L a séance est ouverte à 10 heures . Tous les membres sont prés ents . Monsieur l e Président
l a loi de finances . . . Eh bien , cher Président , c ' est à vous , sur Monsieur JOZ EAU-MARIGNE : Monsieur l e Président , mes c hers
collègues , j e vous disais hier au début de mon expos é combien les l ois de finances prenaient une ampl eur croissante . La remarque vaut encore auj ourd ' hui pour la loi de finance s pour 1991 . E l l e contient 13 5 articles. Additionnés aux 6 9 de l a loi de finances rectificative pour 19 9 0 , que nous avons examinée hier ( 1 ) , cela f ait un total de 2 04 articles . . . Les conditions du travail
parlementaire s ' en trouvent chaque année davantage a f fectées . Mais j e voudrais aussi souligner les conséquences de cet état de fait sur l e travail de nos collaborateurs . Nous disposons tout au plus d ' une s emaine : il f aut bien que la loi de finances s oit
promulguée avant la fin de l ' année , pour que puiss e être perçu l ' impôt . . . Ces délais s ont encore raccourcis du fait de l ' usage de l ' article 49 , alinéa 3 , de la Constitution et de dépôts de motions d e c ensure . . . Les délais dont disposent l e rapporteur et l e
s ervice j uridique sont diminués d ' autant . . . I l e s t vrai que l e s député s , cette fois- ci , nous ont saisis aus sitôt l a l oi adoptée . Mais pour le Sénat , il y a eu des hésitations . Des bruits ont couru comme quoi les présidents de groupe ne manifestaient pas beaucoup d ' enthousiasme à l ' idée de s aisir le Cons eil . Mais à l a dernière minute , sous l ' impulsion d e Monsieur DAILLY , s aisine i l y a eu finalement . I l avait été dit qu ' elle porterait sur différents points . Mais en fin de compte , comme pour les députés , e l l e n ' a trait qu ' à la contribution sociale généralisée . Monsieur DAILLY nous a même fait tenir un courrier ce matin où il nous indique qu ' il ne dispose pas d ' un délai suffisant pour répondre aux
observations du Gouvernement , mais qu ' il n ' en continue pas moins à désapprouver la CSG .
C'est à cette dernière que nous consacrerons probabl ement cette matinée . Mais dans le pro j et de résolution que j e vous ai soumis , vous ave z vu que j ' entends vous proposer un c ertain nombre de censures d ' office ; nous pourrions les examiner cet après -midi Quant à ce matin , j ' ai l ' intention d'exposer l e s choses en trois p arties
d ' abord , je ferai un rappel sur ce que représ ente la C S G , qui est contenue aux articles 127 et suivants de la loi ( me s
observations renverront tou j ours à l a numérotation définitive ) - ensuite , j e vous donnerai mon sentiment sur les s aisine s , en
distinguant en deux parties : d ' une part les critiques sur la
( 1 ) Conformément aux directives du Président, la décision rendue sur la loi de finances rectificative, délibérée les 27 et 28 décembre, a été diffusée dans la matinée du 28 décembre
. . . 1 .
. .Voilà dans quelles conditions je pens e m ' exprimer devant vous .
I - LA CONTRIBUTION SOC IALE GENERALI S EE :
Les articl e s 12 7 à 13 5 ( j e vise l a numérotation définitive ) de la loi de finance s pour 19 9 1 , instituent donc un prél èvement
nouveau sur les revenus , dénommé " contribution sociale
généralisée " ( CS G ) , auquel seront assuj ettie s , à compter d e
l ' année prochaine , a u taux d e 1 , 1% , les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France .
Dans l ' esprit du gouvernement , il s ' agit d ' amorcer une ré forme des conditions de financement de la s écurité sociale , à l aquel l e e s t attribué l e produit d e cette contribution .
Alors que , depuis 19 4 5 , le béné fice des prestations s'est progres sivement étendu à la quasi-totalité de la population , les cotisations continuent de peser essentiel l ement sur les seuls revenus du travail . I l est donc prévu que l a CSG frappera
également les revenus du patrimoine et financier , ainsi que , sous certaines conditions , les revenus de remplacement ( des retraités et pré-retraités , invalides , chômeurs . . . ) .
Mais cet élargis sement de la base ne doit pas s ' accompagner d ' une aggravation du taux global des prélèvements obligatoires. La C S G sera compensée par un allégement à due concurrence de c ertains autres impôts ou cotisations actuel lement a f fectés à la sécurité sociale Dans l ' intention du législateur , c ' est un prél èvement nouveau , mais pas un prélèvement suppl émentaire .
Vous savez les oppositions vives qu ' a suscitée s cette réforme , de divers côtés , et pas s eulement dans l e s hémicycles , où e l l e a fait l'obj et d ' une motion de censure . I l n ' est donc pas étonnant qu ' elle soit soumise ( et elle seule , comme j e l ' ai dit ) au
contrôle du Conseil constitutionnel . Nous avons d ' ailleurs été s aisis de cette question à la fois par un groupe de députés ( qui ont même déposé un mémoire ampliatif ) et par un groupe de
sénateurs dirigé par M . Dailly .
Je procéderai à une brève présentation d ' ensembl e de c e s
articles 1 2 7 à 13 5 ( A ) , avant d ' en venir à l ' examen d e s critiques , de procédure et de fond , développée s par l e s s aisis sants ( B ) .
A . PRESENTATION DES ARTICLES 127 A 1 3 5 DE LA LOI INSTITUANT UNE CSG
Ces articles sont répartis en quatre chapitres :
- le premier traite de la contribution social e sur l e s revenus d ' activité e t de remplacement ( articl e s 127 à 1 31 ) ;
... 1 .. .
- l e deuxième ( constitué du seul article 13 2 ) de l a contribution sociale sur l e s revenus du patrimoine
- le troisième ( article 13 3 ) , de l a contribution s ocial e sur l e s produits de placement .
Comme vous le voyez , l a question peut se poser de s avoir si nous avons affaire à trois contributions distinctes ou à trois c édules d ' une même contribution générale . Nous reviendrons sur ce point .
- enfin , un chapitre quatrième ( articles 134 et 1 35 ) regroupe des dispositions communes à ces trois contributions ( ou cédules de contribution unique ) .
1 . La contribution sociale sur les revenus d ' activité et de remplacement :
l ' article 127 pos e le principe de l ' instauration de cette contribution sur les revenus perçus à compter du 1er février 19 9 1 ;
- l ' article 1 2 8 e n dé finit l ' assiette ( avec u n grand luxe de précisions ) en ce qui concerne essentiel l ement les revenus salariaux et les revenus de remplacement . Vous noterez que si la contribution est en principe l evée sur le montant brut des revenus , une déduction forfaitaire d� 5 % représ�ntative d e frais professionne l s e st
neanmoins prevue .
- l ' article 12 9 fixe les règles d ' assiette de l a contribution e n ce qui concerne l e s employeurs et
travailleurs indépendants des professions non- agricoles , c ' est à dire les personnes physiques titul aire s d e
béné fices industriels e t commerciaux et de bénéfices non commerciaux . La règle est ici que l a base retenue est celle prise en considération par l ' administration fiscal e , c ' est à dire nette de frais profes sionnels ; - l ' article 13 0 délimite l ' assiette des revenus agricoles
non salariaux . On fera l a moyenne des revenus d e s trois années antérieures à l ' année d ' imposition . Au cas où ce ne s erait pas pos sible , sont prévus des mécanismes fort complexes de détermination forfaitaire .
- enfin l ' article 131 pose l e principe que , sauf exception , ce sont les URSSAF et les caiss e s de mutualité sociale agricole ( CMSA ) qui assureront l e contrôle , le redres s ement et l e recouvrement de l a contribution assise sur l'ensemble des revenus
d ' activité et de remplacement , s elon les règl e s en vigueur en matière de s écurité sociale . Le contentieux ,
. . . 1 .. .
quant à lui , relèvera des tribunaux de la sécurité sociale.
2 . La contribution sociale sur les revenus du patrimoine : - L ' articl e 13 2 instaure , à compter de l ' année 1 9 9 1, une
contribution sociale sur le montant net des revenus du patrimoine des personnes physiques , dont il donne une liste limitative : revenus fonciers , rentes viagères constituées à titre onéreux , revenus de capitaux
mobiliers , plus-values . . . etc . L ' assiette , le contrôle , le recouvrement et le contentieux de cette contribution relèveront , en revanche , des s ervice s fiscaux et du � de l ' impôt.
3 . La contribution sociale sur les produits de placement : L ' article 13 3 institue une contribution social e sur les produits de placement à revenu fixe , faisant l ' obj et du prélèvement libératoire de l ' impôt sur l e revenu , prévu à l ' article 12 5 A du Code général des impôts. E l l e sera assise , contrôlée et recouvrée s elon les mêmes règles que ce prél èvement , donc les règle s fis cales , sous l e contrôle du juge de l ' impôt .
4 . Dispositions communes :
- L ' articl e 13 4 pose trois règles communes aux trois contributions sociales
il fixe uniformément leur taux , - proportionnel - .L1..1 ;
il prévoit l ' af fectation de l ' ensemble du produit des contribution s à la Caiss e Nationale des Allocations Familiales(CNAF) ;
il pose le principe de la neutralité de la CSG, en décidant qu ' elle sera compensée à due concurrence par l ' allégement d ' autres prélèvements a ffectés à l a
sécurité social e.
- L'article 13 5 , enfin , a pour obj et de compléter l'information du Parlement : le gouvernement lui présentera un rapport annuel ( qui fera l ' ob j et d ' un débat ) sur la protection social e, et notamment sur la contribution sociale généralisée .
. . . 1 . . .
B . EXAMEN DES SAIS INES :
Dans son état initial , ce texte sur l a CSG soulevait
indéniablement un certain nombre de ques tions cons titutionn e l l e s sérieuses .
Mais il a été beaucoup amendé au fur et à mesure du
déroulement de la discussion parlementaire . Parfois in extremis : je songe aux amendements du gouvernement supprimant des
discriminations en matière de déduction de frais professionnels ou de recours juridictionnels . . .
De telle sorte qu ' il ne m ' apparaît pas devoir faire, en son état définitif , l ' objet d'une censure : ni au regard des moyens articulés par les saisissants , ni d ' o ffice .
L ' argumentation des saisines touche tant à la procédure législative ( 1 ) qu'au fond ( 2 ) . Je l ' examinerai dans cet ordre
1 . La procédure législative :
Les articles relatifs à la CSG ont été :
- introduits dans un projet de loi de finances ( pour 19 91 ) ,
- par voie de l ettre rectificative ( pour les huit premiers des neuf article s en cause ) ;
- cette lettre a été signée du s eul Premier minis tre , - elle n ' a été enregistrée à l ' Assemblée nationale que l e
jeudi 4 octobre 1 9 9 0 ,
- les 9 articles e n que stion ont été placés et discutés dans l a deuxième partie du projet de loi ,
- ce dernier était accompagné d ' un certain nombre
d ' annexes destinées à l ' information et au contrô l e du Parlement .
Ces six points font l ' objet d ' une contestation de la part des s aisiss ants . Je vais les reprendre un à un .
a ) Le premier pos e la ques tion de s avoir si la CSG pouvait être cont enue dans une loi de finances , au regard de l ' articl e 1 er de l ' ordonnance du 2 janvier 19 5 9 .
La réponse doit être , à mon s ens , positive.
En e f fe t , contrairement à ce qui e s t soutenu par l e s
députés s aisissant s , cette contribution présente l e caractère d ' un
... 1 ...
pré lèvement fiscal et non d ' un prél èvement social ( comme l ' es timent , d ' ailleurs , les sénateurs ) .
Deux séries de considérations poussent à en décider ainsi : a} en premier lieu , malgré quelques hésitations
individuelles , il paraît clair que l ' intention tant du Gouvernement gue du Parlement va dans ce sens :
- pour le Premier minis tre - je l e cite - " La CSG e s t un impôt , plus exactement c ' e s t juridiquement une imposition" ;
pour Monsieur EVIN
a f f ectée à la branche famill e " " L a C S G e s t une imposition - pour Monsieur CHARAS SE
l ' article 34 de la Constitution" ; " C ' est un impôt au sens de - pour Monsieur Alain RICHARD , enfin : " I l s ' agit , au sens de notre Cons titution , d ' une imposition de toutes nature s " .
b} En s econd lieu , la jurisprudence du Conseil cons titutionnel commande de retenir cette qualification .
En effet , la CSG ne peut d ' abord pas être une taxe
parafiscale : elle est perçue au profit d ' un établis s ement public à caractère adminis tratif ( la Cais se national e d ' allocations
familiales} , ce qui n ' e s t pas pos sible pour une taxe parafiscal e ( en vertu de l ' ordonnance du 2 janvier 1 959 - article 4 ,
alinéa 3 - comme de notre jurisprudence : C . C� n ° 8 2 - 1 2 4 L , 2 3 juin 1 9 8 2 , p . 9 9).
Ensuite , elle n ' e s t pas une redevance pour service rendu , car il n ' y a pas de rapport de proportionnalité entre une
pre s t ation et la contribution.
Dès lors , en vertu de la décision du Conseil du
2 3 juin 1 9 8 2 , la CSG ne peut qu ' être une "imposition de toutes nature s " au sens de l ' article 34 de la Constitution , donc un pré lèvement fiscal .
J ' ajoute qu ' il n ' existe pas de lien entre l e versement de la CSG e t le bénéfice des pres tations de l a sécurité sociale : l e droit à ces dernières continue de prendre sa source dans l e s seules cotisations sociale s acquittées par aill eurs p a r les as sujet tis , et non dans l e paiement de l a CSG .
Les articles en que stion pouvaient donc figurer dans une loi de finances . Je précise que , pour le dernier d ' entre eux ,
l ' article 1 35 , destiné à l'information du Parlement sur l a ges tion d e s finances publiques , s a présence dans une loi de finances était même obligatoire ( en vertu de l ' article 1er , alinéa 2 , de
l ' ordonnance organique} .
. .. 1 ...
Monsieur le Président : Des ques tions sur ce sujet ? Il s ' agit d ' un impôt, quelle que soit la dénomination . . . Bien, vous pouvez poursuivre .
Monsieur JO ZEAU-MARIGNE : En deuxième lieu ( b ) , la CSG a fait l ' objet ( pour les huit premiers articles ) d ' une let tre
rectificative au projet de loi de finances. Les députés
s aisissants nous disent que cela n ' était pas possible au regard de l ' objet et de la portée de cette lettre : en somme, on nous
demande d ' étendre aux lettres rectificatives notre jurisprudence S éguin, relative au droit d ' amendement .
Mais, dans sa décision n ° 7 8- 1 0 0 DC DU 2 9 décembre 1 9 7 8 ( p . 3 8) , le Conseil cons titutionnel a jugé qu ' une let tre rectificative n ' était pas un amendement, mais un projet de loi à part entière
( qui venait s ' insérer dans un autre ) devant obéir à toute la procédure prévue pour les projets de loi ( ce qui a é té le cas en l ' espèce ) . Il n ' y a donc pas lieu de limiter autrement
l ' initiative des lois qui appartient au P remier minis tre, en vertu de l ' article 3 9 de la Constitution .
c . Ces mêmes députés font, en troisième lieu, remarquer que cette let tre rectificative est signée du s eul Premier ministre, e t qu ' elle n ' est pas revêtue du contreseing d e s minis tres chargés d e l ' exécution des actes du chef du Gouvernement ( comme le veut
l ' article 22 de la Constitution ) . Je ne suis pas sûr que le moyen s oit véritablement articulé par la s aisine : les députés relèvent ce fait comme un simple indice de ce que la CSG serait un
prélèvement social, ce qu ' elle n ' e s t pas, comme je l ' ai dit . Je réponds néanmoins . D ' abord, c ' e s t la tradition, sous la Vème République, que les lettres rectificatives s oient ainsi signée s du seul Premier minis tre . Ensuite, je f erais volontier s mienne une expression utilisée par un arrêt tout récent ( du 1 2 décembre 1 9 9 0) du Conseil d ' E tat, touchant précisément à l ' article 2 2 de la
Cons titution : l ' exigence du contreseing disparaît lorsque " l ' acte comporte en lui-même toutes les dispositions néce s s aires à la
production de ses e f fets juridiques " : c ' e s t manife s tement l e cas en l ' espèce, où il s ' agissait de saisir le P arlement d ' un projet de loi rectificatif . Il n'y a donc pas eu davantage de vice de procédure de ce point de vue . Du res te, tous les minis tres concernés sont venus sur les bancs du Parlement défendre le projet, ce qui est bien plus qu ' un contres eing .
d . Quatrièmement , l ' article 3 8 d e l ' ordonnance du
2 janvier 1 959 aurait été méconnu . Cet article prévoit que ' ' le projet de loi de finances de l ' année, y compris le rapport e t les annexes explicatives prévus à l ' article 3 2 , e s t déposé et
dis tribué au plus tard le premier mardi d'octobre de l ' année qui précède l ' exécution du budge t " . Or, la let tre rectificative
relative à la CSG n ' a été enregistrée à la présidence de l ' Assemblée nationale que deux jours après le mardi
2 octobre 1 99 0 , s oit le jeudi 4 .
. .. 1 ...
Certes , mai s l e Gouvernement a fait valoir un argument , qui
consti tue sans doute la mei l l eure réponse à faire sur ce point . Il e s t inspiré des termes de la déc i s i on du Conse i l const i tu t i onne l n ° 8 6- 209 D C d u 3 j u i l l e t 1 9 8 6 ( p . 8 6 ) . Selon cette déc i s ion , l e s d é l a i s f ixés par l e s alinéas 2 e t 3 de l ' art icle 4 7 de l a
Cons t i tution ( dont le point de départ et l e mode de computation sont précisés par les articles 3 8 et 3 9 de l ' ordonnance du 2
j anvi e r 1 959 ) ont pour obj et "de permettre qu ' interviennent avant le début d ' un exercice les mesures d'ordre f inanc i er néc e s s a i res pour assurer la continuité de la vie nati onale" Dès lors que cet ob j ec t i f a été atteint et que n ' ont pas été réduits les d é l a i s d ' examen const i tutionnellement impart i s aux assemblées , c ' es t à dire pour l ' Assemblée nationale 40 j ours , soit le temps d ' un
carême , et 1 5 j ours pour l e S énat , l e retard susment ionné de deux j ours n ' a pas constitué une irrégular i té de nature à v i c i e r l a procédure légi s l at i ve .
C ' es t b i en l e cas en l ' espèce : l e délai a commencé de cou r i r le 1 1 octobre , en vertu d ' une lettre adressée en ce sens par le
Premier ministre à l ' Assemblée nationale . Celle-c i a d i spos é d ' un délai d ' examen de 4 0 j ours ( 1 1 octobre - 1 9 novembre ) et l e S énat de 2 0 j ours ( 2 1 novembre - 1 0 décembre ) .
e . cinqui ème point : députés et sénateurs e s t iment que les art icles en cause n ' ont été placés e t discutés dans l a deuxième par t i e de l a l o i de finances qu ' en violation des d i spos i t i ons des
art icles 3 1 et 4 0 de l ' ordonnance du 2 j anvier 1 9 5 9 .
* L'article 3 1 di spose que le pro j e t de loi de f i nances de l ' année comprend deux parties d i s tinctes et que , dans la
premi ère parti e , i l "autoris e l a percepti on des ressources
publiques . . . comporte les voies et moyens qui assurent l ' équ i l ibre f inanci er . . . autor i s e la percepti on des impôts affectés aux
collectivités et aux établ i s s ements publ i c s " . Ains i , i l ne s ' ag i t que d ' autor i s er l a percept i on , en première part i e , des ressources publiques ou des impôts affectés ( notamment aux établ i s s ements publ i c s ) déjà exi stants . Or , i c i , nous sommes en présence de l a créa t i on d ' une impos i t ion , a f fectée à un é tabl i s s ement publ i c . S ans doute l ' art i c l e 1 er des lois de finances annuel les à ven i r devra autori ser l a poursui te de l a percepti on de l a CSG . Mai s l ' instaurat i on de cette dernière pouvai t f i gurer en deuxi ème part i e de l a loi de finances pour 1 9 9 1 .
* L ' art i cle 40 de l ' ordonnance du 2 j anvi e r 1 9 5 9 prévoi t que l a s econde partie d e l a loi d e f i nance s n e peut ê tre m i s e en d i scuss i on devant une assemblée avant le vote de la premi ère part i e .
L e Conse i l const i tut ionnel ( n ° 7 9 - 1 1 0 DC , 2 4 décembre 19 7 9 , p . 3 6 , e n a t i ré les règles suivantes : i l faut adopter l ' art ic l e
d ' équ i libre avant que n e pui ss e s ' engager , devant une assemblée , l a d i s cu s s i on sur l a seconde ; on ne peut apporter , à l ' occas ion de l ' examen de l a seconde parti e , de mod i f ications à l a prem ière ,
. . . 1 .
. .que s i ces mod i f ications ne portent pas atteinte aux grandes l igne s d e l ' équil ibre préalablement voté .
Mai s ces règles ne trouvent pas à s ' appliquer s'agi ssant de l a C S G . Celle- c i , e n ef fet , e st une ressource d ' établ i ssement publ i c admini strat i f n ' ayant aucune incidence sur l ' équi l ibre des
f inances de l ' Etat . I l est vra i , comme l e notent les député s , que , par l ' e ffet technique de s a non-déductib i l ité f i scale , e l l e
rapportera à l ' Etat que lques tro i s milli ards de Francs d ' impôt sur le revenu supplémentaire : mai s ce ne sera qu ' en 1 9 9 2 . Le moyen doit donc être écarté . A propos de ces tro i s m i l l i ards , j ' i ndique que j ' ai touj ours beaucoup admiré que lorsqu ' un parlementai re i nterroge un mini stre sur les inc idences de telle mesure , i l y a tou j ours un commi ssaire du Gouvernement pour lui permettre de pré c i ser tout de suite : tant de millions . . .
f . Les s énateurs sai s i s sants estiment enf i n que l ' article 3 2 d e l ' ordonnance de 1 9 5 9 n ' a pas été respecté , en c e qu ' i l d i spose que le proj et de loi de finance s de l ' année est accompagné
d ' annexes générale s destinées à l ' information et au contrôle du Parlement . P lus pré c i s ément , i l s font valoir que ce dernier n'a pas été à même de situer la CSG dans le cadre de l ' e f fort soc i al de l a nation , ni d ' apprécier l ' e f fet redi stribut i f de l a
contribution invoqué par l e Gouvernement , , ni de d i sposer d ' une v i s ion globale de la total ité du dispos iti f , qui a été sc indé en deux proj ets de loi .
Cette argumentation s ' appuie essentiellement sur l ' arti c l e 8 d ' une loi du 24 décembre 1 9 7 4 relative à la protection sociale commune à tous les França i s .
Aux termes de cet artic l e : "Le Gouvernemen t présente chaque année au Parlement , à l ' appui du proj et de loi de finances . . . un état qui retrace , pour les tro i s années précédentes , l ' e f fort social de l a nation en regroupant l ' ensemble des prestations soc i ales et des charges qui en découl ent pour l ' Etat , les collectivités locales , l e s employeurs , les assurés et les contribuables . . . '' .
Sur l e plan des faits , l e secrétar i at général du Gouvernement a reconnu que l ' état ains i v i s é n ' était pas di spon ible lors de la d i scuss ion par le Parl ement du pro j et de loi de f inances pour 1 9 9 1
Devons - nous conclure , pour ce s eul moti f , à la nul l i té de l a procédure législative ?
Je ne l e cro i s pas , et ceci pour deux raisons .
D ' une part , en droit , j 'ai des doutes sur l a conformité à l a Constitution d e l ' article 8 de la l o i d u 2 4 décembre 1 9 7 4 , qui e s t , j e le rappelle , une loi ordinai re .
Or - j ' y ai fait allus i on tout-à- l ' heure - , i l me paraît résulter de l ' article 1 er de l ' ordonnance organique du 2 j anvi e r 1 9 5 9 que
. . . 1 .
. .les mesures destinées à assurer l ' informati on du Parlement sur l a gestion des f inances publ iques relèvent d u domaine de compétence obl igatoire de la loi de finances . A tout l e moins , doit- i l en être ains i si l ' obl igation d ' information est appl i cable au stade du dépôt du proj et de loi de finances .
D ' autre part , sur l e plan des faits, i l me paraît excess i f de d i re que le Parlement n ' a pas di sposé d ' informations suf f i s ante s .
Pour s ' en convaincre , i l suffit de se référer aux substant i e l s rapports consacrés à la CSG ,
- devant l ' Ass emblée nationale , par Mon s i eur Alain RICHARD et par Monsieur COFFINEAU ,
- devant l e S énat , par Monsieur Jacques OUDIN .
Ce dernier a même poussé le souci d ' information ( ou l a mal i c e ) j usqu ' à publier en entier une lettre datée du 2 4 août 1 9 8 8 adressée au Premier mini stre par MM . BEREGOVOY et CHARASSE et prenant une posi tion trè s motivée , hostile à l ' institution de l a CSG .
En définitive , les moyens de procédure dont nous sommes sai s i s sont nombreux et parfoi s même ingéni eux . Mai s aucun ne me paraît devoir condui re le Consei l à j uger que la procédure d ' adoption de la CSG a méconnu l a Constitution .
Mons ieur l e Prés ident : Mess ieurs , sur la procédure ? . . . Pas d ' observations ? . . . B i en , nous passons donc à l a lecture de l a partie correspondante du proj et .
Mons ieur JOZEAU-MARIGNE procède à la l ecture de la partie en question du proj et .
Monsieur l e Pré s ident : Très bien . Merc i pour tous ces points . I l s sont donc adoptés . Nous pouvons donc aborder l e s questions de
fond .
J ' en viens e ffectivement à présent aux critiques de fond ( 2 ) On peut les regrouper en troi s rubriques :
- pour les députés , l a CSG v iolerait l e principe de l ' universal ité budgétaire , tel qu ' i l est consacré par l ' artic l e 1 8 de
l ' ordonnance du 2 j anvi e r 1 959 ;
- s elon eux, i l ne serait ensuite pas pos s ible que le recouvrement d ' une partie de l a CSG ( celle ass i se sur les revenus d ' activité et de remplacement ) fût e f fectué par ces organi smes de droit privé que sont l e s URSSAF et les cai s s e s de mutual i té soc i a l e
agricole ( CSMA ) ;
. . . 1 . ..
députés et sénateurs invoquent , enfin , la violation du princ ipe d ' égal ité , d ' un quadrupl e point de vue . Je reprends les chose s dans cet ordre .
- CSG et princ ipe de non affectation des recettes :
Les députés souti ennent qu ' i l n ' était pas pos s ible de
dés igner , comme l e fait la loi , le béné f i c i aire du produi t de la CSG ( en la personne de la Cai sse nationale d ' allocations
fami l iales ) au regard de l ' artic l e 1 8 de l ' ordonnance du 2 j anvi e r 1 9 5 9 . Cet article interdit l ' affectation des recettes , notamment en cas de dépenses résultant d ' un " droit permanent reconnu par la loi" . Mais i l a été j ugé ( v . C . C n ° 8 1 . 1 3 2 DC , du 1 6 j anvier 1 9 8 2 , p . 1 8 et C . C . n ° 8 2.1 5 2 DC 1 4 j anvi e r 1 9 8 3 p . 3 1 ) que l ' article 1 8 et les règles qu ' il conti ent ne sont
appl i cables qu ' aux ressources de l ' Etat et notamment pas aux ressources d ' établissements publ i c s , comme c ' est l e cas pour l a CSG . Mon s i eur l e Président , souhaitez-vous que nous d i scutions de ce premier point ?
Mon s ieur LATSCHA : Il est d i f fi c i l e de scinder les points de fond . . .
Mon s ieur l e Prés ident : Alors on poursuit .
Mons i eur JOZEAU-MARIGNE
CSG et principe de son recouvrement par des organi smes de droit privé ( pour les revenus d ' activité et de remplacement ) {b )
Comme vous le savez , l e Consei l d ' Etat , dans son avi s au Gouvernement , s ' est montré réticent sur ce point . Avançant les articles 1 3 et 1 4 de la Déclaration des droits de l ' homme , i l a critiqué cette mani ère de confier à des organi smes de droit privé
( même chargés d ' une miss ion de serv i ce publ i c ) une tâche - de
r ecouvrement de l ' impôt - qui , dans la tradition répub l icaine , est au nombre des mis s ions cardinales i ncombant à la seule autorité pleinement investie de la pui s sance publ ique , c ' est-à - d i r e l ' Etat .
Je ne vous proposerai pas de partager cette façon de voi r . Pour quatre séries de rai sons :
* en premier l i eu , le système choi s i a sa logique : i l permet un recouvrement a i s é ( par précompte à l a source ) ; l a CSG étant affectée à l a sécurité sociale , i l paraît normal qu ' elle soit prélevée d i rectement par cette dernière , s ans passer par l e s caisses du Trésor ; l e d i spos iti f conserve autant que pos s ible entre les mains des partenaires sociaux les flux financ iers de l a
protec ti on soc i ale .
* en deuxième l ieu , i l exi ste un certain nombre de précédents d ' impos itions recouvrées par d ' autres
. .. 1 . . .
organi smes que l ' Etat, voi re par des organi smes de droit privé , notamment appartenant à la s écurité sociale
( contri bution des employeurs au Fonds national d ' aide au logement , contribution de sol idarité des soc i étés au profit des régimes des non- salariés non agricoles ,
versement au profit du syndicat des transports pari s i ens , taxe sur les boi ssons alcool iques et contribution des entrepri se s de médicaments ) . I l e st vrai que c e s impôts sont de création récente et qu ' i ls n ' ont pas l ' ampleur de l a CSG . Mai s le fait méritait d ' être rappe l é .
* troisièmement, i l faut avoir présent à l ' esprit que,
depuis 1 9 4 5 , la légis lation et la réglementation relatives aux modal ités de recouvrement des cot i sations soc iales ont fortement fiscalisé les moyens dont d i sposent l e s caisses pour :
contrôler s i les cotisations ne sont pas é ludées - contraindre et sanctionner les assuj etti s
récalc i trants ;
parer à l eur insolvab i l ité grace a des sûretés et priv i l èges .
Dotés de ces moyens inspirés des techniques du droit fi scal, les organ i smes de recouvrement de la sécuri té soc i ale font preuve dans la collecte des cot i s ations d'autant d ' e f f icacité que le f i sc dans celle des impôts .
I l me semble ainsi, au total , qu ' i l ne f aut pas reteni r le moyen : les URSSAF et les caisses de mutual ité agri cole sont certes des organi smes de droit privé , mai s créés pour l e s seuls besoins d ' une m i s s ion de service publ i c . Pour remp l i r c ette
dernière, i ls d i sposent de prérogatives de pui s sance publ ique, et de prérogatives suffisantes . Au nom d ' un certain réali sme , j e ne vai s pas j usqu ' à établ i r sur le plan constitutionnel des exigences trop str i ctes quant au recouvrement des impos itions .
* en quatri ème l i eu , l ' exclus ivité de l ' Etat en matière de recouvrement d ' impôts peut être , il est vra i , revendiquée , inversement , au nom des garanties des assuj etti s . Mai s force e s t de constater que , de ce point de vue auss i, l e s règles de l a sécurité sociale s e sont rapprochées des règles f i scales . Placés sous tutelle de l ' Etat et sous l e contrôl e d u j uge particul i er d e l a s é curité soc i al e , les organi smes de recouvrement appartenant à cette derni ère sont contraints de faire bénéficier l e s redevables de toute une série de garanties protectrices substantiel les . I l est vrai que ces garanties n ' ont pas attei nt le même degré d ' importance qu ' en droit f i scal : nous
retrouverons ce point à propos du princ ipe d ' égal ité . Mai s elles empêchent du moins d e soutenir que s eul l e s services placés sous l ' autorité directe de l ' Etat seraient à même
... 1 ...
de garantir une protection suf f i sante des droits des
assuj etti s à la CSG , à l ' occasion du recouvrement de c ette dernière .
Monsieur l e Pré s i dent
Monsieur ROBERT ? Messieurs , sur ce point intéres s ant ? . . . Monsieur ROBERT • Je comprends les rai sons qui sont c e l l e s de notre rapporteur . Mai s , s i je pui s l e lui d i re respectueus ement , elles ne m ' ont pas conva incu . I l nous a d ' abord parlé de l a
logique d u s ystème ; certes , mai s j e crois qu ' i l s ' est agi surtout d ' éviter d ' avoir à recruter un nombre important de fonctionnaires supplémentai re s . S ' agi s sant ensuite de nos précédents , vous l ' avez dit vous -même , i l s sont ponctuel s et parti els , alors que nous
avons i c i affaire à un impôt de portée générale . Vous avez encore noté que le système retenu serait auss i e f fi cace que si la tâche avait été confiée au f i sc : peut-être , mai s il ne s ' agit là que d ' un argument pratique , d ' uti l ité . Enfin , les garanties , d i te s vous , s eront auss i importantes , mai s l à encore c ' est un argument de fait . Ce qui m ' inqui ète , pour ma part , c ' est le princi pe même de la dévolution de ce recouvrement à des organismes de droit privé . Ils sont certes chargés d ' une miss ion de serv i c e publ i c . Mai s ce n ' est pas suf f i s ant . Les concess ionnai res privés eux aus s i
sont invest i s d ' une miss ion d e service publ i c . S i on s ' engage dans cette voie , on ne sait plus où l ' on va . Les organi smes privés
chargés d ' une m i s sion de service publ i c , cela prol i fère . Reste , j ' en sui s consc i ent , un problème pol itique : s i l ' on censure sur ce terrain , c ' est toute la CSG qui d i sparaît . On bloque toute la mécanique du recouvrement . Voi là que l l e est ma premi ère réaction .
I l n ' empêche que j ' ai beaucoup admiré l a c larté de l ' exposé du rapporteur .
Monsieur le Pré s i dent : B i en . . . Mess ieurs ?
Monsieur LATSCHA . Je voudrais m ' associer aux félic itations de Mons i eur ROBERT quant à la clarté de l ' exposé de Mon s i eur
JOZEAU-MARIGNE sur un texte qui , lui , est loin d ' être clair . . . Mons i eur l e Pré s i dent : Oui . . . Pourquoi fa i re s imple quand on peut
faire compl i qué ?
Mons i eur LATSCHA : mais j e voudra i s m ' é loigner un instant du problème du recouvrement , afin de res i tuer un peu les choses.
D ' abord , je croi s qu ' i l y a un problème quant à s avoi r si l a C S G , c ' est troi s impôts ou un seul. C e n ' est p a s clai rement tranché . L e texte parle tantôt d ' une CSG , tantôt de trois contributi on s
soc iales . La question n ' est pas neutre . Pour l ' ancien IRPP , i l y avait des cédules qui concernaient les d i fférentes ass i ette s , et pui s un taux progress i f qui concernait l ' ensemble , et un
contentieux et un mode de recouvrement uniques .
Deuxièmement , s ' agissant de ce recouvrement et de ce contenti eux , j e voudrai s prendre l ' exemple de l a mutual ité soc i al e agri col e . Je me réserve , dans ce que j e vais d i re, l e droit à une certaine
. . . 1 . . .
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marge d ' erreur . Mai s enf in , lorsqu ' on nous dit le recouvrement est con f i é aux URSSAF parce qu ' il s perçoivent dé j à les cot i s ations soc i al e s et gue l ' ass iette de la CSG est la même gue pour ces dernières , d ' après mes renseignements , les URSSAF , en réal i té , ne sont pas suffisamment équipés pour pouvoi r assurer cette
perception , i l s devront engager du personnel . Mons i eur le Président : Vous êtes sûr de cela ?
Mon s i eur LATSCHA : Pratiquement sûr . . . Un rapport fait état de la pag
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gui règne dans ces organ i smes , d ' absentéi sme , dedémotivation des personnels . . . Même s i e f fectivement quelques 9 8 pour cent du recouvrement est as suré , l e problème de leur
organi s ation n ' est mani festement pas tranché . Mai s j ' en v iens à présent aux cai sses de mutual ité soc iale agricole . I l y en a une par département . Elles recrutent leurs gens pratiquement par
cooptati on . Mai s surtout , les coti sations qu ' elles col lectent sont ass i se s sur le revenu cadastral , selon des règles mystérieuses , et en tous cas , ne prennent pas en compte le caractère bénéf i c i ai re ou déf i c itaire de l ' exploitation . Le système cadastral est établi par les impôts , et les caisses se bornent à en tirer les
conséquences , à l ' aide d ' un coe f f i c i ent multipli cateur . C ' est comme pour les impôts fonc iers . Et cela n ' a r i en à voi r avec l ' impôt sur le revenu . On commenc e , il est vrai , à demander quelques ré férences relatives aux revenus profess ionnel s , ma i s c e l a reste marginal . Pour l ' essentiel , donc , l e s c a i s s es de MSA ne coll ectent aujourd ' hui r i en qu i soit a s s i s sur les revenus , et ne sont donc pas équipées pour faire face à l a nouvelle m i s s i on qu ' on voudrait l eur conf ier . S ans compter qu ' en réal ité l ' a s s i ette de la CSG est di fférente de celle des impôts . Il va falloir faire , dès lors , une déclaration d i f férente . Les caisses ne di sposent pas des é léments suffi sants pour traiter tout cela . Ça va entraîner une inflation énorme de leurs personnels .
Mon s i eur l e Président : Pour moi , s i l e recouvrement par les c a i s s es de sécurité soc i al e est e f f i cace ou pas , je n ' en sais r i en . Le s eul problème constitutionnel , c ' est de s avoi r s ' i l peut être effectué par des organ i smes de droit privé en charge d ' une m i s s i on de servi ce publ i c . Pour le reste , j e n'ai aucune idée . V i s i blement , les finances ne veulent pas s ' en charger . Certains ont dit que les URSSAF étaient équipées , vous , l ' inverse . . .
Mon s i eur LATSCHA : Je ne pré c i s a i s tout cela qu ' a f i n d ' é c l a i rer l e débat. S u r le strict terrain constitutionnel , j ' avoue avo i r été très f rappé par la position du Conse i l d ' Etat . Il est s igni fi c ati f gue c e dernier ait pri s l a peine de rédiger un texte ; i l n ' est pas dans son habitude de réécrire . Quels sont ses arguments ? Vous avez comme moi lu son avi s : " . . . i l serait , en e ffet , contraire aux principes constants gui inspi rent l a l égi slation de l a
République , sur le fondement d e s articles 1 3 e t 1 4 de la
Déclaration des droits de l ' homme et du citoyen , de con f i er à des organi smes de droit privé , même placés sous la tutelle de l ' Etat , une r esponsab i l ité gui ... est au nombre des miss ions e s s enti elles d e la pui ssance publique et , par suite , ne peut être a ssurée que
... 1 .. .
par des services placés sous l ' autorité directe de l ' Etat .. . Les précédents qui ont été s i gnalés, on l ' a noté, n ' ont pas l a même importance ; i c i, c ' e st l ' ensemble des revenus qui e st en c aus e . Je crois que nous avons deux quasi -certitude s : i l ne pourra qu ' y avoir des divergences de j ur i sprudences suivant qu'interv i endront l e s tribunaux de la s écurité sociale ou les tribunaux de l ' ordre admini strati f ; et inévitablement il y aura des i négal ité s de tra itement en ce qui concerne les personnes intéressée s . Encore une fois, l ' av i s du Conse i l d ' Etat m ' a beaucoup ébranlé . Je termine - en m ' excusant d ' avoir été si long - en d i s ant qu ' en l ' état il nous faut, à mon sens, censurer ce système instaurant deux canaux de recouvrement, qui se heurte à un obstacl e de valeur constitutionnel l e .
Mon s i eur le Pré s ident : C ' e st effectivement la grande question qui nous est soumi s e auj ourd ' hui ; vous avez b i en mis l ' accent
dessus . . . Les d ivergence s j urisprudentielles . . .
Monsieur ROBERT : exi stent dé j à ; c ' est pas ça qui me gêne . •. Mon s i eur l e Pré s i dent . . . c ' est en effet un argument qui s e
heurte à ce que les j usti c i ables sont déj à partagés ; ce n ' est pas la prem i ère foi s . . . Mons i eur FABRE ?
Mon s i eur FABRE : Je note d ' abord qu ' i l est assez piquant de voi r que ce sont ceux-là même qui étaient l e s plus chauds part i s ans des privati sations, qui vi ennent au jourd ' hui plaider en faveur du
monopole de l ' Etat . . . Cela dit, je suis sens ible aux rai sons
avancées par le Gouvernement : conserver, par le recouvrement, un caractère social à un prélèvement qui emporte une f i scali s ation de la s écurité soc i al e ; faire en sorte que ce recouvrement soit
a i s é ; garantir l ' affectation du produit : vous vous souvenez de l ' affaire de l a v ignette ; elle était initialement prévue pour les personnes âgées, il y a longtemps qu'elle est tombée dans le
gouffre du budget . . . Pour moi, il n ' est pas anormal qu ' on con f i e aux bénéfici a i re s de la contribution, l a tâche de l a mettre e n recouvrement . . . E t pui s, c e l a s ' inscrit dans l a l i gne d ' une voi e tracée ; avec la décentral i s ation, c e n'est plus l ' Etat qui va percevoir l ' impôt . . . Et il y a d ' autre s exemples, voyez les fondations à caractère caritati f, voyez l e Téléthon, on fait
confiance à ces associ ations, il n'y a qu ' un contrôl e pour l ' usage de l ' argent . . . Au total, moi, j e me ré j ou i s plutôt de la m i s e en place de ce di spos iti f .
Monsieur le Prés i dent : Monsieur le Mini stre d'Etat ? . . .
Mon s i eur FAURE : I l faudrait être un j ur iste chevronné pour une a ffaire s i complexe . . . Mai s on peut peut-être contri buer au débat en prenant les chose s sous un autre angle . . . Moi aus s i, Mon s i eur LATSCHA , je sui s assuj etti à la mutual ité soc i al e agri cole . . . Peut-être pour une cot i sation plus faible, ce qui prouverait que j e suis resté un proléta i re . . . Je ne partage pas votre avis sur l e s difficultés que vous avancez . . . C ' est vrai, pour la première année, i l faut faire référence, dans les déclarations, aux revenus
... 1 .. .
profess ionnels . Je me suis demandé pourquo i . S ' agi s sait-i l
d ' antic iper sur l a CSG ? En réal ité , i l ne pouvait pas y avo i r une seule ass i ette pour un tel impôt : les revenus des França i s ont des caractéri stiques trop différentes . . . On peut soulever
l ' argument des troi s cédules . . . En réalité , d i re que c ' est un i mpôt , c ' est à double tranchant pour l e Gouvernement : l ' avantage , c ' est de réfuter l ' obj ection de procédure ; l ' inconvén i e nt ,
d ' affaibl i r l e fond . . . C ' est un peu une contribution " su i generi s " : j e s u i s o i s eau , voyez mes ailes ; j e s u i s s our i s , v ivent les rats ! Un impôt qui n ' est plus prélevé par l ' Etat , et qui ne va pas à l'Etat . . . est-ce s eulement un impôt ? . . .
Mons i eur l e Prés ident : C ' est une " impo s ition " , tout l e monde en est d ' accord . . .
Mon s ieur FAURE
j ur i d i que . . . Je ne prétends pas faire de démonstration Mons i eur l e Président
j uridique . . . Vous êtes trop modeste , tout i c i est Mons i eur FAURE : S ' i l s ' agissait d ' une petite affaire , j e n ' hés iterai s pas . . .
Mons i eur l e Président : Dans quel sens ?
Mon s i eur FAURE : Je dois dire que les arguments avancé s par Mons i eur JOZEAU-MARIGNE ne sont pas totalement sans valeur .
Surtout deux d ' entre eux . I l y a les précédents ; on d i t : i l s ne sont pas nombreux , ni importants ; mai s il y en a : ce s ont
juridiquement des précédents . Et i l y a les arguments de f a i t que notre juvénile rapporteur a fait valoir , et qui ne sont pas à négl i ger . . . Cherchons à cheminer : l e s ystème of fre une doubl e garanti e . De recouvrement d ' abord : les pouvoi rs d e s c a i s se s sont cousins germains de ceux du f i sc ; et pui s des garant i e s pour les assuj etti s . . . J ' ai donc eu affaire à l a mutual ité soc i a l e
agr i cole : j e vous pri e d e croire qu ' elle n ' est pas sans moyens . . . L ' argument e st plutôt de fait ; du moins peut- i l soulager l e s
consc i ences . . . Je voi s l ' ampleur j uridique e t pol itique à l a foi s du problème . .
Mon s i eur le Prés ident : Monsieur le Président MAYER ?
Mon s i eur MAYER : Je suis d ' accord avec Mon s i eur FAURE . Certes i c i nous ne fai sons que du droit . De ce point d e vue , la pos ition du Conse i l d ' Etat est sans doute la plus sol ide . . . Mai s nous v i vons dans le s i èc l e . L ' ampleur de la déci s i on à prendre amèn e à
r é fléchir . Je songe à la matière référenda i re , le peupl e franç a i s s ' éta i t prononcé . . .
Mon s i eur l e Prés ident : Ce n ' est pas la même chose . . Je ne donne pas au Parlement les pouvoirs de Lou i s XVI.
. .. 1 . . .
Monsieur MAYER : La d i fférence n ' est que de degré . . . Dans une a f faire de cette nature , faut- i l faire du droit pur ?
Mon s i eur CABANNES : Sur ce terrain , on ne pourrai t qu'annuler . Kons i eur le Président : Mons ieur le Bâtonni e r ?
Monsieur MOLLET-VIEVILLE : Je sui s d ' accord avec l e s arguments de Monsieur FAURE , mai s je n ' abouti s pas à la même conclusion que lui .
Mons ieur FAURE : Je doi s faire un bien pi ètre avocat !
Mon s i eur MOLLET-VI EVILLE : Les précédents , s ' i l s exi stent , i l s ont une valeur obj ecti ve et seulement relative . . . Je croi s que sur l a voi e d u droit, j ur i d i quement , nous n e pouvons p a s ne pas
c ensurer . . . Pour l e reste , j ' entends dire : oui , mai s sur le plan pol itique , i l y aura des conséquence s importantes . . . Je me refuse à sorti r du cadre constitutionnel et à ven i r sur l e terrain des conséquences politiques . Il ne s ' agit pas de fermer les yeux sur elles , mai s elles ne doivent pas constituer notre motivation . Je suis donc en faveur de la censure .
Monsieur MAYER : Tout cela évoque en moi des souvenirs . I l y a 41 ans , j ' étais mini stre de la sécurité soc i al e . On n ' avait que
dédain pour une éventuelle f i scal i s ation du recouvrement . Le s ystème était géré par les caisses : l ' Etat ne devait pas mettre son nez là-dedans . . . Auj ourd ' hui , le probl ème est l e même , mai s i nverse . . . Qu ' est- ce que cela v a donner , s i nous repous sons la loi ? Instinctivement , je me rapproche du rapporteur . J ' ai un peu peur de la censure . Je sui s sens ible aux é l éments factuels ; même s ' i l s sont en partie politiques . . . J ' attends que l ' on m ' apporte la preuve que les conclus ions auxquelles parvi ent l e rapporteur ne sont pas constitutionnelles . . . A ce moment du débat , cette preuve n'est pas rapportée .
Mon s i eur MOLLET-VIEVILLE : Il y a deux canaux de recouvrement , qui aboutiront à deux juri sprudences d i f férente s . Cel a , c ' est
i nconstitutionnel .. Et pui s avoir recours au j uge de l a sécurité sociale pour un impôt , ça l ' est également . . .
Mon s ieur ROBERT Un impôt , c ' est perçu par l e f i s c . Qu ' on confie le recouvrement à des personnes morales de droit privé , même
chargées d ' une mi s s i on de service publ i c , c ' e st cela qui n ' est pas constitutionnel . . .
Mons ieur LATSCHA : J ' ai dit que , pour moi , c ' est la pos ition du Con s e i l d ' Etat qui me motivait surtout . C ' e st à titre subs idiaire que j e me pose la question des deux canaux . Je n ' arrive pas à comprendre pourquoi une partie est confiée au f i s c et une autre à l a s écurité soc i al e . Pour l e moins , ce n ' est pas une s ituation trè s logique . . .
. . . 1 .
. .Mons i eur MAYER : Les commerçants , tous les j our s , perçoivent l a T . V . A . pour l ' Etat . . .
Monsi eur le Prés ident
retard . I l s ne peuvent infl iger des pénal ités de Mes s ieurs ROBERT et LATSCHA
gardent pas la T . V . A . Ce n ' est pas l a même chos e , i l s ne Monsieur MAYER : I l n ' empêche qu ' i ls sont des percepteurs
d ' impôts
Monsi eur LATSCHA : I l s ne la gardent pas , i l s sont responsables du reversement . I c i , on va rapprocher encore plus les organi sme s de sécurité soc i al e des organismes f i scaux . ( S e tournant vers
Monsieur FABRE , son voi sin de gauche ) Je préc i se que j e n ' éta i s pas un champion des privatisations ...
Monsieur FABRE : I l n ' y avait aucune al lus ion vous concernant dans mon propos .
Monsieur l e Pré s ident . Je vai s à présent vous donner mon
s entiment . Je crois que nous sommes face à un problème extrêmement d i f f i c i le du point de vue constitutionnel . Qu ' i l s ' agi s s e d ' un bon ou d ' un mauvais choix technique , c ' est une chos e . Charas s e n ' en veut pas . . . Est-ce que les URS SAF le réclament ? . . . Bon . . . Ce qui est très d i f f i c i l e , c ' e st de savoi r s i un princ ipe constitutionnel exige qu ' une impos ition , quelle que soit sa nature , soit perçue par un service publ i c de l ' Etat . Est-ce que l a Constituti on
interdit que ce recouvrement soit e f fectué par des organi smes de droit privé ? J ' ai lu et relu avec beaucoup d ' attention l ' av i s du Conse i l d ' Etat . I l est toujours très ennuyeux d ' être dans une pos ition de rupture avec lui . C ' est d ' a i lleurs plutôt vers une harmoni s ation que nous avons été au cours des dernières anné e s .
I c i , personne du Conseil d ' Etat ne me démentirait , i l s ' est l i vré à un travai l i nus ité , en refai sant l e pro j et de loi . Et dans sa construction nouvelle , i l a choi s i la voie usue l l e et habituel l e du recouvrement par l e fisc . L e Gouvernement n ' en a pas tenu compte . C ' est son droit . Voyez comme cet avi s est s ingul ie r . " I l serait contraire aux principes constants qui inspirent l a
législation d e l a Républ ique , sur le fondement d e s arti cles 1 3 et 1 4 de la Déclaration . . . " Les "princ ipe s constants " , est- i l d i t , et non les principes fondamentaux . Le problème n ' est pas de rupture d ' égal ité . L ' article 1 4 est respecté . C ' e st un problème de
technique : "de confier à des organi smes de droit privé " - peut-on prendre tel organi sme et l'utili ser pour l e recouvrement ? . . . Ça n ' est qu ' ensuite , après la référence à la Déclaration , que l ' av i s devient important : d e confier à ces organi smes une
' ' responsabi l ité qui . . . est nombre des m i s si ons . . . de la pui s s ance publ ique " . La vra i e question est donc de savoir s i l ' exercice du r ecouvrement comporte l ' exerc ice de l a pui s s ance publique . Et donc , pour les URSSAF et les CMSA , de s avoi r si ce qu ' elles font depu i s l'origine constitue une ali énation inconstitutionnelle de l a pui s sance publique . S i oui , c ' est dès l e début qu ' i l aurai t
... 1 ...
fallu l e leur interdire . Inversement , s i on ne dénie pas à
l ' URSSAF l e droit constitutionnel d ' avoir pu exercer l ' action en recouvrement , on ne peut le d i re pour la premi ère foi s à cette occas ion . . . Ce que nous d i rions en censurant , c ' est que depu i s l ' origi ne l'Etat a abandonné à l ' URSSAF d e s prérogatives qu ' i l ne pouvait lui abandonner . . .
Mon s i eur ROBERT : Ce sont des cotisations que recouvre une URSSAF . . .
Mons i eur le Président : Mai s la question n ' est pas dans la nature du prélèvement . Ce qui doi t nous préoccuper , ce sont l e s
garanties . C e dont i l s ' ag i t , c ' est d e ne pas donner à d e s
organi smes privés des droits pouvant ven i r heurter les garanties des c itoyens. Par rapport au contr ibuable , y -a-t- i l en l ' espèce une diminution des garanties ? Est-ce qu ' à cette occas ion du
passage à l ' impôt , on éradi que les garanties des citoyens , e st-ce qu ' on altère leurs droits ? Le droit de la pui s sance publ i que me préoccupe beaucoup moins . Ce qu ' i l faudrait s avoi r , c ' e st quelles sont l e s d i f férences éventuelles en matière de garantie s , par rapport à la perception d irecte par l ' Etat . . .
Monsieur l e S ecrétaire général : Le rapporteur a rés ervé l a
question , pour l a traiter sous l a rubrique du principe d ' égal ité . I l n ' y a pas d ' identité absolue . Mai s le Parlement a rétab l i l e doubl e degré d e j uridi ction , qui constituait un point d é l ic at . Mons i eur l e Pré s ident : On peut réserver l a question . . . Mai s j e ne crois pas que le fait que l ' URS SAF percevra , pui s s e être en soi un manquement à la Constitution . Sauf à dire que dès l ' instant qu ' i l s ' agit d ' un impôt . . .
Mon s i eur ROBERT : Oui Mon s i eur le Président
vous ? Au nom de quoi ? Quels moti fs avance z - Monsi eur ROBERT : Ceux du Conse i l d ' Etat la tâche de recouvrer l ' impôt est au nombre des m i s s ions essenti elles de l ' Etat .
L ' impôt , c ' est l e fi sc.
Mon s i eur le Prés ident : L ' Etat , sous peine de ne plus être
lui -même . . . Est-ce qu ' au moins nous-mêmes nous n ' avons pas d é j à l a i s s é pas ser ça , des cas où l e recouvrement était a f fecté à une personne morale de droit privé ?
Monsieur le S ecrétaire général Il y a une déc i s ion du
2 8 décembre 1 9 8 5 ( 1 ) , relative à la contribution des employeurs au pro f i t du Fonds national d ' a i de au logement , qui est recouvrée par l e s organi smes de la s écurité soc i al e .
( 1 ) N° 85-201 DC, p. 85.
. .. 1 ...
Mais l e problème n ' avait pas été soulevé .
Mons i eur le Pré s ident ( à qui l e Secrétai re général a transmi s le texte de la déc i s ion ) · Et i l y a un article 2 d i sposant que l e reste d e la loi e s t déclaré conforme à l a Constitution . .
Eternelle question . . . Mai s c ' est d i f férent , i l n ' y a r i en sur l ' affectation du recouvrement . . . Est- ce qu ' on n ' a pas l a i s s é passer l a contribution d e sol idarité , qui était confiée aux ASSEDIC , en mai 1 9 8 3 ?
Monsi eur le Secréta i re général : Il exi ste une déc i s ion du
2 8 mai 1 9 8 3 qui n ' e st pas topique . Il y a encore la déci s ion sur les agences financi ères de bas s in du 2 3 juin 1 9 8 2 ( 1 ) . Mai s ce sont des étab l i s sements publics . . .
Mons i eur le Pré s i dent : Ainsi l ' Etat ne pourrait déléguer l a m i s s i on du recouvrement de l ' impôt, même à d e s organi smes étroi tement placés sous son contrôle ou sa tutelle ? . . . Monsieur ROBERT : Oui .
Monsi eur le Pré s ident : Je veux bien . Mai s i l faut exp l i quer pourquoi
Monsieur ROBERT : C ' est comme pour l ' armée et la diplomatie . Cela ne s e délégue pas .
Monsi eur FAURE : Parce que cela fait partie de l ' " imperium" de l'Etat ou parce que s i c ' est l ' Etat, i l y a plus de garanti e s . C ' est ce deux i ème aspect qu ' en l ' espèce i l faudrait " gratte r " . . . Monsi eur LATSCHA : Ou i , i l serait peut-être bon de pas s e r à
1 ' égal ité . . .
Monsi eur l e Prés ident : S ' agi s s ant d'un impôt, i l y aurait dessai s issement de l ' e s s ence de l ' Etat ? . . . Il y a donc deux conceptions : l ' aff i rmation exi stentie l l e et l a réflexion e s s entielle . . .
Monsieur FAURE : Ça ri sque de faire j ur i sprudence . . .
Monsi eur l e Prés ident : Mai s songez à la mass e du para- f i scal Ecoutez , nous sommes en pleine théologie . . . C ' est comme si vous interd i s i ez aux j uridictions consulai res de j uger ! En d i s ant : l e j uge, c ' est l ' Etat, désormai s j e ne veux plus que vous j ugiez . . L'imperium de l ' Etat, c ' est bien d ' abord l a j ustice . . . Alors , s ' i l y a rupture de l 'égal ité en fonction des d i f férentes voi e s de
recours , d ' accord ; mai s d i re que ce n ' est en principe pas pos s ible , je ne vous sui s pas . Toute l a tendance de l ' Etat moderne , c ' est le dessai s i s sement . Voyez l'h i stoire du droit
franç a i s du dernier s i ècle . Sur cette lancée , on se mettra à
( 1 ) N° 82-1 24 L , p . 9 9 .
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sanc t ionner l a pol i ce munic ipale . Quand on e s t en guerre
théologique , on ne s ' arrête pas en chemin . . . Soyez consc i ents de la voi e dans laquelle nous nous engageons
Mons i eur ROBERT : On ne j ugera i t que pour le f i s cal
pourrai t nous rétorquer la justice . on ne
Mon s i eur l e Prés ident : Mai s ce serait logique , si l ' on prend pour cri térium l ' e s s ence du pouvoi r de l ' Etat . . . La justice et l a
pol i c e c ' est , d e c e point d e vue , encore plus important ! Les gardes champêtres , c ' est de la pol i ce privée , fai tes-moi s auter ça ! . . .
Mons i eur FAURE • La pol ice munic ipale n ' a que des pouvoirs très l imités : les foires , les marchés , l e s tationnement . . .
Mons i eur JOZEAU-MARIGNE : Tout ce débat a infiniment d ' intérê t . Mai s enf i n , i l s ' ag i t de bien d i s t i nguer . I l s ' ag i t du
recouvrement de l ' impôt . J ' ai lu e t relu l ' av i s du Conse i l d ' Etat . Le tout est de savo i r s ' i l faut élever la question du recouvrement de l ' impôt au niveau des principes fondamentaux , comme pour l e s dro i ts e t l i bertés . Pour m a part , j e n e s u i s pas l e Conse i l d ' E tat sur ce point . E t les propos qui ont été tenus ne me font pas
reveni r sur ma pos i t ion . Ce qu ' a dit Mons i eur LATSCHA sur l a mutual i t é sociale agr icole , même s ' i l faut refaire tout l e cadas tre . . .
Mons i eur FAURE : Quel cauchemar !
Mons i eur JOZEAU-MARIGNE : . . . tout cela c ' es t du fai t . Le recouvrement env i s agé est- i l const i tu tionnel ou non , vo i l à la seule que s t i on . Le recouvrement a dé j à été délégué sans
d i f f i cultés . Pourquoi , aujourd ' hui , s ' agi ssant de sommes des t inées à l a CNAF , il faudrai t faire un détour par les caisses du Trésor ? F aut - i l faire du recouvrement un princ ipe fondamental ? Interdi re à une autre autorité de recouvri r l ' impôt ?
Mes s ieurs LATSCHA et ROBERT • Oui Oui !
Mons i eur JOZEAU-MARIGNE : Au nom de quel texte ? Ce n ' e s t qu ' un usage . Quel t exte de valeur cons t i tutionnel l e d i t qu ' i l doit y avo i r exclus ivité de l ' Etat ? Le seul problème c ' es t de s avoi r s i dans les méthodes de l ' URSSAF e t du f i sc , i l y a des d i fférences très importantes quant aux garan t i e s ; le voi là l e problème ! C ' e s t par l à qu ' on peut intégrer le recouvrement dans l e probl ème de la défense des l i bertés individue l l e s . Or , des di f férences , i l y e n a , mai s sont - elles s i capitales ? Voi l à l a que s ti on !
Mons i eur le Président � Très bien !
Monsieur LATSCHA : Voi là qui e s t très bri l lant
à cette que s t i on de l ' égal i t é , en effet . I l faut en ven i r
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Mons i eur ROBERT : Vous oubliez les princ ipes fondamentaux reconnus par les lois de la Républ ique . I l s peuvent résul ter , d i rectement , de ce que di s ent ces loi s , et l à j e conviens qu ' i l n ' y a r i en . Mai s indirectement , i l n ' y a j amais eu une loi de l a Républ ique pour confier le recouvrement de l ' impôt à quelqu ' un d ' autre que l ' Etat .
Monsi eur FAURE : On bloquera i t tout l ' avenir .
Monsieur le Prés ident : Non , j e ne veux pas t irer un princ ipe fondamental reconnu par les lois de l a Républ ique sur ce probl ème du recouvrement .
Mons i eur FABRE : I l y a l a redevance- télév i s ion . . .
Mon s i eur LATSCHA Je cro i s qu ' i l faudrai t parler des d i f férences d e trai tement , car elles ne correspondent pas à des di f férences ob j e ct ives . Il y a une s i tuati on i l logique . . .
Monsi eur le Prés ident : B i en , alors , allons - y , Mon s i eur l e Rapporteur , voulez-vous poursuivre ?
Mons i eur JOZEAU-MARIGNE : Volonti ers , Mons i eur le Prés ident , car j e crois aus s i qu ' i l faut traiter l ' ensemble . Mai s d ' abord j e me permets de c i ter à nouveau la l i s te des précédents , même s ' i l s s ont moins importants que la C S G , des impôts exi s t ants qui n e sont pas recouvrés par l ' Etat : contribution des employeurs au Fonds national d ' a ide au logement , contribut ion de sol idari t é des s oc i é tés au pro f i t des régimes des non- salar i é s non agri coles , versement au pro f i t du syndicat des transports par i s i ens , taxe sur l e s boi s sons alcool iques et contribut ion des entrepri s e s de
médi caments . . . C ' es t substant i e l . . . Ma is j e poursui s .
- Sénateurs et députés ont donc enfin invoqué , à plusi eurs
repri ses , l e principe d ' égal i té , devant les charges publiques et l ' impôt , ou devant la j u s t i c e ( c ) .
I l me sembl e qu ' on peut classer l eurs arguments sous quatre rubriques :
principe d ' égal i t é et princ ipe d ' égal i té e t principe d ' égal i té et
- principe d ' égal i t é et
redevables de ass i et t e de la taux de la CSG
la CSG CSG ;
recouvrement et conten t i eux de la CSG .
a - Princ ipe d ' égal i t é et personnes redevables de la CSG .
* De ce point de vue , les députés ont évoqué l a s i tuati on des travai ll eurs fronta l i ers . Mai s s eulement pour dénoncer l a
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