IdR2]B= −1 0
0 −1
+ 1 0
0 1
= 0 0
0 0
. T2+αT+βIdR2est donc l’opérateur nul et par conséquent non inversible.
2
2. Soit V =C2 muni du produit scalaire standard etSl’opérateur ayant la matrice[S]B= 0 10 0
dans la base canonique B = (e1, e2) de C2. Soit U = span(e1). Alors U est S-invariant puisqueS(e1) = 0. On aU⊥ = span(e2)et U⊥n’est donc pas S-invariant puisqueS(e2) =e1.
3. SoitS, T∈L(V)des opérateurs normaux. Alors
(S+T)(S+T)∗= (S+T)(S∗+T∗) =SS∗+T T∗+ST∗+T S∗ et (S+T)∗(S+T) = (S∗+T∗)(S+T) =S∗S+T∗T+S∗T+T∗S.
Donc, commeSS∗=S∗SetT T∗=T∗T, on a l’égalité(S+T)(S+T)∗= (S+T)∗(S+T) si et seulement siST∗+T S∗=S∗T+T∗S.
PrenonsV =F2 muni du produit scalaire standard. SoitBla base standard deF2 et S, T∈L(F2)tels que[T]B=
2 −3 3 2
=:Aet[S]B= 1 0
0 2
=:B. Ces deux opérateurs sont normaux (Sest auto-adjoint etT a la forme trouvée dans l’exercice 4 de la série 22 pour un opérateur normal non auto-adjoint réel, qui est aussi normal si on le considère comme un opérateur complexe) et on a
[ST∗+T S∗]B= 1 0
0 2
· 2 3
−3 2
+ 2 −3
3 2
· 1 0
0 2
= 2 3
−6 4
+ 2 −6
3 4
=
4 −3
−3 8
et
[S∗T+T∗S]B= 1 0
0 2
· 2 −3
3 2
+ 2 3
−3 2
· 1 0
0 2
= 2 −3
6 4
+ 2 6
−3 4
= 4 3
3 8
. {T ∈L(F2)|T normal}n’est donc pas un sous-espace vectoriel deL(F2)car la somme de deux opérateurs normaux n’est pas forcément un opérateur normal.
On peut généraliser cet exemple à n’importe quel espace vectorielV de dimensionn≥2 en prenant des opérateurs normauxS, T∈L(V)ayant, dans une base orthonorméeBde V, les matrices en blocs suivantes :
[T]B= A 0
0 In−2
et [S]B= B 0
0 In−2
.
Exercice 5. 1. Soit(e1, . . . , em)une base orthonormée deU, qu’on complète en une base orthonormée B= (e1, . . . , em, em+1, . . . , en)deV. La matrice deT dans cette base a la forme
M:= [T]B= A B
0 C
,
avecA∈Mat(m,R),B∈Mat(n−m, m,R)etC∈Mat(n−m,R). On a utilisé le fait queU estT-invariant, donc queT(ei)∈span(e1, . . . , em)pouri= 1, . . . , m. On appelle mijles coefficients de la matriceM,i, j= 1, . . . , n. Pouri= 1, . . . , m, on a
kT(ei)k2=
Xm j=1
mjiej
2
= Xm
j=1
kmjiejk2= Xm j=1
m2ji. 3
On obtient donc m
X
i=1
kT(ei)k2= Xm
i=1
Xm j=1
m2ji. Comme[T∗]B=M∗, on a également
kT∗(ei)k2=
Xn j=1
mijej
2
= Xn j=1
kmijejk2= Xn j=1
m2ij.
On obtient donc m
X
i=1
kT∗(ei)k2= Xm
i=1
Xn j=1
m2ij.
Mais commeT est normal, on akT∗(ei)k=kT(ei)kpouri= 1, . . . , m. Cela donne Xm
i=1
kT(ei)k2= Xm
i=1
kT∗(ei)k2,
et donc m
X
i=1
Xn j=1
m2ij= Xm
i=1
Xm j=1
m2ji= Xm
i=1
Xm j=1
m2ij
en échangeant les indices dans la deuxième somme. On obtient donc Xm
i=1
Xn j=m+1
m2ij= 0.
Comme ce nombre est la somme des carrés des coefficients (réels !) deB, on a montré que B= 0. La matrice deT par rapport à la baseBest donc de la forme
A 0 0 C
.
Cela implique queT(ei)∈span(em+1, . . . , en)pouri=m+1, . . . , n. Comme(em+1, . . . , en) est une base deU⊥, on a donc prouvé queU⊥estT-invariant.
2. On obtient de la question précédente que [T∗]B=
At 0 0 Ct
. Le sous-espace vectorielU est doncT∗-invariant.
3. Soit S := T|U ∈ L(U). Soient u, u0 ∈ U. On calcule hS(u), u0iU = hT(u), u0iV = hu, T∗(u0)iV =hu, T∗(u0)iU, commeT∗(U)⊆U. On a doncS∗(u0) =T∗(u0)pour tout u0∈U d’après la caractérisation de l’adjoint. Cela montre queS∗=T∗|U∈L(U).
4. On a pour toutu∈U :
(T|U◦T∗|U)(u) =T|U(T∗(u)) =T(T∗(u)) =T∗(T(u)) = (T∗|U◦T|U)(u), où on a utilisé le fait queT est normal. L’opérateurT|Uest donc normal.
5. On a montré dans le point précédent que la restriction deT à un sous-espaceT-invariant de V est normal. CommeU⊥ est T-invariant d’après le point1, on peut appliquer ce résultat àU⊥.
4