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Article pp.139-140 du Vol.6 n°3 (2012)

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ÉDITORIAL /EDITORIAL

Le destin du Concorde ?

Same destiny than the Concorde plane?

G. Meurette · P.-A. Lehur

© Springer-Verlag France 2012

L’exercice médical n’a jamais été aussi performant et effi- cace ! Le domaine de la coloproctologie n’échappe heureu- sement pas à ce progrès bénéfique aux patients d’abord, mais aussi à notre épanouissement professionnel. Depuis les années 1990, l’innovation a transformé notre pratique dans beaucoup de domaines, dont celui de l’incontinence fécale.

L’évaluation sur la base de scores validés et la prise en charge ont été standardisées, les tabous sont progressivement vaincus. Dans le même temps, une industrie bio-médicale dynamique a développé des dispositifs de haute technologie pour corriger ce handicap.

Le sphincter anal artificiel est ainsi devenu une réalité et source d’espoir pour de nombreux patients. L’élan qu’ont suscité les premiers résultats laissait entrevoir de belles per- spectives de développement pour cette stratégie opératoire peu invasive à morbidité raisonnable [1]. Il faut dire que l’alternative à l’époque était la graciloplastie dynamisée à la complexité et à la morbidité nettement plus importante [2]. Enthousiasme des pionniers ou réalité clinique court- termiste, les premiers patients implantés avec un sphincter de type urinaire (AMS 800) ont été globalement satisfaits.

Le modèle était cependant loin d’être parfait : suppurations, érosions, dysfonctions avec révisions chirurgicales parfois multiples ont amené à s’interroger. Certaines équipes croyant en la méthode ont suivi de près les patients, et mis un soin particulier à les aider, investissement certes consom- mateur de temps, mais indispensable au succès. L’industrie (American Medical System1) de son côté a investi, réuni les chirurgiens et proposé des améliorations conduisant à la mise au point du Neosphincter Acticon™, spécifiquement dédié à l’incontinence fécale.

Après 15 ans d’expérience, le résultat mis en avant dans la littérature était à la hauteur, 2/3 des patients sont nettement

améliorés, la plupart même transformés. En contre-partie dans 1/3 des cas, le traitement était un échec et le matériel explanté [3]. C’est sur ce constat que la controverse a débuté.

Les uns ont défendu un matériel encore perfectible, mettant en avant le succès réel malgré un coût tout aussi réel et ont relayé le témoignage de patients se disant transformés dans leur vie quotidienne, ayant évité la stomie, seule autre alter- native. Les autres, plus pessimistes, ont souligné les imper- fections, le caractère confidentiel de cette activité, l’absence de reproductibilité et le risque infectieux majeur.

Finalement, en 25 ans, environ 500 sphincters Acticon™ seront implantés, principalement en Europe et aux USA.

En France, après une période initiale de remboursement, l’Assurance Maladie a reconsidéré sa position en l’absence de développement suffisant de la technique. Les commis- sions d’experts ont estimé que l’on manquait de preuves dans la littérature pour appuyer les demandes de financement pour ce matériel. Ce constat est d’autant plus décevant que le

« petit frère » urinaire a obtenu tous les accords et s’est déve- loppé sur tout le territoire ! C’est finalement une circulaire émanant de la Haute Autorité de Santé du 15 mars 2010 qui a clos le débat en recommandant de ne plus retenir le sphincter artificiel comme une option thérapeutique dans l’inconti- nence fécale. L’industrie, dans le même temps, a suspendu la commercialisation du dispositif en raison de problème d’homologation par la FDA américaine1. La messe est dite ! Cette expérience n’est pas sans évoquer le triste destin de notre très cher avion supersonique Concorde, innovation aéronautique qui devait révolutionner nos déplacements dans les airs… Toute proportion gardée, le sphincter anal artificiel a ouvert à son niveau, un nouvel axe de développe- ment pour une chirurgie anale moderne et innovante [4,5].

Malheureusement, sans nier les imperfections du dispositif, les controverses contreproductives, des priorités sanitaires divergentes auront peut-être eu raison de cette option théra- peutique prometteuse.

Pour autant, renoncer à la substitution sphinctérienne serait une erreur et un manquement aux engagements tenus par de nombreuses équipes spécialisées vis-à-vis des patients demandeurs d’une solution et qui se retrouvent sans autre

G. Meurette (*) · P.-A. Lehur

Clinique de chirurgie digestive et endocrine, CHU Hôtel-Dieu, Nantes

e-mail : guillaume.meurette@chu-nantes.fr

1La Société AMS annonce que le retour sur le marché de lActicon Neosphincterest attendu pour septembre 2012.

Colon Rectum (2012) 6:139-140 DOI 10.1007/s11725-012-0392-z

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-cer.revuesonline.com

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alternative que la stomie. Or les ressources sont pourtant bien présentes : la neurostimulation des racines sacrées, le sphincter anal magnétique ou les agents d’injection locale pour renforcer le sphincter, sont autant de nouvelles appro- ches qui méritent d’être évaluées. Les résultats de ces tech- niques témoigneront de la place de la chirurgie de remplace- ment ou de renforcement sphinctérien dans la prise en charge de l’incontinence anale. Le pari est d’autant plus important à relever que l’exercice médical, aussi performant soit-il, est contraint par des impératifs économiques sévères (tout comme l’est l’industrie qui développe ces dispositifs d’ail- leurs). Il est primordial que la concurrence entre ces diffé- rentes options génère une émulation nécessaire pour faire avancer la recherche, et que les essais comparatifs devien- nent le quotidien du clinicien de l’incontinence fécale. Une des priorités sera de faire de ce handicap digestif, un pro- blème de santé publique justifiant un investissement à la fois financier et humain, à l’instar de ce qui est proposé par le National Institute for Clinical Excellence britannique. Alors

militons pour qu’après les plans Cancer, Alzheimer et autres…soit mis en place un plan « incontinence fécale » !

Références

1. Christiansen J, Lorentzen M (1987) Implantation of artificial sphincter for anal incontinence. Lancet 12:244-5

2. Baeten CG, Geerdes BP, Adang EM, et al (1995) Anal dynamic graciloplasty in the treatment of intractable fecal incontinence.

N Engl J Med 332:1600-5

3. Wong WD, Congliosi SM, Spencer MP, et al (2002) The safety and efficacy of the artificial bowel sphincter for fecal incontinence:

results from a multicenter cohort study. Dis Colon Rectum 45:1139-53

4. Wong MT, Meurette G, Wyart V, et al (2011) The artificial bowel sphincter: a single institution experience over a decade. Ann Surg 254:951-6

5. Michot F, Costaglioli B, Leroi AM, Denis P (2003) Artificial anal sphincter in severe fecal incontinence: outcome of prospective experience with 37 patients in one institution. Ann Surg 237:52-6

140 Colon Rectum (2012) 6:139-140

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