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ARTICLE ORIGINAL
Le lupus érythémateux systémique
juvénile : expérience marocaine d’une unité de rhumatologie pédiatrique
Juvenile systemic lupus erythematosus: Moroccan experience in pediatric rheumatology unit
K. Bouayed
∗, N. Echcharaï , N. Mikou
Servicedepédiatriegénéraleetrhumatologique,facultédemédecine,universitéHassanII, hôpitald’EnfantsA.Harouchi,CHUIbnRochd,Casablanca,Maroc
Rec¸ule14octobre2015 ;acceptéle4avril2016
MOTSCLÉS Lupusérythémateux systémique; Enfants; Activation macrophagique
Résumé Lelupusérythémateux systémiquejuvénileLESjestunemaladie chroniqueauto- immune caractérisée par uneatteinte multi-viscérale.Nous rapportons les caractéristiques épidémiologiques,cliniques,thérapeutiquesetévolutivesd’unesérierétrospectivemenéedans l’unitéde rhumatologie pédiatriquedel’hôpital d’enfants deCasablanca comptant 25filles parmi30enfants.L’âgemoyendesurvenueestde12ans,ledélaimoyendediagnosticestde 7mois.Letableaucliniqueestfaitd’uneatteintecutanée,articulaire etdefièvredansres- pectivement86,6%,80%et70%descas,suivied’uneatteinterénaledans63,3%descas.La participationcardiaque,pulmonaire,ophtalmologique,digestiveetneurologiqueestrapportée dansdespourcentagesrespectifsdécroissantsde33,3,30,30,26,6et23,3.L’atteintehémato- logiqueestdétectéesurhémogrammechez86,6%despatientsetlesyndromeinflammatoire dans93,3%descas.Untitrepositifd’anticorpsantinucléaires93,3%etd’anti-ADNn80%est objectivé,ainsi qu’uneréductiondutauxdu complémentdans86,6%. Unefaussesérologie syphilitiquecomplétéepardesanticorpsanti-2glycoprotéin1etanticardiolopinesontpositifs dansrespectivement16,6%,16,6%et41,1%descas.L’atteinterénaleprésentedans63,3% descassemanifeste paruneinsuffisancerénaledans43,3%descas,uneprotéinuriesignifi- cativedans50%descasetlaprévalencedelaclasseIV.UncasdeKikushiFujimotoetuncas delupusavecunesignatureinterféronmarquéesontrapportés.Lesprincipalescomplications serésument à1casdepancréatiteaiguëet6casdesyndromesd’activationmacrophagique
∗Auteurcorrespondant.RueKergomard,résidenceBayViewA3,AïnDiab,Casablanca,Maroc.
Adressese-mail:bouayedkenza@hotmail.com(K.Bouayed),nadia.echcharii@gmail.com(N.Echcharaï),mikounabiha@gmail.com (N.Mikou).
http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.003
0987-7983/©2016ElsevierMassonSAS.Tousdroitsréservés.
(SAM).Touslespatients ontrec¸uunecorticothérapieoraleassociéeàl’hydroxychloroquine.
L’utilisationde méthylprednisolone en perfusion aété indiquée dansles cas de SAMet de pancréatite,celledesimmunosuppresseursdanslanéphropathiesévèreassociéeauxantiprotéi- nuriques.LepronosticduLESjresteimprévisible;ilestcorréléàl’atteinterénale,neurologique etàlasurvenuedeSAM.Nousdéploronsquatredécès.Parmilesfacteursdemauvaispronostic identifiés,ledélaidiagnostiqueallongé,l’absencedecouverturesociale,lecoûtonéreuxde certainsmédicamentsetlasévéritédelanéphropathielupiqueNL.
©2016ElsevierMassonSAS.Tousdroitsréservés.
KEYWORDS Systemiclupus erythematosus;
Children;
Macrophagic activation
Summary Juvenile systemic lupuserythematosus (jSLE)is achronicauto-immunedisease characterizedbymulti-organinvolvement.Weintendtoreporttheepidemiological,clinical, therapeuticandevolutionofthejuvenileSLEthroughthisretrospectivestudyinpediatricrheu- matologyunitofChildren’sHospitalofCasablanca.Thisstudyreports25girlsamong30children.
Theaverageageatonsetis12years;themeantimefordiagnosisisabout7months.Thecli- nicalpictureisaskin,jointinvolvementandfeverin86.6, 80and70%, followedbykidney diseasein63.3%ofcases.Cardiac,pulmonary,ocular,digestiveandneurologicalinvolvement arereportedindecreasingrespectivepercentagesof33.3, 30,30,26.6and23.3.Hematolo- gicallocalizationisdetected onhemogramin86.6%ofpatients,aninflammatorysyndrome isreportedin93.3%ofcases.Apositivetitleofantinuclearantibodyandanti-DNAnisobjec- tifiedin93.3%and80%,thereductionofthecomplementlevelsisshowedin86.6%.Afalse syphilisserologysupportedbyanti-2glycoprotein1andanticardiolopineantibodiesispositive inrespectively16.6,16.6and41.1%ofcases.Renaldiseaseisreportedin63.3%ofcases,itis characterizedbykidneyfailurein43.3%ofcases,asignificantproteinuriain50%ofcasesand predominanceofclassIVonbiopsy.AcaseofKikushiFujimotoandoneoflupuswithinterferon signaturearereported.Themaincomplicationsareonecaseofacutepancreatitis,and6cases ofmacrophageactivationsyndrome(MAS).Allpatientsweretreatedwithoralcorticosteroids associatedwith hydroxychloroquine.Methylprednisolone boluswasprescribedinacutepan- creatitisandMAS,theimmunosuppressivetherapywasusedinseverenephritisassociatedif necessarytoantiproteinuricdrugs.TheprognosisofjSLEisunpredictablehowever,itisrelated totherenal,neurologicaloroccurrenceofMAS.Moreover,wedeplorefourdeaths.Amongthe poorprognosticfactors,thelongdiagnosticdelay,thelackofinsurance care,theexpensive costofsomedrugsandtheseverityoflupusnephritischaracterizedourstudy.
©2016ElsevierMassonSAS.Allrightsreserved.
Introduction
Le lupus érythémateux systémique (LES) est une affec- tion chronique auto-immune à expression multi-viscérale variableetdepronosticimprévisible.Lediagnosticestréa- liséhabituellementchezdesjeunesfemmesâgéesde20à 40ans,cependant,ilpeuts’installeràtoutâgeetseraclassé juvénile(LESj)lorsqu’ildébuteraavantl’âgede16ans.
L’objectif dece travailconsiste àrapporterles casde LESj del’hôpital d’enfants deCasablanca, à rappeler ses caractéristiquescliniquesetbiologiques,àapprécierlaprise enchargethérapeutiqueetàmettrel’accentsurlesspéci- ficitésdenotresérie.
Patients et méthodes
Cette étuderétrospective menée entredécembre 2006et décembre2014apermisdecolliger—dansunintervallede
8ans—30cas de lupus juvénile dont le diagnostic a été retenuenprésencede4critèresparmi11selonlaclassifica- tiondel’ACR1997(Encadré1).LaNLaétédiagnostiquée surlesparamètressuivants(tauxsériqued’urée,créatiné- mie,protidémie,albuminémieetprotéinuriedes24heures).
Le recours au rapport protéinuriesur créatinurie, mesuré sur un échantillon d’urines, n’a pu être réalisé chez nos patientsdanslecadredudépistagedel’atteinterénalecar indisponibledansnotrestructurehospitalière.L’évolutiona étéjugéesurdesparamètrescliniquesetbiologiquesdéfi- nissant ainsila rémission complète parl’absence de tout signecliniqueassociéeàunenormalisationdesparamètres biologiques et notamment du taux du complément chez despatientsrecevantdel’hydroxychloroquinesulfateetau maximum unefaibledose decorticoïdesnedépassantpas 0,3mg/kg/j, retenant la rémissionpartielle endehors de toutsymptômecliniqueoubiologiquehormislapersistance d’une consommation du complément sous hydroxychloro- quinesulfateetaumaximumunefaibledosedecorticoïdes
Encadré 1 : Critères diagnostiques de l’ACR («AmericanCollegeofRheumatology»)1997
1. Érythèmemalaireenailedepapillon 2. Lupusdiscoïde
3. Photosensibilité
4. Ulcérationsbuccalesetnasopharyngées 5. Polyarthritenonérosive
6. Pleurésieoupéricardite
7. Atteinte rénale: protéinurie>0,5g/24h ou cylindresurinaires
8. Atteinte neurologique: convulsions, psychose en l’absencedemédicamentsinducteurs
9. Atteinte hématologique: anémie hémolytique avechyper-réticulocytose
• Ouleucopénie<4000/mm3constatéeaumoinsà 2reprises
• Oulymphopénie<1500/mm3constatéeaumoins à2reprises
• Outhrombopénie<100000/mm3enl’absencede causemédicamenteuse
10. Désordreimmunologique
• Anticorpsanti-DNAnatifs
• Anticorpsanti-Sm
• Anticorpsantiphospholipides
◦ SoitanticardiolipinedetypeIgGouIgMàtaux élevés
◦ Ouanticoagulantcirculantlupique
◦ Ousérologiesyphilitiquedissociée
11. Présence d’un titre anormal d’anticorps antinucléaires
Diagnosticpositif:4critères/11.
nedépassantpas0,3mg/kg/jetposantlediagnosticd’une poussédevantlareprisedessignescliniquesetbiologiques aprèsobtentiond’unerémissioncomplète.
Résultats
Le sex-ratio est de 0,2avec une prédominance féminine (25filles/5garc¸ons).L’âgemoyenaudiagnosticestde12ans avec des extrêmes allant de 7à 16ans (Tableau 1). Le délaimoyendediagnosticestestiméà7mois,lesextrêmes s’étalant entre 1et 18mois. La notion de consanguinité parentaleestrapportéechez13,3%despatients.Surleplan clinique,le mode deprésentation de lamaladie est clas- sique (signes généraux, articulaires etcutanés) dans 60% des cas, révélé par une néphrite lupiquedans 23,3% des cas,ouparunSAMdans16,6%descas.Lesmanifestations cutanéessurviennentaupremierplanavecunpourcentage de86,6,suiviesparl’atteintearticulaire80puisparlafièvre
Tableau1 Caractéristiquesépidémiologiques.
Nombretotaldepatients 30 Nombrefilles/garc¸ons 25/5
%Filles 83,33
Âgemoyenaudébutdela maladieenannées
12extrêmes(7—16)
87% 80.00%
70.00%
30% 30.00%26.66%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
100%
Données cliniques
Figure1. Donnéescliniques.
70.LaNLdemeureassezfréquenteavecunpourcentagede 63,3,tandisquelesatteintescardiaque,pulmonaire,oph- talmologique,digestiveetneurologiquerestentplusrareset sontretrouvéesdans despourcentagesrespectifsde33,3, 30,30,26,6et23,3(Fig.1).L’atteintehématologiquevisua- liséesurhémogrammeestprésentedans86,6%descas,elle semanifesteparuneanémiedansunpourcentagede83,3à Coombspositif dans seulement61,1%, une thrombopénie estiméeà46,6%,uneleucopénieà50%etunelymphopénie à 20%. Nos patients présentent un syndrome inflamma- toiredans93,3%descascommeentémoignentl’élévation delavitessedesédimentation(93,3%)contrastant leplus souventavec un taux à peine augmenté de la C-réactive protéine(50%).Lebilanimmunologiquerévèlelaprésence d’anticorpsantinucléaires etanti-ADN natifs dans respec- tivement93,3%et80%descasetuneconsommationd’au moinsuneparmi lesfractionsdu complémentdans 86,6% descas.Lespatientsprésententunefaussesérologiesyphi- litiquedans 16,6% des caset unepositivité des anticorps anti2glycoprotéine1etanticardiolipinedans16,6et41,1% descas.L’atteinterénale,présentedans63,3%descas,se manifesteparune insuffisancerénale dans 43,3% des cas etparuneprotéinuriesignificativesupérieureà20mg/kg/j dans 50% des cas (Tableau 2), conduisant à la réalisation d’unebiopsierénalechez56,6%desmalades,cettedernière montrantune prédominance delanéphropathie classe IV.
Parminosmalades,sontdiagnostiqués,uncasdesyndrome deKikuchiFujimotoetuncasdelupusavecuneélévation delasignatureinterféron (Fig.2)probablement d’origine monogéniquebien qu’aucunedesmutations connuesn’ait pu être identifiée. Tous nos patients ont bénéficié d’un traitementparcorticothérapiesystémiqueenassociationà l’hydroxychloroquinesulfate.LescasayantuneNLjustifiant untraitement immunosuppresseur ont rec¸u soit ducyclo- phosphamide 40%, soit du myophénolate mofétil 13,3%.
L’azathioprineaétéprescritedans3cas,soit10%.L’arsenal thérapeutiqueest complété par l’acide acétyl salycilique encasdepositivitédutauxsériquedesanticorpsantiphos- pholipidesetparlesinhibiteursdel’enzymedeconversion danslesprotéinuriespersistantes.Unepatienteavusonétat secompliquerd’untableaudepancréatiteaiguëet6d’un syndromed’activationmacrophagiquedont5inaugurauxet unsurvenuaucoursd’une pousséeayantbienrépondu au traitementparcorticoïdesàfortesdoses.
L’évolutionestmarquéepar5transfertsdanslesecteur adulte,3pertesdevue,8rémissionscomplètes,5rémissions
Figure2. Tauxd’interféroncheznosdeuxpatientescomparéaucontrôle.
Tableau2 Résultatsbiologiques.
% Atteintehématologiquesurl’hémogramme 86,6
Anémie 83,3
Leucopénie 50
Lymphopénie 20
Thrombopénie 46,6
Syndromeinflammatoire 93,3
VS 93,3
CRP 50
Bilanimmunologiquepositif
TestdeCoombs 61,1
AAN 93,3
Anti-DNAn 80
Aumoinsundosagedecomplémentabaissé 86,6
C3abaissé 80
C4abaissé 83,3
CH50abaissé 84,6
TPHAL/VDRL 16,6
Anti-2glycoprotéin1 16,6
Anticardiolipine 41,1
Bilanrénal
Insuffisancerénale 43,33
Protéinuriesignificative≥20mg/kg/j 50
partielles, 5cas de poussées itératives et 4décès suite à unecomplicationrénalesévèredetypeinsuffisancerénale irréversibleendépitdeséancesd’hémodyalise(Tableau3).
Discussion
Le LES est une pathologie chronique d’évolution impré- dictible qui nécessite un suivi régulier au long cours. Il
Tableau3 Profilévolutifdespatients.
Nombre
Nombretotaldepatients 30
Transfertschezlesmédecinsadultes«en rémission»
5
Perdusdevue 3
Rechutesfréquentessoustraitement 5 Rémissionpartiellesoustraitement 5
Rémissioncomplète 8
Décès 4
survient classiquementchez lesjeunesfemmes autourde lavingtaine,néanmoins15à20%deslupusdébuterontleur maladieavant16ansetserontclassésdanslacatégorieLESj.
Lediagnostic reposesurla classificationdel’American College of Rheumatology (ACR) 1982révisée en 1997 [1]
qui,bienqu’émanantdepopulationsadultes,constituechez l’enfant l’outil essentiel au diagnostic, en attendant que d’autres critères purement pédiatriques puissent voir le jour.Encesens,desétudesrécentesontcomparé laper- formance des nouveaux critères SLICC («Systemic Lupus International Collaborating Clinics») [2] aux critères ACR 1997chez des lupus juvéniles et ont pu conclure à une meilleure sensibilité des SLICC [3]. Ces données ont été étayées par une seconde publication [4], ce qui pourrait hypothétiquement conduireà l’adoptiondansle futur des critères SLICC comme goldstandard au diagnostic duLES juvénile.Dansnotreétude,lesconditionsd’inclusionrete- nues sont un âge de début fixé à moins de 16ans et les critèresACR1997.
Au plan épidémiologique, les données concernant l’incidence et la prévalence sont très variables selon la régionetl’ethnieetmêmeauseind’unmêmegroupe[5—7], mettant en exergue la place primordiale des conditions
environnementales dans la genèse du lupus. Aussi, la prévalenceréelledecetteaffectiondemeureinconnue.Par ailleurs,ladéfinitionmêmedulupusjuvénileestsujetteà controversespuisqu’ellebasculeentreundébutavant16ans pourcertainsauteursetavant18anspourd’autres,consti- tuantunfacteursupplémentaired’erreurdansl’estimation descasexistants.AuMaroc,aucunedonnéeàcesujetn’est disponibleàl’échellenationaleetcelamériteraitdecréer un registre du LESj. La prédominance féminine est une constanteàtoutâgeavecunratiofemelle/maletrèsélevé chezl’adultedel’ordrede10/1,7etseréduisantencasde débutjuvénile pour avoisiner4,6/1 [8,9],ilest d’ailleurs de5/1dansnotresérie.
Bienquel’étiopathogénieduLESsoitdemieuxenmieux connue,certaineszonesd’ombrepersistent.Ils’agitd’une affectioncomplexe,polygénique,résultantdel’interaction defacteursenvironnementaux,infectieuxetimmunogéné- tiques.DesformesdeLESjàdébuttrèsprécoceetoudetype syndromiqueouencoreàcaractèrefamilialparlaprésence deplusd’uncasauseind’unemêmefamilleontconduitvers uneforteprésomptiondeformesmonogéniquesconfirmées génétiquement [10—12].Parmi nosmalades, une patiente issued’unmariagenonconsanguin—ayantunesœurjumelle égalementatteintedeLESj—présenteunphénotypeparti- culier associant aux critères classiques de l’ACR1997, un faciès singulier,une microcéphalie,une calcification péri- ventriculaire, un retard mental, un retard de croissance staturaleetdesengelurescommecelaaétédécritdansle syndromed’AicardiGouttière[11],conduisantàuneexplo- rationplusapprofondie.Lessœursjumellesonteneffetune nette signature cytokinique de type interféron suggérant l’hypothèsed’uneinterféronopathiesdetype1.Néanmoins, iln’apasétéretrouvédemutationgénétiqueconnueetdes étudessupplémentairesdugénomerestentessentiellespour étayercettehypothèse.
Les caractéristiques cliniques de notre série sont conformesauxdonnéesglobalesdelalittératureavecune prédominancedel’atteintecutanéeetarticulaire.Ellessont égalementsimilairesauxsériesarabesrapportéesavectou- tefoisquelquesspécificitéspropresquis’individualisentpar un âge de survenue plus avancé, de 12ans en moyenne dansnotre étudeversus10ansdans uneautresériearabe [13],lararetédesformesfamiliales(1cas),unpourcentage plus faibled’atteinte rénale(63,3%versus 80%) bienque sévèrepuisquemajoritairementsousformedenéphropathie lupiqueclasseIVetVetuntauxdemortalitésignificative- mentplusélevé(13,3%versus7%)imputableàuneatteinte rénalesévèreetirréversibleuniquementetnonàl’infection commecelaaétérapportésurcetteétude.
Auplanbiologique,lesyndromeinflammatoireestquasi constant,commeentémoigne l’accélérationdelavitesse desédimentation paropposition àdes chiffresdeCréac- tiveprotéineCRPavoisinantlanormaledanslamoitiédes cas et faisant la part entre une poussée lupique et une infectionintercurrente.Leprofilimmunologiquecorrespond aux données décrites dans la littérature avec une positi- vitédes anticorpsantinucléairesà untauxde 93,3%dans notreétudeversus 98,2%surunesérie portugaiseportant sur56patients,desanti-DNAnàuntauxde80%versus71,4% etunehypocomplémentémiechiffréeà80%pourlafraction C3versus71,4et83,3%pourlafractionC4versus78,6%[9]
avecunemeilleuresensibilitédelafractionC4parrapport
àC3.Ledosage duCH50n’a puêtreréalisé systématique- mentcaronéreux,maisrecommandécarsonpourcentagede positivitérestesupérieurauxautresfractions.Enrevanche, le taux des anticorps antiphospholipides dans notre série sedistinguedela série portugaisepar unenettesupério- ritédu taux de positivité des anticorpsanticardiolipine à 41,1%versus16%[9].Cetteprévalencedivergentepourrait possiblementtrouversonexplicationdansunethéorieeth- niqueougénétique.Aucundenospatientsn’aprésentéde manifestationscliniquesenrapportaveclapositivitédeces auto-anticorpsetceprobablement grâceàla prescription systématiquedel’acide acétyl salicyliquechezce groupe depatients.
LesyndromedeKikuchiFujimotoconstitueunmodede présentationparticulierdulupus,ilpeutêtreannonciateur dela maladie ouencore survenir à sondécours. Nousen décrivonsuncasapparuà1moisdudébutd’unLESj.Ils’agit d’unelymphadénitenécrosanterareenpédiatrie,touchant préférentiellement le sexe féminin—comme c’est le cas denotrepatiente.Ilestsansconséquencesurlepronostic imposanttoutefoisunesurveillanceétroite[14].
Enoutre, parmi lescomplications rencontrées onnote un cas de pancréatite aigue diagnostiquée sur des dou- leurs abdominales atroces, une élévation de la lipasémie etuneimagescannographiqueévocatrice.Cettecomplica- tionsévère rapportée dans 4,2% des sériesjuvéniles [15]
est considérée par certains auteurs comme un marqueur de sévérité d’issue souvent fatale [16] et par d’autres commeune manifestation duSAM,le pancréasétant sup- poséêtreunorganecible deshémophagocytes[15],notre patiente y a survécu grâce à des doses élevées de cor- ticoïdes. Le SAM réputé compliquant certaines maladies auto-immunes est de survenue plutôt rare dans le lupus juvénileavecuneprévalencede0,9à4,6%[17].Incontes- tablementplusfréquentdansnotresérie,puisquetouchant 20% des patients, ilpourrait être assignableau contexte inflammatoiremajeur, d’autant qu’ilest révélateur5fois sur 6, chez des patientes indemnes de toute médication [18,19].Sondiagnosticserévèledifficiledansle cadredu lupusenraisondesimilitudesclinico-biologiques.Hormisla présenced’hémophagocytessurlemyélogrammequisigne lediagnosticformeldeSAM,àcejour,leseulexamendis- criminatifestl’augmentationdelaferritinémieàdestaux dépassant500g/Lavecunespécificitéde93%etunesen- sibilitéde100%[17,19].Cedosageprendtoutesavaleuren l’absenced’hémophagocytes sur le myélogramme comme c’estlecascheznospatientesquiontbénéficiéd’uneponc- tionmédullairenoncontributive.
La base de la prise en charge thérapeutique du lupus juvénileest calquée sur le lupusadulte [20]. Elle repose sur la corticothérapie qui est prescrite à la dose de 1à 2mg/kg/jenfonctiondelagravitédutableaucliniqueini- tial.Le recours aux perfusions deméthylprednisolone est indiquédanslesformessévèresoucompliquéesd’activation macrophagique, la dose préconisée chez nos patients est de 1g/1,73m2. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens peuventsuffireà contrôlerlamaladie, lorsquecelle-cise confineàuneatteintearticulaireetoucutanée. Maisleur prescription doit être manipulée avec prudence sachant que cette classe moléculaire peut induire une baisse de la filtration glomérulaire pouvant avoir des conséquences graves en cas d’atteinte rénale. L’hydroxychloroquine, à
une dose moyenne de 5mg/kg/j, constitue le traitement defondderéférencedanslelupus,ilcontribueàbloquer le processusévolutifet àstabiliser la maladiela rendant quiescente. Satolérance estexcellente sous réserve d’un contrôlesemestrieldel’électrorétinogrammecomptetenu du risque potentiel de toxicité rétinienne. Les immuno- suppresseurssontincontournablesencasd’atteinterénale sévère, du système nerveux central ou hématologique rebelle,maisiln’existe pasderecommandationsvalidées sur leurs indications exactes en pédiatrie. L’adjonction desimmunosuppresseursestdepratiquecourantedansles formes avancées de NL. Si le cyclophosphamide consti- tue la molécule la plus prescrite dans cette indication, il n’en demeure pas moins qu’il garde une grande toxi- citéayantconduitprogressivementàsonremplacementpar le micophénolate mophétyl dont l’efficacité ne fait plus de doute avec une tolérance nettement meilleure [21].
D’autres produits comme l’azathioprine ont été essayés enphase deconsolidation avecdes résultats satisfaisants [22].Lesantiprotéinuriquestiennentàleurtouruneplace privilégiée dans les protéinuries persistantes ne répon- dant pasou peu aux traitementssus-cités. L’acideacétyl salyciliqueAASestindiquéensaqualitéd’antiagrégantpla- quettaire. L’ensemblede nos patients ontété traitéspar corticothérapie et hydroxychloroquine, seuls les patients ayantaubilandesanticorpsantiphospholipidespositifsont rec¸u del’AAS.La majoritédes NL requérantunrenforce- mentthérapeutiqueparunimmunosuppresseurontrec¸udu cyclophosphamideenraisondesadisponibilité etducoût abordablecomparativementaumicophénolatemophétil.La prescription durituximabtrouve saplacedans lesformes agressivesnotammenthématologiquesquinerépondentpas aux traitementsde premièreligne, mais aussi spécifique- mentdans certainesformesréfractairesdenéphropathies lupiquesautorisantàunedégressionsignificativedesdoses decorticoïdes[23,24].
L’évolutionfavorableavec rémissioncomplète est rap- portéechez8/30(soit 26,6%)des patientstoujours suivis dans notre centre versus 15/45 (soit 33,3%) d’une série prospectivevietnamiennedontlereculserestreintà6mois d’évolution[25].Larémissioncomplètedansnotreétudeest jugéesurl’absencedesignesd’appelcliniques,deperturba- tionsdesparamètresbiologiqueshématologiques,rénauxet suruntauxdecomplémentnormalisé,tandisqu’ellerepose surleSLEDAI(«SystemicLupusErythematousDiseaseActi- vityIndex»)danslasérievietnamienne.
Denombreuxauteursrapportentquel’âgededébutpré- coce impacte l’expression clinique de la maladie et lui confèreun pronosticplus sévère [10,26]. Nos 4décès ont démarréleurlupusdansunintervalled’âgecomprisentre 10et 13ans, tranche habituelle de début du lupus juvé- nile,excluantcefacteurdesélémentsdemauvaispronostic au sein de notre série. À l’inverse, les atteintes rénale et neurologique font l’unanimité en matière d’évolution fâcheuse [7,10]. Les patients décédés ont d’ailleurs tous présentéunenéphropathiesévèreclasseIVetVmalcontrô- léesouscorticoïdesetcyclophosphamide,quiaévoluévers l’insuffisancerénalechroniqueetquis’estcompliquéechez troismaladesd’œdèmeaigudupoumonetchezunpatient d’unépisoded’étatdemalconvulsifhypertensifassociéà unecellulitedelamaind’évolutionfatalemalgrélerecours enurgence à l’épuration extra-rénale et aux mesures de
réanimation. Les décès sont survenus dans un intervalle compris entre13moiset4ansparrapport audébut dela maladie. Paradoxalement, le taux de mortalité chez les lupiques adultes semble plus élevé, la comorbidité infec- tieuseétantlaprincipalecausededécèsenregistréedans cettetranche d’âge[26]. Auseindenotre étuded’autres facteursspécifiquespeuventêtreincriminésetnotamment leretardaudiagnostic,l’absenced’assurancemaladiequi entrave l’observancethérapeutique etl’indisponibilitéde certainesmolécules,grevantindubitablementlepronostic.
Néanmoins,notre échantillonétantréduità30patients,il parait difficiled’établirune véritableévaluation duprofil évolutif.
Remerciements
NousremercionsleDrA.BelotetLePrY.Crowetcollabora- teurspourleurparticipationauxbilansimmunologiqueset génétiques.
Déclaration de liens d’intérêts
Lesauteursdéclarentnepasavoirdeliensd’intérêts.
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